AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,68

sur 297 notes
5
11 avis
4
31 avis
3
9 avis
2
5 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Chaque famille a ses particularités, ses secrets, ses blessures mais il y en a certaines qui sortent de tous les cadres.

Farah est une adolescente de 16 ans passionnée de romans policiers, son père Lenny est le fondateur d'une congrégation millénariste La Treizième Heure et sa mère Hind est maquilleuse pour le théâtre et le cinéma.

Mais dans cette famille, rien n'est ce qu'il paraît et ce roman nous entraîne dans un tourbillon d'illusions où l'anticonformisme est de mise.

Rythmée par les enquêtes romanesques de Farah, les messes poétiques de Lenny et les paroles de chansons de Hind, ce livre nous parle de transgenre, d'hermaphrodisme, de GPA mais aussi de secte, de manipulation et de prosélytisme.

L'autrice consacre une partie à chacun de ces trois personnages atypiques et construit progressivement l'histoire de cette famille en la faisant raconter de trois points de vue différents. Leur vécu s'éclaire un peu plus à chaque page et fait monter notre empathie pour ces êtres marginaux qui vivent dans un monde d'exclusion.

Ce roman d'Emmanuelle Bayamak-Tam monte crescendo en densité et nous parle de tolérance, d'acceptation de soi et de résilience, pour finir en une apothéose de sentiments parfois opposés mais toujours bouleversants.

Pourtant, seule la troisième partie consacrée à Hind m'a vraiment passionnée et j'ai éprouvé beaucoup d'empathie pour cette femme exubérante et excentrique mais fragile et blessée par la vie. J'ai découvert avec elle avec, tout ce que les personnes LGBT+ vivent comme rejet, haine et violence, dans une société qui manque encore cruellement d'ouverture d'esprit.

En mêlant deux sujets d'actualité sensibles, j'ai trouvé que l'autrice avait fait un mélange des thèmes contre-productif et, autant le sujet de la transidentité m'a semblé captivant, autant je suis restée dubitative sur celui des sectes qui est assez galvaudé et me hérisse souvent.

Un roman original que j'ai lu avec un intérêt inégal et pour lequel je conserve quelques réserves.
Commenter  J’apprécie          100
504 pages. Pas un pavé mais tout de même. Trois parties plus une petite dernière. Trois personnages racontant chacun sa vie, sa conception des choses des épisodes communs mais sous des éclairages forcément différents et des divagations qui expliquent la longueur et des longueurs qui ne dérangent pas trop, il suffit de prendre son mal en patience et de lire sans se décourager.

Une fois le livre lu, recherche internet, qui est Emmanuelle Bayamack-Tam, où veut elle en venir et que faire et penser de la treizième heure.
Une interview m'éclaire un peu et le mot fourre-tout me vient à l'esprit.

Trois personnages principaux.
Farah, la fille, 16 ans.
Lenny, le père, fondateur de l'église de la treizième heure.
Hind, la mère et la compagne qui abandonne tout son petit monde, puis revient 16 ans après toute penaude.

Un semblant d'histoire.
Lenny et Hind ont des histoires familiales lamentables. Ils se rencontrent elle dans les 20 ans lui dans les 30 ou plus. Ils s'éprennent l'un de l'autre. Farah naît. Hind part. Lenny frise le suicide, se reprend et crée son église.
Une précision historique.
A l'ère où presque tout se dit, en particulier dans la sphère identitaire, hétéro, homo, bi, trans, pma gpa et ce que j'oublie, ajoutons ici l'hermaphrodisme qui n'a pas eu encore droit de cité du moins via l'écho de mes diverses écoutes médiatiques.

Fourre-tout.
Interview internet, l'auteur a voulu aborder différents thèmes.
- Une histoire d'amour passionnée, ses dérives, ses échecs, ses victoires et tout ce que vous voudrez bien y ajouter.
- une quête identitaire. Entre être l'un ou l'autre ( homme ou femme ), que choisir et a t on le choix.
Idem pour être père ou mère ou les deux. Mauvais choix pour les deux.
- Une photographie angoissée du monde actuel à travers les adeptes angoissés de la treizième heure.
- Une vision négative puisqu'on touche à la fin du monde lorsque sont évoqués le réchauffement climatique, les dérives humaines, pollution, extinction des espèces et autres joyeusetés réductrices de l'évolution humaine.
- Reconstitution christique. Mais non Lenny ne se veut pas un nouveau messie même si ses ouailles le prennent pour un dieu.
- Hommage à la littérature, la poésie et les chansons. Ps. La poésie remplace les prières chez Lenny.

Stop. Point trop n'en faut.

La treizième heure. Un titre qui tend à nous égarer puisqu'il ne s'agit pas que de cela. Une lecture prenante et lassante à la fois. Une variété de thèmes abordés où on pourra ou se perdre ou trouver son compte ou les deux à la fois. Enfin un autrice dont je me demande où elle se situe dans tout cela tout en me disant, quelle importance. Chacun ses goûts, ses choix, ses buts et ses utopies.

Petite dernière.
Soit la petite dernière partie du livre et la parole à l'avenir donc Farah.
Quand mon père reviendra, ce sera trop tard. La résurrection aura lieu pour rien et ne sauvera personne. A moins que dans l'intervalle, je ne me sois moi même lancée dans une carrière de prophétesse et de redresseuse de torts.
Commentaire. Comme si une gamine de 16 ans allait dicter notre passé, pardon, notre avenir.
Commenter  J’apprécie          80
La treizième Heure c'est l'histoire d'une triade : la fille, le père, la mère ou comment ces trois visions de la vie, ces trois individualités, ces trois solitudes se retrouvent à un moment donné. de la poésie au roman en passant par les chansons, les mots sont toujours là pour les accompagner, tels des guides. Parmi eux, il y a tous ces gens perdus qui entrent à la treizième heure pour trouver un (autre) sens à leur vie.
C'est si bien écrit - que de références culturelles ! - et les thèmes si universels (l'amour, l'abandon, la différence, l'acceptation de la différence) que l'on aimerait que cet esprit de tolérance - qui règne à la treizième heure - inonde un peu notre monde.
Commenter  J’apprécie          70
Trois grandes parties pour trois narrateurs. D'abord Farah, la fille, qui vit avec son père dans une congrégation ou secte, La treizième heure, et qui nous raconte sa vie d'adolescente, sans mère, celle ci est partie à sa naissance, et qui se cherche, fille ou garçon, qui est-elle. Puis Lenny, le père, qui a créé cette église à la suite de l'abandon de sa femme et qui revient sur sa vie de jeune homme amoureux. Et enfin Hind, la mère, qui nous dévoile le fin mot de cette famille bancale.
J'ai eu du mal à entrer dans ce gros livre de 500 pages mais on se laisse emporter par l'histoire peu banale qui nous fait découvrir le monde des transgenres. Intéressant.
Commenter  J’apprécie          60
Treizième roman d'Emmanuelle Bayamack-Tam, "La Treizième heure" nous emmène dans le 13e arrondissement de Paris à la rencontre d'une communauté utopiste fondée par Lenny, une sorte de gourou qui espère apporter à tous « une source de joie, de plaisir et de réconfort ». Jusque-là, rien d'extraordinaire si ce n'est la récurrence du nombre 13 et les interrogations qu'elle suscite. Mais tout devient intéressant et original quand on apprend que cette communauté est une Église où la poésie tient un rôle central. Lenny croit en effet aux vertus de la poésie pour nous guérir et de nos angoisses et névroses. le rituel consiste ainsi à réciter des poèmes en majorité d'auteurs du XIXe siècle, et en particulier un sonnet obsédant et obscur de Nerval qui a une telle résonance, une telle puissance évocatoire que les fidèles se sentent, à le répéter sans fin, emportés par une force salutaire.
Quelle belle idée d'Emmanuelle Bayamack-Tam ! Scander la poésie française dans le culte d'une Eglise. Ces messes poétiques et autres rituels de déparasitage psychique font un bien fou aux adeptes de Lenny qui nous ressemblent bougrement avec leurs angoisses et leurs névroses liées au réchauffement climatique, aux guerres ou aux épidémies. J'ai trouvé intéressant l'effet miroir entre cette Eglise poétique et notre société. Emmanuelle Bayamack-Tam est fascinée par les sectes et les convulsions millénaristes, car déjà dans "Arcadie", le récit se déroulait dans une communauté utopique prônant l'amour libre. Mais ici, la dimension poétique des rituels revigore son phalanstère et les catastrophes de l'actualité récente amplifient opportunément le bouillonnement millénariste. J'aime d'autant plus la façon dont l'auteur raconte ses mondes à part qu'elle les décrit avec une grande liberté, qu'elle les imagine tolérants, pacifistes, épanouis, rayonnants loin du fanatisme habituel des sectes. Ses communautés, que ce soit Liberty House ou la Treizième heure, ne présentent aucune radicalité belliqueuse, mais prônent au contraire l'amour, le bien-être, la liberté, le plaisir, la joie.
Une autre réussite du roman réside clairement dans ses personnages, tous atypiques et démesurés. Dans la première partie du livre, c'est Farah, la fille de Lenny, qui prend la parole pour nous raconter sa quête d'identité. Personnage récurrent d'"Arcadie" et qui en possède les mêmes caractéristiques, Farah est une adolescente intersexuée et un peu disgraciée physiquement. Cependant, ici, les configurations sociales et familiales sont différentes. Elevée par son seul père, elle se pose de nombreuses questions sur elle-même, sur sa famille, ses origines et interroge son père qui reste laconique. Elle veut savoir qui est sa mère, partie quelques jours après sa naissance. Face au mutisme de son père, elle interroge également lors d'un passage hilarant ses grands-parents qui « sont tous les deux du genre pinailleur, sans compter qu'ils adorent faire obstruction au plaisir ». Farah va donc, comme les détectives et les espions des romans qu'elle adore, mener son enquête sur le mystère de son origine, cause, ou pas, de sa différence.
Dans la partie centrale du récit, c'est Lenny qui prend la parole. Lui, sa religion, son obsession, son salut, c'est la poésie. Personnage énergique et charismatique, il rassemble autour de lui des gens en rupture de ban, des inadaptés sociaux qui forment une congrégation « qu'on peut dire religieuse bien que Dieu y tienne une place négligeable ». Il va nous raconter sa version de l'histoire et ses deux coups de foudre : sa passion pour la poésie et son amour pour Hind. À la naissance de Farah, Hind disparait, laissant Lenny dévasté. Ce dernier survit à ce chagrin d'amour en trouvant dans la poésie un soutien inattendu, une source de paix qui le poussera plus tard à fonder l'Église de la Treizième Heure.
La troisième partie est donc celle de Hind. Quand elle prend la parole, l'histoire s'enflamme. Hind est une femme trans éblouissante qui se révèle le personnage fort de ce roman. Je l'ai trouvée culottée et fragile, entière et franche, fastueuse et dévastatrice, ingrate et narcissique. Elle raconte l'histoire violente de sa jeunesse pour gagner sa liberté sexuelle, elle décrit sa passion pour la chanson populaire ou réaliste, les moments où elle chante Piaf, Lama ou Sardou, elle parle de son amour pour Lenny qu'elle quittera pour vivre une passion amoureuse vouée à l'échec, elle expose les motifs qui l'ont poussée à vivre en dehors des normes sociales.
La Treizième Heure voit ainsi se succéder trois voix, chacune apportant sa contribution à la compréhension de l'histoire, chacune tissant le récit avec ses propres références romanesques, poétiques ou chansonnières. J'ai trouvé intéressante la passion amoureuse entre Hind et Lenny qui pose la question de la place et du rôle de chacun dans un couple. Qui aime le plus, le moins, qui se laisse gouverner par les sentiments de l'autre, qui est incapable d'aimer, qui au contraire a de l'amour à revendre ? Finalement, les références à la poésie ou à la chanson se justifient compte tenu de l'omniprésence dans leur contenu de l'amour et de la passion.
Enfin, j'ai adoré dans ce roman l'écriture débridée d'Emmanuelle Bayamack-Tam, son imaginaire libre et exubérant. Elle tisse une histoire terriblement originale malgré la proximité du texte avec "Arcadie", elle aborde avec audace les questions sur l'identité et ses bouleversements successifs, elle dézingue nos représentations de la famille, elle interroge avec mordant nos idées reçues sur le genre, le couple, l'amour, la parentalité, elle utilise le registre burlesque pour raconter des situations ordinaires ou intenses (le prêche avec une chanson de Serge Lama), elle décrit de façon naturelle le réel et ses métamorphoses sans provoquer ni défendre une idéologie laissant toute liberté de réflexion au lecteur.
"La Treizième heure" est un roman plein de fantaisie qui raconte avec drôlerie et gravité une tragédie, une histoire d'amour hors-norme et bouleversante. J'en recommande vivement la lecture.
Commenter  J’apprécie          60
« Je me demande comment font les autres pour s'arranger dès l'enfance avec le désespoir. Moi, on m'a toujours parlé de l'immortalité de l'âme et de la nature miraculeuse de toute existence.Ca aide. »

Farah, adolescente et narratrice de la première partie du roman, vit depuis sa naissance au sein d'une communauté de doux illuminés rêveurs (et angoissés) réunis autour du créateur de la Treizième Heure, qui n'est autre que le père de Farah, fondateur d'une sorte de secte des poètes disparus, où la poésie est la remède à la plupart des maux de notre monde.

Dans la seconde partie, elle laisse la parole, à Lenny son père, enfant mal aimé de ses parents, homme brisé par le chagrin d'amour de sa vie, et père aimant, empreint d'un besoin de dévouement et d'héroïsme qu'il mettra au service de la création de cette communauté pour âmes abimées.

Et puis, il y a Hind, qui clôture le récit . Hind, grand amour perdu de Lenny, et mère d'intention et absente de Farah, à la beauté sulfureuse, et… père biologique de Farah.
Je n'en dis pas plus et vous laisse partir à la rencontre de cette communauté, sorte d'arche de Noé pour désespérés en quête de sens à donner à la Vie.

Un Roman, inclassable, ultra contemporain, qui pourrait heurter de chastes oreilles, aussi déjanté que poétique, aux références littéraires multiples.
Un roman sur la quête de sens et d'identité, sur la différence et la tolérance, et tant d'autres choses encore. Un roman atypique, marquant et qui clôture mes lectures dans le cadre du Prix landerneau des lecteurs . Une agréable surprise, moi qui partait avec un à priori, mais qui n'aura cependant pas suffi à en faire mon élu de cette édition 2022 du Prix.
Commenter  J’apprécie          50
La treizième heure est un roman en trois parties avec trois narrateurs différents, une fille Farah, son père Lenny et sa mère Hind. C'est donc un roman triptyque.
Ce roman a un ancrage dans des réalités très contemporaines, en particulier par la conception de Farah, issue d'une GPA, avec une mère porteuse qui fût inséminée par le sperme de Hind qui sera sa mère d'intension mais son père biologique.
Ce roman interroge sur ces nouvelles familles qui se mettent en place en France et ailleurs dans le monde.
C'est un roman sur la transidentité notamment avec le personnage flamboyant et beau de Hind, malgré un comportement problématique.
C'est également un roman sur nos angoisses contemporaines telles que le réchauffement climatique, la pandémie, les guerres et conflits armés, les catastrophes climatiques qui inquiètent les membres de cette « Treizième heure » qui trouvent en Lenny un leader charismatique qui les rassure. On peut aller jusqu'à faire le parallèle avec le Christ et ses apôtres qui auraient pu être des personnes en rupture de ban ou des inadaptés sociaux, tels les membres de la Treizièmes heure.
C'est aussi une histoire d'amour, de passion, de rupture , entre Lenny et Hind, de retrouvailles entre Hind et sa fille Farah. Cette histoire d'amour et de passion est vue par Lenny puis par Hind. On voit comment Lenny se remettra de son chagrin d'amour par le biais de la poésie. Histoire d'amour qui charge ce roman d'une émotion et d'une sensibilité et qui interroge sur qui aime le plus dans un couple, qui se laisse porter par les sentiments de l'autre, qui est incapable d'aimer.
Donc, c'est Farah qui prend la parole en premier, elle a dix-sept ans et vit au sein de la congrégation de la treizième heure fondée par son père. Elle n'est jamais parvenue à connaître sa véritable histoire familiale et ne connait pas sa mère qui les a abandonnés après sa naissance. En pleine adolescence, elle découvre son intersexuation et pose d'innombrables questions à son père, mais elles restent sans réponse, quant aux réponses de ces grands parents, elles restent confuses.
La seconde partie donne la parole à Lenny , il élève seule Farah après que Hind les ait abandonnés. Lenny raconte sa rencontre avec Hind et sa passion pour elle, qui se révèle être une femme trans. Il a fondé la congrégation de la Treizième heure, une église liturgique basée sur la poésie et plus particulièrement sur un sonnet de Nerval « Artémis ». Lenny pense qu'en lisant et en scandant de la poésie on arrive à une sorte de cheminement spirituel qui aide à aller mieux.
Enfin Hind prend la parole pour raconter son histoire avec Lenny, qui diffère beaucoup de celle de ce dernier, elle raconte également son parcours de vie chaotique en tant que trans.
Commenter  J’apprécie          50
Aujourd'hui je vais évoquer La Treizième heure le nouveau roman déjanté d'Emmanuelle Bayamak-Tam. Elle est notamment l'auteur d'Arcadie et de la princesse de dans la même veine que ce nouvel opus et sous l'identité de Rebecca Lighieri elle a publié d'autres romans comme Il est des hommes qui se perdront toujours.
La Treizième heure est une histoire d'amour, de quête spirituelle et d'identité. le roman est organisé en trois parties principales ayant chacune un narrateur différent. Cela commence par Farah, puis c'est le récit de Lenny et enfin la version de l'histoire proposée par Hind. Les liens de parentés sont a priori simples entre eux : Farah est la fille adolescente, Lenny est le père et Hind la mère absente. Farah n'a pas été élevée par Hind qui a fui le domicile peu après la naissance de la petite fille. Mais en réalité le jeu des identités et des orientations de genre rend la situation beaucoup plus complexe et drôle. Il faut se méfier des apparences, le sexe de naissance ne correspond pas nécessairement au genre assumé. Chaque protagoniste raconte la quinzaine d'années précédant les faits à sa façon, avec quelques règlements de compte à la clé. le père est le fondateur d'une communauté religieuse qui pour sa liturgie utilise de la poésie qui est récitée par les fidèles. Suite à la naissance de sa fille et à la défection d'Hind, l'amour de sa vie, il est resté célibataire ; mais il a été épaulé par Sophie mère de famille amoureuse de lui, et a bénéficié des largesses financières d'une vieille dame qui l'a soutenu pour fonder son église. Sa fille précise : « c'est mon père qui a créé l'Église de la Treizième Heure, et si elle compte moins d'adeptes que celle du Septième Jour, c'est une injustice que le temps se chargera de réparer – car je tiens à dire que notre religion est à la fois beaucoup plus libre, beaucoup plus inventive et surtout beaucoup plus poétique que celle des adventistes. » Il ne faut pas trop raconter l'histoire de cette famille, juste dévoiler quelques indices. Farah est intersexuée et disgracieuse elle a côtoyé les membres de la communauté mais comme elle le dit : «je ne sais pas si c'est le fait d'avoir grandi chez les illuminés, mais je voue désormais une passion aux sciences exactes – comme une sorte de syndrome réactionnel aux discours mystiques et aux songeries idéalistes. » Au moment du récit elle est en pleine crise d'adolescence, en interrogation sur ses choix futurs et à l'affût de la vérité sur sa mère. Sa mère déclarée, Hind, est en réalité un homme qui va abandonner Lenny pour le magnifique Sélim. On imagine la difficulté de révéler à l'adolescente la vérité, Lenny ayant toujours opté pour le mensonge. En effet : « pour bien faire, selon elle, il faudrait que je dise à Farah que sa mère est un homme – ou que sa mère est son père, comme on voudra. Et puis tant qu'on y est et toujours pour bien faire, il faudrait que j'ajoute qu'elle-même est un garçon. » le ton du roman est souvent grivois, il est question avec une certaine liberté de sexe et de plaisir, même si l'amour n'est pas toujours heureux et épanoui. Voici quelques extraits emblématiques : « papa, j'ai à la fois des couilles et un vagin ! Et un truc qui pend, trop petit pour être un pénis et trop gros pour être un clito ! Ils vous ont dit quoi les médecins. (...). J'ai encore le goût tourbé de la salive sur ma langue, ma cuisse est encore engluée de son sperme, mais je tremble déjà, dans l'attente d'un commentaire désobligeant, voire d'une sentence de bannissement à vie tombant de cette bouche magnifique. » Dans le roman le thème identitaire (personnages trans, intersexué) est largement brassé. Ce qui donne des phrases presque cliniques : « un garçon avec un phénotype féminin, certes, mais un garçon quand même. Nous avons affaire à un syndrome d'insensibilité aux androgènes ! Pour faire simple, faute de récepteurs ad hoc, la testostérone n'a pas pu viriliser les tissus cibles pendant la vie foetale. Mais comme les testicules de votre enfant fabriquent quand même l'hormone antimüllérienne, l'utérus ne s'est pas développé non plus. Ni les ovaires. » Songeant à son histoire d'amour unique et passée Lenny constate : « elle me laisse avec l'enfant née de ses rêves – mais aussi de sa giclée de sperme ; elle me laisse avec l'enfant de l'amour, et avec la blessure inguérissable de son départ. »
La Treizième heure est l'église qui rassemble les personnages du roman. Ils sont tous attachants malgré leurs particularités et leur difficulté d'insertion sociale. le texte est truffé de références littéraires et de citations de chansons (Serge Lama, Edith Piaf, Michel Sardou notamment). Emmanuelle Bayamak-Tam est en empathie avec les personnages et son message de tolérance est évident.
Voilà, je vous ai donc parlé de la Treizième heure d'Emmanuelle Bayamak-Tam paru aux éditions POL.

Lien : http://culture-tout-azimut.o..
Commenter  J’apprécie          50
L'Eglise de "La Treizième Heure" a été fondée par Lenny, prophète plus inspiré par Rimbaud et Aragon que par la Bible (bref, un biblio thérapeute qui s'ignore).
Dans ce roman, il est beaucoup question de poésie mais aussi d'intersexuation et de femmes à bite.
L'écriture, ample, s'y déploie avec fluidité (logique, on est "gender fluid" ou on ne l'est pas).
Commenter  J’apprécie          30
Après Arcadie, c'est le deuxième livre que je lis de cette auteure. Comme dans le précédent une adolescente prénommée Farah, intersexuée grandit dans une communauté idéaliste, et les thèmes sont également semblables: il y est question de genre qui ne correspond pas forcément à celui constaté à la naissance, mais aussi la famille, l'amour, l'humanisme y jouent un rôle important et comme l'autre elle est un poil déjantée. Et pourtant l'histoire est complètement différente. J'ai aimé l'ambiance positive que décrit Farah dans la première partie du roman, tout en restant un peu interloquée par le côté religieux de la secte dans laquelle elle vit. Mais la vraisemblance ou son contraire ne sont pas un critère qui me fait aimer ou détester un livre: j'ai donc accepté cette secte pleine de bon-sens et d'un ou deux brins de folie. L'idéalisme à la base a quelque chose de vrai, les personnages sont pour la plupart attachants, et étonnamment vrais. Les autres parties m'ont moins plues, les narrateurs n'ayant plus la fraîcheur et l'humour de Farah.
Si le livre est divertissant et assez rapide à lire, il m'a manqué un je ne saurais dire quoi pour pouvoir le classer dans les inoubliables, il est intéressant à lire, un vrai pamphlet pour la diversité en tous genres, c'est pourquoi je lui accorde quatre étoiles.
Commenter  J’apprécie          20




Lecteurs (740) Voir plus



Quiz Voir plus

Testez vos connaissances en poésie ! (niveau difficile)

Dans quelle ville Verlaine tira-t-il sur Rimbaud, le blessant légèrement au poignet ?

Paris
Marseille
Bruxelles
Londres

10 questions
1231 lecteurs ont répondu
Thèmes : poésie , poèmes , poètesCréer un quiz sur ce livre

{* *}