À 50 ans, et après quelques déboires amoureux, Samira a enfin trouvé l'amour. le problème, c'est qu'elle est divorcée avec des enfants, et que l'amant est européen… ce qui sont, au Maroc, deux choses qui passent assez mal dans la bonne société
Ce livre, aux forts accents autobiographiques, raconte le combat de Samira pour trouver sa place dans une société tiraillée entre une modernité venue d'ailleurs, mais accueillie avec enthousiasme par la couche aisée de la société, et la peur de perdre toute identité, qui se manifeste par un attachement à des « traditions » patriarcales qui n'ont d'ailleurs peut-être jamais existé. Un combat tellement douloureux qu'il provoque parfois l'expatriation.
Acheté dans le cadre de la Foire du livre de Bruxelles, qui avait le Maroc comme invité d'honneur, je retrouve dans ce livre une constante des propos de tous les intervenants (et de tous les marocains avec lesquels j'ai pu échanger d'ailleurs) : un amour sans borne pour leur pays, et un agacement (pour rester poli) équivalent envers tous leurs compatriotes.
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Certaines de ses amis, même les plus sincères, qui étaient contentes de la voir épanouie auprès d'un homme capable d'un chevaleresque dont on entendait plus parler qu'au passé, la félicitaient sans oublier de ponctuer leurs vœux d'un « Dommage qu'il ne soit pas marocain ! » , « Il lui manque seulement d'être musulman pour être parfait », ou encore « Mais, acceptera-t-il de se convertir... pour de vrai ? » Ces propos étaient parfois assortis d'un geste de la main imitant le mouvement des ciseaux, comme pour faire allusion à la circoncision, rituel par lequel un individu faisait son entrée dans la Oumma, signe ultime de son appartenance et de son allégeance à celle-ci en tant que membre parfaitement viril et apte à la reproduction selon les règles de la foi.
Leur vie commune était arrivé à ce stade de maturité d'une relation amoureuse faite de tendresse, de petites attentions, de compréhension, et d'une patience à toute épreuve. Dans son entourage, les gens avaient commencé à parier sur le délai qui mettrait fin à cette idylle entre deux mondes, deux cultures, deux modes de vie et de pensée, mais depuis quelques années, tous avaient pu les féliciter pour la force de leur amour, et la solidité de leur couple, étonnés qu'ils étaient de toujours les voir marcher dans la rue, main dans la main, et les yeux toujours remplis de mansuétude autant que d'amour l'un pour l'autre.
[P]lus le temps passait, plus il leur devenait difficile de cacher leur relation amoureuse, et il se trouvait assez régulièrement une âme charitable pour lui rapporter avec une délectation à peine voilée ce qui se racontait dans son dos, comme ce que cet ex-époux d'une amie avait dit d'elle avec grand mépris en la voyant au bras de son amant, qu'on avait pourtant pris la précaution incontournable de lui présenter comme son mari :
— Bof ! Il n'y a que ces impies de gwer pour accepter d'épouser une femme divorcée avec enfants ! Ah là ! Aucune chance avec un marocain pour une « deuxième main » !