« Lorsqu'on y songe, il paraît évident que nos vies sont aussi inconséquentes et sans objet que l'écume à la crête de la vague. Cela sous-entend que si nous avons des velléités de saisir au passage quelque chose qui ressemble à l'éternité, nous ne pouvons jeter notre dévolu que sur ce en quoi nous croyons. »
J'ai ourdi un plan machiavélique un soir de grand vent et d'orage dans un hôtel, le Château-Chantal, à Barbizon. Je suis japonaise et je voyage. J'ai rencontré un homme ce soir là dans le salon feutré de cette auberge. Il n'a vu que le galbe de ma jambe, gainée de soie, celle qui dépassait du fauteuil dans lequel je me prélassais, avant que la tempête ne se déchaîne et que la nuit s'empare du lieu privé d'électricité.
« Pourquoi ne pas nous séparer maintenant, en emportant le mystère de nos visages ? »
Il n'a jamais su qui j'étais. Nous nous sommes aimés au toucher, à l'aveugle, laissant nos sens prendre toute la place qui leur revenait. « Notre rencontre procède du mystérieux, du troublant... Depuis le début j'ai eu l'impression que quelque chose d'étrange allait se produire. » Nous avons parlé De Maupassant. Nous nous sommes quittés. Allons-nous nous revoir ? Peut-être. Il est japonais lui aussi. En attendant, je sais ce qu'il me reste à faire. Lui le découvrira plus tard. J'en suis certaine, dès qu'il recevra une carte postale d'un hôtel proche du lac d'Hakone. Il comprendra. Notre amour restera vivant. « Cette communion, cette rencontre hors du commun n'ont nul besoin de commentaires, mais ne serait-il pas merveilleux qu'elles nous aident à affronter nos deux destinées ? »
De retour au Japon, Daigo va reprendre sa vie familiale, avec sa femme et ses deux filles, et professionnelle enseignant à l'université. Un jour une carte postale arrive. Et tout ses sens deviennent fusion, lave incandescente. Il se met à la recherche de cette femme hypnotique. C'est alors que son supérieur à l'université est tué. L'enquête commence. Il est le principal suspect pour avoir dénoncé la magouille dans laquelle trempait le mort. La police est déconcertée, Daigo dispose d'un alibi solide. En outre, le mort a été vu en compagnie d'une femme peu de temps avant sa mort. Daigo va se retrouver pris dans une machination qui va le dépasser et faire remonter des frissons sensuels d'un passé qu'il est, malgré les circonstances, heureux de ressentir à nouveau. Des sentiments qui le hantaient depuis si longtemps. Un marché est un marché. Cet homme se lance dans l'aventure. Mais les gens ne sont pas toujours ce qu'ils paraissent être.
« ... on ne peut serrer une illusion dans ses bras. »
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Challenge plumes féminines 2021 – n°35
Roman découvert dans une petite boutique de ventes d’occasion. Je ne connais absolument pas cette auteure mais j’ai été d’autant plus intriguée qu’elle soit éditée chez Le Masque, le résumé a fini de me le faire ajouter à ma pal. Il aura fallu ce challenge pour l’aider à l’en sortir.
Ne me souvenant plus du résumé, j’attendais que le personnage principal se fasse tuer pour voir comment aller évoluer l’histoire. Mais en fait, il en est tout autrement car c’est lui qui va se retrouver mêler à un assassinat. Le début est donc un peu long mais néanmoins dépaysant car le personnage principal est japonais et il se trouve actuellement en Angleterre pour son travail. Par contre, le temps de l’histoire n’est pas linéaire, on saute souvent plusieurs mois d’affilée. Un second narrateur apparaît quand le meurtre à élucider survient, il s’agit de l’inspecteur en charge de l’enquête. Comme le dit le résumé, et à juste titre, tous les personnages masculins sont envoûtés à différents degrés par un personnage féminin énigmatique. La résolution est longue mais en même temps, il y a peu d’indices et beaucoup de coïncidences. Le style est agréable et très visuel avec, malgré tout, des détails (physiques ou autre) répétés à l’envi, comme si l’auteure avait peur qu’on les oublie. L’histoire n’est pas focalisée uniquement sur l’enquête, l’auteure a également mis l’accent sur les relations entre les différents personnages. L’histoire est sacrément tordue mais je comprends mieux pourquoi elle a été publiée parmi les Reines du Crime. Même si j’ai de très vagues souvenirs de « Rebecca », ce roman m’y fait beaucoup penser. L’écheveau est plus qu’emmêlé et j’ai adoré découvrir ce que l’auteure nous avait concocté. Je n’en avais pas déduit la moitié… L’histoire de ce roman n’est pas une enquête en soi mais différents détails nous aident à en déduire une partie.
Comme vous l’aurez compris, ce roman a été une excellente découverte, c’est un style tout à fait à part pour une reine du crime car celui-ci est bourré d’énigmes. Je conseille donc très fortement aux amateurs de romans policiers et de cette édition en particulier de découvrir ce roman et son auteure japonaise. Pour ma part, je vais fouiller sa bibliographie en espérant en trouver plusieurs en français.
Sur ce, bonnes lectures à vous :-)
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Ce roman, qui a reçu le Prix d'aventure en 1989, a été écrit par une reine du polar au Japon.
Ce n'est pas un roman d'action mais plutôt un roman psychologique et intimiste, à l'atmosphère trouble. Le début du récit, envoûtant et mysterieux, est particulièrement réussi. Tout commence par une rencontre fortuite en Franceentre deux ressortissants japonais , dans un manoir lors d'un orage violent. L'un est Kohei Daigo, chercheur, qui a découvert un produit alimentaire pour les enfants, mais dont les molécules lui semblent cancérigènes. Pour autant, sa hiérarchie représentée par un homme particulièrement hautain et méprisant, nie cette problématique : Daigo sait que son patron est de mèche avec les fabricants et que les résultats de laboratoire sont faussés. L'autre personne est une femme, Fumiko Samejima, qui commence à se confier à Daigo : elle veut qu’une certaine personne meure. Daigo, secrètement, souhaite que son patron meure aussi car il est hanté par l’image d’enfants mourants de cancer. Cette rencontre, troublante est rapide et tous deux reviennent à une vie normale. Imaginez la surprise de Daigo quand son patron est retrouvé assassiné de façon très mystérieuse. . Maintenant, il est confronté à un dilemme : est-il responsable de cette mort ? Est-ce à la femme mystérieuse, qu’il le doit ? Celle-ci souhaite-t-elle qu’il réponde à la seconde partie du contrat ? Daigo répondra à cet appel, non seulement pour retrouver cette femme, qui l’a envouté, mais aussi car la culpabilité le ronge.
L'intrigue est assez compliquée, parfois improbable, ce qui a diminué mon intérêt pour le livre. De plus, le dénouement m'a semblé prévisible. Par contre, les personnages, leurs psychologies, leurs sentiments sont très bien analysés et restitués : un profond sentiment de solitude affleure tout au long du roman, comme une gangrène de la société japonaise. Daiko tombera doucement dans la folie meurtrière : sa rencontre avec Fumiko sera pour lui un prétexte de faire le mal, sans en ressentir de culpabilité. Les thèmes abordés, la corruption et la prédominance des intérêts privés sur la santé publique, sont très actuel. C'est vraiment la qualité de l'écriture, plus que l'intérêt de l'intrigue, qui m'a enchantée.
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