Une nouvelle lecture qui m'oblige à sortir de mes choix habituels, par le côté historique du sujet, et l'endroit où l'histoire se déroule.
Japon, 1897 : Une époque où les destins sont pratiquement tout tracés, que l'on naisse pauvre ou riche, fils aîné, fille, fils cadet, une place pour chacun dans l'arbre généalogique et dans la société.
Une époque où la femme, la mère, l'épouse a pour seule ambition de tenir sa maison, son rang, de servir les ambitions du mari, d'être acceptée par la belle-mère, d'être tellement bien intégrée à la belle-famille qu'on en oublie la sienne.
Une époque où l'art de la cérémonie du thé, la pratique du koto, la calligraphie, le savoir vivre, l'étiquette et l'art de la conversation faisaient des jeunes filles accomplies pour lesquelles des offres de mariage arrivaient de toutes parts, à des lieues à la ronde.
Le roman se divise en trois parties, nous proposant la rencontre de quatre femmes, Toyono la grand-mère d'Hana, Hana, Fumio, sa fille et enfin Hanako sa petite fille.
Hana approche de sa vingtième année. Jeune fille pârée de toute l'éducation précitée, épouse Keisaku Matani, fils d'excellente famille, homme politique.
la première partie consacrée à Hana nous présente sa relation privilégiée avec sa grand-mère, son mariage en grandes pompes, son soutien indéfectible à son époux, puis la naissance de ses enfants et un choc culturel quand elle prend conscience que Fumio se révèle être une fille rebelle, garçon manqué, se moquant éperdument des traditions, pratiquant la bicyclette et tenant des propos anarchistes.
Février 1922, Fumio ayant évidemment refusé tout arrangement matrimonial, épouse Harumi Eiji, fils d'un architecte, jeune banquier très prometteur mais absolument pas du rang auquel sa lignée la destinait.
Alors que Hana s'était entièrement pliée aux voeux de sa grand-mère, Fumio n'a tenu aucun compte des désirs de sa mère.
De cette union naîtront plusieurs enfants, dont Hanako, qui sera le sujet de la troisième partie du roman.
Hanako enfant voyage beaucoup, suivant ses parents qui s'installent aux USA, puis à Java. Alors que sa mère porte des pantalons et des robes jugées indécentes par Hana, Hanako est ravie de retrouver sa grand-mère et de partager avec elle les traditions qu'elle découvre puisque complètement bannies chez ses parents. Elle aime les tissus soyeux et les kimonos brodés. Elle apportera à Hana douceur et sérénité et lui permettra de vivre une vieillesse et une fin de vie apaisée, après avoir connu les années de guerre et la mort de nombreux de ses proches.
Difficile de résumer en quelques phrases une saga familiale brossant 3 générations sur 70 ans. J'ai apprécié ma lecture, malgré le nombre de personnages aux noms japonais complexes, le nombre de lieux, de villes, de hameaux, etc. Faisant abstraction de toutes ces données, je me suis attachée à découvrir les personnalités des trois personnages principaux.
J'ai évidemment adoré la vitalité et l'esprit rebelle de Fumio. La quatrième de couverture annonce un tableau subtil et saisissant de la condition féminine au Japon depuis la fin du XIXème siècle.
Sawako Ariyoshi étant « la Simone de Beauvoir du Japon ».
Certes l'autrice n'hésite pas à embrayer avec la société moderne quand elle parle du mode de vie de Fumio mais de là à la comparer à
Simone de Beauvoir … J'ai trouvé qu'elle était tout de même très axée sur les traditions et même quand elle évoque le mode de vie de Fumio, on sent bien qu'elle regrette que celle-ci les refuse. Et quant à Hanako, elle la présente comme une fille beaucoup plus douce et délicate que sa mère, attentive au bien-être de sa grand-mère, mais elle n'évoque pratiquement pas sa vie dans la société moderne de l'après seconde guerre mondiale, au contraire, on a l'impression que la petite n'attend qu'une chose, le retour des traditions si chères à sa grand-mère.
Je m'interroge sur ce qu'aurait pu être cette saga si l'autrice l'avait développée à la façon actuelle, c'est-à-dire un livre par héroïne. Elle aurait probablement eu plus l'occasion de poser Fumio et Hanako dans leur contemporanéité. Avec le risque de diluer l'essentiel dans de nombreuses pages sans intérêt.