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Citations de Rosa Luxemburg (98)


Ma très chère petite Sonioucha !
extrait 2
  
  
  
  
(…)
Ce que je lis ? Surtout des ouvrages de science sciences naturelles : botanique et zoologie. Hier, j’ai justement appris pourquoi les oiseaux chanteurs disparaissent d’Allemagne : c’est la rationalisation croissante des cultures – sylviculture, horticulture, agriculture – qui les prive peu à peu de toutes les conditions naturelles nécessaires à la nidification et à la nourriture : arbres creux, terres en friche, broussailles, feuilles mortes dans le jardin. J’ai lu cela avec beaucoup de tristesse. Je n’ai pas pensé au chant des oiseaux et à ce qu’il représente pour les hommes, mais je n’ai pu retenir mes larmes à l’idée d’une disparition silencieuse et inéluctable de ces petits êtres sans défense.



/ traduction de l’allemand par Claudie Weill, Gilbert Badia, Irène Petit et Muriel Pic
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Ma très chère petite Sonioucha !
extrait 1
  
  
  
  
Votre chère lettre est arrivée à point hier, le 1er mai. Avec le soleil qui brille depuis deux jours, elle a fait du bien à mon âme blessée. Ces derniers jours, j’avais bien de la peine, mais maintenant, cela va, cela va aller mieux. Pourvu que le soleil continue à briller ! Je suis presque toute la journée dehors, je flâne dans les buissons, j’examine chaque coin de mon petit jardin, et il trouve plein de trésors.

(…)

L’après-midi j’ai trouvé trois belles petites plumes différentes : une gris foncé de rouge-queue, une dorée de bruant et une gris jaune de rossignol. Nous avons en effet beaucoup de rossignols par ici, j’en ai entendu un pour la première fois le matin du dimanche de Pâques et depuis il revient chaque jour dans mon petit jardin sur le grand peuplier argenté. J’ai ajouté ces plumes à ma modeste collection dans une jolie petite boîte bleue : elle contient aussi des petites plumes que j’ai trouvées dans la cour de la Barnimstrasse – de pigeons, de poules et aussi une très belle plume bleue, d’un geai de Südende. Ma « collection » est encore minuscule, mais je me plais à la regarder. Je sais déjà à qui j’en ferai cadeau.
Ce matin, j’ai trouvé, juste contre le mur, le long duquel je me promène, bien cachée, une violette ! La seule de mon petit jardin. Comment est-ce chez Goethe ?
Une violette était dans le pré
Incognito, sur elle-même repliée ;
C’était une charmante violette !



/ traduction de l’allemand par Claudie Weill, Gilbert Badia, Irène Petit et Muriel Pic
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Écoutez bien : hier, 1er mai, j'ai rencontré — devinez qui ? — une phalène jaune citron étincelante, toute neuve ! J'en ai été si heureuse que mon cœur en a tremblé. Elle a volé sur ma manche — je porte une veste mauve et sans doute a-t-elle été attirée par la couleur — puis elle a folâtré un peu plus haut pour s'enfuir par-dessus le mur.
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Aujourd’hui, le thermomètre est à zéro, mais en même temps l’air est animé d’un souffle tiède et rafraîchissant qui fait penser au printemps, et entre les nuages épais et blancs comme du lait, se montre un ciel d’un bleu profond, tandis que les moineaux pépient gaiement : on pourrait se croire à la fin de mars. Je me réjouis à l’avance du printemps ; c’est la seule chose dont on ne soit jamais rassasié tant qu’on vit ; au contraire, on apprend à l’estimer et à l’apprécier chaque année davantage.
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Quiconque pense clairement et maîtrise lui-même à fond ce dont il parle, s'exprime clairement et de manière compréhensible. Quiconque s'exprime de façon obscure et prétentieuse, alors qu'il ne s'agit ni de pures idées philosophiques ni des élucubrations de la mystique religieuse, montre seulement qu'il ne voit pas clair lui-même ou qu'il a de bonnes raisons d'éviter la clarté. Nous verrons plus tard que ce n'est pas un hasard si les savants bourgeois se servent d'une langue obscure et confuse pour parler de l'essence de l'économie politique, que cela traduit au contraire aussi bien leur propre confusion que le refus tendancieux et acharné de clarifier la question.
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Le socialisme est à cette heure la seule ancre de salut de l'humanité. Au-dessus des murailles croulantes du monde capitaliste flamboient comme une prophétie de feu les mots du Manifeste communiste : Socialisme ou chute dans la barbarie.
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La guerre mondiale a placé la société devant l'alternative : ou bien continuation du capitalisme, avec de nouvelles guerres et la chute prochaine dans le chaos et l'anarchie, ou bien le renversement de l'exploitation capitaliste.

Par la guerre, la domination de classe bourgeoise a perdu son droit à l'existence ; elle n'est plus en état de tirer la société du terrible effondrement économique que l'orgie impérialiste a laissé derrière soi.
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La social-démocratie a toujours affirmé qu'elle représente, en même temps que les intérêts de classe du prolétariat, la totalité des aspirations progressistes de la société contemporaine et les intérêts de toutes les victimes opprimées de l'ordre social bourgeois ; cela ne doit pas s'entendre seulement dans ce sens que cet ensemble d'intérêts est idéalement englobé dans le programme socialiste. Le même postulat se traduit dans la réalité par l'évolution historique, qui fait de la social-démocratie, en tant que parti politique, de plus en plus le havre de tous les éléments mécontents, et ainsi réellement le parti du peuple tout entier contre l'infime minorité bourgeoise qui détient le pouvoir.

Seulement, il est nécessaire de savoir toujours subordonner aux buts finaux de la classe ouvrière toutes les souffrances de cette troupe bigarrée, d'articuler l'esprit de révolte non-prolétaire avec l'action révolutionnaire du prolétariat et, en un mot, d'assimiler les éléments qui viennent à elle.

Cela n'est possible que si des noyaux prolétariens fort et politiquement éduqués donnent déjà le la à la social-démocratie, assez conscients pour être capables, comme jusqu'ici en Allemagne, d'entrainer dans leur sillage les contingents de déclassés et de petits-bourgeois qui la rejoignent. Dans ce cas, une plus grande rigueur dans l'application du principe centralisateur et une discipline plus sévère explicitement formulée dans les articles des statuts peuvent être une sauvegarde efficace contre les écarts opportunistes.
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Je suis heureuse de me lever aussi tôt (5h40), j'attends juste que Monsieur le Soleil veuille bien suivre mon exemple pour profiter un peu de ce lever matinal. Le plus beau, c'est que je vois et j'entends les oiseaux pendant la promenade dans la cour : tout un peuple de moineaux insolents, qui font parfois un tel raffût que je m'étonne qu'aucun garde zélé n'y mette le "holà"; il y a aussi un couple de merles, mais le petit mâle au bec jaune ne chante pas du tout comme mes merles de Südende. Celui-là crisse et chuinte un petit air à pleurer de rire ; peut-être qu'aux alentours de Mars, il consentira à montrer un peu de pudeur et qu'il se mettra alors à chanter comme il faut. (A ce propos, je ne peux m'empêcher de penser à mes pauvres moineaux qui ne trouvent plus leur petit couvert dressé sur le balcon et qui attendent sans doute tout dépités, sur la balustrade.)

23 Février 1915, prison de Berlin.
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Rosa Luxemburg
Tous les jours, je rends visite



Tous les jours,
je rends visite
à une toute petite coccinelle
que je maintiens en vie
depuis une semaine sur une branche,
dans un chaud bandage de coton
malgré le vent et le froid ;

je regarde les nuages,
toujours nouveaux
et chaque fois plus beaux.
Et au fond, je ne me sens pas plus importante
que cette petite coccinelle.
Et dans le sentiment de cette infinie petitesse,
je me sens indiciblement heureuse.
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 Bonjour Petit Hans, me voilà de nouveau.

Je me sens tellement seule aujourd'hui, il faut que je me revigore un peu en bavardant avec vous. (...)
Là, j'allais bientôt vivre autre chose de beau: un rouge-gorge est venu se poser sur le mur, juste derrière moi, et m'a donné un petit concert. En ce moment, les oiseaux sont généralement occupés par leurs soucis familiaux, et on ne les entend que rarement, brièvement.

Et voilà qu'aujourd'hui donc, le rouge-gorge s'est mis à chanter, lui qui n'était venu me voir qu'une ou deux fois au début mai. Je ne sais pas si vous connaissez bien ce petit oiseau et son chant; moi-même, je n'ai vraiment fait sa connaissance - comme pour tant d'autres choses - qu'ici, et je l'aime infiniment plus que le rossignol tant vanté.

Les envolées éclatantes du rossignol me font trop penser à des airs de divas, elles évoquent trop un public, des triomphes grisants et des louanges pâmées. Le rouge-gorge lui, a une toute petite voix tendre, il chante une mélodie singulière, intime, qui sonne comme une ouverture, comme un début d'appel; vous souvenez-vous, dans la scène du cachot de « Fidélio », des trompettes de la délivrance qui sonnent au loin, et déchirent presque l'obscurité de la nuit ?

La chanson du rouge-gorge, c'est un peu ça, mais chantée tout bas, avec des trémolos d'une infinie douceur, si bien qu'on la dirait voilée, comme un souvenir perdu au fond des rêves. Quand j'entends cette petite chanson, mon cœur se tortille littéralement de délices et de peine, et aussitôt je vois ma vie et le monde sous un jour nouveau, comme si les nuages se défaisaient et qu'un rayon de lumière tombait sur la terre.

Aujourd'hui, cette petite mélodie tendre, chantée sur le mur, qui n'a sans doute pas duré plus d'une demi-minute, a fait naître dans ma poitrine quelque chose de très doux, de soyeux. Aussitôt, j'ai regretté tout le mal que j'ai jamais pu faire à un être humain, toutes les pensées et les sentiments durs que j'ai pu avoir ; une fois de plus, j'ai décidé d'être bonne, bonne à tout prix, tout simplement : c'est mieux que d' « avoir raison » et de tenir le compte de toutes les vexations. 

(23 juin 1917-A Hans Diefenbach p. 160 et 161)
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 Chérie, ne sois pas abattue, ne vis pas comme une petite grenouille terrorisée.

Regarde, nous avons à présent – du moins ici - des journées de printemps si splendides et douces, les soirées sont tellement belles avec cette lune argentée. Je ne m'en lasse pas quand dans l'obscurité je fais ma promenade dans la cour de la prison (je sors exprès le soir, pour ne plus voir les murs et ce qui est autour). Lis quelque chose de beau !

As-tu de bons livres en ce moment ? Écris-moi ce que tu lis, je t'en prie, je t'en enverrai peut-être, ou au moins, te conseillerai quelque chose de beau qui revigore.

Je suis plongée jusqu'au cou dans la géologie, qui me stimule et me comble extraordinairement. J'ai peur quand je songe au peu de temps qu'il me reste à vivre, et à tout ce qu'il y aurait encore à apprendre !

Est-ce que tu es contente pour les Russes ? Évidemment, ils ne tiendront pas dans ce sabbat de sorcières - non pas parce que les statistiques montrent l'état d'arriération économique de la Russie, comme ton subtil mari l'avait compris, mais parce que la social-démocratie de notre Occident si développé n'est faite que de misérables lâches, et que tous ces gens laisseront les Russes se vider de leur sang en les regardant sans broncher.

Mais il vaut mieux finir comme ça que « rester vivant pour sa patrie » ; c'est un fait qui appartient à l'histoire du monde, et dont la trace ne se perdra pas dans la nuit des temps.

J'attends encore de grandes choses pour les années à venir, je voudrais seulement pouvoir admirer l'histoire autrement qu'à travers les barreaux.

Chérie, sois calme et solide, et sois sereine, malgré tout – écris moi vite.
Je te serre dans mes bras.

Ta R. 

(24 novembre 1917-A Luise Kautsky p.200 et 201)
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 Oh, comme je comprends que chaque belle mélodie, chaque fleur, chaque journée de printemps, chaque nuit de lune éveille en vous un désir, une sorte d'élan vers tout ce que le monde peut offrir de plus beau.

Et comme je comprends que vous soyez amoureuse« de l'amour» !

Pour moi aussi, l'amour était (ou est) toujours plus important et plus sacré que l'objet qui le suscite. Parce qu'il nous fait voir le monde comme un conte lumineux, parce qu'il va chercher dans l'être humain ce qu'il a de plus noble et de plus beau en lui, parce qu'il élève ce qui est le plus commun et le plus dérisoire, et le sertit de diamants, et parce qu'il fait vivre dans l'ivresse, l'extase ...

Mais, petite Sonioucha, vous n'êtes pas comme Marta et Luise à la lisière de la vie.
Vous êtes jeune et belle, et forcément, vous vivrez encore pour de bon. Il faut seulement tenir ces quelques funestes années, et ensuite - beaucoup de choses changeront et n'avez pas le droit de clore ainsi le bilan, c'est ridicule.

Je voudrais encore vous plonger dans l'ivresse et le bonheur de la vie, et je défendrai fermement votre droit à cela.   

(24 novembre 1917-A Sonia Liebknecht p.202 et 203)
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 Mais je dois être malade pour que tout me bouleverse aussi profondément.

Ou alors savez-vous ce que c'est ? J'ai parfois le sentiment de ne pas être un vrai être humain, mais plutôt un oiseau ou quelque autre animal qui aurait très vaguement pris forme humaine ; au fond de moi, je me sens bien plus chez moi dans un petit bout de jardin comme ici, ou dans la campagne, entourée de bourdons et de brins d'herbe que - dans un congrès du Parti.

À vous, je peux bien dire cela tranquillement : vous n'irez pas tout de suite me soupçonner de trahir le socialisme. Vous savez bien qu'au bout du compte, j'espère mourir à mon poste : dans un combat de rue ou au pénitencier.

Mais mon moi le plus profond appartient plus à mes mésanges charbonnières qu'aux « camarades ».

(02 mai 1917-A Sonia Libknecht p. 144)
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Ma chérie, quand on a la mauvaise habitude de chercher une gouttelette de poison dans toute fleur éclose, on trouve, jusqu’à sa mort, quelque raison de se lamenter. Prends donc les choses sous l’angle opposé et cherche du miel dans chaque fleur : tu trouveras toujours quelque raisons de sereine gaieté.
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Sur ma tombe, comme dans ma vie, il n'y aura pas de phrase grandiloquente. Sur la dalle de mon tombeau, on ne devra lire que deux syllabes : “zwi-zwi“. C'est le cri des mésanges charbonnière que j’imite si bien qu’elles accourent aussitôt. 
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Pour moi, l'amour a été (ou est ?…) toujours plus important, plus sacré que l'objet qui l’éveille. Parce qu'il permet de voir le monde comme un conte de fées scintillant, parce qu'il fait sortir de l'être humain ce qu'il a de plus noble et de plus beau, parce qu'il réhausse ce qui est le plus commun et le plus humble et le sertit de brillants et parce qu'il permet de vivre dans l'ivresse, dans l’extase… 
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Quiconque se prononce en faveur de la voix des reformes légales, au lieu et à l'encontre de la conquête du pouvoir politique et de la révolution sociale, ne choisit pas, en réalité, une voie plus tranquille, plus plus sûre et plus lente, conduisant au même but, mais un but différent, à savoir, au lieu de la restauration d'une société nouvelle, des modifications purement superficielles de l'ancienne société. 
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Il est bien évident que le parti et l'Internationale sont foutus, complètement foutus, mais c'est précisément l'ampleur grandissante du désastre qui en fait un drame historique mondial, qui ne peut plus être confronté qu'à un jugement historique objectif et rend déplacés les gestes personnels de mauvaise humeur – inutile de s'arracher les cheveux. 
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Le socialisme allemand et international est dans un état de crise comme jamais auparavant dans l'histoire, et cette guerre lui pose la question de son destin. Si après la guerre on ne parvient pas à marquer une distinction absolue, authentique et sérieuse, même pour les temps de guerre, entre le socialisme international et l’impérialisme et le militarisme dans tous leurs subterfuge, alors le socialisme peut se faire enterrer, ou plutôt il aura déjà été son propre fossoyeur. 
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