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Citations de Nicole Gonthier (31)


En pensant à cette morte, Sibille était partagée entre l’anxiété et la colère. Et son époux qui n’était pas à Lyon en ce jour pour prendre les choses en main !
Alors qu’elle assumait aisément, d’ordinaire, les devoirs d’une maîtresse de maison, distribuant les ordres et les remontrances aux domestiques, veillant à la tenue morale de tous, initiant ses enfants aux principes de la religion et à la lecture du psautier, elle se sentait incapable dans la circonstance d’aviser à ce qu’il convenait de décider ou de dire pour éviter un scandale !
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Chacun dans cette ville avait, jusque-là, respecté et craint la lignée des Varinier. Mais une telle réussite suscitait tant de haineux, une réputation était si vite compromise par la rumeur que l’on devait tout craindre d’une telle infortune !
Que diable cette femme venait-elle faire dans son hôtel ? Pourquoi avait-elle entrepris de se jeter dans ce puits ? Sans doute parce qu’elle le savait le plus profond de la ville ? Vraiment on reconnaissait bien l’emprise du Malin dans cet acte contre le Créateur ! Mais pourquoi choisir la propriété d’autrui pour commettre ce péché suprême ?
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Dans cette ville, trop de seigneurs entrent en lice, songeait amèrement Arthaud tout en conduisant ses hommes. L’archevêque lui-même n’est-il pas constamment contesté par les orgueilleux chanoines du chapitre cathédral, ces trente-deux prêtres qui se font appeler « comtes de Lyon » ? Parce qu’ils sont nobles, riches en terres et en écus et qu’ils ont l’appui des cardinaux de la cour pontificale, ils osent prétendre gouverner la ville au même titre que le prélat !
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Si la loyauté de ses nouveaux sujets était tout acquise au roi de France, sur le terrain, en revanche, c’était une rivalité quotidienne entre sergents de l’archevêque et sergents royaux et plus d’un délinquant profitait de cette guerre des polices pour échapper au châtiment.
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Le prévôt donna le signal du départ ; la troupe se mit en marche, sortit du cloître Saint-Jean et prit la rue du Palais.

Quand ils passèrent devant la « Maison de Roanne », les sergents bombèrent le torse farouchement car dans cette grande bâtisse siégeaient, sous l’autorité du bailli-sénéchal, les officiers du roi de France qui imposaient à Lyon une police concurrente de celle du prévôt. Leur présence rappelait aux Lyonnais que l’archevêque n’était plus l’unique maître de la police et de la justice dans la ville, depuis que sa seigneurie, terre d’Empire, avait été annexée au domaine de France, cent cinquante ans auparavant, par une de ces audacieuses manœuvres politiques dont le roi Philippe le Bel était coutumier
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Messire de Varey passa la revue de sa petite escouade de cinq hommes, aucun n’avait oublié d’endosser la livrée brodée aux armes de leur maître, l’archevêque Charles de Bourbon, le seigneur de la ville. C’est que les sergents étaient fiers de ce costume qui leur valait l’admiration des femmes et l’envie de leurs voisins. Désireux de manifester leur supériorité et de défiler, glorieux, dans les rues de la cité, ils semblaient impatients de répondre aux ordres de leur chef. Ils arboraient hardiment les insignes de leur autorité et tenaient le poing fermé sur le pommeau de leur épée, brûlant de la sortir du fourreau, à la première sollicitation.
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La grosse cloche de la cathédrale venait de sonner la sixième heure quand le prévôt de police, Arthaud de Varey, rassembla ses sergents pour faire sa ronde habituelle. Il avait choisi de solides gaillards, carrés d’épaules, musclés et téméraires car l’on avait signalé des mendiants assez louches qui traînaient par les rues proches de la place des Changes et devant le parvis de Saint-Nizier, où se tenait la plus forte concentration de marchands étrangers pendant le temps de la foire. Il y avait là Bras-de-Fer, un homme terrible, dont la très haute taille en imposait à tous les délinquants, mais aussi Tout-Lourd, une masse de muscles qu’il fallait parfois retenir car sa violence naturelle trouvait un exutoire dans certaines arrestations.
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Jaquemette frissonna, Guillaume se serra légèrement contre elle pour retrouver un peu de chaleur car il lui semblait que tout son corps était saisi de glace.
Janin était déjà occupé à défaire le nœud solide qui assurait son compagnon, ses mains tremblaient un peu et il fit effort pour articuler : « Il faut prévenir monseigneur le prévôt, viens avec moi Tieven, je ne veux point être seul face à lui ou à ses sergents. »
Qu’un homme robuste comme Janin pût craindre le chef de la police laissa Guillaume songeur : aurait-il donc quelque chose à se reprocher ?
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« Qu’y a-t-il Tieven ? demanda-t-elle, qu’as-tu vu qui t’a fait hurler comme cela ? »
Tieven reprenait péniblement son souffle, sa voix chevrotait encore quand il répondit : « Sur le seau, en travers du puits, il y a une femme, la tête fracassée. Elle n’est guère jolie à voir, le visage est tout éclaté ! »
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Voici que Tieven réapparaissait, le visage maculé d’une poussière grise qu’entaillaient de longues stries de sueur, ses cheveux collés sur la nuque. Mais ce que remarqua tout de suite Jaquemette, ce furent ses yeux, comme agrandis par la peur, fixes et noirs.
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Tout à coup les parois du puits répercutèrent un cri, suivi d’un « sang Dieu » qui glaça Jaquemette et Guillaume, provoqua un arrêt brutal de la part de Janin. Bientôt Tieven hurla : « Janin ! Remonte-moi ! » d’une voix trop aiguë et tremblée qui ne lui ressemblait guère. Jaquemette se signa en murmurant « Jésus », Guillaume se figea près du puits.
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D’emblée il avait compris ce qu’on attendait de lui, en voyant Tieven qui nouait la longue corde autour de son corps.
« Attends, compère, que je trouve le moyen de bien me caler pour te retenir. »
Et il s’assit par terre, les deux pieds appuyés sur la chemise du puits, les jambes largement écartées. Il passa la corde par-dessus son épaule gauche, la fit glisser dans son dos pour la reprendre de la main droite dans sa large paume. De l’autre côté, Tieven s’apprêtait à descendre, il s’agrippa au rebord, plaqua le dos sur la paroi du puits, jeta ses jambes fléchies vers le mur opposé, se cala de la sorte au-dessus du vide et cria à Janin : « Va, lâche un peu de corde. » Ainsi assuré, il descendit prudemment, en ahanant.
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« Tieven, Jaquemette m’envoie te chercher avec Janin. Quelque chose a été jeté dans notre puits qui l’empêche de tirer le seau. J’ai bien proposé mon aide mais elle n’en a pas voulu », ajouta Guillaume avec une moue de désapprobation.
Tieven partit d’un rire franc, son grand corps se secouait et il se mit à frotter plus ardemment la croupe du cheval qui lança un sabot en arrière, en signe d’agacement.
« Toi, avorton, tu pensais devenir le chevalier servant de la Jaquemette ! Sais-tu bien que ce rôle nous est réservé, à moi et à mon compère Janin ? Ainsi la belle nous appelle au secours ! T’a-t-elle dit comment elle nous payera de notre peine ? Par le sang Dieu, je sais bien qu’elle n’est pas aussi sage qu’elle le prétend ! Femme ne peut rester vacante si longtemps. Crois-moi, petit, c’est d’un homme que cette belle nature a besoin ! »
Guillaume se renfrogna. Vraiment ce Tieven était un vil coquin de parler ainsi de Jaquemette. Le garçon était surtout vexé d’être rejeté de cette façon dans le monde de l’enfance, lui qui sentait naître dans son corps, depuis quelques mois, de troublants émois lorsqu’une servante lui souriait ou le frôlait.
« Janin, cria Tieven, viens-t’en par ici, la Jaquemette a besoin de nous. » Janin apparut au seuil d’un entrepôt.
« Je dois finir d’abord de ranger ces balles pour messire Francequin qui est arrivé tantôt de Florence avec ses marchandises.
— Hâte-toi, je vais devant, tu nous rejoindras. Tant pis pour toi si j’obtiens le guerdon2 de Jaquemette ! »
»
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Son zèle, son honnête maintien lui avaient valu la confiance de ses maîtres et, depuis plusieurs années, elle était devenue indispensable à la maison. Elle avait autorité sur valets et servantes, mais certains fils se permettaient parfois des allusions grivoises qui la faisaient rougir et lui mettaient le sang en feu.
Janin Nalet et Tieven Morin étaient de ceux-là. Grands gaillards de trente ans, tout en muscles et en os, valets à l’hôtel du Lion, ils aimaient taquiner Jaquemette sur sa pruderie en lui prenant la taille, mais si elle repoussait alors sévèrement ces effrontés, elle savait pouvoir compter sur leur aide en toute occasion.
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Jaquemette était sans doute fort jolie, autrefois. On disait que, dès ses treize ans, ses parents l’avaient mariée à un boucher, mais que cet époux ne lui avait apporté ni sécurité matérielle ni affection. Il avait fini par être pendu haut et court au gibet dressé sur le pont du Rhône, cinq ans après la rebeyne1 de 1436 dans laquelle il avait joué un rôle mineur mais, hélas pour lui, remarqué. C’est pour échapper à la misère, à l’infamie qui pouvait retomber sur elle et sur son fils, que Jaquemette s’était alors louée comme servante et elle avait trouvé dans la famille Varinier un état convenable.
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Jaquemette était flattée d’en imposer à ce jeune garçon, elle appréciait qu’il la vouvoie en signe de soumission. Sa mère l’a bien élevé, pensa-t-elle. Toutefois, elle savait que la maîtresse lui avait confié le petit valet et qu’elle ne devait pas risquer sa vie inconsidérément. Aussi fit-elle taire son envie d’accepter la proposition de l’enfant.
« Et que feras-tu si la corde casse ou se redéploie ? Niais que tu es ! Non, je vais demander à Janin et à Tieven, ils ont l’habitude de curer les puits. Mais, vrai ! Quelle perte de temps ! Moi qui ai encore la grande salle à lessiver ! Et quelles sottes plaisanteries faudra-t-il que je supporte de nouveau de ces deux fieffés paillards ? »
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Si je pouvais voir ce qui empêche la remontée du seau mais c’est noir comme dans le creux de l’enfer, ce puits est le plus profond du quartier ! J’ai beau me pencher, je ne vois pas la pierre qu’on y a jetée et qui a dû joliment abîmer mon seau ! Ne vois-tu rien, toi ? »
Guillaume se pencha jusqu’aux limites du déséquilibre, il écarquillait les yeux mais ne distinguait que des taches dansant devant ses pupilles dilatées. Il était resté trop longtemps à la lumière du soleil, le contraste était trop fort et rendait encore plus opaque la masse glauque qui se creusait sous la margelle.
« Non, rien ! Mais si vous le voulez, Jaquemette, je peux essayer de descendre le long de la corde, regardez comme elle est tendue entre ce qui obstrue le puits et la poulie !
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Le garçon se dressa prestement sur ses jambes et rejoignit en courant l’énorme servante qui était rouge et suante. Il lui prit des mains la manivelle et s’arc-bouta de tout son poids en arrière, recula et tira – en vain, le seau était bien coincé dans la bouche béante et sombre de ce puits profond.
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« Dans bonne maison, valets heureux », disait l’adage et Guillaume le vérifiait chaque jour.
Pour l’heure cependant, il devait se hâter de répondre à la demande de Jaquemette qui s’impatientait devant le puits de la cour. Sans succès, elle cherchait à faire tourner la manivelle afin d’enrouler la corde sur la poulie et remonter le seau.
« Faut-il que je vienne te frotter les côtes d’un bâton, maudit gars ?
— J’arrive, Jaquemette, j’arrive ! »
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La pierre de taille légèrement ocrée, les meneaux sculptés et les pinacles fleuronnés qui ponctuaient l’architecture de la tour d’escalier, les trois étages du logis, tout révélait la fortune du maître de maison, messire Thomas Varinier, un juriste éminent que les douze consuls élus au gouvernement de la ville de Lyon consultaient dans tous les cas litigieux.
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