J'ai su, tout le monde aussi, tout le monde le saura: que deux et deux font quatre. Il y a loin de la convention,de l 'intuition à la compréhension: je me soumets, et comme tout le monde je dis: « Deux et deux font quatre ». mais. cela m'embête, et cela dérange beaucoup de mes raisonnements. Ainsi par exemple, vous qui admettez que deux et deux font quatre comme une
chose certaine qu'il aurait été impossible de faire autrement, pourquoi admettez-vous que c'est Dieu qui est le créateur de toutes choses. Ne serait- ce qu'un instant! Dieu n'aurait pu faire autrement?
Drôle de Tout-Puissant.
Tout cela dit pour parler des pédants. Nous savons, et nous ne savons pas.
J'aime les femmes aussi quand elles sont vicieuses et qu'elles sont grasses: leur esprit me gêne, cet esprit trop spirituel pour moi. J'ai toujours voulu une maîtresse qui fût grosse et jamais je n'en ai trouvé. Pour me narguer elles sont toujours avec des petits.
Je ne suis pas de ceux qui médisent quand même de la vie. On a souffert, mais on a joui et si peu que cela soit c'est encore de cela qu'on se souvient. J'aime les philosophes, pas trop cependant, quand ils m'ennuient et qu'ils sont pédants.
Le mieux serait de se taire, mais se taire quand on a envie de parler, c'est une contrainte. Les uns dans la vie ont un but, d'autres n'en ont pas. Depuis longtemps on me rabâche la Vertu: je la connais, mais je ne l'aime pas.
Je ne m'en plains pas, et comme Jésus je dis: « La chair est chair,l'esprit est Esprit. » Grâce à cela pour quelque menue monnaie ma chair est satisfaite et mon esprit reste tranquille.
Paul Gauguin Belles Marquises.