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Citations de Michel de Montaigne (971)


Michel de Montaigne
C'est une absolue perfection, et comme divine, de savoir jouir loyalement de son être.
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Michel de Montaigne
La sagesse a ses excès et n'a pas moins besoin de modération que la folie.
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"Mon dessein est de passer doucement, et non laborieusement ce qui me reste de vie.

Il n'est rien pourquoy je ne veuille rompre la teste : mon pas pour la science de quelque grand prix qu'elle soit.

Je ne cherche aux livres qu'à m'y donner du plaisir par un honneste amusement : ou si j'estudie, je n'y cherche que la science, qui traicte de la connoissance de moy-mesmes, et qui m'instruise à bien mourir et à bien vivre."
(Montaigne-Les Essais 1598 Livre II Des livres ed La Pleiade p. 429)
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Michel de Montaigne
La lecture me sert spécialement à éveiller ma réflexion en lui fournissant divers sujets, à faire travailler mon jugement et non ma mémoire. 
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Michel de Montaigne
Il ne faut pas s'attacher si fort à ses propres goûts et son tempérament. Notre principal talent, c'est de savoir nous appliquer à différentes occupations. C'est exister, ce n'est pas vivre que de se tenir attaché et lié nécessairement à une seule façon d'être. Les plus belles âmes sont celles qui ont le plus de variété et de souplesse.
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Les femmes n'ont pas tort du tout quand elles refusent les règles de vie qui sont introduites au monde, d'autant que ce sont les hommes qui les ont faites sans elles.

Essais III
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CHAPITRE II

De la Tristesse
JE suis des plus exempts de cette passion, et ne l'ayme ny l'estime : quoy que
le monde ayt entrepris, comme à prix faict, de l'honorer de faveur particuliere.
Ils en habillent la sagesse, la vertu, la conscience. Sot et vilain ornement.
Les Italiens ont plus sortablement baptisé de son nom la malignité. Car c'est
une qualité tousjours nuisible, tousjours folle : et comme tousjours couarde et
basse, les Stoïciens en defendent le sentiment à leurs sages.
Mais le conte dit que Psammenitus Roy d'Ægypte, ayant esté deffait et pris par
Cambysez Roy de Perse, voyant passer devant luy sa fille prisonniere habillee en
servante, qu'on envoyoit puiser de l'eau, tous ses amis pleurans et lamentans
autour de luy, se tint coy sans mot dire, les yeux fichez en terre : et voyant
encore tantost qu'on menoit son fils à la mort, se maintint en cette mesme
contenance : mais qu'ayant apperçeu un de ses domestiques conduit entre les
captifs, il se mit à battre sa teste, et mener un dueil extreme.
Cecy se pourroit apparier à ce qu'on vid dernierement d'un Prince des nostres,
qui ayant ouy à Trente, où il estoit, nouvelles de la mort de son frere aisné,
mais un frere en qui consistoit l'appuy et l'honneur de toute sa maison, et bien
tost apres d'un puisné, sa seconde esperance, et ayant soustenu ces deux charges
d'une constance exemplaire, comme quelques jours apres un de ses gens vint à
mourir, il se laissa emporter à ce dernier accident ; et quitant sa resolution,
s'abandonna au dueil et aux regrets ; en maniere qu'aucuns en prindrent
argument, qu'il n'avoit esté touché au vif que de cette derniere secousse : mais
à la verité ce fut, qu'estant d'ailleurs plein et comblé de tristesse, la
moindre sur-charge brisa les barrieres de la patience. Il s'en pourroit (di-je)
autant juger de nostre histoire, n'estoit qu'elle adjouste, que Cambyses
s'enquerant à Psammenitus, pourquoy ne s'estant esmeu au malheur de son filz et
de sa fille, il portoit si impatiemment celuy de ses amis : C'est, respondit-il,
que ce seul dernier desplaisir se peut signifier par larmes, les deux premiers
surpassans de bien loin tout moyen de se pouvoir exprimer.
A l'aventure reviendroit à ce propos l'invention de cet ancien peintre, lequel
ayant à representer au sacrifice de Iphigenia le dueil des assistans, selon les
degrez de l'interest que chacun apportoit à la mort de cette belle fille
innocente : ayant espuisé les derniers efforts de son art, quand ce vint au pere
de la vierge, il le peignit le visage couvert, comme si nulle contenance ne
pouvoit rapporter ce degré de dueil. Voyla pourquoy les Poëtes feignent cette
miserable mere Niobé, ayant perdu premierement sept filz, et puis de suite
autant de filles, sur-chargee de pertes, avoir esté en fin transmuee en rocher,
diriguisse malis,
pour exprimer cette morne, muette et sourde stupidité, qui nous transsit, lors
que les accidens nous accablent surpassans nostre portee.
De vray, l'effort d'un desplaisir, pour estre extreme, doit estonner toute
l'ame, et luy empescher la liberté de ses actions : Comme il nous advient à la
chaude alarme d'une bien mauvaise nouvelle, de nous sentir saisis, transsis, et
comme perclus de tous mouvemens : de façon que l'ame se relaschant apres aux
larmes et aux plaintes, semble se desprendre, se desmeller, et se mettre plus au
large, et à son aise,
Et via vix tandem voci laxata dolore est.
En la guerre que le Roy Ferdinand mena contre la veufve du Roy Jean de Hongrie,
autour de Bude, un gendarme fut particulierement remerqué de chacun, pour avoir
excessivement bien faict de sa personne, en certaine meslee : et incognu,
hautement loué, et plaint y estant demeuré. Mais de nul tant que de Raiscïac
seigneur Allemand, esprins d'une si rare vertu : le corps estant rapporté,
cetuicy d'une commune curiosité, s'approcha pour voir qui c'estoit : et les
armes ostees au trespassé, il reconut son fils. Cela augmenta la compassion aux
assistans : luy seul, sans rien dire, sans siller les yeux, se tint debout,
contemplant fixement le corps de son fils : jusques à ce que la vehemence de la
tristesse, aiant accablé ses esprits vitaux, le porta roide mort par terre.
Chi puo dir com'egli arde è in picciol fuoco,
disent les amoureux, qui veulent representer une passion insupportable :
misero quod omnes
Eripit sensus mihi. Nam simul te
Lesbia aspexi, nihil est super mi
Quod loquar amens.
Lingua sed torpet, tenuis sub artus
Flamma dimanat, sonitu suopte
Tinniunt aures, gemina teguntur
Lumina nocte.
Aussi n'est ce pas en la vive, et plus cuysante chaleur de l'accés, que nous
sommes propres à desployer nos plaintes et nos persuasions : l'ame est lors
aggravee de profondes pensees, et le corps abbatu et languissant d'amour.
Et de là s'engendre par fois la defaillance fortuite, qui surprent les amoureux
si hors de saison ; et cette glace qui les saisit par la force d'une ardeur
extreme, au giron mesme de la jouïssance. Toutes passions qui se laissent
gouster, et digerer, ne sont que mediocres,
Curæ leves loquuntur, ingentes stupent.
La surprise d'un plaisir inesperé nous estonne de mesme,
Ut me conspexit venientem, Et Troïa circum
Arma amens vidit, magnis exterrita monstris,
Diriguit visu in medio, calor ossa reliquit,
Labitur, et longo vix tandem tempore fatur.
Outre la femme Romaine, qui mourut surprise d'aise de voir son fils revenu de la
routte de Cannes : Sophocles et Denis le Tyran, qui trespasserent d'aise : et
Talva qui mourut en Corsegue, lisant les nouvelles des honneurs que le Senat de
Rome luy avoit decernez. Nous tenons en nostre siecle, que le Pape Leon dixiesme
ayant esté adverty de la prinse de Milan, qu'il avoit extremement souhaittee,
entra en tel excez de joye, que la fievre l'en print, et en mourut. Et pour un
plus notable tesmoignage de l'imbecillité humaine, il a esté remerqué par les
anciens, que Diodorus le Dialecticien mourut sur le champ, espris d'une extreme
passion de honte, pour en son escole, et en public, ne se pouvoir desvelopper
d'un argument qu'on luy avoit faict.
Je suis peu en prise de ces violentes passions : J'ay l'apprehension
naturellement dure ; et l'encrouste et espessis tous les jours par discours.
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CHAPITRE I

Par divers moyens on arrive à pareille fin
LA plus commune façon d'amollir les coeurs de ceux qu'on a offencez, lors
qu'ayans la vengeance en main, ils nous tiennent à leur mercy, c'est de les
esmouvoir par submission, à commiseration et à pitié : Toutesfois la braverie,
la constance, et la resolution, moyens tous contraires, ont quelquesfois servy à
ce mesme effect.
Edouard Prince de Galles, celuy qui regenta si long temps nostre Guienne :
personnage duquel les conditions et la fortune ont beaucoup de notables parties
de grandeur ; ayant esté bien fort offencé par les Limosins, et prenant leur
ville par force, ne peut estre arresté par les cris du peuple, et des femmes, et
enfans abandonnez à la boucherie, luy criants mercy, et se jettans à ses pieds :
jusqu'à ce que passant tousjours outre dans la ville, il apperçeut trois
gentils-hommes François, qui d'une hardiesse incroyable soustenoient seuls
l'effort de son armee victorieuse. La consideration et le respect d'une si
notable vertu, reboucha premierement la pointe de sa cholere : et commença par
ces trois, à faire misericorde à tous les autres habitans de la ville.
Scanderberch, Prince de l'Epire, suyvant un soldat des siens pour le tuer, et ce
soldat ayant essayé par toute espece d'humilité et de supplication de
l'appaiser, se resolut à toute extremité de l'attendre l'espee au poing : cette
sienne resolution arresta sus bout la furie de son maistre, qui pour luy avoir
veu prendre un si honorable party, le reçeut en grace. Cet exemple pourra
souffrir autre interpretation de ceux, qui n'auront leu la prodigieuse force et
vaillance de ce Prince là.

L'Empereur Conrad troisiesme, ayant assiegé Guelphe Duc de Bavieres, ne voulut
condescendre à plus douces conditions, quelques viles et lasches satisfactions
qu'on luy offrist, que de permettre seulement aux gentils-femmes qui estoient
assiegees avec le Duc, de sortir leur honneur sauve, à pied, avec ce qu'elles
pourroient emporter sur elles. Elles d'un coeur magnanime, s'adviserent de
charger sur leurs espaules leurs maris, leurs enfans, et le Duc mesme.
L'Empereur print si grand plaisir à voir la gentillesse de leur courage, qu'il
en pleura d'aise, et amortit toute cette aigreur d'inimitié mortelle et capitale
qu'il avoit portee contre ce Duc : et dés lors en avant traita humainement luy
et les siens. L'un et l'autre de ces deux moyens m'emporteroit aysement : car
j'ay une merveilleuse lascheté vers la miséricorde et mansuetude : Tant y a,
qu'à mon advis, je serois pour me rendre plus naturellement à la compassion,
qu'à l'estimation. Si est la pitié passion vitieuse aux Stoiques : Ils veulent
qu'on secoure les affligez, mais non pas qu'on flechisse et compatisse avec eux.

Or ces exemples me semblent plus à propos, d'autant qu'on voit ces ames
assaillies et essayees par ces deux moyens, en soustenir l'un sans s'esbranler,
et courber sous l'autre. Il se peut dire, que de rompre son coeur à la
commiseration, c'est l'effet de la facilité, debonnaireté, et mollesse : d'où il
advient que les natures plus foibles, comme celles des femmes, des enfans, et du
vulgaire, y sont plus subjettes. Mais (ayant eu à desdaing les larmes et les
pleurs) de se rendre à la seule reverence de la saincte image de la vertu, que
c'est l'effect d'une ame forte et imployable, ayant en affection et en honneur
une vigueur masle, et obstinee. Toutesfois és ames moins genereuses,
l'estonnement et l'admiration peuvent faire naistre un pareil effect : Tesmoin
le peuple Thebain, lequel ayant mis en Justice d'accusation capitale, ses
capitaines, pour avoir continué leur charge outre le temps qui leur avoit esté
prescript et preordonné, absolut à toute peine Pelopidas, qui plioit sous le
faix de telles objections, et n'employoit à se garantir que requestes et
supplications : et au contraire Epaminondas, qui vint à raconter magnifiquement
les choses par luy faites, et à les reprocher au peuple d'une façon fiere et
arrogante, il n'eut pas le coeur de prendre seulement les balotes en main, et se
departit : l'assemblee louant grandement la hautesse du courage de ce
personnage.

Dionysius le vieil, apres des longueurs et difficultés extremes, ayant prins la
ville de Rege, et en icelle le Capitaine Phyton, grand homme de bien, qui
l'avoit si obstinéement defendue, voulut en tirer un tragique exemple de
vengeance. Il luy dict premierement, comment le jour avant, il avoit faict noyer
son fils, et tous ceux de sa parenté. A quoy Phyton respondit seulement, qu'ils
en estoient d'un jour plus heureux que luy. Apres il le fit despouiller, et
saisir à des Bourreaux, et le trainer par la ville, en le fouëttant tres
ignominieusement et cruellement : et en outre le chargeant de felonnes parolles
et contumelieuses. Mais il eut le courage tousjours constant, sans se perdre. Et
d'un visage ferme, alloit au contraire ramentevant à haute voix, l'honorable et
glorieuse cause de sa mort, pour n'avoir voulu rendre son païs entre les mains
d'un tyran : le menaçant d'une prochaine punition des dieux. Dionysius, lisant
dans les yeux de la commune de son armee, qu'au lieu de s'animer des bravades de
cet ennemy vaincu, au mespris de leur chef, et de son triomphe : elle alloit
s'amollissant par l'estonnement d'une si rare vertu, et marchandoit de se
mutiner, et mesmes d'arracher Phyton d'entre les mains de ses sergens, feit
cesser ce martyre : et à cachettes l'envoya noyer en la mer.

Certes c'est un subject merveilleusement vain, divers, et ondoyant, que l'homme
: il est malaisé d'y fonder jugement constant et uniforrme. Voyla Pompeius qui
pardonna à toute la ville des Mamertins, contre laquelle il estoit fort animé,
en consideration de la vertu et magnanimité du citoyen Zenon, qui se chargeoit
seul de la faute publique, et ne requeroit autre grace que d'en porter seul la
peine. Et l'hoste de Sylla, ayant usé en la ville de Peruse de semblable vertu,
n'y gaigna rien, ny pour soy, ny pour les autres.

Et directement contre mes premiers exemples, le plus hardy des hommes et si
gratieux aux vaincus Alexandre, forçant apres beaucoup de grandes difficultez la
ville de Gaza, rencontra Betis qui y commandoit, de la valeur duquel il avoit,
pendant ce siege, senty des preuves merveilleuses, lors seul, abandonné des
siens, ses armes despecees, tout couvert de sang et de playes, combatant encores
au milieu de plusieurs Macedoniens, qui le chamailloient de toutes parts : et
luy dit, tout piqué d'une si chere victoire (car entre autres dommages, il avoit
receu deux fresches blessures sur sa personne) Tu ne mourras pas comme tu as
voulu, Betis : fais estat qu'il te faut souffrir toutes les sortes de tourmens
qui se pourront inventer contre un captif. L'autre, d'une mine non seulement
asseuree, mais rogue et altiere, se tint sans mot dire à ces menaces. Lors
Alexandre voyant l'obstination à se taire : A il flechy un genouil ? luy est-il
eschappé quelque voix suppliante ? Vrayement je vainqueray ce silence : et si je
n'en puis arracher parole, j'en arracheray au moins du gemissement. Et tournant
sa cholere en rage, commanda qu'on luy perçast les talons, et le fit ainsi
trainer tout vif, deschirer et desmembrer au cul d'une charrette.
Seroit-ce que la force de courage luy fust si naturelle et commune, que pour ne
l'admirer point, il la respectast moins ? ou qu'il l'estimast si proprement
sienne, qu'en cette hauteur il ne peust souffrir de la veoir en un autre, sans
le despit d'une passion envieuse ? ou que l'impetuosité naturelle de sa cholere
fust incapable d'opposition ?

De vray, si elle eust receu bride, il est à croire, qu'en la prinse et
desolation de la ville de Thebes elle l'eust receue : à veoir cruellement mettre
au fil de l'espee tant de vaillans hommes, perdus, et n'ayans plus moyen de
defence publique. Car il en fut tué bien six mille, desquels nul ne fut veu ny
fuiant, ny demandant mercy. Au rebours cerchans, qui çà, qui là, par les rues, à
affronter les ennemis victorieux : les provoquans à les faire mourir d'une mort
honorable. Nul ne fut veu, qui n'essaiast en son dernier souspir, de se venger
encores : et à tout les armes du desespoir consoler sa mort en la mort de
quelque ennemy. Si ne trouva l'affliction de leur vertu aucune pitié et ne
suffit la longueur d'un jour à assouvir sa vengeance. Ce carnage dura jusques à
la derniere goute de sang espandable : et ne s'arresta qu'aux personnes
desarmées, vieillards, femmes et enfants, pour en tirer trente mille esclaves.
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Au Lecteur
C'EST icy un livre de bonne foy, lecteur. Il t'advertit dés l'entree, que je ne
m'y suis proposé aucune fin, que domestique et privee : je n'y ay eu nulle
consideration de ton service, ny de ma gloire : mes forces ne sont pas capables
d'un tel dessein. Je l'ay voüé à la commodité particuliere de mes parens et amis
: à ce que m'ayans perdu (ce qu'ils ont à faire bien tost) ils y puissent
retrouver aucuns traicts de mes conditions et humeurs, et que par ce moyen ils
nourrissent plus entiere et plus vifve, la connoissance qu'ils ont eu de moy. Si
c'eust esté pour rechercher la faveur du monde, je me fusse paré de beautez
empruntees. Je veux qu'on m'y voye en ma façon simple, naturelle et ordinaire,
sans estude et artifice : car c'est moy que je peins. Mes defauts s'y liront au
vif, mes imperfections et ma forme naïfve, autant que la reverence publique me
l'a permis. Que si j'eusse esté parmy ces nations qu'on dit vivre encore souz la
douce liberté des premieres loix de nature, je t'asseure que je m'y fusse
tres-volontiers peint tout entier, Et tout nud. Ainsi, Lecteur, je suis
moy-mesme la matiere de mon livre : ce n'est pas raison que tu employes ton
loisir en un subject si frivole et si vain. A Dieu donq.
De Montaigne, ce 12 de juin 1580.
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Michel de Montaigne
Il n’y point de bête au monde tant à craindre a' l'homme que l'homme .
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Michel de Montaigne
Platon défend aux enfants de boire vin avant dixhuict ans, et avant quarante de s'enyvrer ; mais à ceux qui ont passé les quarante, il ordonne de s'y plaire ; et mesler largement en leurs convives l'influence de Dionysius, ce bon dieu qui redonne aux hommes la gayté, et la jeunesse aux viellards, qui adoucit et amollit les passions de l'âme, comme le fer s'amollit par le feu.
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Michel de Montaigne
La vrai liberté, c'est de pouvoir tout chose sur soi.
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Je souhaiterais aussi parler à des gens qui eussent essayé ce que je dis [qui eussent fait l'expérience de] : mais sachant combien c'est chose éloignée du commun usage qu'une telle amitié, et combien elle est rare, je ne m'attends pas d'en trouver aucun bon juge. Car les discours même que l'antiquité nous a laissés sur ce sujet, me semblent lâches au prix du sentiment que j'en ai [...]. Car à la vérité si je compare tout le reste de ma vie, quoiqu'avec la grâce de Dieu je l'aie passée douce, aisée, et sauf la perte d'un tel ami, exempte d'affliction pesante, pleine de tranquillité d'esprit, ayant pris en paiement mes commodités naturelles et originelles, sans en rechercher d'autres, si je la compare, dis-je, toute, aux quatre années qu'il m'a été donné de jouir de la douce compagnie et société de ce personnage, ce n'est que fumée, ce n'est qu'une nuit obscure et ennuyeuse. Depuis le jour que je le perdis [...] je ne fais que traîner languissant ...

p. 298, Poche.
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Michel de Montaigne
La parole est moitié à celui qui parle, moitié à celui qui écoute.
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Plombières-les-Bains (Vosges, France)
Plombières… Nous y arrivâmes le vendredi 16ème de septembre 1580, à deux heures de l’après-midi. Ce lieu est assis aux confins de la Lorraine et de l’Allemagne, dans une fondrière, entre plusieurs collines hautes et coupées qui le serrent de tous côtés. Au fond de cette vallée naissent plusieurs fontaines tant froides naturelles que chaudes. L’eau chaude n’a nulle senteur ni goût et est chaude tout ce qui se peut souffrir au boire…
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Tann (Haut-Rhin, France)
Première ville d’Allemagne, sujette à l’empereur, très belle. Lendemain au matin trouvâmes une belle et grande plaine, flanquée à main gauche de coteaux pleins de vignes, les plus belles et les mieux cultivées qui soient, et en telle étendu que les Gascons qui étaient là [avec moi] disaient n’en avoir jamais vu tant de suite. Les vendanges se faisaient lors… [28 septembre 1580]
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[Le style et la pensée]
... C'est aux paroles à servir et à suivre, et que le gascon y arrive, si le français n'y peut aller. Je veux que les choses surmontent, et qu'elles remplissent de façon l'imagination de celui qui écoute, qu'il n'ait aucune souvenance des mots. Le parler que j'aime, c'est un parler simple et naïf, tel sur le papier qu'à la bouche ; un parler succulent et nerveux, court et serré, non tant délicat et peigné, comme véhément et brusque ("Seul vaudra le style qui frappera", Vita Lucani). Plutôt difficile qu'ennuyeux, éloigné d'affectation, déréglé, décousu et hardi ; chaque lopin y fasse son corps [que chaque morceau se suffise à lui-même] ; non pédantesque, non fratesque, non plaideresque, mais plutôt soldatesque, comme Suétone appelle celui de Jules César.

I-25, "De l'institution des enfants", p. 265.
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[La grammaire et la philosophie à l'école]
Ce sont là préceptes épineux et mal plaisants, et des mots vains et décharnés, où il n'y a point de prise, rien qui vous éveille l'esprit ; en cette-ci [la philosophie] l'âme trouve où mordre, où se paître. Ce fruit est plus grand sans comparaison, et si sera plus tôt mûri. C'est grand cas [chose étonnante] que les choses en soient là en notre siècle, que la philosophie soit jusques aux gens d'entendement, un nom vain et fantastique, qui se trouve de nul usage, et de nul prix par opinion et par effet. Je crois que les ergotismes [raisonnements trop subtils] en sont cause, qui ont saisi ses avenues. On a grand tort de la peindre inaccessible aux enfants, et d'un visage renfrogné, sourcilleux et terrible : qui me l'a masquée de ce visage pâle et hideux ? Il n'est rien plus gai, plus gaillard, plus enjoué, et à peu que je ne dise folâtre. Elle ne prêche que fête et bon temps : une mine triste et transie montre que ce n'est pas là son gîte.

I-25, De l'institution des enfants, p. 246
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Je trouve vraisemblable qu'il [Solon] ait ... voulu dire que ce même bonheur de notre vie, qui dépend de la tranquillité et contentement d'un esprit bien né, et de la résolution et assurance d'une âme réglée, ne se doive jamais attribuer à l'homme, qu'on ne lui ait vu jouer le dernier acte de sa comédie, et sans doute le plus difficile. En tout le reste il peut y avoir du masque : ou ces beaux discours de la philosophie ne sont en nous que par contenance, ou les accidents ne nous essayant pas jusques au vif, nous donnent loisir de maintenir toujours notre visage rassis [tranquille]. Mais à ce dernier rôle de la mort et de nous, il n'y a plus que feindre, il faut parler français. Il faut montrer ce qu'il y a de bon et de net dans le fond du pot. "Car alors les paroles de vérité jaillissent enfin du fond du coeur ; le masque est arraché, demeure la réalité" (Lucrèce III-57). Voilà pourquoi se doivent à ce dernier trait toucher et éprouver toutes les autres actions de notre vie. C'est le maître jour, c'est le jour juge de tous les autres : c'est le jour, dit un ancien, qui doit juger de toutes mes années passées. Je remets à la mort l'essai du fruit de mes études.

I-18, "Qu'il ne faut juger de notre heur, qu'après la mort", p. 122.
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Notre esprit est un outil vagabond, dangereux et téméraire ; il est malaisé d'y joindre l'ordre et la mesure ; de mon temps ceux qui ont quelque rare excellence au-dessus des autres, et quelque vivacité extraordinaire, nous les voyons quasi tous débordés en licence d'opinions et de moeurs : c'est miracle s'il s'en rencontre un rassis [tempéré] et sociable. On a raison de donner à l'esprit humain les barrières les plus contraintes qu'on peut. En l'étude, comme au reste, il lui faut compter et régler ses marches, il lui faut tailler par art les limites de sa chasse. On le bride et garrotte de religions, de lois, de coutumes, de science, de préceptes, de peines, et récompenses mortelles et immortelles ; encore voit-on que par sa volubilité [inconstance] et dissolution, il échappe à toutes ces liaisons. C'est un corps vain, qui n'a pas par où être saisi et assené [conduit à un but] : un corps divers et difforme, auquel on ne peut asseoir noeud ni prise. Certes il est peu d'âmes si réglées, si fortes et bien nées, à qui on se puisse fier de leur propre conduite, et qui puissent avec modération et sans témérité, voguer en la liberté de leurs jugements, au-delà des opinions communes. Il est plus expédient de les mettre en tutelle.

II-12, Apologie de Raimond de Sebonde, p. 868
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