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"J'écoutai longuement deux Tsiganes – une trompette et un violon – qui avaient soudain surgi comme s'ils tombaient du ciel, et qui jouaient et chantaient des airs hongrois et des valses viennoises suivis de chants bosniaques et macédoniens avec l'accent de Voïvodine."
La voilà, la poudrière des Balkans : un mélange de cultures, de langues, de traditions, concentré sur un petit espace montagneux où la vie pourrait être aussi douce que dans l'Italie d'en face.
Mais non, faut que ça conquiert, que ça se batte, que ça se venge, faut succomber les armes à la main.
Désespérant.
Dans cette quinzaine de nouvelles, Ivo Andrić nous éclaire sur la source de cette furie guerrière : une longue histoire de haine, de nationalismes, de revanches ; des histoires de provocations et d'honneur bafoué, des histoires bien virilistes dans lesquelles les armes et la violence semblent une composante des personnalités masculines.
Et puis il y a les femmes.
Dans "Le tapis", c'est une mère qui rappelle à son fils où devrait se placer sa dignité. Dans "Les voisins", mademoiselle Mariana cesse brutalement de servir la soupe à son vieil ami vaniteux, et ça fait des étincelles.
Et les enfants ! En quelques pages, Ivo Andrić nous immerge dans le sentiment d'injustice ("La fenêtre") ou dans l'angoisse de la punition à venir ("Le livre").
Autant j'ai eu du mal avec les nouvelles "masculines", autant celles des enfants m'ont touchée. Mademoiselle Mariana m'a fait rire aux larmes, et une certaine paire de mocassins rouges ("Le jeu") m'a bien égayée aussi.
Impossible en tout cas de rester insensible à l'univers d'Ivo Andrić.
Traduction de Jean Descat.

Challenge Globe-trotter (Serbie)
Challenge Nobel
LC thématique novembre 2023 : "Videz vos PAL"
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Le seul nom d'Ivo Andric m'a convaincu d'emprunter ce bouquin à la bibliothèque. Ce n'est pas du tout une déception mais, toutefois, je m'attendais à autre chose. Peut-être à un peu plus. Il faut dire que j'étais sorti enthousiasmé de ma lecture du Pont sur la Drina. Assez difficile à surpasser. Contes au fil du temps est un recueil de nouvelles (malgré le titre, faisant mention de contes), que pas grand chose relie entre elles, si ce n'est qu'elles se déroulent dans cette Mitteleuropa, principalement bosniaque, et sans doute un état d'esprit que je n'ai pas encore tout à fait saisi.

L'auteur nous promène entre le 19e et le milieu du 20e siècle. D'abord, dans un village en Herzégovine où des insurgés serbes se réfugient dans une tour et tiennent tête à des soldats turcs. D'autres trouvent refuge près d'un couvent excentré et les moines hésitent quant aux actions à entreprendre. À Bistik, une vieille matriarche refuse d'acheter à des Autrichiens des marchandises que ces derniers ont dérobées chez les musulmans exilés. Puis le lecteur continue son voyage à Sarajevo, dans une pension à Vienne, sur un bateau sur le Danube, etc.

Je ne résumerai pas toutes les nouvelles, il y a en a quatorze. Celle qui m'a le plus touché s'intitule Livre et elle raconte l'histoire de ce jeune garçon, orphelin, qui abime un livre prêté par l'école (la couverture s'en est détachée). le pauvre garçon se tourmente pendant une session complète, craignant les conséquences de ce « crime irréparable et inavouable ». J'ai vraiment eu un petit pincement de coeur à l'idée de ce petit bonhomme qui vivait dans la hantise de devoir remettre au terrible bibliothécaire un bouquin en pareil état.

La plupart n'ont pas vraiment de chute. de ce fait, j'en avais entamé la lecture avec plaisir pour la finir, non pas désenchanté mais avec un petit « c'est tout ? ». C'est le cas avec Les voisins, qui raconte l'histoire de ce jeune homme parti faire ses études dans une ville autrichienne et se retrouvant dans la pension de mademoiselle Mariana. Ses activités le pousse à faire la sieste l'après-midi et à entendre à travers la cloison les échanges entre la maitresse de la maison et son vieil ami le baron. Intrigante d'abord, cette nouvelle finit en queue de poisson. Ceci dit, c'est sans doute une fin appropriée et réaliste, il ne faut pas s'attendre à de grands éclats à chaque histoire.

Au final, Contes au fil du temps est recueil d'histoires assez disparates, mélangeant des portraits (anecdotiques), des aventures s'approchant de la légende et des nouvelles psychologiques. Dans tous les cas, des histoires individuelles, presque anodines, qui auraient pu arriver à n'importe qui. Mais, étrangement, si ces histoires elles-mêmes se transforment en un vague souvenir et finissent par se confondre dans ma tête, quelque chose demeure et persiste, comme une réminiscence. Est-ce cet état d'esprit auquel je faisais référence plus haut ? Alors qu'elles ne m'avaient pas marqué pendant ma lecture, j'y repense beaucoup une fois le livre refermé.
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Quelques tranches de vie choisies par le traducteur de ce recueil de nouvelles sont regroupées ici . Sous la plume d'Ivo Andric, on voyage dans une vaste zone, autant temporelle que spatiale. Autriche, Serbie, Bosnie sur une bonne quarantaine d'années (de1880 à 1920) même si certaines histoires sont intemporelles.
Il y en a pour tous les goûts, de la légende du héro qui combat l'ennemi à l'observation méticuleuse du jeu de pied d'une inconnue dans un restaurant. de la plongée dans la société autrichienne de l'empire à la campagne dénudée des Balkans. du petit garçon qui a peur de se faire tancer pour avoir abimé un livre aux souvenirs d'un moine.
Les cultures se croisent . Les turcs, les germaniques , envahisseurs des Balkans, sont opposés à la culture locale.

Ce livre est très plaisant, les nouvelles où l'auteur s'attache à un personnage m'ont particulièrement plus. Ivo Andric déploie alors son art pour croquer son héro et en quelques lignes nous le décrire , état d'esprit inclus, merveilleusement. J'ai parfois retrouvé le style de maitre Zweig !
Mais alors , pourquoi 3,5 alors qu'élevé à la bienveillance de l'éducation nationale , je suis plutôt large ?
C'est un peu comme quand vous mangez un plat et que tout étant bon, il n'a pas le goût attendu.
Je venais plonger dans la culture de cette zone d'Europe aux prises avec les empires ottomans et austro-hongrois, je venais m'immerger dans les tavernes enfumées, je venais voir voler les poules comme chez Kusturica. Je n'ai eu qu'une ébauche de tout cela. Ce qui n'enlève rien à la qualité de l'oeuvre.
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Il s'agit d'un recueil de nouvelles, sans véritable fil conducteur. Ces nouvelles sont plus diversifiées que dans Les contes de la solitudes, les lieux évoqués mais aussi les époques et les thématiques sont plus diverses. Il y a des nouvelles plus contemporaines, centrées sur la psychologie des personnages, sans véritable lien avec une situation historique. Néanmoins, la nostalgie et une sorte de mélancolie de choses inaccomplies et qui auraient pu être, est présente. Les être portent une sorte de faille qui les rend plus apte à ressentir et donc à souffrir que la moyenne, sensibilité exacerbée. Même lorsqu'il parle de son temps, des gens croisés dans la rue tous les jours, l'univers d'Ivo Andric est toujours un peu le même, et une conversation banale dans la chambre voisine peut devenir évocatrice et porteuse de légende, ouvrir sur un imaginaire presque infini. le monde est plein de nostalgiques mystères pour celui qui sait regarder avec suffisamment d'acuité.

"C'est avec une véritable angoisse que je me décide à écrire le court récit d'une longue et grande peur. Cette peur-là n'a rien de commun avec les frayeurs et craintes qui assaillent les êtres durant leur lutte pour survivre et pour posséder, pour avoir une vie meilleure, une situation, la gloire et la primauté, pour acquérir des biens, les garder et les accroître. Il s'agit d'une autre sorte de peur, de cette terreur difficile à expliquer que suscitent chez les créatures innocentes les phénomènes de ce monde. Il s'agit d'une peur d'enfant qui, selon la nature du premier contact avec la société et ses lois, disparaît ensuite au fil des années, grâce au développement intellectuel et à une saine éducation, ou, au contraire, grandit avec l'enfant, l'envahit tout entier, brise et détruit son âme et empoisonne sa vie comme un mal caché et un écrasant fardeau. Il s'agit de ces événements invisibles mais fatidiques qui, souvent, brisent l'âme de ces petits hommes que nous appelons enfants, et que les adultes, occupés de leurs propres soucis, prennent à la légère ou ne remarquent même pas."

Ainsi commence un des récits, qui nous conte l'histoire d'une de ces frayeurs d'enfants, mais Ivo Andric ne nous dit pas en fin de compte, si l'enfant de la nouvelle arrivera à surmonter ses terreurs, ou va rester marqué à jamais. C'est au lecteur de tirer ses conclusions. Et il en va de même avec les autres nouvelles de l'auteur, il nous laisse toujours tirer les conclusions définitives, après nous avoir dépeints des situations fortes et significatives, mais il nous donne suffisamment d'éléments pour nous faire réfléchir longtemps et pour avoir envie d'arriver à des conclusions. Même si celle-ci ne seront pas les mêmes pour tous.
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Recueil de nouvelles sur lequel je me suis jetée après avoir dévoré "Le pont sur la Drina". Certaines nouvelles reprennent les thèmes chers à Andric, comme l'occupation turque et la résistance serbe, mais certaines sont tout à fait uniques et hors catégorie. Une nouvelle, très marquante, " Un miracle à Olovo" met fort mal à l'aise et reste longtemps en tête...
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A l'occasion de la réédition d'un autre de ses livres de nouvelles, je me suis enfin intéressée à cet auteur d'Europe orientale. Certes, je connaissais son existence, sa carrure (Prix Nobel 1961, tout de même ! ) mais je n'avais pas encore franchi le pas. Pour sonder, j'ai opté pour ces "Contes au fil du temps". Idée lumineuse, je me suis régalée !
Certes, j'ai lu une traduction, mais on n'y pense pas tant le style est fluide et plein de vie. Ce sont des nouvelles indépendantes, avec un art de la chute qui n'en est pas vraiment une. Prodigieux ! Quelques lignes suffisent à brosser un portrait, à créer une ambiance, à décrire un paysage. L'Histoire de la Bosnie au début du XXème siècle nous balade dans l'empire austro-hongrois, la Serbie (slave), sous le joug ottoman. Une richesse culturelle passionnante.
Et, sur Babelio, je me dois de signaler l'extraordinaire nouvelle "Le livre" , où l'on découvre le statut quasi sacré de l'objet-livre pour un adolescent de cette époque... qui ne connaissait donc pas internet et les jeux vidéo.
Ma relation avec cet auteur ne fait que commencer.
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