La langue d'
Aharon Appelfeld est splendide, elle exhale une douceur, une sensibilité saisissante.
Hugo a grandi en Ukraine, avec ses parents pharmaciens appréciés de tous. Avec le déclenchement de la 2e guerre mondiale et l'occupation par l'armée allemande, les juifs, dont la famille d'Hugo, sont confinés dans un ghetto. La mère d'Hugo confie, alors que les déportations augmentent, son fils de 11 ans à une amie d'enfance, Mariana. Pendant un an et demi, Hugo vivra, caché de tous, dans un réduit d'une maison close. Il sera le témoin auditif des nuits subis par Mariana, à la merci d'hommes souvent violents. Jamais Mariana, fidèle à sa promesse en vers son amie Yulia, ne trahira Hugo. Au contraire, elle le couve, le nourrit, le considère comme sien, l'invite à se blottir contre son corps, en besoin de tendresse et de chaleur. Hugo, en amour pour cette belle jeune femme qui le protège, s'éveille aux émois d'un corps pubère.
Aharon Appelfeld a écrit ses romans en creusant des émotions, sensations vécues, alors qu'il survivait, enfant caché, en fuite pour échapper aux rafles. On pourrait relever le caractère pédophile de cette relation entre Mariana et le jeune garçon dépendant d'elle pour sa survie. Or ce n'est pas le sentiment qui émane de ce roman. C'est plutôt une déclaration d'amour d'un homme devenu adulte et âgé, pour une femme victime de violence de son père puis de ses clients, et rejetée par les habitants de sa ville natale. Une femme qui se réfugie dans l'alcool et dans cette relation avec Hugo qu'elle contribue à sauver.