Comme à chaque fois qu'
Olivier Adam sort un nouveau roman, c'est avec gourmandise que je me suis plongée dans sa lecture. J'aime retrouver le regard singulier qu'il pose sur le monde, sans concession et pourtant plein d'une forme de tendresse. J'aime ce mélange d'intransigeance à l'égard de la société et d'une certaine indulgence pour les êtres qui la composent - ou du moins certains d'entre eux. J'aime cette étonnante alliance de noirceur et d'autodérision qui fonde pour moi l'alchimie de son talent.
Ce nouveau roman, je l'ai lu d'une traite, comme les autres. J'en ai savouré le style et les phrases, précises, pleines de la rage contenue des héros, au plus près de leurs émotions. le ton d'
Olivier Adam reste incisif, et ce n'est évidemment pas pour me déplaire.
D'où vient alors que je n'ai pas vibré de la même émotion qu'en lisant
Peine perdue ou
Les Lisières ?
Est-ce parce que cette histoire d'un responsable politique accusé d'avoir profité de sa position pour contraindre des femmes à se soumettre à son désir est trop étrangère à l'auteur ? Est-ce parce que je suis moi-même lasse des histoires de moeurs ou de malversations jetant sans cesse l'opprobre sur une classe politique de plus en plus discréditée ? Est-ce le côté fait divers qui m'a tenue à distance ?
Sans doute est-ce un mélange de tout cela...
J'avoue que je n'ai pas trouvé de réel intérêt à cette histoire. Traitée d'un point de vue extérieur, puisque le narrateur est le fils de la plus proche collaboratrice du maire impliqué dans cette affaire, on n'en saisit pas la dimension psychologique.
Olivier Adam ne s'intéresse pas à cette forme d'ivresse que procurent le pouvoir et le désir de prendre l'ascendant sur autrui ; tout juste la suggère-t-il. Quelques mots sont dits des victimes, de leur souffrance, des dégâts produits sur leur existence; mais telle n'est pas non plus sa préoccupation.
Les événements sont vus à travers le prisme des enfants respectifs des principaux protagonistes. Adam s'intéresse plutôt à de tout jeunes individus, Antoine et Laetitia, qui doivent se construire dans un environnement d'une fadeur absolue, où les référents, tant dans leur dimension sociale, avec un maire sans morale, que privée, avec des parents qui ne leur offrent aucun horizon vers lequel se projeter, les enferment dans un abîme de morosité.
Il m'a manqué, je crois, dans cette lecture le regard distancié qu'
Olivier Adam adoptait dans ses précédents livres. Si sa vision de la société y était aussi sombre qu'elle l'apparaît ici, il y mettait une dose d'humour et de cynisme qui rendait la violence de son propos non seulement supportable, mais, selon moi, franchement réjouissante.
Les pages les plus réussies de ce roman me semblent être celles où, vers la fin, l'écrivain dépeint le parcours de la mère d'Antoine, ses espoirs, ses illusions balayées, ses naufrages. Il explique la manière dont son milieu et son environnement l'ont façonnée. Et c'est là qu'il est le meilleur.
Malgré ces réserves, Adam n'en reste pas moins un écrivain de très grand talent, dont j'ai retrouvé la plume avec plaisir. Ma relative sévérité est à la mesure de l'admiration que je lui voue.
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