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Logbuch » de Jean Arp (1983, Arfuyen, 48 p.), traduit par Aimée
Bleikasten de «
Logbuch des Traumkapitäns » (Le livre de bord du capitaine des rêves), avec une illustration à l'encre. Les textes, bilingues, reprennent ceux d'un recueil paru auparavant (1965, Arche Verlag, Zurich, 55 p.) avec 8 illustrations en noir et blanc. le petit recueil comporte aussi, en plus des 19 poèmes, le cycle des poèmes « Krambol », paru dans la revue « Recherches Germaniques », traduit par Andrée
Bleikasten « KRAMBOL ou les Petites Madeleines de Hans Arp » 1981, Revue Germanique, Strasbourg, p. 246-258).
«
Logbuch » raconte d'où Hans Arp vient, né à côté de sa chère cathédrale « N'aviez vous pas à l'instant le sentiment / que vous étiez la cathédrale de Strasbourg / devenue hirondelle ». On retrouve ce parallèle entre bâtiment et oiseau dans « Jours effeuillés » (1966, Gallimard, 672 p.). Ce procédé de réutiliser des phrases ou des idées, en les polissant à chaque fois, c'est un peu aussi sa façon de procéder en sculpture. Il réutilise un même vers dans plusieurs textes ou des versions différentes d'un même texte selon des publications successives.
Il y a en plus sa sempiternelle interrogation « qui suis-je » « Who is who », « Je tu il nous vous ils » dans laquelle il écrit « Qui suis-je ? / Si je suis moi / n'est pas facile à dire ».
Depuis, il se promène. Sur le sentier « qui de Grendelbruch / mène aux ruines de Guirbaden ». C'est dans les Vosges, où ses parents avaient une maison, pas très loin de Boersch. Ruines de château qui reviennent dans « Krambol » sous la forme de « un nuage dur comme pierre ».
« Qui suis-je ? » qui revient encore, et toujours. Son interrogation sans cesse dans « Jours effeuillés » et sa réponse « un hideux lambeau / du sabbat sanglant des mères-patries ». Il en appelle à la réconciliation. « Je crois qu'il est plus commode / que Toi et Moi / nous ne fassions qu'Un de nouveau ». Il est indéniable que la guerre a marqué Hans Arp. Plusieurs textes de « Jours Effeuillés » y font allusion. Notamment, en 1933 « La Cigogne enchaînée », sous-titrée « Nouvelle patriotique et alsacienne ». Cela débute fort. « L'Alsace, comme son nom l'indique, est un pays appelé aux plus hautes destinées. C'est le pays le plus propre du monde : il change de chemise tous les trente ans ». C'est alors le brun qui domine.
Il convient de rappeler la façon dont Hans Arp se fait réformer lors du conflit en 1914. La guerre est déclarée, l'Allemagne le réclame. Alors domicilié en Suisse près de Zurich, il se rend au consulat allemand de Zurich. Il se déshabille et « fit le signe de croix devant un portrait du maréchal Hindenburg, et comme on lui demandait son âge, écrivit sa date de naissance plusieurs fois répétée sur une colonne / 16 septembre 1887 / 16 septembre 1887/ 16 septembre 1887 / 16 septembre 1887 / tira un trait et inscrivit au total de cette singulière addition un nombre gigantesque ». le résultat devait être juste car il obtint d'être réformé et fut exempté du service armé. L'anecdote est également rapportée par
Leonora Carrington, mais comme étant racontée par l'oncle Ubriaco dans « Histoire du Petit Francis » dans le tome II de « L'oeuvre Ecrit » (2022, Fage, 432 p.). le marquis cite le cas d'un jeune homme, Ulrich Weg, à qui le docteur, je pense lors du Conseil de Révision « a demandé d'écrire son domicile, sa nationalité, son nom » et qui a écrit « 1914 » en face de toutes les questions, fait une addition et présenté la réponse. Donc, à part la personne et la date, on retrouve l'anecdote de Jean Arp.