Livre intéressant pour ce qui est de "découvrir" les tristes ressorts de ce monde souterrain. Bien que truffé de nombreuses fautes d'orthographe (voire de coquilles typographiques), cela me surprend quand Rachid est l'organisateur de la Grande Dictée... Passons. La dernière phrase de Malik me laisse sur ma fin... Qu'est-il devenu depuis son envol pour Bangkok ? Merci pour la suite.
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Le livre de Rachid Santaki présente à travers Rayane son propre parcours, celui d'un gamin de banlieue au parcours scolaire chaotique, qui sort avec un BEP. Il reste en marge et évite les "embrouilles" .
Il s'engage à fond dans ce qu'il fait, et en parallèle de son travail s'immerge dans la cultue hip hop à travers un site internet, puis un magazine. Il met en avant ses relations amicales ou professionnelles, passe sa vie au boulot, et on sent une négligence envers sa famille proche. Ou peut-être décide-t-il de ne pas en parler, c'est son droit. Il marche au feeling, croit aux gens avant d'en revenir, et entretient des liens complexes avec les femmes.
Après de nombreux hauts et bas relationnels et professionnels,des claques données par la vie, des décès d'amis, on comprend mieux le titre, allusion au feuilleton diffusé à l'époque de sa jeunesse: "la gamine court dans la prairie et se casse la gueule, puis se relève. Combien de fois ai-je chuter d ans cette prairie? Bien sûr, la chute peut faire mal, et je n'ai pas de leçon à donner, j'en reçois tous les jours. A chacune de mes nombreuses chutes, je me relève et continue à courir dans cette grande prairie qu'est la vie".
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J'ai fini le livre avec difficulté. Si pouvoir m'y promener dans des rues que je connaissais m'a fait plaisir je n'ai pas réussi à m'attacher au narrateur ni a cette interminable liste de rencontres et menus fait de son quotidien.
Dans la préface on est prévenu : " si tu as été amené à croiser l'auteur ne serait-ce qu'une fois dans ta vie, même dans la queue à la boulangerie, attends-toi à ce que ton nom apparaisse dans le bouquin"
C'est sans doute pour ça : je n'ai pas pu pointer mon nom dans le livre puisque je n'ai pas rencontré l'auteur.
Fichu ego! ;-)
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Merci à babelio_ pour l’envoi et merci évidemment aux éditions filatures et à l’auteur.
Ce livre est tel un documentaire sur les rixes;la vie de la cité sur la victime et sa famille mais aussi sur les bourreaux. On ai pas là pour juger (même si évidemment le jugement arrive) mais pour connaître l’histoire derrière cette tragédie.
J’ai beaucoup aimé cette lecture qui change complètement de mes lectures habituelles et j’ai hâte de rencontrer l’auteur demain
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Laisse pas traîner ton fils
Rachid SANTAKI
En novembre 2017 un fait divers sordide est apparu dans les médias.
Un adolescent de banlieue a été frappé, séquestré, torturé, tué puis jeté dans une fosse en forêt.
Le tout filmé par un des 3 jeunes agresseurs puis mis sur les réseaux sociaux.
Rachid Santaki connait bien ce milieu puisqu’il est dionysien et animateur d’atelier d’écriture en maison d’arrêt.
Il a écrit ce livre pour tenter de comprendre comment une personne pouvait filmer de tels actes sans tenter de s’y opposer et surtout en les livrant au monde entier.
Un « romanquête » absolument horrifiant, dur et révoltant.
La violence se banalise, se normalise dans des zones où les références ne sont que l’argent facile, le rap, la violence et le manque de repères.
C’est dur mais c’est juste.
Clin d’œil à Suprême NTM pour le titre fort !
Rencontre très intéressante avec l’auteur chez Babelio
#babelio
#rachidsantaki
#laissepastrainertonfils
#editionfilatures
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« On lynche un adolescent. Et on envoie ces actes atroces sur les réseaux sociaux. Je n’imagine pas la cruauté des auteurs, je n’imagine pas la douleur de la victime. Je ne vais donc pas évoquer la souffrance de sa famille. La victime n’était pas un énième trafiquant de stupéfiants, c’était un jeune homme qui avait toujours refusé cette voie. Pourtant, les accusés n’en ont pas tenu compte. Ils l’ont lynché et mis en spectacle ces actes de barbaries sur les réseaux ».
Voici comment l’avocat général a entamé son réquisitoire. Rachid Santaki s’intéresse à un fait divers et s’interroge sur l’origine de la violence. Cette enquête va le pousser dans ses retranchements. Même s’il se sent envahi d’empathie pour celui qui a publié cette macabre vidéo (page 77), il s’aperçoit que ce sentiment n’est qu’une manifestation de son instinct de survie. Ce qui le hante, c’est un sentiment d’injustice (page 89). « J’avais décidé de regarder la violence dans ses tripes et elle agitait bien des choses. Je n’étais pas à l’aise. »
Au delà de cette banalisation de la violence, le problème n’est pas cantonné aux banlieues. Il y a une surenchère dans la mise en ligne d’images ou de vidéos abjectes. « C’est un problème mondial lié au numérique ». « L’image a pris une place essentielle et elle est l’enjeu de notre époque ». (Page 140)
Sous ses airs d’enquête journalistique, ce roman au style cinématographique soulève des questions essentielles sur notre société. Comment préserver notre humanité quand les frontières entre le bien et le mal ne sont plus définies ? Jusqu’où peut-on aller dans la violence pour faire le buzz? Comment mieux réguler les réseaux sociaux sans tomber dans la censure ?
Un grand merci aux éditions Filatures et à Babelio pour l’envoi de ce roman. J’ai hâte de rencontrer l’auteur et de l’écouter nous en parler.
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L'histoire n'est pas unique, malheureusement. Je m'interroge sur les différents mécanismes qui mènent deux jeunes à en massacrer un troisième pendant que le quatrième filme.
A quel moment s'opère la bascule qui conduit le vidéaste amateur à n'être troublé ni par l'assassinat auquel il assiste ni par le projet cinématographique qu'il mène, jusqu'à sa publication sur un réseau social. Comment et quand leur part d'humanité s'est-elle évaporée ?
Dans ce récit, l'auteur s'attache principalement à rencontrer Sofiane, celui qui filme. Après avoir assisté à cette mise à mort, nous sommes transportés au tribunal avec toutes les parties. Paraissent les différents accusés, les familles...
A la douleur des uns s'oppose le détachement de certains des accusés.
J'ai beaucoup aimé lire l'auteur qui agence sa prose avec quelques échanges épistolaires. La narration est dynamique et l'on ne cesse de s'interroger.
A plusieurs reprises j'ai dû interrompre ma lecture tant je percevais une violence. Étrangement, ce n'était pas la violence renvoyée par la souffrance du mis à mort mais une violence ressentie face à l'attitude des prévenus ou encore en lisant les propos de leurs familles. Et puis que faire de ces incompréhensions de part et d'autre ? Comment soulager la souffrance ?
J'ai été très sensible aux mots de l'avocat général et à la toute fin du livre.
Je ne peux que vous recommander cette lecture 👌
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Un grand merci à Babelio et aux éditions Filature pour l'envoi de ce livre qui m'a beaucoup intéressée. Je regrette d'avoir manqué la rencontre avec l'auteur le 26/10 dernier.
J'ai trouvé cette lecture très dur et malheureusement vraiment dans l'ére du temps.
L'auteur a bien décrit la vie des cités,la violence qui y règne, l'importance de se montrer fort et bien souvent violent pour prouver sa valeur et se faire respecter.
La banalisation de la violence,l'influence des réseaux sociaux ,de la musique pour diffuser toutes cette violence mais également l'inconscience de ces jeunes bien souvent en souffrance ,en difficulté pour se construire prêt a tout pour prouver que se sont des vrais hommes ,prêt a briser des vies celles de leurs victimes mais également la leur.
Livre que je recommande sans hésitation.
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Un auteur a ne pas rater, qui n'a pas son pareil pour décrire la détresse d'une génération sacrifiéeet oubliée.
Son écriture est incisive et son parler franc.
Il décrit ici un drame réel, il a choisi de comprendre pourquoi et comment des jeunes peuvent arriver à en massacrer un autre gratuitement et à faire lz buzz sur un réseau social.
Ce livre est dur, je dirais même terrible mais c'est aussi une claque qui remet les pendules à l'heure pour comprendre le malaise de la jeunesse désoeuvrée aujourd'hui.
Bref c'est un auteur formidable
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J'aime assez le genre du récit-enquête, à mi-chemin du journalisme et de l'essai, dont l'immense Aubenas reste la référence française. Avec Laisse pas traîner ton fils, Rachid Santaki s'y essaye aussi, dans une approche bien différente.
Tout part d'un horrible fait-divers une nuit en Seine-Saint-Denis : pour une histoire mêlant racket, vengeance et appât du – petit – gain, Mathieu va subir une nuit de calvaire, enlevé, battu, torturé et enfin abandonné en rase campagne au petit matin.
Ses agresseurs ? Trois jeunes de son quartier du 93. D. le leader, M. un brin limité et S. passif inconscient, entraîné par l'effet de bande. Un meurtre ? Pas seulement. Car le lynchage a été filmé et immédiatement propagé sur les réseaux sociaux, entraînant la peur des uns et l'envie de revanche des autres.
En partant de ce fait divers survenu dans des quartiers qu'il connaît bien et avec des jeunes qu'il fréquente régulièrement, Rachid Santaki va suivre les suites du drame, de la détention des jeunes à leur procès, de leurs remords à leur mépris, de leur arrogance à leur bassesse. Et il va surtout s'attacher à suivre S., celui qui aurait pu, qui aurait dû mettre fin à tout cela ou à défaut, ne pas s'y mêler.
À travers ses rencontres et ses parloirs et sur fond régulier de références au rap français, Santaki nous redit les limites actuelles qu'offre la société contemporaine à cette génération. Rien de bien nouveau, si ce n'est que la virtualisation de ces existences, exacerbée par les jeux et les réseaux sociaux, pousse chaque jour inexorablement le degré de violence un cran plus loin. Et que les phénomènes de bandes en rajoutent une dose.
Si le propos est intéressant, la forme du livre m'aura rapidement exclu, l'auteur alternant les positionnements factuels (style journalistique) et romancés (réécriture des scènes et dialogues de fait-divers), en y ajoutant ses propres impressions, réflexions et empathies. Un cumul – certes extrêmement sincère – d'angles qui plaira à beaucoup, mais pas à moi.
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n récit poignant, émouvant et révoltant.. En effet, il nous montre que pour certains, la violence est devenue une normalité, un acte de la vie courante, qu'elle soit physique, psychologique, verbale.
Ainsi, des jeunes en perte de repères, attirés par l'argent facile, sans sens du travail et du respect, s'intéressant au superficiel, perdent leur humanité et le respect de la vie.
Ils tombent alors dans les méfaits: drogue, vol, racket, violence, lynchage, assassinat.
C'est triste, car des morts s'ensuivent, des parents et des familles sont détruits.
C'est récit dur, à lire, et à faire lire par un maximum de jeunes, pour comprendre qu'il faut revenir aux valeurs du travail et du respect, et non de la facilité et de la superficialité.
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C'est une histoire à vous glacer le sang car ceci n'est pas juste un polar, c'est aussi une sorte de roman documentaliste sur une affaire qui a bien eu lieu. Une affaire dans laquelle, l'humanité nous montre son visage le plus terrible surtout quand il s'agit d'adolescents. Automne 2017. Un adolescent filmait le lynchage d’un jeune, torturé, dénudé et jeté dans un canal, les auteurs ont été arrêtés quelques jours plus tard. Le corps a été retrouvé à deux cent kilomètres du lieu du tournage. Nassim, dix-sept ans, n’a pas porté de coup mais a tout filmé, a laissé ses complices tuer pour cinq cent euros… Il a été arrêté et incarcéré.
Un cap a été franchi : le lynchage a été publié sur les réseaux sociaux et très relayé par les jeunes. C'est ce jeune que l'auteur veut à tout prix rencontrer pour essayer de comprendre justement ce qui a bien pu le pousser à faire cet acte ignoble et comment on peut se retrouver mêlé à ce genre d'horreurs en étant si jeune.
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Pas de pays exotique ou nordique cette fois-ci, directement les cités françaises pour un documentaire sur le cœur de la violence.
Lynchage, polémique sur les réseaux sociaux, maison d’arrêt puis procès, on suit une bande de jeunes qui ont commis l’irréparable. L’auteur présente notamment l’histoire de Sofiane avec qui il a pu échanger, son vécu, son quotidien et comment il en est arrivé là.
J’ai beaucoup aimé le travail de l’auteur. Les témoignages sont poignants, les choix sont pertinents avec notamment la place du rap. On sent qu’il maîtrise le sujet et nous le présente sans aucun jugement. Un documentaire sur l’émergence de la violence saisissant.
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Merci à Babelio et à l'éditeur des éditions "filatures" pour l'envoi de ce livre que je n'aurais jamais ouvert autrement. Pourquoi, parce que le sujet m'aurait semblé trop violent et surtout trop loin de mon univers, mais il m'a pourtant interpellé puisqu'il cherche à savoir comment on peut en arriver à filmer des scènes de tortures et de les mettre sur les réseaux sociaux. La réponse vient à la fin, si tant est que l'on puisse vraiment en donner une. Ce livre est un documentaire et pas un roman, ce qui lui donne plus d'intérêt. Donc 2 jeunes de banlieue défavorisée (Damien et Moussa) torturent, lacèrent de coups de coteaux, noient etc... un jeune qui ne leur a rien fait, sauf peut être, crime suprême, qu'il tentait de changer de vie et d'échapper à la misère morale de cette banlieue. le troisième larron, Sofiane, lui, 16 ans, filme la scène. L'auteur qui intervient en prison pour animer des ateliers littéraire, est fasciné par ce "fait divers" (quelle horreur) et va chercher à savoir comment ils ont pu en arriver là. Damien et Moussa : irrécupérables. Sofiane par contre, le touche et est le seul à donner des signes d'éventuels remords. Le constat est que tous ces jeunes ont un passé familial terrifiant, qu'ils écoutent ou plutôt regardent tous du rap violent sur les réseaux, que le règne de l'image les poussent à se mettre en avant via ce canal et donc à se filmer en permanence, jusqu'à filmer l'intolérable.
Je veux bien comprendre cela. L'admettre non. Le verdict m'a laissé furieuse. 15 ans après avoir noyé, tapé, lardé de coup de couteau un être humain ? il ne prend pas perpétuité ???? Moussa 10 ans alors qu'il va récidiver et que l'on sait qu'il est psychopathe ?? Sofiane... je ne dévoilerais pas mais punaise ?
Oui, ils ont forcément eu une enfance inimaginable de douleur mais celui qui est mort tentait de s'en sortir et pour cela on le tue ?
Évidemment qu'un tel sujet ne peut laisser de glace et qu'il déchaine les passions. La question qui n'est pas posée dans ce livre est : que faire pour arrêter ce que produise les réseaux sociaux ? quelle barrière peut on mettre sans tomber dans la censure ? Comment sauver ces ados avant la dérive ? Ce qui m'a interpellé aussi c'est le rap. musique que je ne connais quasi pas et son influence m'a scotchée. Bref, un livre qui n'a pas d'intérêt littéraire mais qui ouvre le débat, ce qui est une qualité énorme.
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Un texte protéïforme où se mélangent la voix de l’écrivain et celles des personnages, les voies de la fiction et des faits divers. Un petit goût en madeleine de Proust de l’excellent travail de journalisme narratif d’Emmanuel Carrère dans l’Adversaire il y a déjà plus de vingt ans. « Sans m’en rendre compte, je me glissais dans l’univers de Sofiane, un gamin écorché, et je me posais encore plus de questions. » p 83 Points. On se glisse nous aussi avec lui dans cet univers que l’auteur réussit à toucher puis dessiner du doigt à petites touches de réalisme et de scènes reconstituées au plus près des mots (les leurs) et des maux (ceux de la société toute entière). La fréquentation des personnages de Rachid Santaki comme en 2000 celle du personnage de l’Adversaire fait s’ouvrir béant le questionnement sur le pourquoi et le comment du Mal. Sur cette indifférence parfois devant la souffrance d’autrui, que l’on soit spectateur, complice ou bourreau. Ce texte, pas mieux que celui d’Emmanuel Carrère, n’apportera de réponse(s) mais il pose un contexte, dessine les contours de la vie de ces gosses qui ont effacé les frontières entre le virtuel et le réel, entre les réseaux sociaux et la société. On en ressort un peu sonné(e)s, toujours inquiet(e)s, mais sans doute aussi, et c’est le plus précieux, plus concerné(e)s.
Chez Alibi on parle pour ce texte d’un « romanquête », ce terme convient mieux que celui de polar, catégorie dans laquelle il semble un peu en marge.
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J'ai reçu ce livre pas plus tard qu'aujourd'hui, en rentrant du travail il m'attendait. (Merci aux éditions Filature(s) et à Babelio pour ce cadeau et l'occasion de rencontrer l'auteur) je l'ai commencé de suite et j'ai du mal à contenir ma rage, mon dégoût et mon impuissance. Une violence banale et inadmissible : lynchage, humiliation et meurtre sur fond de rap et de réseaux sociaux.
Je ne peux m'empêcher de faire le lien avec l'autre livre que je lis actuellement : Les couilles sur la table de Victoire Tuaillon, tout y est des codes masculinistes, l'hégémonie masculine à l'échelle des cités, ce besoin de montrer qu'on domine et tous les codes qui vont avec : drogue, alcool, rap et même la voiture. Voilà ce que coûte le pratiarcat aux hommes, à la société.
En guise d'illustration parfaite de mes propos, p.32 : "lors de son entretien, il a raconté qu'après avoir balancé le corps il avait retenu ses larmes. (un homme ne montre pas ses émotions) Il faisait partie de la famille de la rue et ne pouvait pas être un fragile. (Force et virilité mises à l'honneur, devoir se dominer, être un guerrier)" plus loin, p.35 "puis il a expliqué qu'en cité il y avait une règle - on porte ses couilles - et qu'il avait été victime de cette règle" encore plus loin, p.43 : "la prison était une sorte de passage obligé. Elle faisait de vous un homme aux yeux des autres" (le patriarcat, broie les hommes aussi, souffrance inutile pour prouver quoi ?)
Le dégoût qui s'intensifie quand je lis que les journalistes pour brouiller les cartes, pour donner aux gens ce qu'ils attendent, pour minimiser l'acte, font passer la victime pour un dealer, sans faits, sans preuves. Histoire de briser les proches un peu plus, histoire de dire aux gens biens pensants que cette violence ne les concerne pas, que ce n'est pas pour eux. Leurs enfants vont biens tant qu'ils ne toucheront pas à la drogue. Histoire de les rassurer : mais non la société n'est pas malade, ce sont ces jeunes, spécifiquement, qui le sont. Je ne suis qu'à la page 26 et j'ai le coeur au bord des lèvres, ça promet.
L'auteur nous fait part de son désarroi et de son impuissance face à ses jeunes qui ne répondent à la violence que par la violence, qui n'ont d'autres horizon que ce bout de quartier dans lequel ils ont grandis et les codes qui vont avec. Il cherche des débuts de solution, des pistes.
Il me faudra lui poser la question de sa conscience de l'influence de la société patriarcale dans cette violence des cités. Je ne suis pas sûre qu'il ait envisagé la situation sous ce prisme, ça se voit dans sa façon d'écrire et d'appréhender les choses : les marches blanches sont, de toute évidence l'apanage des femmes, des mères, douleur de femme de perdre un enfant ? Mais où sont les pères dans toutes ces histoires ?
Chaque milieu social a ses propres codes, dans les cités c'est la prison, la violence, les règlements de compte, le territoire, et l'honneur à défendre. Ne pas paraître "faible" voilà ce qui fait de vous un homme dans ce milieu là. Et non la seconde victime n'a pas été tuée par le quartier elle a été tuée par le patriarcat, par les codes masculinistes. Comparer avec d'autres zones du monde n'a pas de sens. Les codes se retrouvent partout.
Il semble dire que le rap peut engendrer de la violence, je pense qu'il ne fait que renforcer quelque chose de pré-existant, il maintient les codes, les transmet aux générations suivantes. Il est notamment question de Moha la squale, de la fascination de Sofiane pour lui. Ce rappeur qui réussit pour sa mère mais qui viole les autres femmes, tout un exemple. L'auteur souligne que la précarité intellectuelle renforce la fragilité aux réseaux, ils manquent de discernement pour tout.
Dans cette histoire sordide, Mathieu, la victime, était devenu de moindre importance dans la hiérarchie de la cité et pour son ami Kader : il avait choisi l'amour, des codes différents. Il n'était plus le profil d'homme qu'on pouvait respecter.
Vient l'histoire de Souad, la mère de Sofiane, reniée pour avoir aimé, tristement banal. Voilà comment le système brise des vies, encore et encore, ça a des répercussions sur toute la famille, sur les enfants et, sans surprise Sofiane répète le schéma.
Vient l'histoire de Moussa, issu d'un viol, sa mère battue par son beau-père, et lui aussi. Il reproduira également tous les schémas, jusqu'au viol. L'auteur fait alors une réflexion pertinente : l'Etat devrait être sur le banc des accusés, j'irai plus loin encore : toute la société. Cette réflexion m'a fait penser à celle de Karine TUIL dans "Les choses humaines"
L'auteur se prend visiblement la violence en pleine tronche, encore et encore, il en souffre, voudrait que les jeunes sortent de cette spirale mais il a du mal à identifier tous les facteurs, il est lui même le fruits de nombreux préjugés et clichés bien enracinés : chapitre 18, il en comprend pas qu'une femme puisse regretter d'avoir eu son enfant mais il suffit de réfléchir : quel bonheur en a retiré Souad ? Abandonnée par tous ceux qu'elle aimait, trahi par le père de son fils, ce dernier qui devient violent. Croit-on encore vraiment si naïvement aujourd'hui que la maternité est obligatoirement une source de bonheur ? Que rien ne peut l'estomper ?
La fin de l'ouvrage m'a un peu plus gênée, l'auteur parle beaucoup de lui, de son ressenti, je m'attendais à un autre but, il n'y a qu'à la toute fin en deux ou trois paragraphes qu'on comprend qu'il veut accuser le numérique, l'image, de rendre tout ça possible, c'est un peu flou. La violence n'était-elle pas là avant ? Pourquoi la mettre en lumière et ne rien proposer de concret ? Il me tarde de rencontrer l'auteur, j'ai beaucoup de questions :)
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Deuxième lecture dans le cadre du Prix du Meilleur Polar Points 2023. Très bonne découverte.
Dans une fiction un peu à la manière d’un documentaire, Rachid Santaki s’attache à montrer l’extrême violence dans laquelle bascule une partie de la jeunesse française et décrypte le processus qui pousse un ou des jeunes à commettre l’irréparable.
Sans fard, sans jugement ni parti pris, des faits, saisissants de réalisme et qui donnent lieu à une scène d’introduction difficilement supportable, au procès et aux condamnations, et parfois pour certains à la prise de conscience, c’est un tour d’horizon édifiant qui est montré ici.
Nous avons tous déjà entendu parler, parfois vu, sur les réseaux sociaux des scènes de violence inouïe, généralement entre bandes de trafiquants mais pas toujours. Des scènes où un ou plusieurs individus, parfois très jeunes, se déchaînent contre un autre avec une brutalité qui horrifie dans un premier temps et qui questionne ensuite.
Ici ce sont Damien et Moussa qui lynchent à mort Mathieu, un jeune de la cité sans histoire. Sofiane, lui, filme la scène, rigole, et poste la vidéo sur les réseaux sociaux.
Rachid, qui organise des ateliers d’écriture pour les jeunes en détention, entre en réflexion sur l’augmentation spectaculaire de la violence dans les banlieues et plus généralement dans la société. Si le nombre de faits ne varie pas tellement d’une année à l’autre, c’est la gratuité et l’intensité qui interroge.
Réseaux sociaux, circulation à grande vitesse de l’information, recherche de sensationnalisme, culture rap qui a dérivé depuis les années 90, accès à des images de plus en plus atroces, des environnements familiaux souvent défaillants, des ados qui dérivent sans aide ni prise en charge, des passages en prison qui détruisent plus qu’ils ne reconstruisent.
L’auteur ne donne pas forcément d’explication ni de solution, il analyse, décrit et emmène le lecteur dans un univers que l’on ne connaît souvent que par le prisme de positions politiques très marquées. Ici ni excuses ni caricatures.
Un fait de société que Rachid Santaki décrypte dans un roman aussi prenant qu’intéressant. Bravo.
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