Citations de Yolaine Destremau (28)
À la première gifle, il faut partir. Et parfois il est déjà trop tard. C’est ce que j’ai appris, bien après. Mais l’emprise avait planté ses crocs dans la matière gélatineuse de mon cerveau, doucement, presque gentiment, implacable et irrémédiable, et n’allait plus me lâcher. Ainsi que l’amnésie, ou le déni, sa fidèle compagne.
La fascination exercée par l'art existe de tout temps. Les œuvres d'art sont admirées, et donc convoitées. Rien de nouveau sous le soleil. Mais voilà que les vols ont pris une ampleur pandémique parce que la cote des objets a augmenté de manière spectaculaire au cours des dernières décennies, aiguisant ainsi la cupidité et la vénalité.
Beaucoup de musées et d'institutions qui possèdent des trésors de provenance étrangère ne se montrent guère enthousiastes à l'égard de toute loi qui les empêcherait d’accroître leur collection. La police, elle, considère que son rôle est plutôt d'arrêter les malfaiteurs que de récupérer les objets disparus.
L'auteur du cambriolage, Robert Mang, avait un dossier judiciaire vierge et nulle difficulté financière. C'est lors d'une visite au musée de Vienne qu'il avait conçu son plan. Il était expert en systèmes d'alarmes.
Comme il n'y a pas mort d'homme, le trafic d'art n'est pas considéré comme dangereux.
On ne frappe pas par amour. On ne tue pas par amour. Il n’a pas de pouvoir, seulement dans ta tête . Et quand tu as peur de lui c’est lui qui gagne.N'oublie jamais que tu es libre.
Apprendre à maitriser le silence. C'est la marque des grands. Il n'y a pas de meilleure façon de prendre possession de la parole que de commencer par se taire pour se faire entendre. Je me redresse. Je suis prête.
- Bonsoir, c'est pour déposer une main courante.
Elle continuait de me fixer, ni gentiment, ni méchamment, juste indifférente. Puis son regard s'est levé vers une pendule sur le mur, qui indiquait 17h28, et s'est reposé sur moi. Elle a ignoré mon visage tuméfié, mes doigts bandés, ou elle ne les a pas remarqués, et elle a annoncé:
-On ferme. A 17h30.
J'étais cloué sur place. Elle a soupiré et a répété, de la même voix morne:
- On ferme. Il est 17h30.
Depuis, j’avais repris des forces, et avec celles-ci, une capacité à m’arranger avec la réalité, un sacré talent pour le mensonge. C’est ce qui se dit des gens qui souffrent d’une addiction: leur disposition à mentir. Mon addiction était Abel.
J'ai choisi ce métier pour connaître l'âme humaine. Je voulais être avocate pour me coltiner avec la noirceur du monde, des hommes. Voir de quoi j'étais capable.
J'ai été servie.
Il me dépouillait, pour me prouver que je ne valais rien. Les crocs insidieux de la dévoration s'enfonçaient un peu plus chaque jour .
Maintenant je sais, c'était juste l'emprise qui grignotait la matière. Et elle se régalait. De temps à autre elle se calmait, m'octroyant un peu de répit,puis elle reprenait son travail de coléoptère,déposant ses larves et ses œufs dans les moindres sillons de mon cortex.
On me demande enfin de quoi il s'agit. Dépôt de plainte pour violences conjugales. Asseyez-vous, on fait passer en urgence les vols de portable, avant vous.
Car non, je ne suis pas une femme battue. Pas moi. Je repousse cette idée avec force. Je n'ai pas le profil type, je ne suis pas née pour ça. Je refuse qu'on me mette dans cette boîte, celle des victimes. Je n'aime pas les victimes, je n'aime que les héroïnes.
On ne frappe pas par amour. On ne tue pas par amour. Il n'a pas de pouvoir, seulement dans ta tête. Et quand tu as peur de lui, c'est lui qui gagne.
N’oublie jamais que tu es libre.
N'oubliez jamais votre rôle de facilitateur. L'importance de la médiation. Il faut trouver un accord sur un désaccord. Rechercher en permanence à rassembler les partis, et non à les diviser.
Retrouver des sensations oubliées. Dormir. Avoir faim.Se réveiller le matin, au bord de l'eau , une mer calme ,sans vagues, sereine, sans être agressée immédiatement par des remarques pénibles, ou juste une indifférence blessante. Ne plus sursauter au moindre bruit , à la sonnerie du téléphone, aux clés dans la porte. Ne plus trembler,ne plus jamais avoir peur.
Entre mes cils, je vois l'horizon saupoudré de gouttes de lumière. La mer me lave, me purifie, peut-être aura-t-elle même le pouvoir de cicatriser mes plaies. (début page 120)
Avec la caresse du soleil, mes douleurs s'estompent, celles qui semblaient inscrites dans mon corps à jamais, les coups reçus à l'épaule, au cou, au dos, au genou, à la mâchoire... (page 119 ligne 8)
[...] Éloïse était la preuve vivante que même si on a reçu peu d'amour, on est capable d'en donner. (page 21 ligne 4)