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Critiques de Valentine Imhof (64)
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Par les rafales

Va où le vent te mène, va où le vent t'amène, oublie les maux qui t'enchaînent, petit plagiat revisité de paroles interprétées par Angelo Branduardi et tiré d'une playlist personnelle pas du tout raccord avec celle de Valentine Imhof présentée à la fin de son roman, Par les rafales.



Présentation de la protagoniste: Alex pour les uns ou Sacha pour les autres mais Alexis Fjaersten sur les papiers, 25 ans, étudiante en lettres et musique, journaliste free lance, père norvégien, mère française, domiciliée à Metz et recherchée. Un beau brin de fille libre à qui l'avenir sourit ou souriait.



L'ouragan dévastateur va se déchaîner dans les bayous de Louisiane proches de la Nouvelle-Orléans alors qu'Alex s'apprête à réaliser une série de portraits de musiciens de rue. Un « hurican » violent, sauvage dont le passage meurtrier la marque de stigmates indélébiles et de séquelles psychologiques profondes. Déboussolée, traumatisée, peut-être traquée, elle prend la fuite. de retour en France, elle trouve une planque, un minuscule appartement et en fait « son camp de base ». Alex ou Sacha, papillon brisé dans son envol, à nouveau chrysalide tisse un cocon protecteur au gré de rencontres amoureuses et amicales. Blessée elle trouve un moment d'accalmie en se réconfortant dans la culture de son enfance norvégienne dont l' univers mythologique la fascine, un baume pour son âme. Prisonnière de sa fuite en avant, Alex « l'inconnue de la chambre 107 » va vite devenir une énigme à déchiffrer aussi bien pour ses proches que pour la police.



Dans ce récit Valentine Imhof aborde avec sensibilité les troubles de stress post-traumatique, la folie paranoïaque, les fragilités d'une jeune femme solitaire, égarée, en état d'urgence, clouée dans une reviviscence répétitive des événements, mue désormais par la haine, la rage, la peur et la souffrance. Une figure féminine forte, brillante mais borderline, incontrôlable à l'image de Marianne dans Meurtres pour rédemption de Karine Giebel ou de Lizbeth Salander dans Millénium de Stieg Larsson.





Un road-trip halluciné et envoûtant, une enquête en filigrane, qui m'ont introduit dans les bars des bouts du monde (petit clin d'oeil à la compilation d'Elise Dürr) de Terre Neuve aux îles Shetland en passant par Gand ou Anvers, jamais très loin des brumes ou des embruns souvent à la merci de violents coups de vent.



Un roman noir, rock, sombre, violent très addictif à la construction originale, des chapitres qui débutent comme des dépêches d'une agence de presse, date, heure, lieu souvent précédés d'extraits littéraires collant aux états d'âme d'Alex, donnant des indices sur les abîmes qu'elle traverse, les étapes de sa cavale.

Une écriture brute, ciselée, réaliste permet au lecteur de s'immerger très vite dans les diverses ambiances grâce aux extraits musicaux suggérés, aux odeurs prégnantes, aux senteurs traversées et aux arômes développés.



Intriguée par le cursus de Valentine Imhof, auteure française originaire de Nancy installée à Saint-Pierre et Miquelon, j'ai eu envie de découvrir son univers. Présente à Toulouse Polars du Sud, j'ai choisi de lire son premier roman, Par les rafales, une très bonne pioche.



Une rencontre réussie, une nouvelle auteure à suivre. Par les Rafales un roman noir animé d'un souffle puissant.

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Le Blues des phalènes

Dans l'Amérique des années trente, quatre destins nous emportent dans la tourmente de la Grande Dépression, alors que des millions de misérables se sont lancés sur les routes dans l'espoir d'un avenir meilleur : Milton a rompu avec sa riche famille de banquiers et d'industriels ; Arthur traîne son trouble et lourd passé de vétéran de guerre ; Pekka ne cesse de changer d'identité pour tenter d'échapper à sa triste condition ; l'adolescent Nathan s'accroche à qui il peut dans son errance à travers le pays.





Tout commence dans la ville canadienne de Halifax, lorsqu'en 1917, la collision entre deux navires, dont l'un chargé de munitions à destination de la guerre en Europe, fait sauter la ville en ce qui restera la plus puissante explosion d'origine humaine jusqu'aux bombes atomiques de 1945. Non contente de bousculer à jamais la destinée des rares survivants, la déflagration semble générer une onde de choc infinie dans la vie des personnages du roman, embarqués dans une inexorable glissade vers un malheur sans cesse réinventé.





En 1933, tandis que l'Exposition Universelle de Chicago vante un siècle de progrès pour la glorieuse Amérique, le pays touche en réalité le fond après quatre ans de crise sans précédent. Le chômage frappe un quart de la population et prive de toit des centaines de milliers de familles. Exploités dans d'infernales conditions, en particulier dans les vergers californiens, les ouvriers sont tentés de rejoindre des syndicats. Des marches de protestation s'organisent, comme celle, en 1932, des anciens combattants réclamant, en raison de la crise, le paiement immédiat de la prime qui leur était promise pour 1945. Crispés jusqu'à la paranoïa par la peur du communisme et du désordre intérieur, politiciens et suprémacistes blancs réagissent par la répression violente, tandis que racisme, antisémitisme et sympathies fascisantes viennent empoisonner un peu plus l'atmosphère explosive d'un pays englué dans le désespoir.





C'est une fresque foisonnante que construit, par touches impressionnistes, ce récit éclaté en multiples rebonds, dans le temps et entre ses personnages. De l'explosion de Halifax à la crise de 1929, en passant par les conflits armés et par la violence sociale, émerge l'impression quasi apocalyptique d'un espace de vie transformé en champ de désolation par des déflagrations en chaîne. Nul espoir ne vient éclairer ces destins, comme brisés dans l'oeuf et inexorablement martelés par le malheur. Une fatalité pesante les condamne : celle de l'indifférence et de la peur des plus riches et des plus puissants, anxieux du maintien de l'ordre de leur univers privilégié, au point de fraterniser avec les penchants les plus obscurs du racisme, du fascisme et de l'autoritarisme.





Nombreux sont les faits méconnus et saisissants qui viennent émailler cette reconstitution historique dense et impressionnante, servie par une narration fluide, incisive et engagée. Un très beau roman, terriblement noir, qui m'a donné envie de relire Les raisins de la colère.


Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Le Blues des phalènes

Ambitieux – Brillant – Déroutant.



Ambitieux

Valentine Ihmof est probablement la plus américaine des auteures françaises. Rien d’étonnant donc qu’après deux polars dont le souvenir me hante encore, elle ait choisi dans Le Blues des phalènes de s’attaquer à un pan sombre et méconnu de l’histoire US.



À travers les destins croisés de ses 4 personnages – Pekka, Arthur, Milton et Nathan – Imhof raconte la Grande Dépression vue par ceux qui la subirent plus qu’ils ne la traversèrent, bâtisseurs laborieux, exploités et oubliés, face B du rêve américain. Des personnages ayant en commun la rupture franche avec leur passé, leur famille, leurs espoirs et leurs illusions. Mais aussi le poids d’un meurtre…



Des personnages qui vont un temps se croiser à Halifax en Nouvelle-Écosse, port stratégique d’envergure mondiale meurtri par l’explosion générée par la collision de deux navires, dont le funèbre bilan ne sera surplanté que par Little Boy des années plus tard.



En près de 500 pages, Imhof travaille son sujet sous tous les angles pour rendre la copie la plus fidèle de ces années 30 de bascule, entre fuite incessante et répit de quelques mois de boulot pour quelques cents par jour ; entre promesse des bénéfices du progrès annoncé et luttes sociales pour ne pas les attendre trop longtemps ; entre relents tentateurs du fascisme européen en cours d’installation et chasse aux communistes devenus symboles à abattre.



Engagements dans les guerres du Commonwealth et de l’Europe, grande explosion, exposition universelle de Chicago, sculptures des Black Hills Moutains, prohibition, bataille de Washington, Bloody Thursday de San Francisco… La grande histoire, parfaitement documentée, se revisite, racontée par ceux qui la vécurent.



Et au-delà, la petite histoire d’une société américaine en attente du rebond, qui n’a de cesse que d’«agiter le fanal fumeux d’un espoir illusoire pour que d’autres phalènes viennent s’y brûler ». Ambitieux, très ambitieux.



Brillant

Valentine Imhoff devait certainement aimer les puzzles, assemblage de pièces diversifiées où seul l’ensemble final finit par faire sens. La construction du Blues des phalènes en témoigne, intelligente et brillante.



Elle travaille jusqu’à l’os chacun de ses personnages, dans une étude à 360° sans logique temporelle, où leurs propres pensées en dévoilent davantage que leurs actes, réussissant peu à peu à déployer une empathie du lecteur pas forcément acquise au début.



Milton qui a fui sa famille pour la guerre puis la vie solitaire et ne trouve l’apaisement que dans la peinture et le désert ; Pekka, Joséphine, Jane… aux multiples vies pour autant de changements de noms ; Arthur, tentant d’expier son passé sanglant dans la révolte et la lutte sociale ; et Nathan, Iowa Kid qui retrouve dans la communauté des bannis, le père qu’il n’a pas eu et l’espoir d’un avenir différent.



L’ensemble est porté, comme toujours chez Imhof, par un style évolutif au fil du livre : factuel dans le récit historique ; violent et cash dans les chapitres les plus sombres ; effrayant quand elle décrit Ragetown et les cloaques ouvriers ; délicieusement poétique et inspiré dès que la bride est lâchée.



« Parce que les hommes auront beau s’échiner à bricoler, calculer, cultiver, combiner, fabriquer, tant qu’ils peuvent, la nature aura toujours le dessus. Ils creusent des tunnels, elle sculpte des canyons. Ils construisent des immeubles, elle érige des montagnes. Ils créent des lacs et des canaux, quand elle a enfanté les fleuves et les mers ». Brillant, très brillant.



Déroutant

Alors forcément, la contrepartie de cette ambition et de cette construction brillante est un livre qui pourra parfois sembler déroutant dans certains de ses passages.



Se fiant de la ligne du temps et de la chronologie, Imhof balade son lecteur entre les époques, au cœur d’un même paragraphe parfois, le plongeant volontairement dans une sorte de tournis temporel nécessitant quelques efforts. Amateur de pageturners, passez votre chemin.



La multiplicité des thèmes abordés et la variation de place et d’importance qui leur est donnée (notamment à la fin), interpelle, amenant le lecteur là où il ne s’y attendait pas, dans une progression originale mais inattendue du livre.



Le Blues des phalènes ravira celles et ceux qui sauront lâcher prise et prendre la main de l’auteure pour se laisser embarquer dans son ambition, ce qui fut mon cas. Avec à la fin la certitude que je relirai ce livre un jour pour en saisir toute la richesse.
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Par les rafales

Un premier roman au style percutant et recherché, rythmé par la musique présente tout au long de la cavale et dont la playlist est fournie en rappel à la fin de livre.



Alex est un personnage libre, une héroïne baroudeuse, rock'n roll, destroy, qui vit comme elle donne des coups et de l'amour. Elle se décrit elle-même chtarbée, branque, avec un pète au casque.



Un genre de récit à part, sorte de road movie cinématographique, original et sympathique.

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Zippo

La scène de crime est insupportable. La victime a été immolée dans une allée du Lincoln Park. Le corps gît à moitié fondu sur un banc . L'odeur de chair brûlée reste prégnante au petit matin. Les lieutenants Mia Larstöm et Peter McManara de la Brigade criminelle de Milwaukee se présentent pour faire les premières constatations. Ce drame va réveiller des traumatismes enfouis dans les consciences des deux policiers. L'enquête avance laborieusement quand deux nouvelles victimes sont brûlées dans le parc… C'est au tour des Fédéraux de mener l'enquête pour mettre un terme à cette série macabre. Bon, je vais être franc, le récit reprend les codes du thriller et m'a vite semblé rébarbatif : des policiers américains parodiques, la plongée dans le monde du sado-masochisme, des scènes de sexe façon gonzo (il est question de « deep throat »), un psychopathe en attente de sa moitié qui purge ses tourments en aspergeant des jeunes femmes d'allume-feu… Vous l'aurez compris, « Zippo » est un texte plutôt hardcore. Il baigne dans la musique rock et - comme dans son livre précédent - Valentine Imhof donne sa playlist. Le lecteur peut faire de jolies découvertes dans les titres sélectionnés (le groupe Hüsker Dü dans mon cas). Si le roman ne sombre pas dans la série Z, c'est grâce à une écriture appliquée, à des références à la mythologie et à des intrigues croisées plutôt prenantes qui le rendent difficile à lâcher. « Zippo », un roman… «incandescent».



Je remercie Babelio et les éditions du Rouergue pour l'envoi de ce livre dans le cadre d'une Masse Critique.
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Zippo

4 personnages incandescents: le tueur, Éva, Mia, Peter



Notre tueur était soudeur " sous marin": il réparait les gazoducs, les fondations immergées des plateformes offshore. Métier à risque mais bien payé; adrénaline et virées enivrées avec ses potes. Une expédition en hélico: crash: tous ses potes crèvent: syndrome du survivant: blessé gravement dans sa chair mais surtout dans son âme. Déglingué, il traîne sa misère et sa folie : il vit toujours avec ses potes et l'hélico en flammes Puis il rencontre une jeune femme de 16 ans qui ne le juge pas , qui, au contraire est fascinée par ce personnage brisé, sombre .Il va la façonner, lui donner un prénom, en faire sa soumise mais plus il la domine plus il en devient dépendant; plus il la brûle avec son Zippo, plus il s'enflamme pour elle Mais leurs jeux glauques deviennent meurtres et elle s'enfuit. Persuadé qu'elle ne peut vivre sans lui il l'attend puis la recherche pendant 8 ans . Et il se met à brûler des jeunes femmes qui lui ressemble afin de l'attirer vers lui



Mia et Peter sont deux flics chargés d'enquêter sur ce tueur pyromane. Mia est une grande blonde d'origine suédoise, froide sèche , musclée (ex commando des marines): bloc ignifugé en apparence elle expurge ses tourments et sa fragilité le soir dans des clubs Bdsm.

Tous les matins, Peter raconte ses exploits sexuels de la veille à ses collègues , Qu 'est ce qu'un macho ne ferait pas pour cacher ses blessures?

Mais l'enquête piétine, aucune braise à souffler; ils sont déssaisis par le FBI

Mais ils continueront en solo et iront se brûler les ailes aux flammes de l'enfer



L'auteure, remarquée par son premier roman " Par les rafales" nous a concocté un roman noir pur jus! L'enquête est secondaire.

Chaque personnage lutte contre ses démons , contre un mal pour lequel ils sont plus ou moins responsables : ils ont tout tenté, à leur manière de remonter la pente, mais ils échoueront.



Superbe roman noir

Mais ce n'est que mon humble avis
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Le Blues des phalènes

Dans Le blues des phalènes, Valentine Imhof nous entraîne dans les pas de quatre personnages.

Au début des années 30, entre le Canada et les États-Unis.

Points communs de ces protagonistes ?

Une explosion à Halifax (Nouvelle-Écosse), le 6 décembre 1917. Leur futur va se jouer ce jour-là.

Nathan, l'enfant. Pekka, la femme et mère. Arthur, le vétéran. Milton, le fils d'une riche famille.

Tous ont des secrets et tous ont, du sang sur les mains.

C'est leur errance que nous conte la romancière.

Dans une Amérique de l'après-krach de 29.

Les entreprises ont fait faillite, le chômage explose et la violence avec.

Chacun fait ce qu'il peut pour s'en sortir.

Il faut se battre pour travailler,  pour avoir un toit, pour se nourrir, pour vivre.

Il faut surtout ruser pour échapper à un funeste destin.

Dans son roman, Imhof nous fait revivre cette terrible époque d'une Amérique au bord de l'implosion.

Il y a un air des Raisins de la colère dans son récit.  On y côtoie la même misère.

La montée de l'extrême droite, l'exploitation par un patronat qui ne s'embarrasse pas devant l'afflux de main-d'œuvre, la lutte ouvrière, la répression policière ou milicienne.

C'est une guerre fratricide au quotidien, qui voit les politiciens fermer les yeux sur les exactions et le gouvernement ordonner à ses troupes de faire feu sur ceux qui, hier encore, luttaient pour la liberté du monde.

Le blues des phalènes est un roman noir auquel cette musique s'accorde tout à fait.

J'ai eu du mal à trouver mes repères au début de ma lecture, mais une fois plongé dans l'histoire, l'autrice m'a accroché et j'ai eu du mal à la lâcher.

On s'attache aux personnages qui, bien que malmenés par la vie et conscients de leurs erreurs, assument.

Un roman bouleversant.
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Zippo

Des meurtres atroces sont commis sur des jeunes filles à Milwaukee. Mia, inspectrice à la criminelle et son partenaire Peter, sont sur l'affaire. Mais rapidement le passé de Mia l'entraine bien loin de là, dans le cerveau du tueur qu'elle connait bien parce qu'ellel'a connu lorsqu'ado, elle a découvert les joies du BDSM - du vrai pas celui de 50 nuances de G- , et que, sous l'emprise d'un homme mûr dont elle ne connaissait pas le nom, elle a commis l'irréparable.

Très excellent polar, loin des sentiers battus et loin de tout ce que j'ai lu dernièrement, ce thriller m'a happée et vraiment fait frémir: je n'ai pas pu le lâcher avant d'avoir fini, ça a été une journée marathon, avec juste ça en tête « comment ça va se finir cette histoire? ». Perversions et traumatismes, ce sont les maîtres mots d'à peu près tous les personnages de ce livre, et même si quelques fois on est un peu dégoûtés par la description des meurtres, ça va il n'y en a pas beaucoup (si on peu dire) et tout le suspens porte en réalité sur la noirceur des personnages, qui sont le vrai fond du polar.

En bref, je le conseille à tous ceux qui aiment les personnages bien torturés, les manipulateurs et les autres, et aussi les retournements de situation parce que jusqu'à la dernière page, on est bien ballotés…
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Par les rafales

Une pinte glacée à la main, tu te fraies un passage dans la foule à coups d'épaule pour t'approcher de la scène. Un groupe enchaine des morceaux de rock alternatif à plein volume. L'ambiance est survoltée. Odeurs de sueur, de bière éventée et de vieux cuir. Saisi par le rythme, gagné par un début d'ivresse, tu attends de finir ton verre pour te joindre au pogo. Cette atmosphère, tu la connais sûrement, tu l'apprécies peut-être, imprègne le roman de Valentine Imhof.



Alex, la protagoniste de « Par les rafales » est un être anéanti. Partie étudier aux Etats-Unis, elle décide de visiter la Louisiane. Déçue par le carnaval de la Nouvelle-Orléans qu'elle juge factice et trop touristique, elle sillonne les campagnes inondées de l'Etat en quête d'authenticité. Alors qu'elle se rend à une fête paroissiale perdue dans un bayou, elle se trompe de direction et fait une mauvaise rencontre. Tout bascule. La jeune femme est désormais meurtrie et traumatisée. Animée d'une rage meurtrière, elle fuit sans trouver de répit à travers le monde, pourchassée par des démons qu'elle a fait siens.



A travers le portrait de cette héroïne déjantée, l'auteure nous offre une immersion dans un monde cauchemardesque aux nombreuses influences : rock, alcool, mythologie, poésie, tatouages et voyages… La musique est omniprésente dans le récit et donne un écho à l'état d'esprit des personnages. Les titres évoqués sont repris dans une playlist en fin d'ouvrage de très bon goût : Tom Waits, The Jefferson Airplanes, Nick Cave, J.J. Cale, etc. le roman est imprégné de la mythologie nordique ; la protagoniste mêle notamment sa destinée à celle de Loki, le dieu destructeur, dont elle s'est fait tatouer le nom sur la nuque. Les références littéraires sont nombreuses et comme pour la musique, très bien choisies. Autre thème, celui du voyage. Et j'ai adoré le récit des virées à Gand, les bars undeground, les verres de oude jenevers, la bruine pisseuse, les pavés glissants… J'ai également aimé l'ambiance des îles perdues au coeur de l'océan, l'odeur de tourbe, les embruns, la minéralité et enfin la solitude et le sentiment d'être hors du monde qui ont des vertus salutaires.



Pour conclure, je me permets de paraphraser la présentation de l'éditeur : Valentine Imhof nous livre un premier roman incandescent, gorgé d'alcool, de rock et de littérature. Une très belle découverte.



Je remercie les Éditions du Rouergue pour cet envoi dans le cadre d'une Masse critique.

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Le Blues des phalènes

Valentine Imhof m'avait impressionné avec son précédent roman tout en noirceur, aussi envoutant que perturbant. J'étais assez impatient de me plonger dans sa nouvelle aventure.



Le récit ne suit aucune logique temporelle ou scénaristique. La narration est éclatée, parfois confuse et passe d'un protagoniste à un autre, d'une époque à une autre, sans véritable lien. Il faut donc vraiment s'impliquer dans la lecture pour appréhender la profondeur du sujet.



J'ai appris beaucoup de choses sur l'Histoire américaine, avec des évènements que l'on a peu relatés. J'ai découvert la terrible explosion d'Halifax et les grèves syndicales suite à la crise de 1929. Mais le but de l'autrice n'est pas dans les péripéties, il se trouve dans le ressenti des personnages. Ce sont des êtres lambdas et on vit les situations par leurs yeux et à travers leur esprit.



L'écrivaine veut nous parler d'un lieu et d'une période, par le prisme de ceux qui l'ont habités. En entrant dans le psychisme de ces hommes et de ces femmes, elle s'intéresse aux conséquences des grands drames sur la population. L'Histoire n'est qu'une toile de fond sur laquelle s'écrit le sort des petites gens.



L'atmosphère est morne, les quatre destins sont écorchés et malmenés par la vie. On évolue avec eux dans ce tunnel noir, en ressentant leurs tristesses, leurs désespoirs, leurs fatigues, leurs petites joies. On participe à ces destinées brisées par la dure réalité de l'époque.



L'autrice montre avec ce roman que son talent est protéiforme. Elle sait l'adapter à des récits complètement différents. Sa plume, d'une qualité supérieure et exigeante, produit à chaque fois son effet. Sur un rythme lent et obsédant, elle nous procure une approche sociologique qui fait appel à tous les sens. La lecture d'un livre de Valentine Imhof est une expérience que je conseille à tous ceux qui sont en recherche d'une littérature ambitieuse.
Lien : https://youtu.be/lAdSLohn_3I
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Zippo

Comme la couverture et le titre le laissent présager, ce polar est un mélange de feu et de latex. L’atmosphère est sombre et certaines scènes sont assez dérangeantes. L’univers de sadomasochisme et pyromanie entraîne parfois les enquêteurs dans des endroits et des situations glauques. La violence et la douleur sont donc omniprésentes. Mais sous la plume poétique de Valentine Imhof, elles flirtent parfois avec l’érotisme.



Tous les personnages ont un côté malsain. On découvre leurs penchants cachés dont Mia semble le déclencheur. Elle est l’étincelle qui met le feu aux poudres. Par où elle passe, les hommes ne s’en remettent pas. Elle le sait et utilise ses talents pour engendrer une vague de bouleversements qui lui permet de plus ou moins maitriser les évènements. Mais à jouer avec le feu, elle risque bien sûr de se brûler.



On suit alternativement tous les protagonistes de cette affaire. Chaque court chapitre nous renvoie à l’un d’eux. Ainsi, le puzzle se dévoile petit à petit devant nos yeux. Avec les révélations sur leur passé, les acteurs prennent forme et leurs actes changent de résonance. Leurs différentes décisions, basées sur leur histoire, vont emporter l’aventure dans des directions incontrôlables et créer une cascade de drames. On comprend alors que chaque être est défini par ce qu’il a vécu et par les cicatrices qu’il porte en lui.



Grâce à une écriture sensorielle, l’auteur arrive à nous passionner pour le destin de ses acteurs torturés malgré tous leurs défauts. C’est une lecture dérangeante et bouleversante, du noir pur jus ! J’ai le premier livre de Valentine Imhof dans ma Pile à Lire depuis quelques mois. Autant vous dire qu’après la lecture de ce « Zippo », je ne vais pas tarder à me jeter dessus. Cette auteure a un véritable talent et il faut la découvrir!
Lien : http://leslivresdek79.com/20..
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Stop

68 textes. Quelques 300 pages. 68 hommes et femmes pour jeter une bouteille à la mer, dire leur colère, leur amertume, leur désespérance.

Un combat, ou 10, ou 100... L'anthropocène devenu capitalocène et anthropocide; la folie guerrière qui jette ses filets pour prendre les dollars des marchands de guerre; l'ineptie d'empoisonner la terre au principe de nourrir les populations; l'injure faite aux majorités dans l'injonction de faire plus et mieux quand ils donnent quasiment tout; le mépris jeté à la face de jeunes qui n'ont d'avenir assuré que leur lendemain; l'abrutissement orchestré dans une virtualisation offerte comme un pis aller rassurant; la compétition stérile et injurieuse sans cirque mais nourris de pouces baissés...

68 textes, cela fait beaucoup de mots et pourtant si peu quand il faudrait reboiser les esprits de milliers de gens.

Mais peu de mots au carré, au cube, à la puissance de 1000 lecteurs, voilà que cela devient une marée, un tsunami.

Romanciers, poètes, dessinateurs, réalisateurs, journalistes, sociologues, ces hommes et femmes ont joué le jeu d'un appel lancé par Oliviet Bordaçarre. Ecrire pour marquer un Stop, pour dire la colère et la peur.

Bribes de réflexion, manifestes, poèmes, courtes nouvelles, ces textes empoignent le cœur, rallument l'effroi ou offrent un peu d'espoir. Mais tous sans exceptions, secouent la torpeur insouciante qui sait que la situation est grave mais veut croire que l'humanité, en bonne élève, poursuivra sa course, persuadée de l'impossibilité de son extinction.

Collapsologie, pourront penser certains, oublieux des chiffres qui disent chaque jour la disparition de nos voisins aquatiques, volatiles, férus de froid, ou de forêts luxuriantes.

C'est peut-être un coup d'épée dans un océan d'impossibles, mais il a le mérite d'exister.

Alors, je sais gré à chacun de ces hommes et femmes, sentinelles, qui posent des mots comme on gratte une plaie, pour qu'elle suppure, gangrenne, et qu'enfin on coupe le membre.

Qu'importe le temps qu'il nous reste. Toutes les civilisations se sont éteintes un jour, mais, sans doute pouvons nous gagner un peu de temps avant que, pour citer cette belle expression de Mouloud Akkouche, la planète ne baisse définitivement ses paupières.

Un grand coup de chapeau à l'éditeur, la manufacture des livres, qui a joué le jeu.

Et, cerise sur le gâteau, tous les droits du livre dont reversés à des associations et collectifs locaux qui, en fourmis travailleuses, œuvrent sans relâche pour faire leur part du colibri.
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Par les rafales

Valentine Imhof nous propose cette histoire d’une jeune femme aux plusieurs visages, Alex Fjaersten. Qui est-elle vraiment Alex, journaliste free-lance de 25 ans dont Anton, qui l’attend désespérément au Donjon - un bar de Metz- est tombé fou amoureux ? Car Alex a la bougeotte comme il si elle fuyait quelque chose ou quelqu’un. Tantôt à Metz, à Gand ou au nord des Ecosse dans les Shetland. La réponse est peut être à trouver dans son voyage un an plus tôt aux Etats Unis et notamment lors de son passage en Louisiane où elle a fait une très mauvaise rencontre qui va forger son destin et ses futures actions.

En tout cas, Alex était bien présente le soir du Up Helly AA en Ecosse, cette fête annuelle qui honore la culture viking où un drakkar plus vrai que nature finit carbonisé. Ce soir-là, un homme est mort assassiné. C’est la détective Kelly McLeish qui est chargée de cette enquête difficile. En effet, vu le nombre de touristes présents sur l’île, les recherches sont fastidieuses mais Kelly est entêtée et ne lâchera pas le morceau avant d’avoir abouti, histoire de faire la pige à ses collègues masculins.



Le rythme du roman tente de suivre le rythme effréné des pérégrinations d’Alex, en mouvement permanent. Quitte à laisser sur le carreau son amoureux dans ce bar rock de Metz.. Alex n’est en effet pas la femme d’un seule homme, elle trop éprise de liberté et de nouvelles découvertes. Liberté ? Son parcours ressemble de plus en plus à une fuite en avant. Et gare à celui qui serait trop entreprenant car Alex est une lionne qui sait mordre à mort. On lui a fait trop mal pour qu’elle se laisse faire sans réagir. Mais ses actes extrêmes ne sont pas sans conséquence, car les polices européennes sont à ses trousses..



J’ai rapidement très vite pensé à “Thelma et Louise”en lisant ce livre. Certes en plus noir et plus rock’n’roll mais le tempo comme l’un des éléments déclencheur sont dentiques , quant à la fin…

C’est très bien écrit, brut de pomme et sans filtre et cela rend d’autant plus difficile de lâcher Alex dans son parcours sauvage et chaotique.





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Par les rafales

Il suffit parfois d'un petit rien pour qu'une vie bascule...



Pour Alex, étudiante-pigiste passionnée de musique et de culture, ce sera une erreur d'itinéraire au coeur d'un bayou proche de la Nouvelle Orléans où elle s'aventure en quête d'un peu d'authenticité, pour fuir la carte postale qu'est désormais devenu le carnaval. Un mauvais choix de chemin, une intrusion involontaire en propriété privée, un fermier et son fils avides de sanction comme de chair fraîche : une orgie sexuelle contrainte et violente va laisser Alex à moitié morte dans la boue et la faire basculer dans l'errance. Avec un incessant goût de vase dans la bouche qui ne la quittera plus...



Après s'être vengée du père, Alex est désormais persuadée que le fils ne la lâchera pas, où qu'elle aille. De Metz à Nancy, de Gand à Anvers en passant par les Iles Shetland et Terre Neuve, elle fuit et tente sans grand succès de se réparer. Le corps, autant qu'il en soit possible, sous le dermographe lumineux de Bernd ; le coeur à petites doses, avec le patient Anton ; l'âme qui reste son bien le plus précieux, à l'aide de ses racines nordiques et du Dieu Loki qui lui donne esprit de vengeance et rage destructrice.



Le meurtres se succèdent, les flics s'activent, l'espace se restreint. Il faudrait maintenant plus qu'un petit rien pour que la vie d'Alex rebascule du bon côté de la force, que ce perpétuel goût de vase la quitte. À moins qu'une rafale...



Pour son premier roman, Valentine Imhof réussit avec Par les rafales, un polar original et nerveux, aux variations de rythme maîtrisées et guidées par les notes d'une playlist rock/punk/grunge/spleen qui colle parfaitement aux états d'âme successifs d'Alex et des autres. L'écriture est alternativement choc et hard comme un shot de Screech, puis posée et apaisante comme un dernier genièvre bu avant la fermeture du rade. Saisi dès le début, le lecteur entre rapidement en empathie avec Alex, reléguant presque le coeur de l'intrigue en sujet annexe.



Un livre prometteur, qui fait guetter le prochain avec intérêt !
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Par les rafales

Enorme coup de coeur pour ce thriller / roman noir ! Une histoire terrible sous fond de rock, pop voire punk ... une plume délicate, envoûtante mais vive qui donne des frissons ! Livre en 3 parties : ce qui est, ce qui fut, ce qui sera.

Vous l'aurez compris, la première partie est au présent. On rencontre notre personnage principal, alex. On comprend très vite que cette femme a subi des choses monstrueuses mais son caractère "punk" est surprenant ... Directement, on veut savoir ce qui s'est passé ! La deuxième partie, justement, nous l'explique ! On est plongé dans son passé et on comprend tout ... Enfin, la troisième partie est très étonnante. Si vous aimez ce genre, foncez les yeux fermés mais attention, il y a quelques scènes assez terribles ! Âmes sensibles s'abstenir !!!
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Le Blues des phalènes

La vie de chroniqueur n'est faite que de frustrations et de rendez-vous manqués avec des ouvrages qui défraient la chronique et que l'on n'a pourtant pas eu le temps de lire comme ce fut le cas avec Par Les Rafales (Rouergue/Noir 2018) de Valentine Imhof, un premier roman policier dont une partie de l'intrigue se situait à Nancy et qui avait bouleversé bon nombre de critiques. Second roman policier, Zippo (Rouergue/Noir 2019) prenait pour cadre Milwaukee aux Etats-Unis avec une parution beaucoup plus confidentielle mais qui suscitait le même enthousiasme auprès des amateurs. Entre Lorraine, terre d'origine de la romancière, et Etats-Unis où elle a séjourné à plusieurs reprises, Valentine Imhof enseigne désormais le français au lycée de l'île de Saint-Pierre, comme partagée entre deux territoires de prédilection qui s'inscrivent dans ses deux premiers romans. Détentrice d'une maîtrise en littérature et civilisation américaine, Valentine Imhof a également publié Henry Miller, La Rage D'écrire (Transboréal 2017) une biographie sur ce célèbre romancier, grand témoin critique de l'Amérique contemporaine qu'il décline tout au long d'une oeuvre jugée sulfureuse par une société puritaine qui ne lui fera aucune concession. Regard critique d'une Amérique qui la fascine, Valentine Imhof change de registre avec Le Blues Des Phalènes qui prend pour cadre une nouvelle fois les Etats-unis dans son ensemble avec un récit oscillant sur les registres de l'histoire, de l'aventure et du roman noir et qui se déroule durant la période sombre de la grande dépression des années 30 avec comme point d'orgue l'explosion de Halifax en 1917 qui fut la plus grande déflagration causée par l'homme avant les premiers essais atomiques au Nouveau Mexique.



Le 6 décembre 1917, une gigantesque explosion ravage la ville de Halifax en bouleversant le destin des rares survivants qui semblent poursuivis toute leur vie par le souffle de la déflagration balayant leur destinée. Comme marqués par cette malédiction, ils vont traverser une Amérique frappée par la Grande Dépression des années 30. Celle qui projète des millions d'affamés sur les routes en quête d'un avenir meilleur. Il y a Arthur, le vétéran de guerre qui ne se remet pas du souvenir des massacres dans les tranchées de la Somme et surtout du poids de crimes impardonnables qu'il a commis. Il y a Pekka qui change constamment de nom, qui endosse d'autres identités à chaque fois qu'elle débarque dans une nouvelle ville. Il y a Nathan, le fils de l'Explosion qui entame une vie de trimardeur, une vie d'errance en parcourant tout le pays à bord de trains de marchandises en essayant d'éviter les vigiles et leurs matraques. Et puis il y a Milton, le rejeton d'un famille richissime qui a renoncé à tout pour se retirer à Tip Top, une ville fantôme de l'Arizona. Du gigantisme de New-work à l'immensité des champs de la Californie et de ses travailleurs courbés, de l'exposition universelle de Chicago au barrage Hoover qui s'érige sur le sang des ouvriers, on suit ainsi le parcours de ces quatre âmes damnées qui se débattent dans le fracas d'un monde impitoyable.



Comme tout récit monumental, Le Blues Des Phalènes est un roman noir intense qui se mérite avec une structure narrative déconcertante qui ne manquera pas de bousculer le lecteur abreuvé de trames trop linéaires. A la manière d un compte à rebours, le récit se concentre sur chacun des personnages représentant une année de la Grande Dépression débutant en 1935 pour Milton puis se focalisant sur la période de 1933 pour Arthur avant de passer au déroulement de l'année 1931 pour Pekka et Nathan. Puis survient cette explosion de 1917 à Halifax qui rassemble l'ensemble des personnages avant d'être à nouveau projetés dans une temporalité qui s'inverse en retournant en 1932 pour suivre le parcours de Nathan, puis en 1933 en accompagnant Pekka du côté de Chicago suivi de 1934 pour s'attacher au destin d'Arthur découvrant les affres des travailleurs exploités en Californie avant de s'achever en 1935 dans la solitude du désert de l'Arizona dans lequel on retrouve Milton. La boucle est ainsi bouclée et l'on observe donc une espèce d'éclatement, d'explosion de cette arche narrative, symbole de la déflagration de Halifax, qui contribue au malaise d'une époque trouble où l'on croise une multitude d'individus déroutants qui s'inscrivent dans cette fresque historique à la fois méconnue et brutale de l'Amérique que Valentine Imhof dépeint au gré d'un texte incandescent et flamboyant. Outre l'aspect d'une narration singulière, il faut également souligner la beauté de cette écriture dense et extrêmement travaillée nous permettant de nous immerger dans un texte très fluide qui nous entraîne, sans crier gare, dans les méandres d'une intrigue où la réalité se conjugue constamment à la fiction sans que l'on y prenne vraiment conscience. Aux côtés de ses quatre personnages de fiction que sont Milton, Arthur, Pekka et Nathan, on côtoie des individus méconnus de l'histoire contemporaine des Etats-Unis que sont John Spivak, journaliste communiste qui s'attache à dépeindre les conditions de vie des ouvriers, Gutzon Borglum le sculpteur du Mont Rushmore affilié au Klan, Robert Allerton philanthrope issu d'une famille richissime de Chicago, Winnie Ruth Judd une meurtrière qui défraya la chronique judiciaire sensationnaliste de l'époque et Robert Ripley reporter et dessinateur qui organisa des expositions de freaks pour l'exposition universelle de Chicago. C'est l'occasion pour Valentine Imhof de dépeindre les contradictions d'un pays partagé entre deux idéologies que sont le communisme et le fascisme et des conflits qu'il ont engendré notamment au sein d'une classe ouvrière surexploitée avec des méthodes telles que le taylorisme et dont on prend la pleine mesure au gré de scènes parfois dantesques abondamment décrites tout comme le ressenti de ces personnages poignants qui évoluent dans cette période chaotique en supportant constamment le poids d'une culpabilité dramatique qui les détruit peu à peu. Tout cela nous donne une fresque foisonnante d'un pays ravagé par la misère qui semble se consumer de l'intérieur au gré de ses contradictions et de ses clivages que Valetine Imhof restitue avec la précision d'un texte ambitieux qui comblera les lecteurs les plus exigeants qui auront sans doute quelques réminiscences des romans de London, de Steinbeck et de Dos Passos.



A la fois âpre et majestueux, Le Blues Des Phalènes est une éblouissante reconstitution de cette époque trouble de la Grande Dépression que Valentine Imhof décline au gré d'un récit intense et engagé qui nous rappelle que l'Histoire est un éternel recommencement et que les erreurs du passé ne font que renforcer celles du présent.



Valentine Imhof : Le Blues Des Phalènes. Editions du Rouegue/Noir 2022.



A lire en écoutant : Georgia Lee de Tom Waits. Album : Mule Variation. 2017 Anti.
Lien : https://monromannoiretbiense..
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Par les rafales

Une histoire choquante, marquante, perturbante dont je ne veux strictement rien dévoiler, laissez-vous juste emporter par

Une bande-son ahurissante « une musique de route, pour trajets de nuit, quand celui qui conduit devient le gardien du sommeil des autres, endormis confiants, dans la voiture »

Des images sensorielles en pagaille, coriandre, combava, Lagavulin,

Des références qui vont d'Agrippa d'Aubigné à Bukowski Capote et Twain en passant par Béatrix Potter, l'Olympia de Manet, des Georges de la Tour, le jardin des délices de Bosch, Un tramway nommé désir, Marlon Brando et George Romero, bref

« Une mosaïque littéraire dont les éléments, pourtant disparates, s'imbriquent parfaitement. »

Cinq étoiles sans hésiter

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Zippo

Ouh là... quelle lecture !! Elle aura bien habitée une nuit complète d'insomnie... Ou bien, le contraire... m'aurait-elle fait faire de l'insomnie. J'en ai aucune idée... mais bon, le principal, c'est que j'ai tout aimé dans ce roman. C'est proche du coup de coeur. Un tueur en série qui sévit à Milwaukee. Sa particularité : il brûle vivantes ses victimes qu'il trouve dans un bar sado-maso. On comprends vite qu'il cherche sa disciple qu'il a trouvé 8 ans plus tôt et qui est partie du jour au lendemain. Toutes les autres filles ne sont que de faibles copies d'elle. Cette fille, on le sait bien rapidement, c'est Mia, qui est maintenant policière dans la ville et qui enquête sur lui. Nous apprenons également rapidement que le tueur n'est pas sain d'esprit, souffrant d'un SSPT, suite à un grave accident professionnel. Seul survivant où il a perdu ses 7 collègues. Bref, une histoire bien tordue comme je les aime. Avec des personnages sombres et très bien développés... Et une très bonne finale. J'ai passé un super moment de lecture (même si ma nuit fut plus que courte).
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Le Blues des phalènes

Dans ce roman comme pour notre cosmos tout commence par un Big Bang. L’effroyable explosion d’Halifax en 1917 est au cœur du récit , elle projette les quatre personnages principaux Milton,Arthur,Pekka et Nathan Nathan comme des météores aux quatre coins de l’Amérique . Leur trajectoire ,leurs avatars permettent à Valentine Imhoff d’éclairer les pages sombres de ces années de l’entre-deux guerres et ,Dieu sait qu’il n’en manque pas : exploitation forcenée des humbles , misère des « hobos » , répression des syndicalistes ,des anciens combattants , des indiens , sympathies fascistes d’une partie de l’opinion avec comme seule contrepartie la fraternité et l’entraide des misérables La romancière a su combiner les destins individuels de personnages attachants et complexes à une fresque historique où passent des échos de Steinbeck ou London . Belle lecture.
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Le Blues des phalènes

C’est l’Amérique du Nord dans les années 30, les USA et le Canada. Illusions, désillusions, misères diverses, vétérans méprisés, hobos, prostituées, dockers en grève, proprios cyniques et j’en oublie. On y est, on les touche, on les sent. Mais c’est beaucoup trop long et parfois insupportablement bavard.



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