La neuvième enquête de son commissaire Dupin se déroule à Saint Malo. Il s'y trouve en séminaire de formation. Joignant l'agréable à l'utile, il va faire son marché à Saint Servan, où justement est commis un crime. La victime de 44 ans se nomme Blanche Trouin. Elle est cheffe et propriétaire d'un restaurant étoilé à Dinard. La meurtrière n'est autre que sa soeur, Lucille Trouin, 42 ans, cheffe aussi à Saint Malo. Elle reste muette sur son acte, mais la rivalité entre les deux soeurs n'est un secret pour personne. L'énigme grandit encore lorsqu'un deuxième cadavre est retrouvé sur la plage de Sables d'Or.
Jean-Luc Bannalec a choisi Saint Malo et en fait une présentation bien loin des clichés crêpes et Kouign-amann. Il évoque l'histoire de la ville, depuis ses origines et la cité d'Alet, ses corsaires et ses pirates, ses armateurs et le commerce triangulaire. L'ouverture du roman au marché de Saint Servan fait l'objet de descriptions détaillées qui mettent l'eau à la bouche. L'auteur est un fin gastronome et livre les meilleures adresses pour goûter les spécialités locales. On peut en dresser une liste en vue d'un prochain séjour gourmand. le commissaire Dupin se laisse aller à une dégustation de rhum qu'on aimerait bien partager. Il découvre ses vertus soporifiques. Quant aux huîtres de Cancales, elles semblent stimuler son activité cérébrale.
La ville de Saint Malo,
Jean-Luc Bannalec la considère comme une enclave qui se démarque du reste de la Bretagne. C'est un lieu privilégié qu'il n'est pas donné à tout le monde de connaître. L'équipe du commissariat à Concarneau, en pays bigouden, éprouve quelque sentiment d'envie à voir Dupin s'y rendre pour suivre son séminaire. La commissaire locale, Huppert, se montre toutefois assez hautaine et cynique. Est-ce la mentalité héritée d'ancêtres conquistadors? Elle considère ses collègues et Dupin avec beaucoup de condescendance.
L'auteur se fait très précis dans son approche du pays malouin. Au fil des chapitres, il aborde différents sites qui ont chacun leur caractère bien propre. Il en fait à chaque fois une découverte bien étayée. C'est d'abord la ville intra muros et ses remparts, puis l'élégante et luxuriante Dinard, et Saint-Suliac sur la Rance, beaucoup plus calme et sereine. La suite nous conduit à la sauvage pointe du Grouin.
Le récit est clairement découpé. L'action s'étend sur cinq jours, et chaque chapitre est consacré à une journée. Les trois premiers chapitres démarrent avec la découverte d'un cadavre. D'autres vont suivre encore. La tension monte d'un cran aux deux tiers du livre, après un début presque en dilettante pour l'équipe des commissaires et préfets. L'enquête piétine et les cadavres se multiplient. Dupin se sent en échec, face à la commissaire Huppert, de plus en plus sèche. Mais sur une intuition de Dupin, l'enquête prend un nouveau départ. le suspense est au plus fort.
Jean-Luc Bannalec fait de superbes descriptions des conditions météorologiques très changeantes. Elles accompagnent le récit dans son atmosphère de tension grandissante. Cela donne lieu à des tableaux de ciel marin aux couleurs magnifiques.