« Mon très cher Père,
J’ai mis du temps à répondre à ton dernier courrier, et je m’en excuse. Je suis très prise par les filles, mes cours, la maison à tenir seule en l’absence de Jean. J’ai également été très perturbée ces temps-ci et il n’y a qu’à toi que je puisse confier l’objet de mon inquiétude.
Il s’agit d’Anne… Elle est encore très jeune mais j’ai de fortes craintes à son sujet. Si j’ai refusé de le voir jusqu’à présent, il apparaît désormais indéniable qu’elle a le… don, comme Mère… J’ai très mal réagi quand elle a cherché à m’en parler et je l’ai renvoyée dans les cordes avec une violence que je regrette… Je ne sais pas quoi faire, Père. J’ai essayé, depuis, de lui dire de ne pas s’inquiéter, de ne pas y prêter attention, qu’elle était juste un peu trop sensible. Mais, au fond de moi, je sais très bien ce qu’il en est. Je l’ai laissée dans un état de confusion totale sans parvenir à mettre des mots sur ce que je lui ai désigné comme étant « une sorte de folie » ! Je m’en veux tant. Je ferai tout ce que je peux pour l’en débarrasser. Depuis, je sens de sa part une réelle défiance ; elle s’est refermée comme une huître, refusant, désormais d’aborder le sujet… »
La lettre était restée inachevée.
‒ Mais c’est quoi « ce don » ? bredouilla Émilie.
Chez nous, on a instauré un système de médiation et ça marche plutôt bien. Le but est d'y améliorer l'ambiance en incitant les élèves à régler par eux-mêmes les différents conflits qui peuvent surgir au quotidien.
"Ça me fait ça chaque fois que j'entre dans une librairie. Je me dis qu'une vie ne suffirait pas pour lire tous ces livres et cela m'émeut terriblement."
Et là, soudain, je sais à quoi va me servir mon cahier : je vais y déverser tout ce que j'ai sur le cœur et qui s'y est accumulé ces derniers jours.
Je m'élance à la recherche de Ludivine et Zaïra, mes meilleures amies.
.....................
Alors que je m’apprête à l'embrasser, Ludivine me repousse carrément et Zaïra éclate de rire tandis que la nouvelle s'écrie :
-- Ah, c'est elle la rouquine !
-- Je m'appelle Mylène, lui rétorqué-je.
-- Elle, c'est Mona, notre nouvelle amie ! fait Zaïra en me lançant un regard mauvais.
J'en reste interdite, clouée sur place.
-- Vous venez, les filles ? leur dit Mona. On bouge, ça pue ici !
- Alors ? lui demande sa sœur sur le chemin du retour.
Momo soupire. Comment trouver les mots pour décrire cet après-midi de rêve ? Monsieur Edouard aurait su, lui. Momo réfléchit. Il sait que les mots doivent toujours être choisis avec soin.
- Alors ? insiste Fatima. C'était comment ?
- Attends, je réfléchis.
Fatima sourit. Décidément, elle se demande d'où est sorti ce petit frère pas comme les autres.
- C'était éphémerveilleux, Fatima, finit-il par lui confier.