AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Xiaolong Qiu (479)


Chen tourna les yeux vers les montagnes aux sommets découpés contre le ciel assombri. Il crut entendre le murmure d'une cascade et le frissonnement des pins au fond de la vallée. Il aperçut au loin une faible lumière. D'où pouvait-elle venir ? La lueur brilla encore une seconde avant de disparaître.
Des milliers d'années plus tôt, un autre homme - le juge Ti peut-être - s'était tenu là, comme lui, face aux montagnes enveloppées de nuit, sous le scintillement des étoiles.
Les mêmes montagnes, la même lune, le même vent. La même question, peut-être. Mais laquelle ?
Chen prit une profonde inspiration et tenta de disperser la brume qui planait sur son esprit. Il n'était pas un fonctionnaire de haut rang comme le juge Ti qui avait su tirer son épingle du jeu dans la sphère politique impitoyable et complexe de la dynastie Tang.
Commenter  J’apprécie          40
- Vous lisez quoi ?
- Une enquête du juge Ti. Un roman très intéressant. C'était un juge incorruptible de la Chine ancienne, l'antithèse des juges Jiao de notre société actuelle."
Il prit le livre et le lui tendit.
"Ah oui, j'ai lu plusieurs romans de lui, annonça-t-elle. Dans des traductions chinoises, bien sûr.
- Ah bon ? Et qu'en avez-vous pensé ?
- Du juge Ti ? C'était un mélange entre un maire, un magistrat et un Premier Ministre. Rien à voir avec ce qu'on entend par le terme aujourd'hui.
- Vous êtes très cultivée.
- Non, pas vraiment. J'ai fait des études d'histoire, c'est tout."
Commenter  J’apprécie          40
Le ciel était clair, sans le moindre nuage, mais après tout, il n'était pas si étonnant qu'un vieil homme en habits neufs ait décidé par précaution d'emporter de quoi se protéger de l'orage.
"Vous comprendrez bientôt pourquoi j'ai pris ce parapluie de couleur vive", expliqua Vieux Chasseur avec un sourire énigmatique digne d'un acteur sur le point de révéler un secret incroyable qui fera basculer l'intrigue.
En entrant dans le parc, ils tournèrent à droite et s'engagèrent sur un sentier arboré jalonné de bancs peint en vert. Le jardin avait rétréci au fil du temps, grignoté par les gratte-ciel et les stations de métro, mais il ravivait toujours en Chen des souvenirs et des émotions ambigus.
Vieux Chasseur pointa du doigt une foule assez dense au sortir d'un virage. La plupart des gens étaient âgés, les cheveux gris ou blancs. Assis sur des tabourets ou accroupis, ils criaient comme devant les étals d'un marché.
Chen remarqua alors qu'ils avaient tous des parapluies ouverts devant eux sur le sol. On aurait dit une poussée surréaliste de champignons colorés après une pluie printanière.
_"Vous voyez, expliqua Vieux Chasseur en s'approchant d'un des parapluies. Ils font office de stands. Des descriptions et des photos de célibataires sont scotchées dessus. Les parents s'efforcent d'attirer l'attention et de fournir un maximum de détails pour trouver des maris et des femmes à leurs enfants.
- Et ils peuvent aussi servir en cas de pluie. Je vois. C'est très malin. Cette pratique n'est pas sans rappeler la tradition des mariages arrangés dans la Chine ancienne, n'est-ce pas ?
- Si vous voulez en savoir plus sur les coutumes de la Chine ancienne, vous devriez écouter les opéras de Suzhou. On y parle en détail des rites de mariage, du rôle des entremetteuses, de la divination, de l'horoscope chinois et de l'importance des dates de naissance des futurs mariés dans le choix de la date propice à l'union..." Vieux Chasseur s'emballait. "De nos jours, les mariages arrangés par les parents ne reposent que sur des critères financiers. Que voulez-vous, c'est tout ce qui compte maintenant. "
Commenter  J’apprécie          30
L’impératrice voyait en Ti un homme honnête, droit et digne de confiance, mais elle avait été vexée par ses arguments pointilleux basés sur des principes confucéens poussiéreux.
Commenter  J’apprécie          10
Comme le président Mao l’a dit récemment, c’est une invention bien connue de conspirer contre le Parti avec des romans.
Commenter  J’apprécie          130
Tous deux entraînèrent le camarade Jun dans un petit restaurant de boulettes de la rue de Zhejiang. Là, après un bol de soupe aux boulettes de crevettes émincées, un plat de tranches d’oreille de porc et deux bouteilles de vin de riz gluant agréablement tiédi, le camarade Jun révéla que les ennuis de monsieur Ma étaient dus à un livre : un roman en langue étrangère à propos d’un docteur du nom de Zhi Vag – un nom pas très chinois, mais, après tout, ces intellectuels inventaient parfois des noms bizarres.
Commenter  J’apprécie          60
Les policiers étaient en droit d’arrêter quelqu’un sans donner d’explication ni montrer de mandat. C’était cela, la dictature du prolétariat. Les autorités du Parti décidaient de tout, de toutes les affaires. Pas d’avocat, pas de jury, et pas de tribunal.
Commenter  J’apprécie          40
Après avoir quitté Vieux Chasseur devant la maison de thé, Chen marcha dans la rue de Nankin Ouest au milieu d'une forêt grise et oppressante de gratre-ciels bétonnés. Il discerna soudain le piaillement d'un moineau solitaire, un son minuscule de plus en plus rare dans la mégalopole tonitruante.
La ville s'éveillait, engourdie, dans les relents de bière d'un bar fétide dont un ouvrier astiquait les fenêtres. Comme chaque jour, elle se parait de neuf et d'ancien. Un vieil ivrogne traînait dans la rue, frappant sa poitrine décharnée, pareille à une vieille planche à laver, en braillant : "La Révolution culturelle est de retour!"
Commenter  J’apprécie          20
La Villa Moller faisait partie des hôtels prestigieux de Shanghai et avait été minutieusement préservée à cause de son histoire.
Moller, un homme d’affaires juif qui avait fait fortune à Shanghai dans les courses de chevaux et de chiens, avait lancé dans les années trente la construction d’un château féerique pour satisfaire le rêve de sa fille. D’inspiration européenne, la villa avait subi l’influence du long séjour oriental de son propriétaire, comme en témoignaient les dalles cirées, les briques de couleur, et même la fenêtre du grenier en forme de tigre assis typique de certaines maisons shikumen de Shanghai. Un délire architectural.
Commenter  J’apprécie          20
Apparemment, l’affaire était politique. Un membre du gouvernement pris dans un scandale public trouvait la mort au beau milieu de sa détention. Tout cela ouvrait la porte à un vaste horizon de spéculations.
Commenter  J’apprécie          20
– Mais je ne sais rien d’autre sur l’affaire.
– Eh bien, vous venez de nous montrer que vous en savez assez sur les circonstances. C’est important, très important.
Mais Chen ne possédait aucune information, il n’avait fait qu’entrevoir un gros titre dans un journal local. Ce n’était que par curiosité naturelle qu’il avait retenu l’expression « chasse à l’homme ». Une histoire de traque sur Internet, c’était tout ce qu’il savait. Un nombre incalculable de termes empruntés au réseau avaient surgi dans le langage courant et leur sens restait souvent à peine intelligible pour des non-initiés comme lui.
Commenter  J’apprécie          10
Il se souvenait.
– Zhou. Une chasse à l’homme sur Internet. À cause d’un paquet de cigarettes.
– Un paquet de 95 Majesté Suprême, précisa Li. Une photo publiée sur Internet a lancé la chasse à l’homme et fait éclater un terrible scandale. Bon, nous pouvons vous épargner les détails, conclut-il sans délai. Vous assisterez la brigade criminelle.
Commenter  J’apprécie          10
. Vous êtes occupé, nous le savons bien, c’est pourquoi nous laisserons la brigade criminelle se charger de l’enquête – en majeure partie. Mais vous agirez en tant que conseiller spécial. Nous montrerons ainsi l’attention particulière que nous accordons à ce dossier. Vous êtes le vice-secrétaire du Parti, tout le monde le sait.
Chen écoutait en silence. Il alluma une cigarette et inspira profondément.
Commenter  J’apprécie          10
– Vu la position de Zhou et le caractère sensible de l’affaire, nous avons été chargés d’enquêter et de conclure qu’il s’agit tout simplement d’un suicide, résuma Li de façon mécanique, comme s’il récitait soudain un extrait du Quotidien du peuple au milieu de la conversation. La situation est complexe. Le Parti compte sur notre efficacité.
– Si Liao et Wei sont déjà sur le coup, pourquoi m’avez-vous appelé ?
– Vous êtes le plus expérimenté du bureau, vous devez y aller.
Commenter  J’apprécie          10
Les autorités considéraient le shuanggui comme une ramification, et non comme une aberration, du système judiciaire. D’après Chen, ce type de détention permettait d’empêcher que des détails compromettants pour l’image du Parti ne soient révélés puisque les enquêtes se déroulaient dans l’ombre et sous l’œil vigilant des autorités.
Bref, le shuanggui n’était pas du ressort de la police.
Commenter  J’apprécie          10
De hauts fonctionnaires du Parti disparaissaient régulièrement sans qu’aucune information ne soit livrée à la police ou aux médias. En théorie, les cadres pris dans la zone d’ombre extrajudiciaire du shuanggui étaient censés se rendre disponibles pour une enquête interne avant d’être relâchés. Mais le plus souvent, ils passaient devant le tribunal des mois, voire des années plus tard pour être jugés et condamnés selon un verdict établi à l’avance.
Commenter  J’apprécie          20
Le shuanggui était encore un exemple criant du socialisme à la chinoise. Sorte de détention illégale initiée par les départements de contrôle de la discipline du Parti, cette mesure venait répondre au phénomène de corruption massive propre au système de parti unique. À l’origine, le terme signifiait « double précision » : un cadre du Parti accusé de crime ou de corruption était détenu dans un endroit défini (gui) pendant une période déterminée (gui). En dépit de la constitution chinoise qui stipulait que toute forme de détention devait être conforme à la loi votée par l’Assemblée nationale populaire, le shuanggui n’exigeait ni autorisation légale, ni durée limitée, ni aucun protocole établi.
Commenter  J’apprécie          10
Pour le journal, la poésie ne représentait plus qu’un bouquet de fleurs en plastique oublié dans le coin d’un palais de nouveau riche.
Commenter  J’apprécie          10
– Bonjour, présidente An, salua-t-elle avant d’adresser à Chen un large sourire. Vous êtes le camarade inspecteur principal Chen, n’est-ce pas ? J’ai lu vos poèmes. Vous avez écrit pour nous.
– Et vous êtes…?
– Je m’appelle Lianping, je suis journaliste au Wenhui et j’ai été chargée de superviser temporairement la rubrique littéraire. J’espère que vous continuerez tous les deux à soumettre vos productions à notre journal.
Elle leur tendit une carte de visite sur laquelle on pouvait lire sous son nom : La numéro un des journalistes financiers.
Intéressant. C’était la première fois qu’il voyait un titre pareil sur une carte de visite. Enfin, sa requête n’était pas désagréable.
– Yaqing est en congé maternité. J’occupe son poste pendant son absence. S’il vous plaît inspecteur principal Chen, ajouta-t-elle, envoyez-moi vos poèmes.
– Avec plaisir, si j’ai le temps d’en écrire.
Commenter  J’apprécie          10
Un bref silence dans leur conversation fut rempli par le chant d’un grillon, un peu en avance sur la saison.
Chen leva les yeux et remarqua une jeune femme qui s’approchait d’eux à pas légers.
Si mince, si souple, elle n’a pas quatorze ans
Pareille à un bourgeon de cardamome au début du printemps.
Elle n’était sans doute pas membre de l’Union car il ne l’avait vue à aucune réunion de l’association.
Commenter  J’apprécie          10



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Xiaolong Qiu Voir plus

Quiz Voir plus

Inconnus

"Le bonheur est parfois caché dans l'inconnu". Qui est l'auteur de cette citation? Indice: 💃🏽

Jean d'Ormesson
Victor Hugo

10 questions
22 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}