Olivier Dutaillis : "Victor Hugo a réconcilié les français avec..."
Pourquoi écrire un roman sur la Révolution aujourd'hui ?
Cette période n'attirait pour son caractère éminemment romanesque, une fois dépassé l'imaginerie patriotique. Les principaux acteurs sont jeunes. Pas de temps à perdre pour lutter et s'aimer. La vie quotidienne est sans cesse bouleversée. Les élans les plus généreux côtoient les pires opportunismes. Les enjeux humains grouillent derrière le paravent des grandes idées...
Bien avant la fuite à Varennes, on le (La Fayette) suspecta d'être traître à la Révolution. Et il n'attendit pas la fusillade du Champ-de-Mars pour se monter très répressif.
Déjà, un an plus tôt, quand le bataillon de Chateauvieux se mutina à Nancy -les soldats n'ayant pas touché leur solde depuis longtemps- La Fayette réclama qu'on les exécute. C'était ce même bataillon qui, le 13 juillet 1789, aux Invalides, avait refusé de tirer sur le peuple lorsqu'il s'était emparé des fusils avant la prise de la Bastille.
Mais c'est au Champ-de-Mars que La Fayette se déshonora définitivement en faisant tirer sur le peuple.
J'ai ainsi compris ce qui me touchait tant chez Mérimée : il avait renoncé à son œuvre pour sauver vos monuments tandis que Hugo, son rival de jeunesse, devenait un monument lui-même.
« Un jour Prosper me demanda : - Vous n'avez donc aucun scrupule à dépouiller notre patrimoine ? - Aucun, mon ami ! Je n'allais pas me justifier en lui racontant que c'était pour moi le seul moyen de financer ma liberté. - Enfin, Emily, une personne qui a un sens artistique comme vous ! Fit-il espérant m'amadouer. Vous ne pourriez pas trouver une autre activité ? - Hélas, je ne sais rien faire d'autre ! Répondis-je sur le même ton. Et puis mes spoliations sont peu de chose à côté de ce que vous avez dérobé en Égypte ou en Italie, avec votre Napoléon... - C'était un butin de guerre ! - Le mien a le mérite d'être pacifique ! »
Ils vont se retrouver dans deux situations que tout oppose. Chacun d'un côté de la barricade, Hugo avec les insurgés, Mérimée avec la garde nationale. Hugo combattant de la liberté, Mérimée défenseur de l'ordre. Hugo républicain, Mérimée réactionnaire. Hugo en poète offensif, Mérimée en bourgeois conservateur. Et finalement, l'un proscrit, l'autre favori officiel du nouveau régime...
Jusqu'en 1848, pourtant, j'aurais été incapable de faire la différence entre leurs opinions.
Avec ce livre (Notre-Dame-de-Paris), il (Victor Hugo) avait créé un mythe. Une cathédrale de poésie. Hugo avait imposé la puissance de ses images. Il s'était approprié le monument en le réinventant. La fiction avait pris le pas sur la réalité.
Sur sa carte, Morel change les noms des plats pour s'adapter au nouveau climat politique,
avec son opportunisme habituel.La bouchée à la reine est devenue la timbale du citoyen,
le turbot en majesté le turbot façon Jeu de paume, les pommes dauphine les patates du sans-culotte,
le potage à la fleur de lys le potage patriotique, même les volailles à la broche sont maintenant des volailles à la baïonnette...
« La fin de Hugo est un triomphe absolu. Des obsèques nationales. Deux millions de personnes qui suivent sa dépouille. Et lui, génial metteur en scène jusqu'au bout, dans le corbillard des pauvres, selon ses dernières volontés. À défaut de pouvoir assister à son propre triomphe, à défaut de pouvoir prononcer un dernier discours du haut de son corbillard, il a eu droit à la répétition générale : trois ans plus tôt, la ville de Paris a organisé une cérémonie grandiose pour son quatre-vingtième anniversaire. Des trains entiers d'admirateurs sont montés à la capitale et, pendant toute la journée, un interminable cortège d'hommes, de femmes, d'enfants des écoles, de corps constitués... a défilé devant son domicile aux cris de «Vive Victor Hugo! ». À la fin de cette journée grandiose, l'avenue d'Eylau où il réside a été rebaptisé avenue Victor Hugo. Désormais, il a pour adresse : « Victor Hugo, en son avenue. »
J'arrivais trop tard, hélas, pour piller la Grèce ou l'Italie. Depuis plusieurs décennies, leurs plus belles antiquités étaient parties. Mais pour la France, c'était juste le bon moment.
"Il y a deux choses dans un édifice : son usage et sa beauté ! Son usage appartient au propriétaire, sa beauté à tout le monde ! C'est donc dépasser son droit que de le détruire !"