Citations de Volodia Petropavlovsky (42)
Chaque rencontre sublime ce voyage, mais chaque séparation l'alourdit.
Je quitte une Amérique citadine qui me fascine pour une Amérique sauvage qui m'envoûte.
Je cours vers le danger même si je fais tout pour l'éviter au dernier moment : le frisson n'est agréable qu'une fois dépassé.
Les routes du Grand Nord balafrent la taïga de leur long tracé rectiligne. Elles relient les villages par la voie la plus courte.
La brume matinale flotte sur les eaux dans une ambiance mystérieuse.
La solitude que je vis au quotidien, bien que consentie, est le meilleur chemin vers la sociabilité. Elle m’incite à rechercher la moindre trace de présence humaine. Une simple cabane abandonnée ou un bruit de moteur me rassurent par leur présence. Je parle avec chaque inconnu disposé à échanger quelques bribes avec ce curieux personnage à l’accent français que je suis.
Le crépuscule dessine dans l'horizon les sombres contours acérés des sommets. Grâce à l'obscurité, la lune se dévoile pour la première fois depuis mon arrivée en Alaska.
La Tanana n'en finit pas de me surprendre, passant sans transition de l'esthétisme à la violence.
Passer du rire aux larmes, de la joie à l'anéantissement est l'apanage de tous les voyageurs solitaires.
Je n’ai parcouru qu’un tiers de la route alors que l’expédition me semble avoir débuté depuis une éternité. J’éprouve le grand paradoxe du voyageur, celui qui me donne l’impression d’être parti hier mais d’avoir été depuis toujours sur l’eau, celui qui me rend heureux d’être là autant que nostalgique de ma vie d’avant. Le lendemain, je quitte la maison fantôme en repensant à la question de l’homme au chapeau de Nenana : « Pourquoi faites-vous cela ? » On me l’a posée des dizaines de fois. La réponse m’échappe toujours. En guise d’explication, quelques bribes glanées au fil de l’eau : l’Amérindienne aux poissons, le crépuscule sur Healy Lake, le regard de Patrick, les trois oursons et le rire de Bob...
Le risque. Il est inhérent à l’aventure. Certains vous diront même à la vie. Ils argumenteront que n’importe quelle conduite dangereuse ne l’est pas plus que d’embarquer dans une voiture ou de traverser la rue à pied. C’est stupide dans un sens et très juste dans l’autre. Si le danger est banal, c’est son acceptation qui fait débat. J’ai choisi de traverser l’Alaska de la même manière qu’un acrobate téméraire évolue au-dessus du sol : sans filet. J’ai l’impression d’être guidé par le principe de ne prendre aucune précaution mais j’en suis conscient et cela me convient. Je cours vers le danger même si je fais tout pour l’éviter au dernier moment : le frisson n’est agréable qu’une fois dépassé.
Dimanche après-midi, les allées de Nenana sont aussi désertes qu'avant la fatidique fusillade d'un western.
Le risque. Il est inhérent à l'aventure.
Ma Bourgogne natale est vallonnée de collines verdoyantes entre lesquelles coule un fleuve paisible et sauvage jusqu'à l'Atlantique. Ses eaux sont cristallines aux beaux jours et ses abords parcourus de pêcheurs et de promeneurs.
Vert, beige, bleu : j'évolue dans un triptyque qui ne quitte jamais mon regard.
La lumière étincelle sur les feuilles encore humides. Elle éclaircit la rivière boueuse et colore le ciel d'un azur sans pareil.
Un bon pêcheur de truites est capable de savoir où se trouve le poisson à la seule observation du courant.
Du sommet des collines au creux de la plaine, les arbres épousent les moindres courbes du relief et viennent mourir dans les eaux tourmentées de la Tanana.
L'Alaska fait partie de ces lieux mythiques qui se vivent d'abord sur les pages du National Geographic.
Incipit :
Franchir une frontière n’est jamais anodin. Surtout chez l’Oncle Sam où, dès la démarcation entre le Canada et l’Alaska franchie en avion, consigne a été donnée par l’équipage de « ne pas avoir d’attitude suspecte et ne pas former de groupes autour des toilettes ». Wilderness ou pas, l’administration a autant de prise dans le Grand Nord que dans n’importe quel autre État américain.