C'est d'un de ces dimanches de mes sept ans que date mon exil loin du monde que j'aimais. Comme un navire qui quitte le port pour la haute mer, j'ai été arraché au havre paisible de l'enfance pour être jeté dans les eaux tumultueuses de la vie adulte.
Colombo, avec son beau port à mi-chemin de l'Orient et de l'Occident, était l'un des grands carrefours du monde maritime des années vingt. Il jouissait par conséquent d'une immense importance dans le commerce de l'Empire britannique. Pourtant, la ville ne connaissait pas le vacarme d'un chantier perpétuel, le tohu-bohu qu'on associait aux autres grandes cotés d'Orient, Singapour, Shanghai ou Bombay. Ce qui frappait d'abord, à Colombo, c’étaient les arbres et l'eau. La ville s'adonnait d'un côté de l’océan et ses habitants n’étaient jamais très loin de l'odeur salée des embruns ni de la brise rafraîchissante de la mer. Le vaste lac Beira s’étendait au milieu de la ville et ses affluents serpentaient dans l’agglomération pour former ici et là d'autres petits lacs. Des frondaisons d'une incomparable beauté les escortaient : des palmiers de toutes sortes, les massifs de fleurs écarlates des flamboyants, les feuilles ondoyantes des plantains. Les rues de Colombo étaient bordées de part et d'autre par d'immenses arbres qui les ombrageaient. Le plus répandu s'appelait le suriya, dont les fleurs abondantes pleuvaient en un tapis jaune primevère sur les trottoirs. Le quartier commercial de la ville lui-même, le Fort, était dote de larges rues aux bâtisses imposantes et blanchies à la chaux. Les bureaux et les magasins étaient vastes, souvent ornés de vérandas en colonnades pour abriter les passants du soleil.
Le seul quartier de la capitale qui connût le chaos et la presse des autres grandes métropoles s'appelait le Pettah, dont les bazars pittoresques résonnaient du cri rauque des vendeurs et de l’âpre marchandage des ménagères. Là, les rues restaient étroites, les bâtiments entassés , les échoppes et les maisons d'habitation souvent ouvertes sur les rues au point que le commerce et la vie se poursuivaient au beau milieu de celles-ci. L'air était saturé d'odeurs de fruits, d’épices, de poisson séché, de viande, du sang issu des étals de boucher qui dévalait l’égout à ciel ouvert.
Son âme se tendait contre les limites de cette vie, aspirant à jaillir au-dehors mais elle était désespérément confinée.
à propos du suffrage universel à Ceylan:ce serait donner le droit de vote aux domestiques de nos cuisines, aux laboureurs, au mendiant de la rue. Des illettrés pour lesquels la sophistication de la politique est aussi incompréhensible que les mathématiques avancées pour un enfant.
Le Mudaliyar était un fils, et qui plus est un fils aîné (…). Depuis sa plus tendre enfance, on lui avait appris à ressentir sa supériorité, son droit de n’être jamais contrarié.
Elle était certaine que les Macintosh avaient dit oui en dépit de la « réputation » de sa fille : il fallait que leur fils eût un défaut.