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Critiques de Thomas Flahaut (89)
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Les nuits d'été

Une saison d'été, trois amis d'enfance qui retournent dans le quartier populaire qui les a vus grandir, et se retrouvent à un moment charnière de leur vie, la petite vingtaine, un pas dans les études, l'autre dans la vie active, selon les parcours. Thomas a échoué dans ses études supérieures et se fait embaucher comme saisonnier dans l'usine de son père, désormais retraité, poussé par Medhi qui y travaille déjà. Louise, soeur jumelle de Thomas, va démarrer un thèse en sociologie sur les ouvriers français transfrontaliers, on est tout proche de l'opulente Suisse.



Thomas Flahaut a beaucoup de talent pour saisir cet étrange moment, comme flottant, du passage à l'âge adulte, lorsqu'on réalise les écarts sociaux, déjà présents dès le départ, qui se sont creusés par les études, rendant pour certains l'entrée dans le monde du travail difficile. Le personnage de Thomas est souvent touchant, perdu dans son échec alors que son père, cassé par l'usine, rêvait d'ascension sociale plutôt que de voir son fils trimer dans son usine. Les dilemmes de Louise sont également très justement décrits, entre son désir de reconnaissance et la peur de trahir son milieu, elle qui utilise les codes des sciences humaines pour observer cet univers ouvrier paternel, et qui doit le faire avec objectivité alors qu'on sent en elle la volonté de rendre justice par l'écriture de sa thèse.



Les personnages sont intéressants. Ce sont les interactions qu'ils ont entre eux qui m'ont moins convaincues, un peu trop schématiques et attendues. Lorsque je décrochais, la belle écriture de Thomas Flahaut m'a souvent ramenée à son texte, portée par une voix sincère, profondément sincère.



En fait, ce qui m'a le plus intéressé dans ce roman, ce ne sont pas les personnages ni le romanesque insufflé et tissé en eux, c'est l'horizon quasi sociologique et éminemment politique de ces mots qui parlent de l'héritage ouvrier, des mutations de ce monde avec une authenticité vibrante. Il dit magnifiquement le corps à corps de l'homme avec la machine et le travail aliénant. Il réinterprète la lutte des classes dans le monde contemporain actuel, l'usine du livre étant désossée, avant fermeture, par les actionnaires suisses sous le regard des ouvriers, ceux en CDI et les intérimaires qui font le même travail mais dont la précarité les empêche de se dire ouvriers.



C'est là que ce roman ultra sensible m'a touchée, dans la mélancolie de ce monde qui disparaît. La citation en exergue de L'Établi, écrit par Robert Linhart au lendemain de mai 68 ( également cité par Leurs Enfants après eux, de Nicolas Mathieu, comme une évidence ) prend tout son sens lorsqu'on referme les pages.



Lu dans le cadre du collectif Les 68 premières fois
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Les nuits d'été

À peine a-t-il franchi les portes de l'atelier qu'une odeur de fer brûlé et de plastique fondu le saisit. À ses côtés, Romuald, le chef d'atelier, qui lui présente Miranda, la machine dont il aura la charge durant les prochaines nuits. Non loin de là, son ami, Medhi, tendu, presque absent, accaparé par sa machine, et qui, malgré leur longue amitié, le regarde à peine. Sept étés que son ami travaille à l'usine Lacombe, alternant avec des saisons hivernales. Thomas, lui, débute ici. Non pas par choix mais parce qu'il a échoué à la fac. Quatre ans de mensonges à ses parents, leur faisant croire que tout allait bien. Sa jumelle, Louise, s'en sort mieux. Elle prépare d'ailleurs une thèse sur le milieu ouvrier, notamment les frontaliers qui, tous les jours, partent travailler en Suisse... Cette nuit n'est que la première des longues nuits d'été, fatigantes et épuisantes, aussi bien pour le corps que pour l'âme...



Des ouvriers frontaliers qui, chaque jour, vont travailler en Suisse, chez Lacombe, une usine de fabrication de pièces destinées à l'automobile. Parmi eux, Thomas et Medhi, des amis d'enfance. Fini pour eux le temps de l'insouciance et des nuits d'été pleines de promesses. Leurs nuits d'été sont désormais consacrées au travail chez Lacombe, là où leurs pères ont trimé avant eux. Des nuits d'été où résonnent les cris des machines, tous comme ceux des hommes mais que l'on feint de ne pas entendre, où l'on danse et boit parfois pour s'oublier et oublier, où les corps s'échinent à la tache, où les cœurs battent à l'unisson et où désespoir et désillusions battent en cadence. Ce roman social, autofictionnel, met en scène trois vingtenaires, enfants d'ouvriers, qui vont vivre un été charnière. Des personnages, criants de vérité, très attachants, à qui Thomas Flahaut donne à tour de rôle la parole. Profondément désenchanté et un brin mélancolique, Thomas Flahaut nous étreint par la poésie et la force de ses mots, nous émeut par son humanité et sa tendresse et nous berce entre illusions et résignation.



Un roman d'apprentissage d'une rare justesse...
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Les nuits d'été

Ce roman raconte l’histoire de parents qui ont voulu le mieux pour leurs enfants, mieux pour eux, c’étaient les études, et le fait d’échapper au travail en usine,



C’est aussi l’histoire de trois jeunes qui se cherchent, Louise, qui poursuit un cursus de sociologie, qui découvre l’amour, qui semble fuir par peur de la vie active, Thomas son frère, qui n’ose avouer à son père son échec et la fin de ses études, Thomas qui est embauché pour travailler à l’usine, Thomas qui déprime, Thomas qui doute de ses capacités, Thomas qui se tait... Et Mehdi, employé à l’usine la nuit et qui travaille à la vente des poulets rôtis avec son père le jour...



Trois êtres qui se croisent et qui évoluent chacun à leur façon, qui essaient de vivre, qui partagent des bribes de leur vie avec le lecteur, les bribes d’une vie qui promet errance et ennui, fuite et impossibilité de s’exprimer alors que l’on démonte peu à peu, toutes les machines de l’usine qui va être transplantée, générant chômage et conditions de travail qui se dégradent.



On observera l’impuissance de chacun face au pouvoir des employeurs, on observera la difficulté des jeunes à s’installer pour envisager leur vie future, difficulté courante désormais et pas seulement dans cette région que décrit l’auteur.



Je n’ai pu m’empêcher en lisant ce beau roman, de faire le rapprochement avec quelques-uns des Rougons Macquart de Zola car il décrit avec précision la situation sociale d’une famille d’ouvrier avec deux-cents ans de différence.

Un roman qui fait réfléchir et montre combien il est difficile de devenir adulte, et combien la précarité paralyse, empêche l’action et amène à baisser les bras.


Lien : https://1001ptitgateau.blogs..
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Ostwald

La centrale nucléaire de Fessenheim est en feu. Un réacteur nucléaire brûle et c'est toute la population qu'on évacue. Avalé ses cachets d'iode et suivre la marche forcée des camions qui dirigent tout le monde vers des lieux de rétention, voilà ce qu'il reste à faire ! Mais Noël et son frère Felix ne l'entendent pas ainsi...



Comment faire pour échapper à cette mise en quarantaine ? Comment fuir et pour aller où ? Que restera-t-il de cette ville ? et que fera l'Etat de tous ces gens ? Les deux frères n'attendent pas de savoir le sort qui leur sera réservé. Ils fuient. Du mieux qu'ils peuvent. Croisant ça et là des êtres aussi paumés qu'eux, ils décident de se lancer à la recherche de la femme dont ils sont tous les deux amoureux, comme une dernière quête. La seule peut-être digne d'être vécue...



Bienvenue dans ce no-mans land où plus rien n'est à perdre, car tout est déjà perdu :



"Sur la plateforme, la foule des danseurs, liquide, une mer prenant son élan avant la tempête. Mais derrière la frénésie, les lumières des projecteurs laissent entrevoir des mines déconfites, des yeux fatigués qui ne regardent plus rien d'autres que le vide noir. Des bouches silencieuses, scellées par le goulot des bouteilles de vodka et de gin. Laisser venir l'ivresse et dans la tristesse moite de la nuit un semblant de bonheur. Ici, on fête la fin de quelque chose qu'on n'a pas envie de voir."



Un premier roman avec de belles idées et de beaux passages, qui reste prometteur, malgré quelques longueurs...
Lien : http://page39.eklablog.com/o..
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Les nuits d'été

J'ai lu ce roman réaliste dans le cadre du Prix Summer 2021.

Deux amis d'enfance sont employés provisoirement dans l'usine suisse proche de la frontière avec le Jura français, une région que l'auteur connaît bien. L'un y travaillait chaque été, l'autre a été embauché après des études ratées. Sa sœur jumelle, étudiante en sociologie, a choisi d'étudier cet univers si bien décrit.

Nous assistons à la fermeture de l'usine et au désarroi des ouvriers. Ces jeunes gens désabusés, qui essaient simplement de vivre le plus heureux possible malgré toutes les difficultés pour y parvenir et pour sortir de leur milieu social.

J'ai suivi successivement ces trois voix mais sans me perdre dans le récit comme ce fut le cas dans d'autres romans.

Ce jeune auteur relate l'histoire par petites touches, sans misérabilisme, ni mièvrerie lorsqu'il s'agit d'amour.

L'histoire est sensée se passer avant la crise sanitaire et économique, je pense que la situation doit être bien pire aujourd'hui.

Mon seul bémol concerne la remarque sur le woofing, un peu trop généraliste à mon gré.
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Les nuits d'été

***,*



Thomas a raté la fac. A tel point que l'université refuse sa prochaine inscription. Alors il rentre aux Verrières, dans la maison des darons, là où il a grandit. Mais il ne dit rien à ses parents, pas encore. D'abord parce qu'il a honte et puis parce qu'il ne sait pas comment sortir de 4 ans de mensonges... Dans cette ville du Jura, frontalière de la Suisse, Thomas va apprendre le langage de l'usine, la même que celle où s'est épuisé son père. Il est intérimaire de nuit, pour l'été, aux côtés de son ami d'enfance, Mehdi. Chacun à leur façon, ils vont devoir faire le deuil de leurs rêves, de leurs espoirs, et avancer sur un chemin escarpé...



Les nuits d'été de Thomas Flahaut n'ont rien de la douceur du soleil couchant. Thomas et Mehdi ne goûtent aux nuits estivales que derrière leur Miranda, ces machines infernales enracinées à La Combe. Leurs pères s'y sont épuisés, espérant pour leurs fils un avenir meilleur.

C'est bien ce qui est le plus difficile à vivre pour ces deux amis. Un sentiment d'échec, de retour en arrière, de honte. Ils n'ont pas fait mieux, même si ils ont essayé...



Thomas Flahaut écrit avec justesse sur ces jeunes adultes perdus, qui ne trouvent pas de sens à leur vie, qui se croit invisible tant qu'ils n'ont pas de place dans le monde du travail.

L'amour et l'amitié les maintiennent à flots, difficilement parfois...



Une écriture maîtrisée et des personnages attachants font de ce roman une image un peu triste mais touchante d'une France à l'industrie qui se meurt, de parents qui espèrent mieux et d'enfants qui ont bien du mal à trouver leur place...



Encore une belle découverte des 68 premières fois...
Lien : https://lire-et-vous.fr/2021..
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Camille s'en va

Camille S'en Va - Thomas Flahaut (éditions de l'Olivier) - Janvier 2024 - 20€ - 185 pages

Verrirères (la citée natale de Jérôme) se voit être démolie avec une foule de témoins nostalgiques...

Jolie plume. (On dirait que M.Flahaut a déjà assisté à une démolition...)

Jérôme va trouver une bonne planque chez son bon camarade Yvain.

Révolte contre l'ordre établi. Nombreuses personnes recherchées par la Police. On ne voit qu'un seul point de vue biaisé.

"Elle me casse les couilles cette meuf"

"C'est qui?"

Yvain soupire puis après un moment de silence esquisse un Rire

"C'est personne"

Phoenix

++
Lien : https://linktr.ee/phoenixtcg
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Les nuits d'été

Fils d’ouvrier, Thomas Flahaut a lui-même travaillé pendant une petite période dans une usine de son Jura natal avant de partir étudier le théâtre et la littérature à Strasbourg et en Suisse .



Le monde ouvrier semble assurément l'habiter et en tout cas imprégner l'ensemble de ses écrits puisqu'il était déjà le décor principal de son premier roman, Ostwald, à forte dimension apocalyptique.



Pour les nuits d'été, son second roman, Thomas Flahaut s'inscrit dans une veine plus réaliste mais définitivement liée à un ancrage social très fort, dans la droite lignée du Goncourt 2018, le roman de Nicolas Mathieu "Leurs enfants après eux".



Les trois protagonistes princiaux de ce roman sont trois amis d'enfance, deux garçons Mehdi et Thomas et une fille Louise qui se retrouvent le temps d'un été dans la cité HLM du Doubs de leur enfance. Alors que Louise prépare sa thèse de sociologique, Thomas se fait embacher dans l'usine où travaille Mehdi et ou ont travaillé leurs pères respectifs.



Alors que ces paternels ont trimé toute leur vie pour éviter que leurs descendance connaissent le même destin, l'ultra libéralisme ambiant fait que finalement, la précarité est également l'horizon qui attend la génération postérieure.



Ces trois jeunes gens qui cherchent leur place dans une vie et une société qui semble ne pas vouloir d'eux sont parfaitement représentatifs d'une partie de la jeunesse actuelle qui tentent de survivre dans un monde jalonné d'obstacles surtout pour ceux qui n'avaient pas toutes les cartes en main .



Flahaut décrit toutes ces mutations et ces contradictions du monde professionnel actuel avec énormément de justesse, et en privilégiant toujours la densité romanesque de son récit, sans jamais verser dans le roman à thèse.



On pense évidemment dans un genre littéraire très différent au très beau A la ligne de Joseph Pontus (La Table Ronde, 2019)



Mais Les nuits d'été aborde également des sujets qui traversaient déjà le premier roman de l'auteur, celui de la quête identaire, du très difficile passage à l'âge adulte et des relations parfois complexes entre les générations.



Thomas Flahaut connaît parfaitement les décors et les personnages de son roman, et cette authenthicité et cette empathie qu'ils leur portent contribuent pour beaucoup à la grande réussite de ces nuits d'été, aussi mélancoliques que sincères...
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Les nuits d'été

Ce livre nous conte l'histoire de Thomas, Louise sa sœur jumelle et de Medhi leur copain.

Thomas a échoué à ses examens et ne peut se réinscrire à la Fac. Sa sœur prépare sa thèse qui parlera des ouvriers. Mehdi comme depuis sept été, travaillera à l'usine la nuit. A vingt cinq ans, on s'imagine pouvoir s'élever socialement et éviter l'usine où leurs pères se sont échinés.

Dans ces nuits d'été, on retrouve donc Medhi et Thomas à l'usine. Thomas s'occupe de La Miranda et des pièces à sortir, car il y a des objectifs à atteindre, souvent impossible.

La frontière géographique, ainsi que l'usine et les machines sont omniprésentes dans ce livre. Ces jeunes qui passent la frontière suisse plusieurs fois par jour, pour se rendre à l'usine.

Pourquoi l'on délocalise cette usine et l'on démonte ces machines ?

Cette jeunesse en quête de repères mais qu'il est difficile de passer à l'âge adulte. Un roman social ancré dans une vrai réalité avec des personnages attachants.

Merci aux 68 Premières fois et aux Éditions L’Olivier de m'avoir permis de découvrir ce livre.





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Les nuits d'été

Jura, à la frontière avec la Suisse. Mehdi comme toutes les nuits estivales se rend sur sa moto dans l'usine suisse pour laquelle il est intérimaire. Thomas a loupé encore une fois ses examens et ne souhaite plus continuer ses études. Il décide d'aller charbonner toutes les nuits avec son ami d'enfance Mehdi. Première nuit, on lui apprend les rudiments du métier et surtout le maniement des machines infernales produisant sans lassitude aucune des dizaines de centaines de rotors par jour. Puis c'est la quille on oeur annonce la fermeture de cette antenne pour une réinstallation dans une usine flambant neuve mais sans reclassement des intérimaires évidemment. Puis il y a Louise la sœur de Thomas qui va se rapprocher de Mehdi notamment pour avancer sur sa thèse au sujet des travailleurs frontaliers, ici ouvriers.



Ce trio de personnages fonctionnent à merveille et j'ai ressenti de l'empathie pour les trois. C'est une joyeuse bande, amis d'enfance mais qui va de désillusion en désillusion et on sent combien il peut être dur de trouver sa place au sein de la société et notamment celle du travail. Le trio est de plus en plus morose et le texte s'en ressent tant tout paraît sombre malgré la saison estivale. Ici le bout du tunnel semble très loin et surtout invisible.



Énorme coup de coeur pour ce roman que j'ai dévoré !
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Les nuits d'été

C'est un titre qui évoque la douceur, la volupté, la légèreté, peut-être la fête. Qui rappelle, dès la première ligne que pour certains, les étés ne riment pas avec vacances et farniente, mais avec boulot, usine et chaîne de production. Pourtant, ce n'est pas un titre trompeur. L'atmosphère tissée par Thomas Flahaut est charnelle, presque amoureuse. Les machines-outils sont des personnages que l'on caresse, dont on prend soin. Il nous dresse le portrait d'un monde qui disparaît, avec une sensibilité et une tendresse qui englobent tous les protagonistes de l'histoire. Autant j'avais trouvé Ostwald, son premier roman, très sombre, autant j'ai perçu dans celui-ci une lumière permanente, même au plus près du drame ou du désespoir.



Nous sommes dans l'Est de la France, région frontalière avec la Suisse où se rendent nombre de travailleurs chaque jour. Mehdi a ses habitudes chez Lacombe depuis quelques années, en été, tandis qu'il travaille l'hiver dans les stations de ski. Pour Thomas, son ami d'enfance, c'est le premier contrat. Il n'a pas encore dit à ses parents qu'il avait foiré ses examens et que ses espoirs de vie meilleure étaient pour l'instant mis de côté. Lacombe, c'est l'usine où son père a travaillé toute sa vie, jusqu'à épuisement. Un père qui pensait que ses enfants verraient autre chose. Louise, la sœur de Thomas prépare justement une thèse sur les travailleurs frontaliers. Elle observe, interviewe. Il y a du mouvement à l'usine, on demande plus de productivité, des réunions de types en costard se multiplient ; le contremaître a beau rassurer, l'inquiétude gagne. Puis la colère, teintée d'impuissance. La nuit cependant, on tente de danser quand même. Et puis de s'aimer.



C'est le roman d'une génération qui se heurte à la violence du monde du travail piloté par l'argent ; qui cherche en vain un peu de sens à l'image de Thomas qui s'interroge sur le vocabulaire employé pour le définir. Il est "opérateur de production" et non "ouvrier" comme on disait avant. La notion d’œuvre a disparu au profit de celle d'opération. Avant lui, Mehdi a fait l'expérience de la précarité, jamais sûr d'une saison à l'autre de pouvoir louer une chambre où dormir. Son organisme a intégré la fatigue inhérente tandis que Thomas, dans sa filière d'études longues découvre la vie avec retard et un corps plus fragile. Et a du mal à supporter des conditions que son père a pourtant subies toute sa vie. C'est l'histoire d'une génération qui a besoin de retrouver le sentiment de servir à quelque chose, à l'image de Louise qui part faire la cueillette des fruits parce qu'elle a besoin de voir le résultat concret de son travail. Tenter de dépasser la souffrance, les désillusions, tout ce que lui renvoient les hommes et les femmes qu'elle interroge.



Il y a bien sûr dans ce roman des éléments d'une expérience vécue par l'auteur, il le raconte lui-même d'ailleurs. Mais il parvient à sublimer son matériau pour faire résonner une petite musique teintée de mélancolie et livrer un roman poignant et délicat qui se lit presque en apnée. Je ne peux que vous inciter à découvrir cette voix d'un jeune auteur en lice pour le Prix de la Vocation.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Les nuits d'été

Thomas et Louise, des jumeaux âgés de 25 ans, et Mehdi sont des amis d’enfance, des amis du quartier, celui des Verrières, en Franche-Comté, pas loin de Montbéliard. Mais si le père avait trimé pour que Thomas s’en sorte et parte à la ville faire des études qui lui permettrait d’échapper à la vie des ouvriers, celui-ci s’est sans doute un peu fourvoyé. Ou bien avait-il des aspirations plus hautes que ses capacités, toujours est-il que fort de ses échecs aux études de médecine, c’est dans l’usine qu’il pose aujourd’hui son bardât pour avancer.



Voilà donc Mehdi et Thomas désormais collègues à l’usine, la seule qui embauche dans ce coin où la zone a gagné du terrain. Celle-là même où travaillaient déjà leurs pères, qu’ils avaient rêvé de fuir, mais qui inexorablement les ramène à leur condition. Job d’été ou études manquées, qu’importe puisque finalement les voilà qui triment comme le autres, sans aucun espoir de s’en sortir un jour. Il faut alors apprendre le maniement des machines, le bruits, les odeurs, la solidarité et l’entraide, les gestes de sécurité et le rythme intensif de la production.



Jusqu’au jour où… les actionnaires, les délocalisations, les patrons peu soucieux de leurs ouvriers, tout y passe et l’usine ferme pour se réinstaller plus loin, mais avec beaucoup moins de travailleurs. Au grand désarroi de toutes ces familles qu’elle faisait vivre dans la vallée.



Dans cette usine, Louise va poursuivre sa thèse sur les ouvriers frontaliers. Elle se rapproche de Mehdi le solitaire, l’enfant resté au pays qui travaille dans les stations de ski l’hiver et à l’usine tous les étés, qui rentre à moto par l’autoroute transjurane pour passer la frontière entre la France et la Suisse. Lui seul dans ce trio sait déjà ce que veut dire la précarité.

...

chronique complète en ligne sur le blog Domi C Lire https://domiclire.wordpress.com/2021/02/16/les-nuits-dete-thomas-flahaut/
Lien : https://domiclire.wordpress...
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Les nuits d'été

Après avoir abandonné la faculté, Thomas retourne dans son quartier natal du Jura pour travailler de nuit cet été là avec Mehdi, son ami d'enfance dans une usine transfrontalière. Il retrouvera aux Verrières sa soeur jumelle, Louise, qui prépare quant à elle thèse portant sur les ouvriers transfrontaliers.

Dans ce deuxième roman et au travers de ces trois personnages centraux Thomas Flahaut dépeint une classe sociale populaire et les réalités auxquelles elle doit faire face.

L'espoir d'une vie meilleure que l'ancienne génération est-il encore possible?...



#68premieresfois
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Les nuits d'été

On peut penser nuits d'été, nuits de vacances. Ce n'est pas tout à fait le propos de l'auteur qui nous emmène à l'usine où se retrouvent des jeunes, fils et filles d'ouvriers qui essaient d'améliorer leur condition sociale en continuant des études supérieures, mais pour lesquels l'usine, le temps d'un été, reste une solution pour "améliorer l'ordinaire". Quand ils se retrouvent l'été dans l'usine qui a usé leurs pères, soumis à une machine qui est peut -être encore plus vorace que les cadences infernales de leurs aînés, on entend bien le propos en demi-teinte de l'auteur. Il parle vrai, Thomas Flahaut, on le suit avec un sentiment mitigé de compassion et de respect.
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Les nuits d'été



Il m’a fallu insister, persévérer, pour entrer dans ce roman âpre qui brosse le portrait d’une certaine jeunesse qui a du mal à trouver sa place dans un monde en mutation.

Thomas, sa sœur jumelle Louise et Medhi, leur ami d’enfance sont issus de la région de Montbéliard, leurs pères ont été des ouvriers transfrontaliers, travaillant dans une usine en Suisse, et ils ont rêvé pour leurs enfants d’un autre destin.

Louise et Thomas sont partis à l’université à Besançon, tandis que Medhi est resté , travailleur précaire, saisonnier en montagne l’hiver et « opérateur » de nuit pendant l’été dans la fameuse usine où les chaînes de montage sont désormais pilotées par des ordinateurs.

Cet été-là, Thomas rejoint Medhi à l’usine. Il n’a pas osé avouer à ses « darons » qu’il a définitivement « foiré » ses études.

Cet été là l’usine déménage presque clandestinement et les intérimaires, comme Medhi et Thomas restent sur le carreau.

Cet été-là, il fait très chaud. Louise qui est revenue aux Verrières pour enquêter sur les ouvriers transfrontaliers redécouvre Medhi qui devient son amoureux.

Les jeunes vont et viennent, font des virées à moto, ils sont désoeuvrés, boivent des bières, observent tristement ce monde qui ne les fait pas vibrer. On les sent à la croisée des chemins, l’enfance est derrière, mais ils ont bien du mal à cerner ce qu’il y a devant.

Il s’agit d’un roman qui diffuse une mélancolie sourde, dont le style est un peu hybride, à la fois littéraire par moment et plus abrupt parfois. C’est un livre de qualité qui n’entraîne pas le lecteur du côté du plaisir, mais plutôt du côté d’une réalité sociale qu’il préfèrerait peut-être ignorer !Je crois que la force de l’écrivain est d’arriver à faire partager au lecteur son désenchantement.

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Ostwald

Quand je reçois Ostwald de Thomas Flahaut pour le lire et le commenter dans le cadre des 68 premières fois, le livre est accompagné d'un petit mot de la précédente lectrice qui me prévient que, jusqu'à présent, ce livre n'a pas rencontré beaucoup de succès dans notre collectif de lecteurs…

Personnellement, je ne lis jamais les critiques déjà publiées tant que je ne me suis pas fait ma propre impression sur un livre et je ne vais pas déroger ici.



Un scénario catastrophe revisité de manière plutôt originale, qui évite les clichés habituels : pas de grand spectacle, pas de vision de fin de monde… L'accident nucléaire est mis à distance et vécu à travers les points de vue des membres d'une famille éclatée : une mère, un père et surtout deux frères ; autour d'eux gravitent quelques personnages, une petite amie, un clochard, d'autres habitants évacués, des militaires…

Quelques incendies, quelques exactions, quelques scènes surréalistes… C'est plutôt sobre, stylisé à grands traits. La psychologie des protagonistes est travaillée mais pas uniquement par rapport au disfonctionnement de la centrale nucléaire et à ses conséquences : les souvenirs les accompagnent et prennent souvent le pas sur l'actualité. C'est la fin d'une culture ouvrière après les conflits sociaux de la société Alstom, à Belfort : paradoxalement ces évènements passés servent de lointaine toile de fond.

La question du lieu est omniprésente : la ville d'Ostwald symbolise un point d'ancrage où il faut revenir, un but illusoire, mais un projet, même fragile. le Parlement Européen de Strasbourg perd toute crédibilité et influence ; le bâtiment évacué devient un lieu interlope dénué de sens citoyen mais lourd du délitement de toute une région.

L'écriture est efficace, factuelle, brute, mais jamais brutale. Ce roman se lit facilement, vite, dans l'urgence… La problématique est simple : en cas de catastrophe majeure, il y a une procédure, un plan… Mais, dans une démocratie, il existe « le droit pour tout le monde de s'enfuir ».



Ce roman m'a interpelée : comment réagirais-je dans une situation similaire ? Comment vivrais-je l'évacuation rapide avec un minimum de bagages, la promiscuité des camps d'hébergement, l'éventuelle séparation de mes proches ? Comment analyserais-je le manque d'information, l'incertitude sur l'avenir ?

Même dans cette ambiance angoissante de catastrophe nucléaire, les personnages principaux ne parviennent pas à établir de véritable communication entre eux, à se rapprocher vraiment, à aller à l'essentiel ; leur profonde solitude est frappante.

Dans ce roman, l'écriture est à la première personne : ce JE pourrait être le mien, le vôtre, le nôtre… C'est un JE ancré dans le présent, sans recul, sans devenir.



Alors oui, je vais peut-être me démarquer, mais ce premier roman de Thomas Flahaut me parle, même s'il me laisse avec mes questions : à la place de ses personnages, où irais-je ? Où serait mon Otswald à moi ?

Un premier roman prometteur que je recommande.

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Les nuits d'été

Les nuits d'été est un roman sur un fonds social à double titre. D'un côté, il nous parle de la jeunesse qui ne trouve pas de travail stable et bien rémunéré, où la précarité est la règle. Et de l'autre, il effleure l'évolution de l'industrie pour la laquelle la recherche de la productivité est une constante, pour laquelle on sacrifie les hommes, les villes, les pays.



Il nous parle également d'amitié entre jeunes et des différences entre les générations, avec des valeurs différentes et des contextes sociaux qui ont radicalement changé.



Personnellement je n'ai pas accroché au livre malgré mon intérêt pour le sujet. Deux reproches à son égard. Pour commencer j'ai trouvé les personnages trop caricaturaux, sans ressort, trop résignés, sans envie d'aller de l'avant quelque soit le chemin ou le choix. Ça ne correspond pas à la jeunesse que je connais, même si je suis d'accord avec les difficultés qu'elle doit affronter. Par ailleurs les relations entre eux sont sans relief, avec un cardiogramme plat. Il n'y à pas de passion, pas d'amour, pas de tendresse.



Ensuite le récit m'a paru morne, plutôt ennuyant même si le langage et le rythme rendent la lecture fluide et agréable. Mais on reste sur le même tempo tout le long comme si c'était une étude à peine romancée et pas un roman.



Mon analyse et ma notation sont peut être un peu dures. Mais ça correspond à mon ressenti après la lecture du livre et plusieurs jours de réflexion.
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Les nuits d'été

Thomas, Louise et Mehdi sont des enfants de la classe ouvrière. Des pères quasi absents, ouvriers de toujours, l’usine c’est une vie, une vie entière. Celle qui préoccupe, celle qui use, celle qui distille un poison sournois, celle qui brise, celle qui n’amène que désolation. Thomas, Louise et Mehdi ont vu l’usine prendre la moindre parcelle de leurs pères. La maladie, l’alcool pour oublier la dureté de l’usine. Mais lorsqu’on est enfant l’usine se concentre sur le quartier dans lequel on grandit. Un ghetto où la détresse se mesure aux rires des enfants.





Thomas, Louise et Mehdi ont grandit avec l’idée que l’usine n’était pas leur avenir. Un rêve illusoire tristement rattrapé par la réalité. Mehdi y travaille l’été depuis sept années. Thomas la rejoint après avoir raté ses études. Louise, étudiante, prépare sa thèse sur les ouvriers frontaliers.





Elle est là, partout, filigrane visible dans les corps et les cœurs. L’usine happe, alpague, maintient, enserre, noie. L’usine c’est un monde violent, répétitif. Un monde de chiffres, de bruits, de regards en coin, de regards triste. Un monde solitaire où le corps est mis à contribution, où la nuit désolidarise. Un monde où la vitesse, l’alcool deviennent cette liberté fugace et où l’amour est un doux éphémère.





Thomas Flahaut parle de la brutalité du monde avec une honnêteté sans faille. Il décortique les corps et les âmes. Il nous montre l’invisible, ce qui se chuchote dans ce monde douloureux. Une fresque sociale puissante, sans concession, sans avenir, sans vie. Un monde désenchanté, enchaîné dans une sorte d »héritage morbide de père en fils. Une plume impitoyable instillant par moment cette dose de bonheur, de liberté, de vie. Mais l’épuisement, la survie sont bien plus forts que ces instants fugaces et précieux.





J’ai souvent du mal avec les romans sociaux. Le désespoir est bien trop souvent présent et oppressant. L’atmosphère est y tout aussi pesante J’admire toutefois la manière dont Thomas Flahaut s’en accapare et nous plonge dans son monde.
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Les nuits d'été

Avec un titre pareil on pense vacances, fête, chaleur, mais pour certains c'est job de nuit en usine, beaucoup moins glamour! La chaleur est bien là, étouffante, les nuits sont longues. L'atmosphère oppressante n'est pas à la fête mais à la fermeture d'usine.

Thomas Flahaut nous raconte trois jeunes qui se cherchent, les jumeaux Thomas et Louise et leur ami Mehdi. Ils ne veulent plus du monde ouvrier dont ils sont issus. Les nuits d'été est une fresque sociale, avec certainement une bonne part autobiographique. Louise réussit dans son domaine mais Thomas abandonne ses études et traîne toute la journée à dormir. Il est en manque d'espoir, sans perspective d'avenir. Il faudrait dire aux jeunes que la faculté n'est pas la panacée, que les filières générales conduisent droit au chômage. Alors, comme il faut bien, à 25 ans, rentrer dans l'âge adulte, c'est retour à la case départ, à l'usine. Oui, mais on délocalise et la solidarité entre ouvriers ne va pas pouvoir faire grand chose contre la précarité et les désillusions. Il reste l'alcool pour lutter contre le déterminisme social...

J'ai horreur des mots "Daron, Daronne". Ça m'a grandement dérangé dans cette lecture, sans doute signe de mon âge.
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Les nuits d'été

Loin de l'insouciance et de la légèreté qu'évoque son titre, Les nuits d'été est une grande fresque sur la puissance et la fragilité de l’héritage social. Thomas Flahaut écrit le roman d’une génération, avec ses rêves, ses espoirs, ses désillusions. Il dépeint la brutalité du monde ouvrier en déclin face aux exigences du capitalisme. Rendement et délocalisation sont devenus les maîtres mots. L'auteur brosse le portrait d'une certaine jeunesse, celle de la classe ouvrière, qui malgré les études et la volonté de s'élever socialement, reçoit en héritage un statut. Les nuits d'été c'est en somme une histoire de trajectoire sociale, mais aussi de combats, d'amitié et d'amour.



La plume poétique de Thomas Flahaut mêlée à un style abrupt, font de ce roman, non pas une diatribe contre le capitalisme, mais un livre mélancolique et sociologique sur les difficultés qu'ont les jeunes à se projeter tant personnellement que professionnellement. Les nuits d'été est un roman social criant de réalisme, porté par des personnages poignants ancrés dans la société actuelle. Portraits d'une génération désenchantée.


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