Il trouvait lui-même des explications quand celles des adultes ne le satisfaisaient pas : « Moi, je pense que la lune, c’est le soleil quo dort les yeux ouverts après avoir rentré ses rayons. »
(p. 68)
De verdoyant qu’il était, le paysage devenait splendide l’hiver. Le parfum des fleurs cédait la place à la pureté de l’air, les couleurs multiples au blanc immaculé. Il y avait de l’orgueil chez les Canadiens à se tenir debout dans la bourrasque, surtout lorsque quelque nouvel arrivé geignait devant eux sous les coups de dent du froid.
(p. 519)
Vous savez comment c’est : un soldat a besoin de haine pour combattre l’ennemi et un tel sentiment reste dans le coeur bien longtemps après la bataille.
(vlb, p. 360)
"Mathurin Regneault pensa au temps de son enfance quand, dès l'arrivée des premiers grands froids, les gens se barricadaient dans leur maison pour attendre le printemps. L'hiver ne dérangeait plus vraiment, on s'y était habitué. S'il n'était pas venu, on l'aurait sans doute déploré. De verdoyant qu'il était l'été, le paysage devenait splendide l'hiver. Le parfum des fleurs cédait la place à la pureté de l'air, les couleurs multiples, au blanc immaculé. Il y avait de l'orgueil chez les Canadiens à se tenir debout dans la bourrasque, surtout lorsque quelque nouvel arrivé geignait devant eux sous les coups de dent du froid. Mathurin aimait à se répéter: "Moi je suis d'ici." En descendant la côte de la Montagne, du bras il désigna le blanc infini, doré par endroits, du fleuve: "Des couleurs pareilles, ça ne s'invente pas!" p.485
Ce n’était plus une rumeur; c’était la vérité, et tout un drame. Un horrible drame. Le plus épouvantable, peut-être, qu’eût connu jusqu’alors l’histoire de Montréal, parce qu’il était l’œuvre du diable lui-même et que la victime, innocente, en était un enfant.
Un crime. Prémédité et d’une cruauté abjecte. Tous les habitants de Montréal se le reprochaient un peu, car depuis longtemps ils répétaient qu’une sorcière logeait dans la ville, et personne n’avait rien fait pour la chasser. Ils s’étaient bornés à manifester leur indignation et à prier leurs prêtres de les libérer de la présence de cette magicienne aux sombres maléfices.
"Au bout du fleuve géant, grande comme une province de France, l'île dormait sous la neige. Elle était allongée entre deux bras d'eau glacée, découpés à même la forêt dont l'immensité recouvrait tout un continent. Autour de l'île, le territoire était si vaste, la nature si sauvage, que le moindre vent, la moindre pluie, la moindre variation brusque de température prenaient des proportions de catastrophe. Les changements de saison étaient des mutations d'univers qui bousculaient profondément la vie des êtres, les chassaient, les ramenaient, les broyaient ou les libéraient, les sauvaient ou les perdaient." p.11
La politique n’a jamais été dans la nature de nos gens. Ils réagissent dans l’adversité en multipliant les ennemis. Au début, ils s’en sont pris à l’hiver, puis, s’étant apprivoisés à cette saison, ils s’en sont pris à l’isolement du territoire. Mais ils n’échappent toujours à une situation qu’en se jetant dans une autre. Aussi je crois que toute cette question est illusoire et que les événements d’hier doivent plutôt nous convaincre d’unir nos intuitions pour tenter de deviner l’avenir et nous y préparer.
En raison du sévère couvre-feu édicté par M. de Maisonneuve depuis l'aggravation de la menace iroquoise, les sentiments de la milice de la Sainte vierge qui arpentaient les chemins de ronde du fort de Montréal et de la citadelle, dressée entre les rives du Grand Fleuve et le coteau Saint-Louis, étaient les seules à se mouvoir à cette heure matinale. On aurait même pu croire qu'elles gardaient un village abandonné, car, malgré le froid, aucune cheminée ne fumait.
Mais il faut vous souvenir que la mort est si inévitable que l’âme la considère comme de routine. La vie, convenez-en, n’est jamais, au fond, bien longue et on n’y trouve toujours que satisfaction passagère… La mort demeure une grande libération: mais nos sentiments humains l’oublient. J’ai vu la souffrance subie par des gens courageux, fiers et forts qui, pour survivre, avaient choisi des méthodes souvent plus atroces que la mort elle-même, et qui ont rendu leur âme dans un moment de grand calme, étonnés de découvrir une telle sérénité à l’heure de la mort. Bien sûr, la naissance est facile à comprendre et nous rallie à l’idée d’un Dieu qui donne la vie; on comprend moins bien cependant qu’il la reprenne… Peut-être est-ce parce que la naissance est tangible et la mort, impalpable.
Lorsque je sus écrire, je pris l’habitude, à la manière de mon père, d’inscrire le nom des malades à côté de leur maladie et, seul dans ma chambre, je me berçais de l’illusion d’être déjà capable d’identifier les maux et de les guérir. Ma mère m’entretenait dans cette prétention, me donnant ostensiblement raison lorsque j’émettais quelque opinion médicale, même lorsque ces dernières défiaient le gros bon sens. Considérant uniquement les simplicités évidentes, j’ignorais la complexité des choses. Je n’éprouvais aucune hésitation à me montrer agressif pour imposer ce que j’estimais être la vérité, fût-elle dérangeante.