Citations sur Le collaborateur et autres nouvelles sur la guerre (10)
Essayons le Commandant. Il a un certain âge.
Après tout ,l'âge ....c'est surtout important chez les femmes.
Les hommes ....on n' a qu'à fermer les yeux.
M. Picot, lui, pensait qu'on pouvait être anglophile et bon père de famille et même il n'aurait pas fallu le pousser beaucoup pour lui faire dire qu'il y avait des braves gens chez le francs-maçons. Partout d'ailleurs. Enfin, il ne faut rien exagérer, parce que... Les communistes... mais qui est-ce qui parle des communistes ? Les salauds sont les salauds.
(...)
Maintenant, être gaulliste et intelligent, ça, non, ce n'était pas Dieu possible. Vous me couperiez la langue, plutôt que me le faire dire.
"Voyons, voyons, monsieur Robert, vous avez été en Rhénanie, en 19, vous aussi, comme moi ! est-ce que nous étions mécontents, quand une jeune fille voulait bien danser avec nous, et même ?... Non, n'est-ce pas ? Alors il faut être logique...
- Bien sûr, mais aussi les... enfin les Allemands leur rasaient la tête, vous vous souvenez ?
Il paraît même qu'il y a un évêque de l'Académie française qui voulait aller se battre dans les neigeuses plaines russes pour les délivrer, mais son âge l'en a empêché. Ce qui prouve que tous les évêques ne sont pas comme ces mauvais prélats que nous avons en Allemagne qui font des prêches contre notre führer, l'euthanasie, et beaucoup des principes de notre troisième empire.
Mais tout ici manque terriblement de musique. Musique, musique, musique ! Peut-être que l'Amérique serait mieux dans mon genre. Le jazz, c'est tout-à-fait dégénéré, négroïde : Dommage que notre armée n'aille pas jusque-là. On nous avait tant parlé de la France. Ce n'est pas du tout mon genre. Enfin j'espère que la guerre durera assez longtemps pour que nos savants inventent un moyen de transporter notre armée en Amérique. En attendant ...
C'était vrai que, dans le quartier des tas de gens avaient varié d'opinion, depuis le 11 novembre. Grégoire Picot n'était pas comme ça, lui: il ne tournait pas sa veste toutes les cinq minutes. Une occupation, c 'est une occupation, ça ne peut pas aller sans inconvénients, il fallait s'y attendre.
"Le Commandant n'est pas très drôle, mais on voit du monde au tribunal, des gens qu'on ne verrait pas sans ça. Des Français, des communistes, des assassins. Aussi des soldats à nous, qu'on a pris à faire ce qu'il ne faut pas, les déserteurs. C'est curieux, je déteste les déserteurs, mais ils m'intéressent".
"C'est terrible... aussi est-ce raisonnable de faire grève ?" Emile d'abord ne répondit pas. Puis il me regarda bien : "Monsieur Julep, dit, on est pas des Boches.... Raisonnable ? S'agit pas d''etre raisonnable... Faut chasser les Boches... vous vous souvenez de 36 ? Alors, vous m'avez demandé puirquoi je faisais grève... Eh bien ! aujourd'hui non plus on ne peut pas trahir les copains... Et quand un tombe, il faut qu'il y en ait dix autres qui se lèvent". C'était un énorme feldwebel qui passait entre nous, sentant cette odeur paticulière de la soldatesque allemande, avec un de ces visages sans expression dont ils ont le secret. "Ils sont bien habillés", dit Emile, et il parla d'autre chose."
C'était vrai que, dans le quartier, des tas de gens avaient varié d'opinion, depuis le 11 novembre. Grégoire Picot n'était pas comme ça, lui : il ne tournait pas sa veste toutes les cinq minutes. Une occupation, c'est une occupation, ça ne peut pas aller sans inconvénients, il fallait s'y attendre.
Il n'y a pas si longtemps, j'aurais considéré Émile comme un bandit. Aujourd'hui, et ce n'est pas à force de réfléchir, c'est tout simple, les choses ont changé de sens, de signification. Pas seulement pour moi. Le boucher, par exemple. Le curé. Et presque tous, ici, ces gens qui ont travaillé toute leur vie, dans le respect des lois, saluant le maire. Petitement.