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Critiques de P. Craig Russell (84)
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L'étrange Vie de Nobody Owens, tome 1 (BD)

Dans le cimetière de Navotas, quartier nord de Manille, des familles et des enfants vivent dans des tombes, à cause de la pauvreté... Ils cohabitent avec les morts! Reportage LCI.

D'autres pauvres "vivent" ainsi dans la Cité des morts, au Caire. (Reuters).





Un petit garçon de 2 ans environ échappe à la mort, pourchassé par Jack, un tueur.

Comment peut-on nous déranger, après toutes ces années, s'insurgent les morts!

Ils s'étonnent même de la venue de la maman de l'enfant. "...étrange forme scintillante...de panique et de pure émotion"

- Protégez mon fils! Il veut faire du mal à mon bébé.





Toute la famille du bébé a été assassinée, et Jack est dans le cimetière, afin de finir sa sinistre besogne...

Nous ne saurons pas pourquoi, ni rien de Jack, car Silas, un vampire millénaire s'interpose...





Les morts vont se disputer, afin de savoir quoi avec ce bébé importun. Car, il est vivant, lui!

Cette nécropole est un monde onirique et étrange, avec ses morts et ses goules, ses codes... et une belle "Dame en gris" qui intervient.

- Les morts doivent être charitables.





Dans quel monde doit vivre Nobody? Celui des morts ou des vivants? La frontière entre le monde réel et le monde imaginaire des enfants ( thème cher à Neil Caïman / voir "L'Océan au bout du chemin") avec ses croyances, ses espoirs, et sa fantasmagorique... poésie !





Nobody, le bébé, grandira dans le cimetière et... sera ami avec une petite Scarlett...

Disney a acquis les droits cinématographiques du livre!
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L'étrange vie de Nobody Owens, tome 2 (BD)

Dans le tome 1, Scarlett avait 5 ans environ, quand elle rencontra dans un cimetière, Nobody, un étrange petit garçon, dont toute la famille avait été assassinée par un "Jack".





Scarlett a 15 ans et elle retourne par hasard, au cimetière...

- Tu peux me voir?

- Au début, je n'ai aperçu qu'une ombre, tu es comme dans mon rêve.

Scarlett voit au delà des apparences. Nobody est bien réel, mais s'il peut s'effacer et devenir invisible, aux yeux des vivants, lui qui a grandi avec les morts.





- Je peux te serrer dans mes bras? Demande Scarlett.

- Eh bien...OUCH!

- Désolée!

Scarlett voulait vérifier que c'était bien Nobody, (Je ne t'ai pas imaginé !)





Ce simple geste de deux adolescents va déclencher une cascade d'événements...

Silas le vampire millénaire, le tuteur de Nobody et gardien de la nécropole va partir en chasse...

Les " Jacks", les tueurs ont retrouvé la trace de Nobody, à cause de Scarlett...

Des personnes vont mourir, dont Mlle Lepescu et La Vouivre va trouver son... Maître !





Tout dépend de la façon de voir les choses. Scarlett a peur de Nodoby:

- Tu n'es pas une personne. Tu es aussi horrible que lui ( le "Jack"). Tu es un monstre.

- Non, ce n'est pas ça du tout.

Nobody vient de sauver Scarlett, d'une mort horrible... Et Silas le vampire va devoir encore intervenir!





Plus rien ne sera comme avant!

" Laisser la vie aux vivants est un gâchis. Nodoby Owens. L'un de nous est trop bête pour vivre, et ce n'est pas moi. Dis moi que je te manquerai."

Soupire Liza, en embrassant Noboby ( avec des lèvres tellement froides) puis elle s'évanouit, avec l'aube...
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American Gods, tome 1

American Gods de Neil Gaiman. J'ai plongé dans cette adaptation comic sans avoir lu préalablement le roman, mais en ayant écouté la série télé.



On y suit Odin qui tente de recruter les vieux dieux de tous les panthéons dans une guerre contre les nouveaux dieux : les médias, la technique, les autoroutes, etc. Ces vieux dieux sont arrivés en Amérique via les croyances des immigrants de toutes origines. Comme toujours avec Gaiman : tout est une allégorie.



Le protagoniste est Shadow. Un Noir qui sort de prison pour retrouver sa femme après 3 ans. Sauf que sa femme vient de mourir, dans un accident de voiture, alors qu'elle faisait une fellation au chauffeur, son meilleur ami.



Il est donc recruté par Wednesday (littéralement en anglais : Odin's Day) comme garde du corps. Évidemment, Odin n'a pas vraiment besoin de garde de corps et l'on se demande alors quel rôle attend Shadow. Surtout quand les nouveaux dieux adoptent la mauvaise habitude de kidnapper Shadow pour lui demander ce que prépare Odin.
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American gods, tome 3

American Gods réussit à nous offrir une fin satisfaisante et surprenante. Tous les arcs narratifs se ferment, y compris ceux que nous n'avions pas compris qu'ils en étaient.



A Storm is coming, donc. La bataille finale entre les vieux et les nouveaux dieux, et ces derniers ont assassiné Odin. Il ne fallait que cela pour que les panthéons s'unissent.



Mais d'abord, Ombre, le protagoniste, veut faire une veillée funèbre à Odin. Neuf jours attaché à un arbre, tant pis s'il en meure. Il n'a plus trop envie de vivre de toute façon depuis la mort de Laura : sa femme décédée d'un accident de voiture pendant qu'elle s'exerçait à l'art de la fellation sur son meilleur ami.
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American Gods, tome 2

Ce deuxième comic (sur trois) adapte la partie centrale du roman. Il souffre pour cela de m'avoir ni début ni fin. Il n'a ni l'avantage d'introduire l'univers extrêmement intéressant de American Gods comme le tome 1. Ni celui (j'imagine) du tome 3 qui pourra conclure les arcs narratifs.



À vrai dire, il se lit presque comme un interlude. L'histoire principale —les dieux des vieux panthéons qui partent en guerre contre les dieux modernes — est mise en pause alors que le protagoniste s'installe dans un petit village tranquille et fait face à ces problèmes personnels. Par chance, c'est du Neil Gaiman, et les personnages concernés demeurent bien écrits, attachants et crédibles.
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L'étrange vie de Nobody Owens, tome 2 (BD)

J'ai continué ma lecture du tome 1 avec grand plaisir à suivre Nobody Owens devenu désormais adolescent, il va être scolarisé, devenir presque transparent aux yeux de ces professeurs mais il va aider beaucoup d'adolescents de son âge notamment à faire face au racket qu'ils subissent.



Les dessins sont toujours autant plaisants et l'univers de ce tome est toujours aussi gothique à mon plus grand plaisir, il y a un côté aussi ici mystérieux avec tous ces Jack qui sont à la poursuite de Nobody et puis il y a des personnages côtoyés dans l'opus précédent qui font leur retour ici.



Une bonne approche pour moi de l'auteur Neil Gaiman que je n' ai toujours pas lu pour le moment. Un roman graphique qui se lit avec plaisir et d'une traite tout comme le premier.



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L'étrange Vie de Nobody Owens, tome 1 (BD)

Je découvre ce récit par le roman graphique, je fais d'habitude l'inverse mais je suis tombé sur ce roman graphique totalement au hasard à la bibliothèque.



J'ai beaucoup aimé cette histoire du jeune Jack qui échappe à un assassinat et se retrouve dans un cimetière, il est recueilli par des fantômes qui vont se charger de son éducation et de Silas qui va être son tuteur.



Un univers gothique qui m'a plu, de très beaux dessins, un récit captivant sans temps mort. Je suis heureuse d'avoir également emprunté le second tome afin de poursuivre ma lecture et je n'hésiterais pas à lire le livre de Neil Gaiman car je vois de nombreux éloges sur les livres de cet auteur.



Une très belle découverte et un moment plaisant de lecture.
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Elric : Stormbringer

Fatalité

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Ce tome constitue une adaptation du sixième tome des aventures d'Elric, écrit par Michael Moorcock. Il regroupe les 7 épisodes, initialement publiés en 1997 par Dark Horse Comics, écrits, dessinés et encrés par Philip Craig Russell, avec une mise en couleurs réalisée par Lovern Kindzierski et le studio Digital Chameleon. Il commence avec une introduction de Russell écrite en février 2021, et revenant sur sa longue relation avec Elric, entamée en 1979 avec sa lecture du premier roman, puis au travers des différentes adaptations qu'il a réalisées au fil des décennies, à commencer en 1983 avec Roy Thomas pour la première.



Vint un temps où il se produisit de grands changements sur Terre et dans les cieux, quand le devenir des hommes et des dieux était forgée par le destin. Le plus grand des héros de cette époque était un aventurier conduit par la fatalité, qui portait une épée chantante. Son nom était Elric de Mélnibonée. Le seigneur d'une race éparpillée qui avait autrefois dominé le monde. Elric le sorcier, l'épéiste, l'assassin de ses pairs, le spoliateur de sa patrie, l'albinos au visage de craie, le dernier de sa lignée. Il avait fini par se rendre au royaume de Karlaak pour prendre Zarizinia comme épouse. Son sommeil est troublé et il connaît son destin qui va bientôt s'accomplir. Des petites créatures démoniaques s'introduisent dans la chambre à coucher d'Elric à Karlaak. Après un rapide combat, ils l'estourbissent et ils enlèvent son épouse. Elric reprend connaissance au beau milieu de la nuit. Il va frapper à la porte du seigneur Voashoon, le père de son épouse. Celui-ci lui ouvre, et Elric lui demande de lui remettre son épée Stormbringer. Alors qu'il ressort de l'armurerie, plusieurs cavaliers attendent ses ordres. Il leur enjoint de battre la campagne à la recherche des kidnappeurs. Alors que l'aube pointe, leur chef vient rendre compte à Elric : ils sont bredouilles. Ça ne l'étonne pas, et il sait qu'il va devoir recourir à une autre méthode.



Elric retourne à son palais et prononce une incantation pour faire revenir à la vie l'agresseur qu'il avait eu le temps de tuer avant d'être assommé. Celui-ci a juste le temps de proférer quelques propos sibyllins. Il est une créature du chaos. Par-delà l'océan, une bataille se prépare. Par -delà la bataille, du sang sera versé si un parent d'Elric s'aventure avec lui portant un jumeau à celui qu'il porte. Vers un lieu où se trouve celui qui ne devrait pas vivre. Une transaction sera conclue. L'épouse d'Elric sera restaurée. Le démon s'écroule définitivement. Elric se souvient qu'il a entendu un voyageur évoquer des tensions montantes entre les différents royaumes par-delà l'océan, la reine de l'une de ces nations ayant requis l'aide de Dyvim Slorm, le seul parent d'Elric encore vivant. Cela signifie que le royaume de Jharkor s'apprête à entrer en guerre contre celui de Dharijor. Il fait serment au dieu Arioch de faire payer les responsables de l'enlèvement de Zarizinia. Le lendemain il entreprend la traversée qui le mène au port de Banarva. Il remarque qu'il abrite de nombreux navires de guerre, et que les rues sont pleines de soldats. Puis il entame la chevauchée devant le mener à Sequaloris pour rejoindre son cousin. Sur la route, une vieille femme le reconnaît et lui délivre un message de la part d'un démon du chaos avec lequel elle a conclu un pacte.



La parution des romans d'Elric s'est effectué dans un désordre chronologique. En gros, Stormbringer est le dernier du cycle de ce héros. Il est initialement paru sous la forme de quatre nouvelles : Les porteurs de flammes (1963), Retour d'un dieu mort (1963), Le bouclier du géant triste (1964), Le trépas du seigneur condamné (1964), après une série de six autres nouvelles se déroulant avant. P. Craig Russell a commencé à réaliser une adaptation d'un autre roman de ce personnage avec Roy Thomas, une quinzaine d'années auparavant. Il a donc acquis une maturité certaine dans la méthode d'adaptation, influencé par Thomas. Le lecteur prend vite conscience que cette bande dessinée est très dense et se lit deux fois moins vite qu'un comics de superhéros ordinaire. Il remarque que la quantité de texte est assez importante, en particulier tout ce qui est narration, hors dialogue. Il acquiert vite la conviction qu'il s'agit de passages du livre intégrés en l'état. Il se souvient que Roy Thomas était un adepte fervent de cette méthode qui lui permettait de réaliser lesdites adaptations beaucoup plus vite, en ayant moins à écrire. D'un autre côté, Russell se montre ainsi particulièrement fidèle à l'écriture de Moorcock. Parfois cela aboutit à une forme de répétition entre texte et image, mais finalement très peu de fois pendant ces 200 pages. Le lecteur se dit également que l'auteur n'a pas dû procéder à beaucoup de coupures puisque le roman initial passe d'environ 250 pages, à une bande dessinée de 200 pages, alors que toutes les descriptions écrites se retrouvent à l'état de dessins.



Le lecteur s'adapte donc à ce rythme de lecture qui correspond plus à celui d'un roman, qu'à celui d'une bande dessinée d'action. L'introduction de 3 pages attire déjà son attention sur les particularités des dessins de P. Craig Russell. Il y a cette vue d'une cité, Imrryr la capitale de Melniboné, avec juste la silhouette des bâtiments détourée d'un trait fin, et une couleur rose surprenante : une cité de conte pour enfants. Il y a le visage très simplifié du roi Voashoon, l'exagération romantique pour le couple formé par Zarozinia & Elric. Au fil du récit, le regard peut ainsi s'arrêter sur une case vraiment surprenante par sa tonalité : l'allure de vieille sorcière déguisée en paysanne pauvre qui délivre le message d'un démon du chaos, le corps d'ébène de Sepiriz, un tsunami évoquant Hokusai jouxtant une éruption volcanique évoquant Mike Mignola, les magnifiques glyphes quand Elric parle dans une langue ancienne, un plan rapproché en contreplongée sur le derrière d'Elric en train de monter à une échelle accrochée au flanc d'un navire, l'œil au milieu du bouclier du chaos représenté de manière naïve, une parodie du Death Dealer de Frank Frazetta pour représenter un seigneur de l'enfer, etc. L'artiste utilise des registres visuels inattendus, avec des apparences parfois enfantines ou très romantiques.



Cependant à la lecture, ces étrangetés spécifiques à P. Craig Russell font sens dans le fil des cases. Elles font partie intégrante de la narration, et y sont aussi pertinentes que les quelques cases qui semblent montrer ce que dit déjà le texte. En y repensant, le lecteur se dit même que l'artiste a su donner à voir des créatures et des entités défiant l'imagination, et le déchaînement de forces surnaturelles et magiques originales. L'adaptateur a su concevoir une apparence globale cohérente à laquelle chaque élément hétéroclite appartient sans solution de continuité. Le lecteur voit bien qu'effectivement tout coexiste dans le même monde cohérent : le casque ouvragé d'Elric, l'épée noire et massive Stormbringer (avec une longueur qui la rend impossible à manier dans un monde qui serait trop proche de la réalité), les flots agités par la présence du chaos, Straasha le roi au fond des mers dans son trône de nacre, les feuilles tueuses de sept arbres, et bien sûr Sotrmbringer en train d'absorber l'âme des individus qu'elle a occis. Le lecteur prend conscience à quel point les images forment une narration aussi dense que le texte, l'auteur ayant eu à cœur de montrer cet univers de Fantasy si riche, ses fastes et sa décadence, ses guerriers et le peuple, les démons du chaos et les créatures de l'ordre.



S'il a lu le roman, le lecteur découvre une adaptation fidèle, qui lui donne à voir ce que son imagination lui a sûrement dépeint sous une autre forme. S'il est allergique à cette idée, il se sera tenu à l'écart de cette adaptation, sinon il peut faire l'expérience de retrouver cette création de Michael Moorcock et de la voir par les yeux d'une autre personne pour confronter sa propre interprétation, car il y a autant de versions d'un livre que de lecteurs. S'il n'a jamais lu ce roman, il plonge dans un récit de genre, la Fantasy, avec une utilisation des conventions comme les sorciers, les entités surnaturelles et les combats à l'épée, plus ou moins conscient que Moorcock a inventé une partie de ces conventions. Il est à la fois conquis par la richesse de ces aventures, et de la trame de fond qui apparaît progressivement. Il peut sourire aux interventions bien opportunes de Sepiriz qui apporte toujours des informations au bon moment pour faire avancer la quête d'Elric. D'un autre côté, il peut aussi se dire que ce personnage n'est pas que l'avatar du scénariste en mal d'inspiration pour faire progresser son intrigue de manière organique, mais aussi l'incarnation de cette fatalité qui s'impose au héros. Elric est le jouet du destin : il lui est impossible d'échapper au rôle qui découle de sa culture, du système socio-culturel dans lequel il est né. Elric est l'incarnation de l'individu qui n'a d'autre possibilité que de subir ou d'accepter la vie toute tracée qui l'attend. Cette narration très centrée sur un personnage principal qui lutte contre des ennemis peut sembler un peu trop manichéenne, mais dans le même temps cette fatalité s'applique tout autant à tous les autres personnages qui n'ont pas plus de choix que de jouer le rôle qui leur a été imposé.



Il n'est pas donné à tout le monde de parvenir à adapter une œuvre aussi forte que ce roman d'Elric, écrite par un auteur à la forte personnalité et à la créativité originale. P. Craig Russell a pris le parti de conserver beaucoup du texte original, sans tomber dans une simple illustration de ce texte avec des cases fonctionnelles. Il a développé une vision personnelle de cet univers baroque, décadent et funeste, en respectant parfaitement le texte original, tout donnant à voir au lecteur l'image qu'il s'en fait. La pagination de l'adaptation lui permet de concilier ce respect du texte et une narration en images, plutôt que des illustrations accolées.
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The Magic Flute

Il s'agit d'une histoire complète en 1 tome, écrite et dessinée par Philip Craig Russell en 1989/1990. Dans ce tome (éditeur NBM, ISBN-10: 1561633518), il adapte en bandes dessinées, l'histoire du livret de La Flûte Enchantée (Die Zauberflöte), l'opéra de Mozart.



Tamino dort, étendu sur le sol en juste-au-corps noir avec un maillot au motif rouge et blanc. Il rêve : influencé par les 3 servantes de la Reine de la Nuit, il se promène dans une profonde caverne où il fait face à un être menaçant. Il est tiré de ses songes par Papageno (un oiseleur) qui prétend l'avoir sauvé des griffes d'un dragon. La Reine de la Nuit apparaît. Elle bâillonne Papageno pour ses mensonges et s'adresse à Tamino. Elle souhaite qu'il retrouve Pamina, sa fille, détenue prisonnière par Sarastro. Afin d'accomplir sa quête, elle lui confit une flûte capable de repousser la peur et le danger. Elle intime à Papageno l'ordre de l'accompagner, et confit à ce dernier un carillon magique. Les 2 compagnons de route décident de se séparer pour retrouver Pamina au plus vite. Celui ayant réussi appellera l'autre au moyen de son instrument magique.



Philip Craig Russell est un auteur de comics américain, connu pour ses collaborations avec Neil Gaiman (The Dream Hunters, Coraline ou Murder Mysteries), et ses adaptations d'Elric de Michael Moorcock (avec Roy Thomas, Elric of Melnibone), de Conan (Jewels of Gwahlur), d'opéras et des contes d'Oscar Wilde (par exemple The Birthday of the Infanta).



NBM a choisi de rééditer ses adaptations d'opéra en 3 tomes : (1) la Flute Enchantée, (2) Parsifal, Ariana & Bluebeard, I Pagliacci & Songs By Mahler et (3) Pelleas & Melisande, Salome, Ein Heldentraum, Cavalleria Rusticana. Les 3 tomes sont regroupés dans une même offre : The P. Craig Russell Library of opera adaptations (tomes 1 à 3).



L'intérêt du lecteur pour cette adaptation sera fonction de ce qu'il vient chercher. Pour ma part, je n'apprécie par l'opéra et je cherchais une introduction à l'histoire qui m'e la rende plus vivante qu'un simple résumé. Le travail d'adaptation est compliqué car les codes narratifs de l'opéra ne sont pas ceux d'un récit traditionnel, que ce soit sous la forme d'un roman ou d'une bande dessinée. De fait (après comparaison avec un résumé de l'argument), P. Craig Russell a fait des choix dans sa transposition. Ce qui lui importe est de raconter une histoire qui soit lisible, il a donc laissé de coté tous les éléments d'initiation et les références à l'Égypte antique, pour se concentrer sur l'aventure, le romantisme et les intrigues de la cour.



Il subsiste quelques transitions abruptes et une transposition du temps qui passe, un peu gauche et maladroite. Néanmoins P. Craig Russell réussit son pari de transformer un livret d'opéra en une bande dessinée intéressante. Le lecteur suit les pérégrinations de Tamino, les intrigues de palais et les tergiversations de Papageno. Le résultat est visuellement impressionnant. La séquence d'ouverture est bâtie sur une trame de 6 cases rectangulaires par page. Elle est dépourvue de phylactères, facile à suivre. Elle comporte des éléments oniriques aisément reconnaissables en temps que tels. Elle se déroule suivant cet écoulement du temps un peu étrange propre au rêve. La suite met en scène des personnages aux costumes renaissance mâtinés de moyen âge et de fantaisie. Seul maître à bord, Russell a dévolu le nombre de pages comme bon lui semblait, ce qui aboutit à des mises en page aérées et fluides qui mettent en valeur les moments clefs et ceux chargés d'émotion. Russell sait manier avec sobriété et efficacité les symboles pour montrer au lecteur que le cheminement du héros comporte une part de rite de passage.



L'esthétisme retenu par Russell est déconcertant. Il proscrit heureusement toute représentation hyper musclée ou hyper sexualisée pour des individus à la morphologie normale. Ses costumes évoquent ceux de l'opéra avec un coté exagéré et symbolique. Il se sert de la mise en page pour figurer les liens qui unissent 2 personnages, ou un personnage et un objet. Par exemple dans une pleine page, Pamina est agenouillée par terre et tient un couteau à la main, le quart supérieur est occupé par une case en médaillon où ne figurent que les mains dans le creux desquelles repose le couteau, et les bordures de 2 cases s'enchevêtrent pour souligner le dilemme du personnage. Il recourt parfois à des traits non signifiants pour accentuer l'émotion d'un personnage, telle la Reine de la Nuit prise de folie se tenant la tête dans les mains et entourée de traits intensifiant sa perte de repère. Il s'agit donc d'un dessinateur qui dispose d'un vocabulaire et d'une grammaire graphiques étendus. Il utilise également des couleurs un peu vives, dans des tons inhabituels tels que le jaune, l'orangé ou le mauve.



Visuellement, le voyage est agréable de bout en bout et il sort de l'ordinaire. Quant à l'adaptation en elle-même, tout dépend donc de ce que vous venez chercher. Russell propose plus une vulgarisation du récit qui permet au profane de se familiariser avec l'argument (même s'il comporte quelques modifications). Il ne s'agit en rien d'une retranscription fidèle, encore moins d'une adaptation commentant les intentions des auteurs (Mozart et Emanuel Schikaneder, son librettiste). En particulier toute la symbolique des rites franc-maçonniques a disparu, sans qu'il soit possible de dire si c'est par ignorance de Russell ou par choix délibéré. En prenant en compte ces différents aspects, il reste une bande dessinée qui sort de l'ordinaire, qui présente des visuels enchanteurs sur la base d'un récit parfois maladroit. Il reste également une adaptation peut être trop simplifiée qui privilégie le romantisme de l'oeuvre aux dépends de son sens caché.
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Norse Mythology, tome 1

Ce tome est le premier dans l'adaptation du livre La Mythologie Viking (2017) de Neil Gaiman. Il comprend 7 récits, tous adaptés par Philip Craig Russell, avec différents dessinateurs. Russell a adapté de nombreux livres de Gaiman dont Coralie, L'étrange vie de Nobody Owens, American Gods, également avec plusieurs artistes. La mise en couleurs a été réalisée par Lovern Kindzierksi, à l'exception de 3 histoires. Le tome se termine avec les 6 couvertures originales de Craig Russell sans texte ni logo, les 6 alternatives de David Mack véritablement enchanteresses, et celle de Bill Sienkiewicz, ainsi que 10 pages d'études graphiques.



Prologue : dessins de P. Craig Russell, 10 pages. Au nord il y avait Niflheim, plus froid que le froid, caché par le brouillard et la brume glacée. Là, neuf rivières empoisonnées jaillissaient du même maelstrom grondant appelé Hvergelmir. Au sud, était Muspell. Là, il n'y avait rien d'autre qu'une chaleur jaillissante, du feu, et de la lave en fusion. Sur le bord des flames, là où la brume se consume en lumière, se tenait Surtr qui existait avant les dieux. - Yggdrasil et les neuf mondes : dessins de P. Craig Russell, 6 pages. Le frêne Yggdrasil est un arbre vigoureux. Les plus belles et les plus parfaites de ses racines plongent dans trois mondes, alimentées par trois puits. La première racine, la plus profonde, plonge dans Niflheim, le dragon Nidhogg la rongeant par en dessous. - La tête de Mimir et l'œil d'Odin : dessins de Mike Mignola couleurs de Dave Stewart, 6 pages. En Jontuheim, la demeure des géants, se trouve le puits de Mimir. Il arrose l'arbre monde Yggdrasil. Tous les matins, Mimir plonge sa corne Gjallerhorn dans l'eau et se désaltère : son puits est la sagesse. - Les trésors des dieux : dessins de Jerry Ordway, 28 pages. L'épouse de Thor était la belle Sif. Thor l'aimait pour elle-même, pour ses yeux bleus, ses lèvres rouges, et ses longs, longs cheveux, de la couleur d'un champ d'orge à la fin de l'été. Un matin, Thor se réveille aux côtés de son épouse, et il constate que son crâne est chauve Il sait immédiatement qui s'est rendu coupable de cet acte : Loki.



Le maître bâtisseur : dessins de Piotr Kowalski, 32 pages. Thor s'était éloigné d'Asgard, pour aller combattre les trolls à l'Est. La ville profitait du calme et de la paix, les dieux étant conscients qu'elle manquait de protection. Loki propose à Odin de faire construire un mur d'enceinte autour de la cité. Le jour suivant, un nouveau venu se présente aux portes d'Asgard. Il est reçu par Odin et sa cour. Il propose ses services pour construire un mur d'enceinte en trois saisons : un hiver, un été et un hiver. En échange, il exige la main de Freya, le soleil qui brille dans le ciel le jour, la Lune qui donne de la lumière la nuit. Sa proposition est reçue par le silence des dieux, et le visage énervé de Freya. Odin lui demande de sortir, le temps qu'ils se concertent. - Les enfants de Loki : dessins et couleurs de David Rubín, 24 pages. Loki est marié à Sigyn, avec qui il a eu deux garçons Narfi et Vali. De temps à autre, il s'en va plusieurs jours durant. Odin a eu la vision que son fils a eu trois autres rejetons avec Angrboda. - Le mariage inhabituel de Freya, dessins peints de Jill Thompson, 26 pages. Un matin, Thor se réveille et son marteau Mjöllnir a disparu. Loki découvre qu'il a été volé par l'ogre Thrym qui ne le rendra qu'à la condition qu'il épouse Freya.



Neil Gaiman avait intégré certains éléments de la mythologie nordique dans sa série Sandman, par exemple Loki, et il a donc fini par raconter ces légendes, une forme synthétique à la fois érudite et de bonne foi, pour les présenter simplement à des lecteurs néophytes, sous forme d'histoires facilement accessibles, sans intention académique ou philosophique. L'éditeur Dark Horse a établi de longue date une relation de confiance avec cet écrivain (ou avec son agent littéraire), et organise régulièrement des projets d'adaptation de ses œuvres en comics, que ce soient des nouvelles ou des romans. P. Craig Russel a également établi une relation de confiance avec cet écrivain, d'abord en illustrant des épisodes mémorables de Sandaman (Ramadan dans le 50 par exemple), puis des adaptations qu'il a lui-même illustrées, et enfin des adaptations avec d'autres artistes. Le lecteur découvre donc de sympathiques bandes dessinées relativement courtes, reprenant chacune une légende ou un conte traditionnel mettant en scène Odin, Thor, Asgard et d'autres divinités de cette mythologie. Les dessins sont agréables à l'œil, tout public. Il ne faut donc pas s'attendre à une vision d'artiste de cette mythologie, ou à une interprétation très personnelle de type psychanalytique ou sociologique. Les histoires sont racontées au premier degré et le lecteur est supposé les prendre comme des comptes, parfois avec une morale.



Craig Russell se charge donc de dessiner les deux premiers chapitres : le prologue est consacré à la cosmogonie, et la suite aux neuf mondes et à leurs habitants. Le coloriste complète parfaitement les traits encrés, au point que le lecteur ne perçoive pas le fait qu'il s'agisse de deux artistes différents, et à ne pas pouvoir imaginer l'allure des cases sans les couleurs. Le dessinateur est un créateur avec une sensibilité personnelle développée à l'écart des superhéros, en particulier en réalisant des adaptations d'opéras classiques (The P. Craig Russell Library of Opera Adaptations) et d'histoires pour enfants d'Oscar Wilde (voir The Fairy Tales of Oscar Wilde). Ses cases ne sont donc pas percluses des tics graphiques des comics de superhéros, et le lecteur n'éprouve jamais la sensation de lire un comics de Thor version Marvel. Il réalise des images un peu épurées, tirant parfois vers une idéalisation naïve, tout à fait adaptée pour transcrire des notions divines, des lieux mythologiques. Il a la lourde tâche de donner à voir deux chapitres d'exposition et de présentation, et il s'en sort très bien avec des dessins légers et des cartouches de texte concises et claires. Le lecteur fait donc connaissance (ou retrouve) les neufs mondes, le dragon Nidhogg, l'écureuil Ratatosk, Surtr, les trois nornes Urd, Verdandi et Skuld, et quelques autres. C'est une présentation légère, agréable à la lecture, destinée à des néophytes, ou à des lecteurs souhaitant se faire une idée plus précise de ce qui relève réellement de la mythologie nordique, sans ajouts éditoriaux apocryphes.



Le lecteur passe ensuite à l'histoire racontant comment Odin a perdu son œil. Il ressent tout de suite que l'histoire est plus sombre, à la fois pour le sujet, à la fois du fait des dessins, plus épurés, avec des aplats de noir plus important, aux formes plus torturés. Mike Mignola est en très grande forme pour une épure des plus sophistiquée, à la fois d'une rare élégance et d'une simplicité apparente qui est le fruit de nombreuses années de raffinement de son art. C'est une histoire fondamentale, narrée avec intelligence. Le tome se poursuit avec une histoire plus longue évoquant la manière dont Loki a manipulé deux tribus de nains pour un concours de trésors à offrir à Odin. Le mode narratif revient dans un registre très classique avec des dessins plus descriptifs et précis, des personnages avec des dialogues, et très peu de cartouches de texte. Cela se lit donc comme une bande dessinée classique. Jerry Ordway, vétéran des comics, parvient à se tenir à distance de l'apparence de Thor et Odin des comics Marvel, s'inspirant plus de leur apparence dans le prologue dessiné par Craig Russel. Il a disposé du temps nécessaire pour peaufiner ses dessins dans les contours, avec une présence régulière des décors, même si ceux-ci manquent d'imagination, et d'emphase pour une cité des dieux. L'histoire est facile à lire, et raconte comment Thor a acquis un marteau proche de la perfection, mais pas tout à fait à cause de la nuisance d'une mouche, et comment Loki a dû payer le prix de sa duplicité.



L'histoire suivante reste dans le même registre narratif : des dessins descriptifs, et une prédominance des dialogues sur les récitatifs. Piotr Kowalksi réalise des dessins plus vivants que ceux du chapitre précédent, avec une petite touche d'amusement qui rend le conte plus savoureux, sans neutraliser sa dimension dramatique. Par exemple, le lecteur ne peut que sourire devant l'air furibard de Freya qui ne peut pas envisager un seul instant l'éventualité d'un mariage avec cet inconnu, et qui ne peut pas croire que les autres dieux n'écartent pas cette éventualité avec la même vigueur qu'elle. Le lecteur se rend compte que cette narration très littérale rabaisse les dieux à l'état de simples mortels, au moins dans les dessins, ce qui diminue d'autant la fibre mythologique du récit pour le ramener à l'état de simple conte. La narration visuelle de David Rubín est plus colorée, moins réaliste pour les personnages, comme s'ils étaient habités par une énergie plus riche qu'un simple être humain. Du coup, l'aura des dieux augmentent un peu d'intensité, et les monstres sont moins inoffensifs sur le plan visuel. Les actions magiques sont plus inquiétantes, que ce soit le ruban de soie de l'atelier des elfes ou les crocs du loup et la texture de sa langue. Jill Thompson s'éloigne également un peu de la représentation descriptive, avec des pages allant plus vers une lecture pour lecteurs plus jeunes, une touche de comédie dans le jeu des acteurs, et une mise en couleurs à l'aquarelle douce et très agréable sans être fade. La dimension dramatique diminue d'autant, les dieux passant pour des gens pas très sérieux, mais sans perdre leur aura de personnages avec une stature plus grande que celle de simple être humain.



Bien sûr, l'appréciation du lecteur pour ces histoires dépend fortement de ce qu'il est venu chercher. Si son horizon d'attente est celui d'une interprétation personnelle de mythes bien connus, il n'y trouvera pas son content. S'il est venu découvrir des parties des fondations de la mythologie nordique, il apprécie des histoires bien faites, accessibles et agréables à la lecture convenant à un large public.
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L'étrange Vie de Nobody Owens, tome 1 (BD)

j' ai trouvé ce roman graphique par hasard dans la section ado de la bibliothèque d Ixelles et j'ai tout de suite apprécié cette histoire poétique et gothique d'un jeune enfant recueilli par les habitants d'un cimetière alors qu'il est poursuivi par un tueur. Les morts sont de différentes époques , un couple du XVIIIe siècle, ayant vécu sans enfant, l'adopte. Il vit toutes sortes d'aventures étranges, avec un vampire pour tuteur, croise une vouivre, des goules, un loup garou, une belle sorcière, une confrérie de tueurs . Son apprentissage accompli, il peut quitter le cimetière pour vivre sa vie jusqu'à que la dame en gris sur son étalon le retrouve.
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L'étrange Vie de Nobody Owens, tome 1 (BD)

Quelle drôle de vie que celle du jeune Nobody Owens !

A 5 ans, il est le seul membre de sa famille à échapper au Jack, tueur implacable qui assassine son père, sa mère et sa sœur. Il se retrouve à vivre dans un cimetière, élevé par les fantômes qui hantent le lieu, avec pour seule consigne de ne jamais passer les grilles. Silas, son tuteur, est une étrange créature de la nuit qui pourvoit à ses besoins. Seul humain à vivre là, Nob passe ses journées (et ses nuits) à vivre de nombreuses aventures...

J'ai vraiment beaucoup aimé cette BD fantastique et gothique à souhait.

J'ai trouvé original le fait que les cinq épisodes de ce premier tome soient illustrés par des dessinateurs différents et que pourtant, il y ait une unité tout au long du récit.

Nobody Owens est un jeune garçon très attachant qui côtoie de mystérieuses créatures sans se rendre compte des dangers qui l'entourent. Silas, quant à lui, semble cacher des choses mais reste très protecteur envers le jeune garçon.

Je n'ai pas lu le roman de Neil Gaiman mais je pense que je vais très vite remédier à cela !
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American Gods, tome 1

Ce tome est le premier de l'adaptation du roman de Neil Gaiman du même nom : American Gods (2001). Il comprend les 9 épisodes de la première saison, initialement parus en 2017, écrits et mis en page par Philip Craig Russell, dessinés et peints par Scott Hampton, avec des couvertures réalisées par Glenn Fabry, et des couvertures alternatives par David Mack. Il comprend également une séquence dessinée par P. Craig Russell (4 pages), une par Walter Simonson (4 pages), une par Colleen Doran (8 pages) et une par Glenn Fabry (11 pages). Il contient un cahier de 27 pages de recherches graphiques, et les couvertures alternatives réalisées par Skottie Young, Becky Cloonan, Fábio Moon, Dave McKean, David Mack, Bill Sienkiewicz, Mark Buckingham, Scott Hampton.



Shadow Moon est un afro-américain qui arrive au bout de sa peine de prison de 3 ans. C'est un individu costaud dont la carrure lui a permis de ne pas se faire embêter. Il s'est tenu à carreau et a passé le temps en entretenant sa forme physique et en s'entraînant à des tours de magie à base de pièces de monnaie. Il s'est tenu à l'écart de toutes les embrouilles. Le soir, il imagine ce qu'il fera quand il sera libre : prendre un vrai bain, retrouver sa femme Laura McCabe, se tenir à l'écart de toute magouille. Un détenu lui a prêté son exemplaire de Histoires d'Hérodote d'Halicarnasse (-480 à -425). Un mois avant sa sortie de prison, il voit un conseiller à qui il peut dire que quelqu'un l'attend à sa sortie (sa femme) et qu'il a même un boulot d'assuré. Deux jours avant sa sortie, un garde vient le chercher pour un entretien avec le responsable de la sécurité. Il lui indique qu'il va être libéré un peu en avance, pour lui permettre de se rendre à l'enterrement de sa femme, décédée dans un accident de voiture. Il lui présente ses condoléances.



Shadow Moon sort de prison, prend le bus, prend un premier avion, puis un second, puis un troisième après avoir couru pour attraper sa correspondance. Le passager assis à côté de lui indique qu'il est en retard. C'est un homme portant, chemise, cravate et veste, avec un œil gauche mort et une balafre en travers de l'arcade sourcilière gauche. Il lui indique qu'il a un boulot pour lui. Shadow Moon ne donne pas suite et laisse Mister Wednesday derrière lui, alors qui prend une voiture de location pour se rendre dans sa ville. De manière inexplicable, Wednesday est en train de se soulager aux urinoirs lorsqu'il s'y rend lui-même après avoir fait de la route. À Los Angeles, une femme prostituée (Bilquis Withaq) reçoit un client chez elle. Elle lui demande de l'adorer. Il se rend compte qu'il est en train de jouir de la meilleure partie de jambes en l'air qu'il n'a jamais connue.



Quand il se lance à la découverte de ce tome, le lecteur a forcément conscience qu'il s'agit de l'adaptation d'un roman. Philip Craig Russell est un habitué des adaptations des romans de Neil Gaiman. Celle-ci a été mise en chantier pour coïncider avec l'adaptation télévisuelle du même roman. La présentation de l'ouvrage ne précise pas le degré d'implication de Neil Gaiman, si ce n'est qu'il est l'auteur de l'histoire et des mots, et que Russell est le responsable du script. Le lecteur reconnaît bien le processus de production des comics américain, mais avec un découpage un peu différent de d'habitude : un adaptateur qui se charge de la mise en page, un artiste qui assure la finition des esquisses et leur mise en couleurs. La participation de Walter Simonson, Colleen Doran et Glenn Fabry correspond à des retours en arrière expliquant comment des divinités ont pu s'installer en Amérique du Nord. Le lecteur prend plaisir à voir les pages de P. Craig Russell finalisées par lui-même. Les pages de Simonson sont sympathiques, mas sans avoir la puissance mythologique attendue. Celles de Doran sont beaucoup plus nuancées, parfaitement en phase avec l'époque décrite. Enfin celles de Fabry ont une texture charnelle apportant une force et une intensité incroyable à la séquence.



Si le lecteur connaît déjà le travail de P. Craig Russell, il retrouve sa manière de découper les planches et de dessiner. Il utilise essentiellement des cases rectangulaires, de taille variable, parfois très petites, comme pour insérer un détail minuscule, ou pour la présence d'un élément dans un espace trop réduit. Lorsque le récit s'oriente vers une dimension onirique ou spirituelle, il peut utiliser des cases de forme irrégulière, qui ne sont pas disposées en bande bien rectiligne. Russell est adepte du dessin épuré, avec une importance donnée aux contours pour les personnages, et aux lignes structurantes pour les décors. Il recherche une impression réaliste, mais avec le minimum de détails. Ainsi les pièces dans lesquelles se tiennent les personnages sont souvent réduites à un ou deux traits verticaux pour en figurer les angles et un ou deux traits pour délimiter la frontière entre les murs et le plafond. Pour une raison non explicite, Russell aime bien également les pièces avec une grande hauteur sous plafond, même si cela ne correspond pas au type de construction. De la même manière, les personnages peuvent se tenir dans une case dépourvue de tout arrière-plan pour mettre en avant leur discussion. Ces choix graphiques donnent parfois une impression de narration visuelle naïve et un peu détachée du point de vue émotionnel. D'un autre côté, elle permet de mieux faire passer les éléments magiques ou oniriques.



Les esquisses de P. Craig Russell sont donc complétées par les finitions de Scott Hampton. Ce dernier affectionne les traits de contour très fins, ce qui confère une impression un peu éthérée aux personnages et aux décors. Il respecte la volonté d'épure de Russell, tout en habillant un peu ses dessins avec la mise en couleurs, sans chercher à cacher les zones vides des dessins. Il ne lisse pas ses traits de contour, les légères irrégularités apportant une petite complexité aux éléments ainsi détourés. Il complète parfois les cases avec des photographies retouchées, ou avec des décors plus élaborés. Cette façon d'achever les esquisses présente l'avantage de rendre insensible le glissement de la réalité vers l'onirisme ou le spirituel, de donner une allure grimaçante ou surnaturelle au visage de certains personnages, de donner plus de consistance à un décor en le représentant avec plus de détails ce qui l'ancre plus fortement dans la réalité. Le lecteur peut aussi considérer que le degré de détails ou celui de réalisme reflète le degré d'attention ou de concentration du personnage principal, ou son état d'esprit, sa façon d'appréhender la réalité ou de glisser vers un état de fugue. Les fluctuations d'un mode de représentation vers un autre provoquent également une sorte de flottement dans l'esprit du lecteur qui ne sait pas toujours comment ajuster son mode d'interprétation de ce qu'il lit.



Même s'il n'a pas fait attention au fait qu'il s'agit de l'adaptation d'un roman, le lecteur se rend vite compte des spécificités du mode narratif. Les cellules de texte du narrateur omniscient sont présentes environ 8 pages sur 10, apportant des informations complémentaires sur l'état d'esprit d'un personnage, sur son histoire personnelle, sur ce qu'il est en train de faire. S'il a déjà lu un roman de Neil Gaiman, le lecteur identifie tout de suite sa voix d'auteur et comprend qu'il doit prendre au pied de la lettre le fait que les mots sont de Neil Gaiman, dans cette adaptation. Il remarque aussi qu'il arrive de temps en temps que ces cellules de texte disent pour partie ce que montrent déjà le dessin auxquelles elles sont accolées. L'intrigue s''avère assez linéaire, puisqu'elle suit Shadow Moon dans l'ordre chronologique des événements qui lui arrivent. Dans le même temps, la narration donne l'impression au lecteur de cumuler de nombreux détails anecdotiques, sans grande signification par rapport à l'histoire générale. Parfois un détail acquiert de l'importance des dizaines de pages plus loin (la lecture des Histoires d'Hérodote), parfois le lecteur reste perplexe. Par exemple, quel sens donner au fait que Shadow Moon doive courir pour attraper une correspondance dans un aéroport ? Quelle importance qu'il passe devant un cimetière pour engins de chantier, avec un millier de bulldozers et de tracteurs ? Même en passant en mode poétique ou association libre d'idées, le lecteur ne perçoit pas de sens ou d'écho avec un autre élément du récit.



Le lecteur accompagne donc Shadow Moon dans son étrange boulot, de servir d'homme de main ou d'homme à tout faire pour un vieil homme un peu excentrique, avec un objectif clair dans sa tête, mais indiscernable pour les autres. Il repère des actes de magie, d'abord de prestidigitation, puis des manifestations surnaturelles. Il voit l'intrigue progresser lentement, tout en ayant conscience que l'évolution de Shadow Moon est tout aussi essentielle au récit que les événements plus importants. Il reconnaît bien la capacité de Neil Gaiman à concevoir des situations et des endroits décalés à la poésie séduisante, comme cet étrange manège. D'un autre côté, le titre et les couvertures des épisodes ne laissent pas beaucoup de place au doute ou au suspense : il s'agit d'une histoire relative aux dieux existant sur le sol américain. Qu'il ait lu le livre auparavant ou non, le lecteur comprend vite la véritable nature de monsieur Wednesday (même s'il ne l'a pas forcément identifié jusqu'à pouvoir lui donner son vrai nom), ainsi que celle des personnes qu'il rencontre. Du coup, la dynamique du récit ne recèle pas de suspense, et n'en paraît que plus lente. En choisissant de rester évasif quant aux sens des épreuves de Shadow Moon, de laisser le lecteur interpréter ce qui reste implicite, il ajoute à l'étrangeté des situations (par exemple quand il travaille pour une entreprise de pompes funèbres dans la ville de Cairo), mais aussi il n'accroche pas toujours l'attention du lecteur si celui-ci est moins sensible à la métaphore d'une situation ou d'une autre, ou s'il n'y voit qu'une évidence, sans réelle résonnance émotionnelle, spirituelle ou ésotérique. En cela, P. Craig Russell & Scott Hampton se montre d'une fidélité exemplaire à l'œuvre originale, en transcrivant parfaitement le ressenti de la lecture du roman.



Dès le premier épisode, le lecteur se rend compte de la qualité du travail d'adaptation réalisé, que ce soit dans la conception de la narration graphique qui réussit à marier les séquences les plus prosaïques avec les éléments plus oniriques et mystiques, ou dans l'interaction des mots et des images qui restituent à la perfection la tonalité et l'esprit de la prose de Neil Gaiman. Du coup, si le lecteur est sensible à aux romans de Gaiman, il éprouve le plaisir ineffable de se (re)plonger dans ce récit, 5 étoiles. S'il n'est pas en phase avec la sensibilité de l'auteur, il s'attache aux pas de Shadow Moon sans déplaisir, mais en se demandant quel est l'enjeu d'un tel récit, et en finissant par trouver le temps long malgré la qualité de l'adaptation, 3 étoiles.
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L'étrange Vie de Nobody Owens, tome 1 (BD)

Adaptation du roman de Neil Gaiman du même nom, cette BD (et 1er tome) raconte l'histoire de Nobody Owens, un jeune garçon qui, pour échapper au tueur qui a assassiné sa famille, se réfugie dans le cimetière surplombant la ville. Il sera alors élevé, choyé et protégé par les fantômes occupants des lieux, un petit être vivant au milieu des morts, tous plus charmants les uns que les autres. Même son tuteur Silas, vampire de son état, veille patiemment à son éducation, et à ce qu'il ne quitte pas le cimetière pour le protéger de Jack, l'assassin qui doit terminer son noir dessein...

J'avais adoré le livre, je suis tout aussi emballée par la BD. J'y ai retrouvé toute la poésie, l'ambiance doucement gothique et le charme désuet qui m'avait tant plu à la lecture de Gaiman. Découpée en 5 chapitres équilibrés, cette BD bénéficie de la contribution de plusieurs auteurs sous la houlette de Craig Russell. L'exercice est géré harmonieusement et permet une lecture limpide et sans accroc. Une fois lancé, on ne décroche plus et on n'a qu'une hâte : enchaîner sur le deuxième tome !
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Fables, Tome 4 : Le dernier bastion

Waw, je viens de sortir retournée de cette lecture car si j’en ai appris un peu plus sur l’invasion du monde des Fables par l’Adversaire, je suis encore loin de tout savoir !



Mais j’adore quand on me titille la curiosité de la sorte et quand on me surprend alors que je suis bien installée dans mon confort de lecture.



Boy Blue n’a pas trop le moral et puisqu’on lui demande si gentiment, il va nous conter l’histoire du dernier bastion, ce dernier refuge des Fables avant qu’elles ne quittent définitivement leur monde pour arriver dans le nôtre.



L’auteur est une peau de vache, bien qu’il nous dévoile un peu plus sur cette guerre et ce qui se passa durant le dernier bastion, cette sorte de Fort Alamo qui est prêt à tomber au mains de l’Adversaire, il ne nous dit pas tout non plus, juste assez pour nous satisfaire, mais sans nous gaver ou tout nous dire.



De plus, il introduit aussi trois personnages bien chelous dans Fableville avec des airs des M.I.B, la démarche de Will Smith en moins.



Hélas, il y a toujours un dessinateur dont je n’aime pas ce qu’il nous fait de Bigby (pas de nom), mais pour le reste, ça bouge, c’est rempli de souvenirs, de suspense et de sacrifices de certains aussi pour que d’autres puissent s’enfuir et vivre.



Le tout entrecoupé de la campagne électorale de notre Prince Charmant qui se verrait bien maire à la place du maire de Fableville. En tout cas, comme tout bon politicien, il baratine beaucoup.



Rien à dire, c’est addictif cette série !


Lien : https://thecanniballecteur.w..
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L'étrange Vie de Nobody Owens, tome 1 (BD)

J’ai vraiment aimé cette BD qui est très travaillée et suffisamment étoffée pour qu’on ne reste pas sur sa faim. Il s’agit de l’adaptation d’un roman de Neil Gaiman que je n’ai pas lu donc pour moi la découverte était totale. Pour ceux qui comme moi ne connaitrait pas l’histoire, ce sont les aventures du jeune Nobody Owens dit « Bod » qui réchappa très jeune à l’assassinat de toute sa famille par le « Jack », un tueur implacable, et fut recueilli par les fantômes d’un cimetière. Il n’a pas l’autorisation d’en quitter l’enceinte mais cet espace est suffisamment vaste et peuplé de créatures étranges pour lui faire vivre de nombreuses aventures...

Cinq épisodes dans ce premier tome, chacun dessiné par un auteur différent, ce qui ne gêne aucunement la continuité de l’histoire mais bien au contraire l’enrichi avec des graphismes nouveaux. Le second tome paraitra début 2016 : nul doute que je l’achèterai ...

Les histoires sont légèrement effrayantes mais peuvent être lues je pense par des enfants à partir de 10 ans. La poésie gothique de l’auteur est bien retranscrite. Une BD de qualité dans un format que j’aime beaucoup que je vous recommande chaudement !!!

Merci à babelio et aux éditions Delcourt pour cette belle découverte.

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L'étrange vie de Nobody Owens, tome 2 (BD)

Suite et fin des aventures de Nobody Owens en version bande dessinée, j’ai préféré ce tome qui offre plus d’action quand dans le premier on avait surtout la présentation des personnages et la mise en place de la quête du jeune orphelin. On part totalement dans le fantastique dans ce volume et ça me plaît beaucoup, Neil Gaiman sait construire une histoire et l’adaptation du roman est très bien réalisée. Les illustrations et couleurs sont toujours aussi bien faite, les dessins sont simples mais compréhensibles, il faut absolument avoir lu le premier tome pour comprendre l’intrigue.

Pour résumer, le jeune Nobody Owens a grandi dans un cimetière après le meurtre de ses parents par le terrible Jack, dans ce lieu lugubre il grandi au milieu de fantômes, vampires et autres créatures de la nuit, l’enfant a bien grandi et il est devenu adolescent, sa dernière aventure lui a permis de devenir plus adulte. Les adieux sont déchirants mais la fin répond à toutes les questions qu’on se pose dans le tome 1, belle conclusion tout comme dans le roman, l’adaptation est réussite.

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Batman Arkham : Poison Ivy

En parallèle de la gamme Batman Mythology, les éditions Urban Comics sortent Batman Arkham, qui se consacre aux vilains, et cette fois-ci, on s’intéresse à la femme la plus vénéneuse de Gotham : Poison Ivy. Le premier volume était centré sur Double-Face, et le troisième aura comme protagoniste principal, Le Pingouin.



Comme les autres anthologies, nous avons donc ici 13 histoires, ayant étés écrites à des époques différentes allant de 1966 pour la plus ancienne à 2015 pour la plus récente. La plupart des histoires ont étés publiées dans les années 90-2000, donc c’est un recueil qui est accessible pour les lecteurs récents, qui ne seraient pas spécialement fan de l’ère 70-80.



En ce qui concerne les auteurs, on retrouve des noms très connus, tel que Paul Dini, Ann Nocenti ou encore Neil Gaiman. Chacun apporte sa petite touche au personnage de Poison Ivy, et telle une fleur on la voit s’épanouir au fil des histoires.



Si vous ne connaissez pas le personnage c’est un très bon point d’entrée, sinon, ça vous permet quand même d’approfondir votre savoir sur l’un des vilains les plus charismatiques. À noter que sa relation avec Harley Quinn n’est pas vraiment mise en avant ici, car on est vraiment sur l’histoire pure de Poison Ivy.



Si justement vous cherchez un récit sur les deux femmes, alors je vous conseille le one-shot, paru il y a quelques mois (toujours chez Urban Comics) et qui s’intitule Harley et Ivy.



Une fois encore, les éditions Urban Comics nous livrent un excellent titre, qui permet de faire un focus sur l’histoire d’un personnage, sans que l’on doivent lire des dizaines et dizaines de comics. Ici nous avons une très bonne base de départ, et il ne reste plus qu’à approfondir tout ça, avec d’autres récits, nous dévoilant des points plus précis sur Poison Ivy !
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The Fairy Tales Of Oscar Wilde, tome 5 : Th..

Ce tome fait suite à Fairy Tales of Oscar Wilde 4: The Devoted Friend & The Nightingale and the Rose qu'il n'est pas nécessaire d'avoir lu avant. Il comprend un unique récit publié pour la première fois en 2011, écrit, dessiné, et encré par Philip Craig Russell. La mise en couleurs a été réalisée par Lovern & Jese Kindzierski. Il s'agit de l'adaptation d'un conte écrit en 1888 par Oscar Wilde (1854-1900) et publié dans le recueil Le prince heureux et autres contes. Cet album comporte 30 pages de bandes dessinées en couleurs.



Dans une ville de moyenne importance, fin dix-huitième siècle ou début dix-neuvième, une statue de prince surplombe les toits, posée sur une colonne. Elle est couverte de feuilles d'or. Ses yeux sont des saphirs, et il y a un rubis rouge sur le pommeau de son épée. Au sein de la ville, cette statue est un modèle à suivre, un modèle de bonheur, un modèle angélique même. Une nuit, une hirondelle vient à survoler la ville. Elle a pris 6 semaines de retard par rapport aux autres déjà parties pour l'Égypte, car elle était tombée amoureuse d'un roseau. Elle l'avait aperçu en survolant la rivière, attirée par sa courbure élégante. Elle lui avait fait la cour, entre autres en touchant l'eau de l'extrémité de ses ailes pour créer des rides à la surface. Les autres hirondelles avaient fini par trouver cette relation ridicule d'autant qu'il y avait de nombreux autres roseaux sur les rives. Après un peu de temps, l'hirondelle avait fini par se lasser du roseau, trouvant qu'il n'avait pas de conversation et qu'il se montrait un peu trop coquet et un peu trop casanier, alors que l'hirondelle aime voyager. Elle avait donc fini par s'envoler et partir vers d'autres cieux.



Ainsi, l'hirondelle vient à passer au-dessus de la ville. La nuit tombant, elle décide de se poser sur le piédestal de la statue. Alors qu'elle s'apprête à mettre sa tête sous son aile, une goutte s'écrase dessus. L'hirondelle en reste très surprise car il n'y a ni pluie, ni nuage. Une deuxième goutte s'écrase sur sa tête. Elle décide d'aller trouver une cheminée offrant un meilleur abri. Elle lève la tête juste après la troisième, et découvre qu'il s'agit de larmes coulant des yeux de la statue du prince heureux. Elle lui demande qui il est. Le prince heureux lui raconte sa jeunesse, comment il vivait dans le palais du sans-souci, où la tristesse n'avait pas le droit de cité. Autour du jardin du palais courait un haut mur, de l'autre côté duquel il ne s'était jamais demandé ce qu'il pouvait y avoir. Il vécut heureux et mourut à un jeune âge. Maintenant il se retrouve là, mort, pouvant voir tout ce qui se passe dans la ville. Il a un service à demander à l'hirondelle, aider une couturière miséreuse.



C'est donc le dernier conte d'Oscar Wilde adapté par Philip Craig Russell, et le plus célèbre de ceux écrits par Wilde. Il a décidé d'y consacrer un tome entier, soit 30 pages. Du coup, le lecteur conserve cette impression que les cartouches de texte et les phylactères contiennent les mots et les phrases du conte écrits par Oscar Wilde, mais la narration peut se permettre d'être aérée et d'avoir des suites de cases décrivant des actions. Le lecteur peut voir l'hirondelle voler dans les parages du roseau, et faire des ronds dans l'eau. Il peut observer les mimiques de l'hirondelle alors qu'une larme après l'autre lui tombe sur la tête. Il compatit aux conditions de travail de la couturière, à la souffrance de son fils alors qu'elle s'approche de son lit, tout en observant le dénuement de leur appartement. Il peut apprécier le romanisme irradiant d'un couple en train de danser sur un balcon. Il voit les arabesques gracieuses de l'hirondelle se rendant d'un point de la ville à un autre. Craig Russell peut également prendre le temps et la place de donner à voir des éléments secondaires du récits, à commencer par l'exotisme de l'Égypte : les pyramides, les fleurs de lotus sur le Nil, ou encore les crocodiles se réchauffant au soleil.



P. Craig Russell n'a rien changé à sa manière de dessiner : des contours de forme un peu épurés, peu de marques de texture, une forme de naïveté dans les personnages et dans certains décors (l'horizon de toits de la ville, l'urbanisme fantaisiste, les visions de conte (le roi des montagnes de la Lune), les compositions porteuses d'une forme de romantisme sublimé. Cette bande dessinée est d'un format plus grand que celui des comics, pas loin du franco-belge avec une moyenne de 7 cases par page. La simplification des représentations permet à l'artiste d'inclure de nombreux détails sans surcharger les cases ou les rendre illisibles. Il peut donc représenter la richesse des tissus des robes au bal du palais Sans-Souci, la finesse de la broderie de la couturière, tous les pétales des fleurs de lotus, ou encore les différents crayons et plumes dans le pot et sur la table de travail de l'auteur. Sous une apparence tout public et parfois enfantine, les dessins contiennent en fait un bon niveau d'informations visuelles. Le lecteur apprécie également le naturel avec lequel les textes et les dessins se marient, sans redondance entre les 2.



Au fil des séquences, le lecteur trouve toutes les situations normales, tellement les dessins les font apparaître naturelles. Il en vient même à trouver la statue particulière expressive, tellement le prince semble parler à l'hirondelle, avec la bonne posture, le bon geste. Il lui faut revenir sur les pages précédentes pour se rendre compte que P. Graig Russell n'a pas modifié la position du Prince heureux, et qu'en fait il joue uniquement avec les cadrages et les angles de vue pour donner cette impression au lecteur, mais que la position reste bien la même du début à la fin, un tour de force de prises de vue. Comme dans les tomes précédents, l'artiste humanise un peu les animaux. À nouveau, en y regardant de plus près, le lecteur se rend compte qu'en fait il se limite à accentuer un peu l'expression de leur gueule pour en faire un visage, mais rien de plus. Au contraire, il a augmenté le naturalisme de ses représentations animalières, et pourtant le lecteur s'attache immédiatement au gracieux volatile. Il réussit un tour de force tout aussi remarquable avec les êtres humains. Ils sont à la fois des stéréotypes (de couturière pauvre, d'écrivain sans le sou, de jeunes riches et oublieux des autres), et à la fois des individus uniques habités par des émotions subtiles et sophistiquées. Le lecteur se retrouve transporté par la joie d'un enfant, attristé par le moral en berne d'un citoyen jalousant l'expression de bonheur de la statue du prince, apitoyé devant le délire fiévreux du jeune fils de la couturière, choqué par l'indifférence des riches.



La narration visuelle de P. Craig Russell s'avère donc riche en saveurs délicates, tout en restant légère et aérienne à la lecture, élégante et nuancée. Le lecteur prend fait et cause pour l'hirondelle, écoutant avec elle les paroles du prince. Il aimerait bien qu'elle s'envole pour l'Égypte, afin de pouvoir découvrir ce pays merveilleux, rendu encore plus séduisant par les dessins de l'artiste. Éprouvant une forte empathie pour l'hirondelle, pour sa curiosité polie, il écoute comme elle les paroles du prince. Il s'agit bien sûr d'un conte à destination des enfants et les situations sont dépeintes de manière tranchées. Le prince éprouve de la tristesse à la vue de la misère dont souffre certains habitants de la ville. La misère et le dénuement de la couturière et de l'écrivain sont entiers, avec la souffrance d'un enfant pour ajouter au drame. Oscar Wilde n'a pas hésité à intégrer également la détresse de la petite marchande d'allumettes d'Hans-Christian Andersen. Malgré le pathos, le conte décrit bien l'injustice de ces inégalités sociales, par opposition de l'insouciance des nobles, parfois un peu agacés de ne pas voir leurs désirs exaucés à l'instant, et des pauvres s'acharnant à la besogne, sans espoir de sortir de leur situation précaire. L'écrivain montre aussi comment juste pour des raisons de tranquillité publique 2 vagabonds sont chassés de l'abri d'un pont et contraint de subir la pluie. La simplicité des dessins de Craig Russell ne neutralise pas ces drames ; elle ne les édulcore pas non plus. En fait elle les dépeint dans toute leur simplicité, montrant l'évidence de l'injustice, la cruauté de l'acharnement même pas réfléchi.



Ce conte fonctionne encore d'autant mieux que l'hirondelle fait preuve d'une certaine forme d'innocence. Elle ne se doute pas de la souffrance qu'endurent certains citoyens, mais dans le même temps elle sait qu'elle doit partir dans les plus brefs délais pour rejoindre les autres hirondelles dans un pays fabuleux, car elle ne survivra pas à l'hiver. Elle est donc tiraillée par le peu d'efforts nécessaires pour apporter un peu de réconfort, et ses habitudes de vie, l'appel de la migration qui est inscrite dans sa nature d'hirondelle. Pour terminer son récit, Oscar Wilde utilise le motif de la religion catholique, en particulier le sacrifice christique. Le lecteur peut y voir une obligation pesant sur Wilde de se conformer au dogme de l'Église pour que son conte soit moral. Le lecteur peut également y voir une critique cachée sur le fait que le rétablissement des valeurs morales soit réalisé par un oiseau (un représentant de la nature, de l'ordre naturel) et un mort statufié (un individu dont la fin de vie lui permet de voir au-delà de la gratification matérielle et égoïste). En fonction de sa sensibilité le lecteur appréciera la juste reconnaissance des 2 dernières pages, ou au contraire préfèrera les oublier au profit de la fin de la statue et de l'hirondelle.



Avec cette adaptation, Philip Craig Russell réalise une bande dessinée extraordinaire, sachant conserver le propre des phrases d'Oscar Wilde et de son esprit, tout en respectant les conventions narratives de ce média. Le lecteur, enfant comme adulte, se laisse emmener par ces images agréables à l'œil, montrant un monde facile à appréhender et à comprendre, tout en mettant ainsi à nu les horreurs qu'il contient.
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American Gods, tome 1

• « American Gods, tome 1 » de P. Craig Russel, Scott Hampton, Walter Simonson , Glenn Fabry et Colleen Doran publié chez Urban Comics Editions.



• J'ai commencé cette lecture à la suite du défi lecture de BD de Babelio de Mars, cherchant une BD avec un titre commençant par la lettre A, dans le but d'étendre ma "culture" BD.



• « American Gods » est avant tout un roman, à succès, de Neil GAIMAN. Neil GAIMAN est un auteur actuellement phare de la littérature de fiction, dont nombre de romans, nouvelles et histoires en tout genres sont adaptés dans un format télévisé, ou au cinéma. Ces écrits sont également beaucoup adapté en format comics, avec là aussi un certain succès. C'est un auteur dont j'ai vu beaucoup de ces adaptations, notamment Coraline (dont j'ai également lu le roman récemment !), Good Omens (qui est en attente dans ma bibliothèque) et enfin, American Gods. La série en est à sa troisième saison sur StarZ, chaîne appartenant au géant Amazon, et je suis totalement à fond dedans ! C'est pourquoi j'ai voulu savoir ce que donnait le livre, mais pour éviter de me spoiler les prochains épisodes, chose que je déteste tout particulièrement, je me suis porter sur l'adaptation en BD avec son tome 1, qui couvre des moments de l'intrigue antérieurs à cette saison 3.



• Je le précise également ici, je suis un amateur invétéré de tout ce qui touche aux créatures folkloriques et mythologiques. Je suis littéralement fasciné par les légendes et les contes, c'est quelque chose qui me tient très à cœur, et que je partage dans mon métier d'animateur, car ce sont ces histoires, qui ont donner aux hommes le goût de croire et de rêver.



• Je dois l'avouer, les débuts de cette BD m'ont laisser très froid. Le format des pages, la structuration du récit, ainsi que le visuel ne m'avait pas emballés, pas emballés du tout. Les deux premiers chapitres sont très long, et dur à lire, il faut s'habituer à ce format étrange, mêlant des dessins à une narration littérale, avec les mots exact du livre, décrivant les scènes illustrées. Ce n'est pas le cas absolument partout mais c'est très présent dans ces premiers chapitres, s'en détachant légèrement au fil des chapitres. Heureusement que ce n'est pas le cas en permanence, car la lecture en aurait été terriblement ennuyeuse. Ce que l'on recherche dans une adaptation comics, c'est bien une adaptation, avec une retranscription du texte par des images qui illustre directement les scènes et les propos, pas des dessins qui sont décrits par le texte..



• Autre point pouvant fâché, les dessins. Comme pour le format évoqué auparavant, le dessin est au début assez dur à accepter. Il n'est pas laid, même si parfois certains passages laisse à désirer, mais c'est surtout que la plupart du temps, les personnages se retrouve dans des décors complétement vide.. C'est assez rebutant, et si on ajoute à cela que certains personnages sont très mal esquissés par endroits, c'est encore plus décevant. Heureusement, c'est encore une fois moins le cas par la suite.



• Toujours pour ce qui est du dessin, ce comics est illustré par d'autre artiste, s'occupant des récits sur les dieux, et là, c'est totalement autre chose ! Ces petites phases entrecoupant le récit principal sont magnifiquement illustrées, et c'est ici que le texte illustrant les images est utile, c'est là qu'il doit être utilisé, car cela représente littéralement un récit raconté ! Et c'est magistralement appliqué, pour notre plus grand plaisir. C'est également le cas des scènes oniriques et irréelles, où ce format est garder. Un ravissement pour les yeux !



• Reste la comparaison avec le livre et la série télévisée. Je n'ai pas lu le livre, mais beaucoup semble le confirmer, ces chapitres sont plus fidèles au roman de Neil GAIMAN que ne l'est la série. Et il est vrai que le comics et la série sont très différents sur de nombreux points. Les objectifs des personnages ne sont pour la plupart pas les mêmes, certains personnages iconiques de la série étant même des personnages très secondaire dans cette BD. Le déroulement est lui aussi très différents dans ses différentes étapes.. Et c'est ce qui est génial ! On a ici le droit à une œuvre dont les adaptations sont très différentes, tout en étant très bonnes. On a ici le droit à deux œuvres distinctes, s’appréciant de façon différente. On a le droit ici à ce que j’ appelerai une véritable adaptation intéressante et réussie.
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