Il peignait sa décadence, physique et morale. Il peignait les horreurs que devait affronter un homme qui s’était éloigné de sa voie. Il inclut même parmi ses créations des versions abstraites de Silvia et de son mannequin ainsi que de ses enseignements religieux. A l’occasion, il peignait des images d’espoir et de lumière. Pour celles-là, il blâmait l’influence que Marisol avait sur lui. Elles ne se vendaient pas aussi bien que ses œuvres plus sombres. Ce n’était pas grave. Ces tableaux étaient plus pour lui que pour les autres. Son œuvre sombre était frappante par ses thèmes et il possédait une bonne technique, mais ce n’était pas cela qui avait d'abord attiré les touristes, et plus tard les collectionneurs, à San Sebastian. C’était son sang.
Même s’il avait assez d’argent pour acheter un billet d’avion, aucune compagnie aérienne ne le laisserait monter à bord. Il avait certaines compétences – il pouvait effectuer un travail requérant de la force brutale, ou encore voler une banque ou faire de la contrebande. Malheureusement, il était trop faible pour faire quoi que ce soit, en raison du sang qu’il ne cessait de perdre. Il était fini et il était temps de mettre un terme à sa souffrance.
Il était trop tard pour se rendre dans un hôpital. Se précipiter au service d’urgence dans cet état résulterait en sa mise en quarantaine. Des questions suivraient. Puis les flics. Il choisit de regarder les choses du bon côté, si mince soit-il. Bien sûr, tout allait mal, mais il était près de chez-lui. Une fois là-bas, il pourrait trouver tout ce dont il avait besoin et obtenir le meilleur traitement possible avec ses quatre cent mille dollars.
Peu importe ce qu’il avait, il en était à un stade avancé. Et ça avait mis du temps avant d’en arriver là. Des semaines. Des mois peut-être. Il n’avait été exposé au mal que quelques heures. Ce n’était rien. Il avait juste besoin d'une injection de quelque chose, de pilules ou d’une sorte de pommade pour le mettre sur la voie de la guérison. L’homme à la Caprice était en difficulté, pas lui. Il avait juste besoin de se rendre chez un médecin.
La pommade fit peu pour soulager sa douleur et ses démangeaisons et il luttait constamment contre l’envie de se gratter. Il se ferait soigner bientôt. Ce dernier discours d’encouragement ne s’était pas montré aussi efficace que le précédent. Il se concentra sur la route sombre devant lui et compta les kilomètres dans sa tête pour essayer d’oublier sa douleur. Il échoua.
Anaïs Moreau étudiante à l'ESMOD Bordeaux vous présente l'ouvrage de Simon Wood "The ultimate Sneaker Book" aux éditions Taschen.
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Note de musique : © mollat
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