L'abécédaire de la petite personne

"L'abécédaire de la petite personne".

Un titre insolite.

Et plein d'humilité.


De quoi est-il question?

"Abécédaire en forme de dialogue entre un petit dessin et sa créatrice".

C'est une partie de son résumé et l'on suppose le contenu très drôle, que le personnage puisse s'adresser à son auteur, que son auteure apparaisse aussi en ombre chinoise dans les pages.


Le rapport entre la créature et le créateur, cela a souvent inspiré les romanciers, adultes et jeunesse.

La créature qui tire sur les ficelles qui l'anime, c'est le prolongement de la magie.

Elle en veut plus, elle veut tout ce qu'il y a à donner quand on donne la vie à un personnage.

La liberté d'inventer sa propre histoire.


C'est le petit bébé de l'auteur, cette petite personne.

Le créateur doit-il se réjouir de ce désir d'émancipation?


Le professeur Frankenstein, le visage contusionné, vous répondrait que non.

L'horrible créature de l'auteure Mary Shelley s'indignerait, elle, d'un grognement brut.

Pourquoi donner la vie pour la suspendre de multiples laisses?

Le sujet est intéressant n'est-ce pas?


Ainsi le petit personnage de cet imagier se distingue t'il d'un animal de compagnie et le fait bien savoir avec humour.

C'est un clown.

Vous ne me croyez pas?

C'est écrit là, dans la suite du résumé:

"Tour à tour rebelle et cabotine, la petite personne n'a qu'un seul but : prouver à son auteure qu'elle existe en dehors d'elle."

La petite personne est-il un adolescent?

Vérifions.


Nous parcourons l'imagier et sourions de la complicité auteur et personnage pour rendre par des gestes le sens d'un mot, c'est un vrai jeux de mimes.

Le duo s'étale sur la double-page et les jeunes lecteurs pourront se rendre compte de la richesse du vocabulaire sélectionné.

Le titre est plutôt à recommander à un lectorat qui appréciera la force et le sens des mots.

Trop petit, s'abstenir.


Exactitude, ennui, bouée, bulle, bruit, harmonie et même hostilité.

Un Abécédaire original qui laisse planer l'essence des mots et souvent leur poésie sur les pages, avec les performances du duo, digne d'une tentative de danse contemporaine.


Perrine Rouillon joue de l'innocence et de l'irrévérence, une grande liberté de mots et de liberté d'expression, pour apprendre.


Amusant et profond, à découvrir.

Simple point sur le carré blanc de la page, Petite Personne dialogue avec sa créatrice. En quelques mots et quelques gestes, elles égrènent un abécédaire, évoquent la vie et l'amitié, la nuit et la création. Petite Personne joue de son "corps idéogramme" pour suggérer chaque mot. A ce "corps gribouillis" répond l'ombre douce de son interlocutrice. A la gestuelle nette et précise de l'une répond la présence massive et fragmentée de l'autre. Au fil des lettres, s'installent la complicité, la tendresse, l'impertinence. Et le lecteur se laisse entraîner dans ce jeu de décodage et d'écho, s'amuse du côté frondeur de la Petite, est touché par la bienveillance de la créatrice.