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Citations de Morgan Audic (183)


Encore une porte couverte de givre, et Lottie arriva dans la « Cathédrale », la grande pièce qui menait aux trois chambres fortes où étaient stockées les graines. Rails métalliques, tuyaux et barres de néon au plafond. Avec ses murs irréguliers et blancs, on avait presque l'impression d'être dans un gigantesque igloo.

C'est là qu'elle retrouva (…) une quinzaine de personnes coiffées de casques de chantier bleus, qui expiraient de petits nuages de vapeur à chaque parole. Emmitouflés dans de lourds manteaux, elles écoutaient une des responsables de NordGen, la banque de gènes qui gérait l'Arche, leur faire une présentation de la réserve et de son importance pour l'humanité.

Lottie se demanda si elle allait leur expliquer qu'en 2017, la réserve avait été innondée à cause du réchauffement climatique. Le pergélisol, la couche de terre qui ne dégelait jamais, avait fondu. Les graines n'avaient pas été affectées et des travaux avaient été entrepris pour éviter que l'incident se reproduise, mais le symbole était fort : même le plan B de l'humanité prenait l'eau.
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Avec amertume il se dit que le monde se souvenait de dictateurs, de joueurs de foot brésilien et d’artiste peignant des carrés blancs sur fond blanc, mais que personne ne pouvait donner le nom d’un seul de ces hommes qui avaient sauvé l’Europe d’un cataclysme nucléaire sans précédent. Qui connaissait Alexeï Ananeko, Valeri Bespalov et Boris Baranov ? Qui savait qu’ils s’étaient portés volontaires pour plonger dans le bassin inondé sous le réacteur 4, pour activer les pompes et le vider de son eau avant que le cœur en fusion ne l’atteigne ? Qui savait que si le magma d’uranium et de graphite s’était déversé dans le bassin, il se serait produit une explosion de plusieurs mégatonnes qui aurait rendu inhabitable une bonne partie de l’Europe ?
Qui le savait ?
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C'était considéré comme un fait acquis par tous ceux qui le connaissaient ; en dessous de la définition de connard dans le dictionnaire, on trouvait la photo de Mohamed Malouche.
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Les gens qui viennent ici comprennent rarement ce qu’est le Svalbard. Sur le papier, on leur vend un petit paradis glacé. Des beaux paysages, des rennes qui broutent le long de la route, et oh ! Regardez les oursons qui jouent avec leur mère. On leur vend une société parfaite, sans crime, sans pauvres, sans malades. Et on balaie sous le tapis la réalité de la vie ici. Qu’est-ce qui se passe quand quelqu’un est trop vieux ou trop malade ? On l’expulse. On l’envoie sur le continent par le premier avion pour qu’il crève ailleurs. Pareil pour ceux qui perdent leur job. Même les femmes enceintes on les fout dehors le temps qu’elles accouchent. Le Svalbard trie naturellement les forts des faibles.
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- Quelle plaie, maugréa Jorn. On va avoir tous les écolos de Norvège sur le dos. Quand je pense que j'ai d'anciens collègues qui trouvent le Svalbard ennuyeux...

Frost, ou Isbjorn N26392 pour les scientifiques, était connue au-delà des frontières de l'archipel. Elle avait fait l'objet de plusieurs documentaires diffusés sur Netflix et la BBC. La presse allait massivement relayer la nouvelle de sa mise à mort, d’autant plus que l'ours polaire était devenu dans l'imaginaire collectif l'animal totem du réchauffement climatique. Une dépêche rouge lancée par NTB, l'agence de presse norvégienne, devait déjà tourner dans les rédactions de tous les grands quotidiens du pays.

Le téléphone de Jom se mit à vibrer. Des officiels d'Oslo.
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Hamsun parlait déjà de notre société sans le savoir. Des personnes qui n’existent que par les objets qu’ils possèdent, qui négligent l’enracinement dans la nature… Aujourd’hui, les gens passent leur temps devant des écrans, à regarder la vie des autres au lieu de vivre la leur.
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- Je n'ai pas pu me séparer de certaines choses.

Il ramassa un livre ancien sur une étagère.

- Ceci, par exemple. Une édidon originale d’Alice au pays des merveilles. Je la lui avais offerte pour ses dix-huit ans.

- Elle doit valoir une fortune, commenta Diane.

- Elle n’a pas de prix. Elle est comme Alice. Unique et irremplaçable.

Dodgson regarda tristement le vieux volume en passant son pouce dessus.

- Petite, je lui lisais des histoires avant de s'endormir. Elle aimait beaucoup celle-là, parce que l’héroïne portait son prénom et était blonde comme elle. Un peu avant sa disparition, ma fille préparait une adaptation du livre avec une troupe de théâtre. Elle devait jouer une Alice qui avait grandi et qui retournait au pays des merveilles.

Le médecin rangea soigneusement l’ouvrage à sa place, avant de conclure :

-Je crois que tous les pères ont souhaité un jour que leur Alice ne grandisse pas. Qu'elle reste pour toujours au pays des merveilles.
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A l'entrée, ils enlevèrent leurs lourdes bottes et traversèrent le hall en chaussettes. C'était une des étrangetés de l'île : on se déchaussait toujours dans les bâtiments publics. Une habitude qui datait de l'époque où la plupart des hommes de l'archipel travaillaient à la mine et ramenaient sous leurs semelles de la poussière de charbon qui s’incrustait partout.
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Personne ne meurt à Longyearbyen.

C'était une solide rumeur qui y circulait, en partie à cause d'un vieil arrêté municipal qui datait de 1950 et qui interdisait qu'on enterre les gens dans le cimetière de la ville. Ceux qui vivaient à l'année à Longyearbyen savaient que c'était une fiction, bien sûr. On mourait au Svalbard comme ailleurs. De mort violente, toujours. Accidents, crises cardiaques... Les morts lentes, on les exportait sur le continent.

Il n'en restait pas moins que les gens de l'archipel se croyaient à l'abri du genre de mort qui avait frappé Agneta. C'était quelque chose de réservé aux grandes villes. Aux pays sous-développés. Ça ne pouvait pas se passer ici. C'était inacceptable.

Et pourtant, c'était arrivé.
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Une odeur de vieux papier flottait chez Oscar Duclair et l’air était sec. Dans toutes les pièces, des piles de journaux et de magazines montaient à hauteur d’homme. Celles près de l?entrée étaient composées d'anciens numéros du Détective français. Mourir pour dix euros. Poignardé pour un téléphone. Le pédophile de la crèche municipale. Les titres se disputaient la palme du sordide.

Publié chaque semaine, le canard de Duclair contenait une dizaine d'articles, abondamment agrémentés de photos floutées, qui relataient des faits divers Judiciaires romancés pour les rendre plus sensationnels. Duclair y racontait le crime au présent de l'indicarif, comme s'il le vivait, pour que l’horreur se déroule sous les yeux du lecteur, quelque part dans l'épaisseur du papier glacé. Oscar appelait ça du « journalisme narratif », mais pour Diane, ça s'apparentait juste à du voyeurisme.
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Par chez nous, le soleil ne se lève pas pendant des semaines. Ça tape sur le moral. Les gens peuvent vriller d’un coup. C’est une période dure pour ceux qui traînent des valises trop lourdes.
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La- bas c’est sera du blé d’hiver, dit machinalement le fermier en designant ses terres d’un large geste de la main. Tout en bio, zéro pesticide.
- Du bio de Tchernobyl, soupira Novak, désabusée. Et les gens achètent ça ?
- Bien sûr. C’est meilleur et plus sain que la plupart des choses que vous trouvez sur le marché. On en exporte aussi à l’étranger.
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- Les gens qui viennent ici comprennent rarement ce qu'est le Svalbard. Sur le papier, on leur vend un petit paradis glacé. Des beaux paysages, des rennes qui broutent le long de la route, et oh ! regardez les oursons qui jouent avec leur mère.

On leur vend une société parfaite, sans crime, sans pauvres, sans malades. Et on balaie sous le tapis la réalité de la vie ici.

Qu'est-ce qui se passe quand quelqu'un est trop vieux ou trop malade ? On l'expulse. On l'envoie sur le continent par le premier avion pour qu'il crève ailleurs. Pareil pour ceux qui perdent leur job. Même les femmes enceintes on les fout dehors le temps qu'elles accouchent. Le Svalbard trie naturellement les forts des faibles.

Tout ce vemis qu'on passe sur nos mœurs, ça n'existe pas ici. Si tu ne peux pas subvenir à tes besoins, tu meurs. Si tu ne sais pas te défendre face à un ours, tu meurs.
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Le vent charriait dans son sillage de minuscules flocons de neige soufflés depuis la réserve ornithologique des Gåsoyane, invisible dans la demi-pénombre bleutée à l’autre bout du fjord. Chaque printemps, des oiseaux migrateurs allaient nicher là-bas, eiders, fulmars boréaux, bernaches nonnettes et guillemots de Brünnich. C’était comme si la brise avait décroché le duvet de leurs nids abandonnés pour l’éparpiller jusqu’ici.
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Bien qu'il n’apprécie pas que Ie médecin lui parle comme à un enfant attardé, il lui signifia son approbation d'un geste lent de la tête.

Asseyez-vous sur Ie bord du lit, s'il vous plait.

II obéit sans hate. Ses muscles étaient douloureux et ses mouvements patauds. Le médecin lui posa tout un tas de questions auxquelles il répondît par monosyllabes. Ça vous arrive souvent de boire autant ? Non. Est-ce que vous buvez régulièrement ? Non. Vous souvenez-vous de la nuit dernière ? Non. De celle d'avant ? Non. Vous avez des maux de tête ? Oui. Sur une échelle de un a dix, à combien situeriez-vous cette douleur ? Onze. Mal au ventre ? Oui. Quel a été l'évènement déclencheur de votre surconsommation d'alcool ? Rybalko regarda longuement Ie docteur.

— J'ai tué quelqu'un.

Le médecin se transforma instantanement en statue de sel.

— Quelqu'un ? Comment ? Qui ?

II prit son temps avant de répondre, un sourire narquois aux lèvres :

— Un toubib. II posait trop de questions.

Vexé Ie jeune medecin piqua un fard et lui enfila sans ménagement la sangle d'un tensiometre autour du bras.
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La pudeur protestante, songea Madsen. Dépression, suicide, alcoolisme, on ne parlait pas de ces choses-là en public, par crainte du jugement de la communauté. Le mot « suicide » apparaissait rarement dans les journaux quand quelqu’un mettait fin à ses jours. On utilisait des périphrases, on suggérait.
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Personne ne meurt à Longyearbyen.
C’était une solide rumeur qui y circulait, en partie à cause d’un vieil arrêté municipal qui datait de 1950 et qui interdisait qu’on enterre les gens dans le cimetière de la ville. Ceux qui vivaient à l’année à Longyearbyen savaient que c’était une fiction, bien sûr. On mourait au Svalbard comme ailleurs. De mort violente, toujours. Accidents, crises cardiaques… Les morts lentes, on les exportait sur le continent.
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- La cabane est un monument historique, lui rappela son collègue.
Elle avait oublié. Au Svalbard, tout ce qui datait d’avant la Seconde Guerre mondiale était protégé, même les ruines croulantes des anciennes mines abandonnées. La cabane de Rasmus datait des années 1930, il n’avait donc pas le droit de modifier quoi que ce soit dans sa cabane sans obtenir l’autorisation des services du gouverneur.
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Le site proposait une visite virtuelle du musée. Lottie se balada un moment dans les salles d'exposition, jusqu'à tomber sur l'image d'une grande vitrine en bois. À l'intérieur, on avait installé deux mannequins de cire, une femme et un enfant à qui elle donnait le biberon. En dessous, un carton indiquait : « L'animal le plus dangereux de la planète ».

Elle se demanda si le conservateur qui avait conçu le panneau parlait des humains en général ou des mères en particulier. Si on s'en prenait à sa fille, Lottie savait qu'elle pourrait probablement tuer.
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Les attaques d’ours étaient rares au Svalbard. Surtout les attaques mortelles. Mais les contacts avec eux devenaient de plus en plus fréquents dans l’Arctique. À cause du réchauffement climatique , d’abord. Chaque année, la banquise reculait et la chasse au phoque se complexifiait pour les ours polaires. Ils avaient donc tendance à s’approcher de plus en plus des endroits occupés par les humains pour y trouver de quoi se nourrir. Et puis il y avait le tourisme, en plein essor dans l’archipel, qui amenait des hordes de curieux au cœur de leur territoire.
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