On ne sait jamais ce qui se passe au sein d’un foyer, derrière les murs d’une maison semblable à des dizaines d’autres. On ne connaît jamais l’intimité, les secrets, les travers d’une famille que tous pourraient jurer ordinaire, ordinaire à pleurer. Un pompier respecté de ses collègues, une coiffeuse efficace et appréciée de sa clientèle, deux gosses adorables, une maison avec un jardin et une balançoire, tout ça, c’est seulement la façade, la surface, la partie émergée de l’iceberg.
A-t-on conscience, lorsqu'on vit quelque chose, que ce moment se transformera en un souvenir qu'on chérira de toutes nos forces plus tard ? La plupart du temps, non. Mais parfois, tout au fond de soi, on sent que quelques instants de joie sont en train de se graver dans notre mémoire au moment même où ils se produisent, on est capables de ressentir ce processus d'enregistrement, de se dire qu'on ne les oubliera pas.
A trop faire semblant, elle en oublie parfois sa propre identité.
Papa n’est pas assez fort pour continuer à chercher Jessica et à croire en son retour.
Maman n’est pas assez forte pour accepter d’avancer et pour essayer d’être heureuse sans Jessica.
Coline n’est pas assez forte pour savoir où se situer entre ses parents aux réactions diamétralement opposées.
[...]
Coline se fait caméléon, absorbe les émotions de ses parents comme une éponge, jusqu’à oublier qu’elle n’est encore qu’une petite fille.
Les souvenirs sont des choses précieuses, aussi imprévisibles et étincelantes qu'une étoile filante. Pourquoi tel ou tel moment reste-t-il à jamais gravé dans la mémoire de quelqu'un ? Pourquoi d'autres s'effacent-ils au fil du temps malgré le souhait qu'on pourrait avoir de ne pas les perdre ?
En un claquement de doigts, tout peut chavirer, irréversiblement ? En un claquement de doigts, tout peut chavirer, irréversiblement.
On ne sait jamais ce qui se passe au sein d'un foyer, derrière les murs d'une maison semblable à des dizaines d'autres. On ne connait jamais l'intimité, les secrets, les travers d'une famille que tous pourraient jurer ordinaire, ordinaire à pleurer.
Coline aimerait s'autoriser à être heureuse, ne plus être rongée par une sorte de culpabilité écœurante et irrationnelle, la culpabilité d'être celle qui n'a pas disparu, celle qui a continué à respirer, à dormir, à manger, depuis plus de huit ans.
Les moments de joie et d'insouciance sont extrêmement rares depuis un an pour cette fillette de sept ans qui devrait pourtant parfois oublier, même pour quelques instants seulement, le drame d'avoir été séparée de sa jumelle.
La colère de Coline contre sa mère est retombée au fil des semaines, sans même que Patricia ne soupçonne à quel point sa fille l'a rendue responsable de la disparition de sa soeur.