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Citations de Pierre-Henri Tavoillot (27)


Il y a donc de très bonnes raisons de dire non, quand l’idéal démocratique semble marcher à l’envers ou contre lui-même : l’impuissance collective au lieu de la maîtrise du destin ; la tyrannie des minorités au lieu du respect de la majorité ; le mépris de l’élection et de la délibération.
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Sommes-nous entrés dans l'ère du déclin démocratique, voire dans un âge postdémocratique ? Admettons au moins l'existence d'une triple déception : la démocratie libérale souffre d'une terrible crise de la représentation, d'une grave impuissance publique et d'un profond déficit de sens. Autrement dit, elle aurait perdu, en cours de route, à la fois le peuple qui la fonde, le gouvernement qui la maintient et l'horizon qui la guide.
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L’abeille est devenue l’emblème de la fragilité du monde. Pollution chimique, réchauffement climatique, mondialisation frénétique, agriculture intensive, etc. : sur chacun de ces grands dossiers de notre temps, elle apparaît comme l’innocente victime des méfaits de la technique humaine. Son destin témoigne du dérèglement tragique d’une nature qui serait de plus en plus dominée par un consortium diabolique. Faust, Prométhée et Frankenstein Inc., si l’on peut dire, soit : l’omniscience, la toute-puissance et la folie des grandeurs réunies en l’homme, par l’homme et pour l’homme. Face à la triple prétention de tout connaître, de tout maîtriser et de tout fabriquer, l’abeille apparaît comme l’être fragile par excellence, symbole de la vulnérabilité d’une nature soumise aux diktats de l’humain. Mais ce qui explique aussi le succès médiatique de cet insecte sur lequel on ne cesse de projeter les angoisses du présent plonge ses racines dans une longue et ancienne tradition. Car si l’on déplore aujourd’hui avec autant d’émotion – et parfois d’emphase – le déclin de l’abeille, c’est qu’elle fut longtemps considérée comme le symbole privilégié de la beauté et de l’harmonie du monde, lorsque la Nature était considérée comme infiniment plus vaste, plus puissante et plus durable que tous les mortels réunis.
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Cette construction d'une nouvelle Europe exigera d'abord que les démocraties européennes dépassent un double oubli : celui du peuple et celui du pouvoir.
L'oubli du peuple, c'est quand on croit pouvoir affirmer la main sur le cœur qu'il est "de gauche" ou qu'il st "de droite" sans savoir ce que cela veut dire. L'oubli du peuple, c'est quand on ne le regarde plus que comme une somme de petites zones à défendre : les minorités, les victimes, les opprimés, les méprisés...et qui ne l'est pas ? L'oubli du peuple, ce sont toutes les nouvelles censures, cette impossibilité de dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas : les lynchages médiatiques, les indignations vertueuses, les procès en sorcellerie, et tous les nouveaux tabous de l'ère de la transparence.
Quant à l'oubli du pouvoir, c'est confondre la citoyenneté avec la résistance ; c'est penser qu'être libre, c'est être contre ; c'est croire qu'on a agi parce qu'on s'est indigné et qu'on est efficace lorsqu'on a communiqué ; c'est vouloir commander sans être responsable et être citoyen sans obéir ; c'est penser que l'économie dirige tout et que le droit régit le reste ; c'est refuser de voir le monde ou ne le voir qu'à sa mesure ; c'est fantasmer sur une vie sans conflit, sans injustice et sans secret. L'oubli du pouvoir, c'est aussi rêver que l'on est tout puissant.
Oubli du peuple e oubli du pouvoir, cela donne un oubli de la démocratie.
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Le wokisme, théorie délirante, est devenu un excellent business !
Tiens ! Serait-il aussi le stade suprême du capitalisme ? Marx n’était pas loin de l’annoncer : « Ce constant ébranlement de tout le système social, cette agitation et cette insécurité perpétuelles distinguent l’époque bourgeoise de toutes les précédentes. Tous les rapports sociaux, figés et couverts de rouille, avec leur cortège de conceptions et d’idées antiques et vénérables, se dissolvent ; ceux qui les remplacent vieillissent avant d’avoir pu s’ossifier. Tout ce qui avait solidité et permanence s’en va en fumée, tout ce qui était sacré est profané, et les hommes sont forcés enfin d’envisager leurs conditions d’existence et leurs rapports réciproques avec des yeux désabusés » (Manifeste du Parti communiste, 1847).
À n’en pas douter, ni Marx, ni Nietzsche, ni Freud d’ailleurs ne seraient wokes. Ils en seraient au contraire les plus virulents critiques, y voyant, pour le troisième, une pulsion de mort, pour le second, une expression décadente du ressentiment et, pour le premier, une ruse suprême de la bourgeoisie capitaliste.

Mais n’étant ni marxiste, ni nietzschéen, ni freudien, je me contenterai – même si c’est moins chic – d’une critique humaniste et universaliste du wokisme. Je ne pense pas qu’une personne se réduise à son « identité », ni que cette identité se définisse toujours comme « différence », ni que cette différence soit forcément « opprimée ». Ni la couleur de peau, ni le sexe, ni la classe, ni l’âge ne sont des « opinions » ; devrais-je dire des préjugés ? Je ne pense pas que la civilisation démocratique représente le comble de la domination, mais bien le plus grand effort jamais réalisé vers l’émancipation. Et c’est cette émancipation qui permet au wokisme de cracher en toute sécurité dans la soupe de la civilisation, dont il est la progéniture ingrate et matricide.
Cela dit, rassurons-nous : la critique du wokisme offre de nos jours davantage de chefs-d’œuvre que n’en comptera jamais la prétendue « culture » de l’annulation (ou cancel culture) : The Human Stain (La Tache, prix Médicis) de Philip Roth (2000) ; The Nix (Les Fantômes du vieux pays) de Nathan Hill (2016) ; Middle England (Le Cœur de l’Angleterre) de Jonathan Coe (2018) ; Le Voyant d’Étampes d’Abel Quentin (2021). L’histoire littéraire aurait-elle déjà jugé ? Mais en attendant
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C'est là tout le problème de la condition humaine. L'homme est en effet cet animal étrange qui, incapable de vivre sans ses semblables, ne peut jamais facilement coexister avec eux. Seul il meurt ; en société il tue. D'où la politique, le droit, la morale qui tentent de lui apporter quelques bonnes raisons de ne pas le faire. La première par la gestion des conflits et des rapports de force (plus ou moins légitimes), le deuxième par la loi (plus ou moins juste), la troisième par des principes ou des valeurs (plus ou moins clairs).
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Cet âge adulte devient l’âge de toutes les pressions. Et si, dans cette courte période, on ne réussit pas les objectifs que l’on s’est fixé, on déprime parce qu’on ne les a pas atteints. Dans le cas contraire, on déprime quand même parce qu’on les a atteints et que l’on a plus rien à espérer. Quel âge terrible ! Une petite fille que nous interrogions sur cet âge-là en lui demandant « C’est quoi pour toi un adulte ? » avait eu cette sublime réponse : « Un adulte, c’est quelqu’un qui n’a jamais le temps. » Magnifique définition de l’âge adulte : c’est un être qui n’a jamais le temps, tout en s’apercevant simultanément qu’il en a de moins en moins.
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L’expérience c’est le rapport au monde. La responsabilité, c’est le rapport aux autres. L’authenticité, c’est le rapport à soi. Ensemble, ils constituent un petit système de sagesse qui est assez impressionnant quand on y réfléchit.
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Les poètes nous disent bien, en effet, qu’ils puisent à des sources de miel et butinent les poèmes qu’ils nous apportent dans les jardins et les vallons boisés des Muses, à la manière des abeilles, en voltigeant comme elles, et ils disent la vérité. Car le poète est chose légère, ailée, sacrée, et il ne peut créer avant de sentir l’inspiration d’être hors de lui et de perdre l’usage de sa raison. Tant qu’il n’a pas reçu ce don divin, tout homme est incapable de faire des vers et de rendre des oracles. Aussi, comme ce n’est point par art, mais par un don céleste qu’ils trouvent et disent tant de belles choses sur leur sujet, comme toi sur Homère, chacun d’eux ne peut réussir que dans le genre où la Muse le pousse…
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D'où l'attrait considérable de la théorie du complot, qui permet de penser et de neutraliser le tragique de l'existence dans un monde sans Dieu. Car rien n'est plus angoissant et vertigineux qu'un mal qui arrive sans raison. Au moins le complot lui donne-t-il du sens et une forme de logique. (25)
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Avant Aristée, c’est une nymphe proche de Déméter la déesse de la fertilité (et du mariage) qui est réputée avoir découvert dans la forêt les premiers rayons de miel. Elle s’appelait Mélissa. Ce fut la première à oser goûter le miel et avoir l’idée de le mélanger à de l’eau pour en faire une boisson : l’hydromel. 
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Clarifier la réalité complexe des choses en refusant de la simplifier à outrance : voilà sans doute le meilleur moyen de lutter contre la concurrence déloyale qu'impose la vision conspirationniste du monde. (33)
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(...)l'abeille permet de penser l'homme tout comme l'homme permet de penser l'abeille. [p.238]
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La fabuleuse grandeur du petit monde des abeilles n'est pas seulement esthétique et lyrique, elle montre une voie morale, politique et épique. [p.65]
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Bref, le monde de l'abeille se situe, dans toutes ses dimensions, à la charnière trouble de plusieurs ordres du réel : le végétal et l'animal, le terrestre et le céleste, la nature et la culture, le vivant et l'éternel, l'humain et le divin... [p.17]
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Voilà ce qui arrive un beau jour, au légendaire Baron de Münchhausen, aussi nommé "Baron de Crac". Alors qu'il se promenait à cheval dans une vaste et sombre forêt, il se trouva face à un large étang. Résolu à le franchir, il prit son élan, mais voyant, en plein milieu du saut, qu'il n'y parvenait pas, il tourna bride et revint sur le bord ! Déçu, mais pas découragé, ce vantard fit prendre à son cheval encore plus d'élan. Il sauta, s'éleva... et chuta au beau milieu de la mare. Sa dernière heure était-elle venue ? Que nenni ! Car notre Baron, plein de ressources, eut alors cette idée géniale : il se sortit de l'eau... en se tirant lui-même par les cheveux !
C'est là la plus parfaite allégorie de la démocratie : un régime où le peuple se gouverne lui-même et décide de se sortir seul des lisières de la minorité. Mais illustré de la sorte cela semble aussi fantastique qu'absurde.
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Le salaud ne veut pas le mal, mais le fait.
Le médiocre veut le bien, mais ne le fait pas.
Le méchant veut le mal et le fait bien.
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C'est tout le drame de l'adepte de la théorie du complot : il aimerait tellement avoir une confiance absolue que sa défiance naturelle sombre dans la méfiance complète… et lui avec. (132)
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Finalement, nous souffrons d'avoir voulu continuer à croire que le monde était simple. (70)
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L'attrait pour la grille complotiste d'explication du monde ne dépasse que rarement l'hypothèse d'école et la conversation de café. (29)
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