Citations de Philippe Bouin (59)
-Je ne comprends pas qu'on autorise les femmes à posséder des gros chiens. Elles ne savent pas les tenir, c'est la casa du démon.
Le râleur eût été bien inspiré de ravaler son ironie. Sans le savoir, il venait de s'engager dans un combat perdu d'avance.
-Où avez-vous appris à cracher ces conneries ?
Au club des petites bites ?
-Comment ?! Mais je ne vous permets pas !
-Je me permets ce que je veux : quand on l'a riquiqui, on a une grosse bagnole. Et quand je dis bagnole, je devrais dire un tank. Il pollue votre tas de boue. Quand on n'aime pas la nature, c'est normal qu'on n'aime pas les chiens.
-J'ai la pastille verte, madame !
-Moi, c'est la langue avec les machos.
-Quoi, la langue ?
-Verte, la langue... Faut tout vous expliquer, monsieur le misogyne ?
Oui, c'est ça, je suis comme un frelon : l'insecte que je guette périra sur mon bucher. Il aura beau me supplier, pleurer, gémir, j'appliquerai la sentence sans aucun état d'âme.
-Non, tonna Archi, le thé est interdit ici! Dans le Beaujolais, on ne démasque pas un coupable le petit doigt en l’air en mangeant des cookies !
Mère Adrienne l'interrompt :
- Deux ? Ne dit-on pas que l'assassin revient toujours sur les lieux de son crime ?
- Et que le vert porte malheur ? Allons, ma mère, tordons le cou à ces enfantillages. Il est heureux qu'à la Crim' nous privilégions le manuel du Dc Locard au détriment du Dictionnaire des idées reçues de Flaubert.
... Oubliez, ma soeur, je me faisais l'avocate du diable, l'exercice ne me réussit pas.
Soeur Blandine, à l'appareil. Écoutez-moi bien, Chomard : Gustave a été abattu cette nuit comme un chien, ça nous fait trois cadavres sur le carreau pour ces foutues enveloppes. Alors un conseil, si vous ne voulez pas finir avec une neuf millimètres dans la tronche, essayez de vous servir de ce qu'elle contient pour réfléchir vite. Mon marché se résume en une phrase : vos principes ou le crâne en purée. Compris ? J'ai rien à ajouter.
- Mais je vous rassure, depuis le Viêt Nam la chimie a fait des progrès, elle a inventé des armes plus redoutables.
-Les fées sont mortes, les adultes les ont tuées.
[...]
- Comment peux-tu affirmer une horreur pareille?
- Parce qu'ils ont tout oublié! Les grands ne savent plus qu'ils ont cru aux sorcières, aux princesses, aux gentils géants. Ils font mourir leur rêves en vieillissant, des jolis rêves qu'ils remplacent par de la méchanceté.
- N'exagères-tu pas un peu?
[...]
- Non, Mélaine, regardez autour de vous: ils chassent les oiseaux, ils détruisent les forêts, ils salissent ce qui est beau, ils mettent des machins laids partout... et puis ils ne savent plus lire, plus s'évader, ils préfèrent leur télé... Je ne veux pas devenir comme eux, à toujours parler d'argent, je refuse d'aller à l'école pour apprendre à en gagner.
- Là, tu exagères, on t'y enseigne aussi des matières passionnantes.
- C'est vrai, mais pour être un jour "quelqu'un"... Moi, même si je n'ai que six ans, je suis déjà quelqu'un, ça ne m'intéresse pas d'être un autre.
Jamais on ne corrompt le peuple, mais souvent on le trompe.
- Bien, j'ai dit ce que j'avais à vous dire. Bonsoir monsieur le maire.
- C'est ça, bon vent! Il la regarde, réfléchit, menace:
- Et si vous racontez quoi que ce soit, je brûle l'église de votre neveu!
- C'est entendu. Ça ne m'empêchera pas de prier pour vous à la messe de minuit!
- Je vous l'interdis!
- Alors, je prierai pour la Sociale!
Ça c'est différent... Et elle priera aussi pour que l'année 2001 soit bercée par la paix entre les hommes de bonne volonté; il en reste quelques-uns.
- Mais, comme je te l'ai dit, [la forêt] est aussi dangereuse. Sais-tu qu'un garçon y est mort? C'était il y a un an, on a retrouvé son corps dans un fossé.
[...]
- C'est maintenant un fantôme heureux... Il vaut mieux être un lutin des forêts qu'un robot fabriqué par les grands.
– Quitte à vous choquer, je vous avoue que je préfère une vocation tardive comme la vôtre à celles de ces jeunes exaltées. Heureusement que le noviciat nous sert de garde-fou ; aimer Dieu est une chose, le servir en est une autre… À un certain âge, il est déjà difficile de se passer du sexe, des plaisirs de la vie, mais pour une femme, il y a aussi à mettre une croix sur les joies de la maternité. Vaste problème.
Drôle de ville où le bien-manger tourne à l’obsession.
Dans son centre, des tours s’érigent, des immeubles poussent comme des amanites, Lyon se transforme aussi vite que Fregoli ; or ce qui préoccupe les Lyonnais dans ces nouveaux chantiers, c’est de savoir si des métiers de bouche s’y installent. Le parpaing et le béton, soit ! mais du pain et des grattons d’abord ! Il ne peut y avoir d’âme dans ces nouveaux ensembles si la panse n’y est pas satisfaite… Hors la gueule, pas de quartier !
C’est donc au hasard que les Hansson, Suédois habitués aux laitages et à la morue salée, sont entrés aux Rognons roses. Les innocents ignoraient où ils mettaient les pieds. Pour le solide Olaf, le cadre de l’endroit a été déterminant. Son décor Grand Siècle, ses poutres à la française et, surtout, sa propreté l’ont séduit au premier coup d’œil. Quant à Gunilla, son imposante moitié, épousée il y a vingt ans (leur voyage est un cadeau d’anniversaire), deux mots sur le menu ont emporté sa décision. Elle les a traduits à son mari : « Salade et poisson », ravie de dénicher des mets civilisés.
Le problème est que Lyon poétise ses gamelles. Ainsi le caviar vert, spécialité du cru, est le doux nom de la salade de lentilles. Vinaigrée à souhait, assaisonnée d’oignons, c’est le régal des dieux. Excepté pour Odin et ses mortels descendants. Consternée, Gunilla grimace devant son assiette et jure de changer de dico. Olaf, pour sa part, s’emporte. Du poisson, ça ? Mais de qui se moque-t-on ? éructe le Suédois. Colère partagée par Gunilla : il n’y a même pas d’arêtes ! Et puis cette sauce, d’où sort-elle ? Ne pouvait-on la mettre à part ? Fureur reprise par Olaf : ce poisson n’a ni queue ni tête ! Ou on l’a fricoté dans une casserole moisie, ou on l’a pêché du côté de Tchernobyl ! De plus, s’empourpre la Suédoise, pour qu’il soit si boursouflé, c’est qu’il était malade !
Les tympans gavés de rrr terribles qui lui font maudire Babel, le serveur, la maigreur pliée en huit, la moustache frémissante, tente aimablement d’expliquer aux deux blonds les composants de la recette.
— Brochet… Quenelles de brochet… Sauce Nantua… It is miam-miam very good… Gut delicatessen… Caramba bueno…
Braves soldats de plomb
Qui allez à la guerre
Rira rirou riron
Menez avec aplomb
Le drapeau de vos pères
Rira rirou rière
Sur des champs victorieux
Où vos armes vaillantes
Rira rirou rieux
Les couvriront des feux
D'une gloire éclatante
Riou rirou rirante !
Retour à l'état de nature, je ne fais plus confiance qu'à ma propre justice.
Un célèbre condiment, spécialité de Dijon, monte au nez de soeur Blandine.
Quand on vous offre un cheval, on ne regarde pas s'il est borgne.
L'argent file. Il faut que tu saches où tu en es tous les jours, c'est le secret d'une bonne gestion.
Gouverner c'est prévoir.
En revanche, à l'instar de ses compatriotes, il ne pardonnait toujours pas à de Gaulle son retournement de veste. "Je vous ai compris !", l'imitait-il avec les siens, "Et je vous l'ai bien mis ! "
À tout gêneur, tout honneur, Darwin fut le premier à tirer sur nos origines. Sa théorie sur l’évolution provoqua de tels remous qu’on en ressent toujours les vagues. Être évolutionniste, aujourd’hui encore, se révèle parfois dangereux. Souvenons-nous qu’en Espagne, au début du régime franquiste, parler d’Homo Sapiens ou de diplodocus vous valait la prison – avec les compliments des évêques, outrés que l’on promeuve des horreurs communistes sous couvert scientifique.