Car je sais bien qu'en essayant de changer les choses on met souvent plus de bordel qu'au départ. (…) La vérité, tout le monde s'en fout.
L'humain est un virus qui se répand et qui engloutit tout. Il détruit, arrache, brûle, explose, s'entre-tue, chaque jour un peu plus. Et quand il n'aura plus rien à bouffer, il se dévorera lui-même.
J'ai besoin de frayer parmi les ombres, de marcher au bord du précipice. Je suis comme ça, il me faut ressentir cette peur pour me sentir vivant. Il y'a autre chose aussi. Si je continue à me jeter tout au fond, dans les ténèbres, c'est parce que je crois encore que je pourrais ramener un peu de lumière. Dans les tréfonds de l'âme humaine, il n'y a pas de monstre ni de démon aux dents aiguisées, il n'y a que des blessures qui ne cicatrisent jamais, des oreilles qui se bouchent parce qu'elles ont trop entendu crier, des souvenirs qui vous dévorent et vous rendent fou. Bref...
Nous ne sommes rien d'autre que la somme de nos souvenirs.
_Tu ne veux pas voir la vérité. La forêt nous a toujours protégés. Des incendies, des maladies, des intempéries... Regarde la crise que traverse notre pays. Ces milliers de famille qui ont perdu leurs maisons, leurs vies... Ici, elle nous a épargnés. Mais tout cela a un coût...Askafroa nous demande du sang en retour.
Je pensais pourtant ne plus avoir à foutre les pieds dans cette mélasse, ces territoires maudits. Une fois que l'on commence à descendre dans les tréfonds de l'âme humaine, dans ce que l'homme a de pire, on s'embourbe et on ne remonte jamais vraiment. On n'est plus jamais pareil après Un peu plus ébréché, abîmé de l'intérieur. Pas certain que cette fois, je tienne le choc. Mais il y a la môme...
Dès qu'il me reconnaît, ses traits se tendent. Les gars qui vivent dans la forêt sont souvent les plus durs à interroger. Même s'ils n'ont rien à se reprocher, ils restent toujours sur leurs gardes. Ils préfèrent ne rien dire plutôt qu'en dire trop.
Le jour finit toujours par se lever. La pire des nuits aura irrémédiablement un terme. Il y a toujours une lueur, si infime soit-elle. Et il faut s'y accrocher.
La poursuivre, coûte que coûte, malgré la douleur, la peine, les regrets, les mensonges et toutes les ténèbres qui nous dansent autour.
J'ai de plus en plus fréquemment cette sensation. Tomber sur mon reflet et ne pas me reconnaître tout de suite.
L'impression d'être face à une autre. Cette femme n'est pas celle que je suis. Celle que je crois être.
Les seules prisons qui nous retiennent sont celles que l'on se fabrique.