Tout d'abord, je tiens à féliciter les éditions Marchialy pour le travail graphique fait sur la couverture et l'intérieur du livre. le jeu de typographies, le sens de lecture des titres, les inserts de notes « de bas de page », tout est très bien pensé pour véhiculer le même dépaysement que le texte. Quand on ouvre les deux « romans » de
Jake Adelstein, on se sent projeté au Japon.
Il faut bien préciser que ce livre-ci est un peu différent de son précédent. Toujours aussi factuel dans son approche, il couvre une bien plus grande période et nous parle du véritable fonctionnement de la structure des clans de yakuzas. J'ai mis plus de temps que je ne l'aurais cru pour le lire, mais cela ne tient pas à la qualité du livre.
Même si
Jake Adelstein romance la vie de Saigo, il écrit comme un journaliste. Ce que je veux dire par là, c'est que j'ai trouvé que la traduction manquait de finesse, dans le sens où il y avait beaucoup de lourdeurs dans les phrases. Beaucoup de formules passives, de « et » et de « que », qui manquaient d'élégance en français. L'information, en revanche, passait très clairement et sans fioriture inutile, même si j'ai clairement eu un manque au niveau de la poésie de la langue.
Comme je le dis juste au-dessus, la vie de Saigo, le Tsunami, nous parvient romancée. La raison est simple : si Jake était prêt à se faire le porte-parole d'un yakuza, il n'avait pas l'intention de s'attirer plus d'inimitiés ou de dénoncer par son récit des individus bien précis. Il a donc modifié les événements de façon à ce que l'on ne puisse pas remonter jusqu'à ceux qui ne voulaient pas apparaître dans l'histoire. Il n'empêche que, malgré la tristesse et l'horreur du monde décrit, certaines scènes m'ont arraché de sacrés fous-rires ! Par exemple, le coup des chats à la banque (je vous laisse imaginer ce que des yakuzas peuvent faire devant une banque avec des chats… :p).
J'ai adoré me plonger encore une fois dans la culture japonaise, dans ses subtilités et ses paradoxes, dans sa richesse et sa complexité. J'ai adoré découvrir cette part méconnue de leur monde et son histoire. Pourtant, par moments, les noms cités, ainsi que les dates et les chiffres, me tiraient de l'émotion pour me ramener aux faits. Je n'avais pas envie d'étudier, alors je lisais ces passages un peu plus distraitement que le reste, je dois l'avouer.
Malgré tout, au bout du bouquin, on se rend compte qu'on s'est attaché à Saigo, à Coach, à tous ces malfrats pleins de défauts qui sont partis de rien pour finir riches et puissants. Et en même temps, on ressent la même peine que Saigo, la même tristesse que lui, de voir ce en quoi il croyait s'effriter avec le temps. Il n'a rien d'un bon gars, il a commis de véritables crimes, il a trempé dans bien des affaires, mais il a toujours suivi le gokudo, le code d'honneur des yakuzas. Un code qui tend à disparaître.
J'ai vraiment aimé ce roman de bout en bout. Je l'ai dévoré avec curiosité et avidité. J'ai appris énormément sur cette culture qui me fascine depuis toujours. Félicitations à
Jake Adelstein d'être parvenu à nous raconter l'histoire de Saigo avec tant de justesse dans la voix. Je conseille ce roman à tous les vrais amateurs du Japon. C'est un incontournable… 🙂