L'idée de base du livre est intéressante, puisqu'elle nous concerne presque tous et toutes, sachant qu'il s'agit de l'intelligence artificielle (IA) qui devient de plus en plus omniprésente, mais aussi du futur de l'école, qui devra s'adapter à un monde de plus en plus technologique. Là-dessus, j'accorde donc à l'auteur de faire un point essentiel sur l'état des avancées technologiques autour de l'IA et des nanotechnologies, de façon accessible et compréhensible, et de proposer des futurs possibles sur la cohabitation de l'humain et de la machine.
Laurent Alexandre adule tout au long du livre le travail de Google, Facebook, glorifie
Bill Gates, palabre sur
Elon Musk, et porte l'Amérique et la Chine comme des géants prodiges. Problème : ça va aussi avec toutes les dérives, dont il parle beaucoup d'ailleurs, comme pour les dénoncer (sauf qu'il prouve aussi qu'il est complètement d'accord avec ces pratiques). Au menu : les appareils de télépathie de Facebook qui « permettront de transférer des informations d'humain à humain, ou d'humain à ordinateur. (...) Grâce à une puissante Intelligence Artificielle, ces appareils liront littéralement dans notre cerveau, bouleversant les méthodes éducatives. (...) L'introduction des appareils de Facebook améliorera certes les techniques éducatives mais exigera parallèlement une réflexion neuroéthique approfondie : l'école ne doit pas devenir une institution neuromanipulatrice. »
Pour le reste, le point de vue de l'auteur, la tonalité du livre, les idéologies dangereuses et le catastrophisme m'ont réellement dérangée - et je n'ai fini le livre que parce que je me suis engagée à le faire. J'aurais pu arrêter à la page 29, déjà, lorsque ce monsieur s'est amusé à sortir ce genre de propos : « Seule une IA de phase 3 pourrait sembler intelligente, se faire passer pour un homme - ce qui pose d'énormes problèmes de sécurité - et remplacer par exemple un médecin généraliste ou un avocat. Mais aujourd'hui, l'IA ressemble encore à un autiste atteint d'une forme grave d'Asperger qui peut apprendre le bottin téléphonique par coeur ou faire des calculs prodigieux de tête mais est incapable de préparer un café... », voire même à la page 12 : « L'intelligence est aujourd'hui la seule vraie distinction ; en être dépourvu, le seul vrai handicap. (...) L'intelligence est l'inégalité que la société corrige le moins bien aujourd'hui. À l'heure où les "plafonds de verre" sont combattus avec détermination - sexe, origines ethniques et sociales -, elle est la dernière frontière de l'égalité. » Venant d'un docteur, donc, ces propos en disent long sur la considération DE BASE de l'être humain. Vous l'aurez donc compris, il y aura déjà un discours profondément validiste qui dénigre complètement les personnes handicapées (notamment avec déficience mentale). Qui devraient, selon lui, être éliminées dès avant la naissance. Il ne cache qu'à demi-mot son idéologie clairement eugéniste, dont il fera l'apologie presque tout au long du livre, en disant toutefois que c'est à prendre avec des pincettes (oh oh oh). J'ai d'ailleurs rassemblé un petit florilège de citations et passages effrayants relégués par l'auteur, que vous pouvez voir ici (https://lecombatoculaire.blogspot.com/p/extraits-problematiques-de-laurent.html).
Pour conclure, tout n'est pas à jeter, il y a de réelles réflexions dans ce livre, mais qui sont complètement étouffées sous le catastrophisme (discours de "guerre"), l'apologie du transhumanisme qui passe par la neuroaugmentation et l'eugénisme biologique, la vision du QI comme seule valeur humaine (sans oublier du coup tous les propos bien racistes et classistes - qu'est-ce qu'on se marre, décidément). L'Europe est pour lui décidément trop à la ramasse de privilégier les droits des utilisateurs d'internet pour protéger leur vie privée plutôt que de forcer l'utilisation des données personnelles comme c'est fait ailleurs... Et, pour finir, un discours qui pose clairement l'Homme comme un Dieu, avec tout ce qui va avec. Bref, le livre est un condensé de tout ce que je n'avais vraiment pas envie de lire, avec des discours dangereux et extrémistes. Il y a d'autres façons d'envisager et de parler de l'IA bien plus saines, et je rajouterai que ce n'est pas l'IA qui est une menace, mais bien les personnes qui sont derrière et ce qu'elles en font.
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