Daniel Benchimol vit heureux depuis trois ans dans l'île de Mozambique, aux côtés de Moira, sur le point d'accoucher de leur bébé. Un festival littéraire est en préparation sur la petite île. Il doit accueillir essentiellement des écrivains de différents pays d'Afrique. Plusieurs participants sont déjà arrivés, mais pas tous. le roman se déroule sur sept jours, et le premier se révèle un peu essoufflant pour le lecteur à qui
José Eduardo Agualusa présente de nombreux personnages : Uli Lima, Ofelia
Easterman, Luzia Valente, Cornelia Olukum et Jude d'Souza, tous écrivains, presque tous déjà célèbres, auxquels il faut ajouter Abdul, un serveur, sa grand-mère, dona Cinema, ainsi que Pierre, le mari de Cornelia, resté sur le continent. Ces deux-là sont pendus au téléphone… Ça fait beaucoup de monde en quatorze pages et six courts chapitres. Dès le début du deuxième jour, l'atmosphère change : l'électricité est coupée ainsi que tous les moyens de communication, Internet inclus. On comprend qu'il y a une tempête sur le continent, et si on peut prendre le pont pour sortir de l'île, personne n'est arrivé depuis la veille, et ça n'est pas normal : il y a peu de manifestations de ce type en Afrique et les écrivains invités ne manqueraient l'événement pour rien au monde !
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Que vont bien pouvoir faire des écrivains confinés sur une île, sans autre public qu'eux-mêmes ? Eh mais ils vont parler d'autres écrivains, de littérature, de fiction, de l'identité africaine et plus particulièrement des écrivains africains vus par les autres et par eux-mêmes, ce qu'ils projettent et ce qu'ils sont. Ofelia, par exemple. Elle est poète et elle cultive un vrai franc-parler : radicale en entrevue, parfois jusqu'à l'impolitesse… Elle considère Daniel comme un bon journaliste, mais le trouve médiocre comme écrivain. Elle juge ses romans puérils et prétentieux. Elle n'en revient pas qu'ils se vendent aussi bien ! Au contraire, elle apprécie Uli : il a du talent, et en plus, il est bel homme... Amitié, envie, admiration, jalousie, lucidité, cynisme, etc., mais aussi magie, rêve, réalité et fiction, des discussions passionnantes s'engagent. Voilà cependant qu'apparaissent des inconnus (des inconnus, vraiment ?) et que quelqu'un apporte à Daniel un manuscrit qu'il connaît parfaitement…
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Je me suis laissé prendre au charme de l'écriture de
Les Vivants et les autres. Ce beau roman vous entrainera dans un monde réel et merveilleux où vous serez intrigué par un étrange corbeau, par un femme-blatte, par des voix inconnues et des rencontres incongrues. Ce texte vous emplira de poésie, vous régalera de trouvailles, vous fera peut-être vérifier lesquels, parmi tous ces écrivains, existent vraiment, mais peu importe dans le fond. le ton en apparence léger, souvent humoristique, n'empêche pas la réflexion, pas plus d'ailleurs que les aphorismes ou la subversion des idées reçues. Un vrai plaisir de lecture. Cependant, encore une fois, je me permets de vous recommander de ne pas lire la quatrième de couverture ! Encore une fois, elle dévoile une clé importante pour la compréhension et gâche complètement la surprise que l'on ne découvre qu'à la page 128. Dommage, vraiment dommage…
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Merci à Babelio et aux éditions Métailié : j'ai reçu ce beau roman grâce à l'opération Masse critique littérature de janvier.