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Citations de Rosella Postorino (303)


Mais nous, Allemands, avions besoin d'hommes de caractère, sans peur, capables de respecter la mort. C'est-à-dire d'hommes capables de la subir sans souffler mot.
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Ma mère disait que manger, c'est lutter contre la mort.
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Le repas terminé, deux SS se sont approchés et la femme à ma gauche s’est levée.

« On ne bouge pas! Rassieds toi! »

Elle s’est laissée retomber comme s’ils lui avaient donné une bourrade. Une de ses tresses roulées en macaron s’est échappée de son épingle dans un léger balancement.

« Vous n’avez pas le droit de vous lever. Vous resterez ici, à table, jusqu’à nouvel ordre. En silence. Si les plats sont empoisonnés, l’effet sera rapide. » Le SS nous a dévisagées une à une, guettant nos réactions. Personne n’a bronché. Puis il s’est adressé de nouveau à celle qui s’était levée: elle portait le Dirndl traditionnel et avait peut-être voulu manifester sa déférence.

« C’est l’affaire d’une heure, rassure-toi. Dans une heure, vous serez libres.

-Ou mortes », a souligné un de leurs hommes.

J’ai senti ma poitrine se serrer. La jeune fille couperosée a enfoui son visage dans ses mains, étouffant ses sanglots. « Arrête » a dit entre ses dents la brune à côté d’elle, mais à présent les autres pleuraient toutes comme des crocodiles rassasiés. Un effet de la digestion? Allez savoir.
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La capacité d’adaptation est la principale ressource des êtres humains, mais plus je m’adaptais et moins je me sentais humaine. P. 227
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« Puis un matin, un de nos hommes a perdu la tête. Au lieu de les viser, eux, il a retourné son arme contre nous. Nous avons riposté. »
A ce moment-là j’aurais pu savoir. Connaître l’existence des fosses communes, des Juifs alignés à plat ventre, attendant d’être tués d’une balle dans la nuque, de la terre, de la cendre et de l’hypochlorite de calcium qu’on jetait sur leur corps pour qu’ils n’empestent pas, des nouvelles rangées de Juifs qui marchaient sur les cadavres et offraient leur nuque à leur tour. J’aurais pu connaître l’existence des enfants soulevés par les cheveux et fusillés, des files d’un kilomètre de Juifs ou de Russes – ce sont des Asiatiques, ils ne sont pas comme nous – sur le point de tomber dans les fosses ou de monter dans les camions pour être gazés au monoxyde de carbone. J’aurais pu l’apprendre avant la fin de la guerre. J’aurais pu demander. Mais j’avais peur et je n’arrivais pas à parler et je ne voulais pas savoir.

Que savions-nous à cette époque ?
En mars 193, l’ouverture du camp de Dachau avec ses cinq mille places avait été annoncée dans le journal. Camp de travail, disaient les gens. Qui n’en parlaient pas volontiers. […] D’ailleurs, ceux qui en revenaient disaient : s’il te plaît ne me pose pas de questions, je ne peux pas raconter, et là les gens s’inquiétaient pour de bon.
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On s'était quittés d'un commun accord, et ce fut très douloureux. D'habitude les gens disent on l'a décidé d'un commun accord pour signifier qu'il n'y a pas eu de souffrance, ou qu'il y en a eu moins, mais ce n'est pas vrai. Certes, il se peut qu'on souffre davantage si l'un des deux ne se résigne pas, s'il fait du mal à l'autre délibérément, mais la séparation est une expérience inévitablement douloureuse. Surtout dans le cas où l'on a eu une seconde chance, contre une attente.
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Que nous arrivait-il ? Nous étions deux étrangers qui se racontaient. L'intimité physique peut-elle engendrer la bienveillance ? J'éprouvais pour son corps un incompréhensible élan protecteur.
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Nous sommes entrées une par une. Après plusieurs heures d’attente debout dans le couloir, nous avions besoin de nous asseoir. La pièce était grande avec des murs blancs. Au centre, une longue table en bois déjà dressée pour nous. Ils nous ont fait signe de nous y installer.
Je me suis assise et j’ai croisé les mains sur mon ventre. Devant moi, une assiette en porcelaine blanche. J’avais faim.
Les autres femmes avaient pris place sans bruit. Nous étions dix. Certaines se tenaient droites, l’air compassé, les cheveux tirés en chignon. D’autres regardaient à la ronde. La jeune fille en face de moi mordillait ses peaux mortes et les déchiquetait entre ses incisives. Ses joues tendres étaient marquées de couperose. Elle avait faim.
À onze heures du matin, nous étions déjà affamées. Mais cela ne tenait pas à l’air de la campagne, au voyage en autocar. Ce trou dans l’estomac, c’était de la peur. Depuis des années nous avions faim et peur. Et quand les effluves de nourriture sont montés à nos narines,notre sang s’est mis à cogner à nos tempes, notre bouche à saliver. J’ai regardé la fille couperosée. Il y avait la même envie chez elle et chez moi.
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Le Führer remettrait une Ehrenkreuz d'or aux plus méritantes, qui avaient réussi à produire jusqu'à huit enfants sains, qu'importe si par la suite certains mourraient de faim ou du typhus bien avant de voir pousser leur barbe ou de porter un soutien-gorge, et qu'importe si d'autres mourraient à la guerre : l'important était de compter de nouvelles recrues à envoyer au front, de nouvelles femmes à engrosser.
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Nous sommes entrées une part une. Après plusieurs heures d'attente debout dans le couloir, nous avions besoin de nous asseoir. La pièce était grande avec des murs blancs. Au centre, une longue table en bois déjà dressée pour nous....
....À onze heures du matin, nous étions déjà affamées. Mais cela ne tenait pas de l'air de la campagne, au voyage en autocar. Ce trou dans l'estomac, c'était la peur . Depuis des années nous avions faim et peur.......
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Sur cette table, Lénine avait perdu sa virginité. Où est le mal, a dû penser Ernst, Lénine avait l’air consentante, je te jure. Nous avions tous l’air consentants en Allemagne. (Page 316)
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La séparation est une expérience inévitablement douloureuse. Surtout dans le cas où l'on a eu une seconde chance, contre toute attente.
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L'espèce humaine est tarée : il ne faut pas favoriser ses instincts.
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Que le veuvage, effectif ou potentiel, fût un état courant ne me consolait pas : je n'avais jamais cru que ça pouvait m'arriver. Gregor avait surgit dans ma vie pour me rendre heureuse, c'était son rôle, tous les autres cas de figure relevaient de l'escroquerie, je me sentais bernée.
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Les semaines passèrent et notre méfiance à l'égard de la nourriture faiblit, comme devant un homme qui vous fait la cour et à qui vous autorisez une intimité croissante.
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On ne nous avait pas encore versé notre premier salaire, mais nous serions rétribuées pour notre travail, c'était ce qu'avaient dit les SS, même s'ils n'avaient pas spécifié le montant.
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Ma colère contre Hitler était personnelle. Il m avait privée de mon mari et chaque jour je risquais ma vie pour lui. Mon existence était entre ses mains, voilà ce que je détestais. Hitler me nourrissait, et cette nourriture pouvait me tuer.
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Hitler était sain et sauf. et moi de nouveau affamée.
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En classe, j'avais cherché une fissure dans le mur, une toile d'araignée, quelque chose qui puisse m'appartenir comme un secret. Mes yeux avaient erré dans la pièce, qui semblait immense ; puis j'avais remarqué qu'il manquait un bout de plinthe et je m'étais sentie rassurée.
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Il régnait entre nos corps une sorte de fraternité, comme si nous avions joué ensemble enfants. Comme si à huit ans nous avions mordu le poignet de l'autre pour y imprimer une "montre", la marque de nos arcades dentaires luisantes de salive. Comme si nous avions dormi dans le même berceau, de sorte que l'haleine chaude de l'autre était pour nous l'odeur même du monde.
Pourtant cette intimité n'était jamais une habitude, c'était un point de catastrophe.
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