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En guerre » est le dernier livre de
François Bégaudeau . Vous n'aurez pas manqué de noter que Stéphane Brizé a déjà montré la France ‘
En guerre' dans son film présenté il y a quelques mois à Cannes, avec Vincent Lindon. Je n'ai pas vu ce film, mais j'ai lu le livre, et je continue de penser que le titre ‘
En guerre' pour désigner la réalité sociale en France est une provocation à l'égard de tous ceux qui sont victimes de la Guerre, la vraie. Même si Louisa, un des personnages principaux, a tout d'une combattante des temps modernes.
Romain Praisse et Louisa Makhloufi n'auraient jamais dû se croiser: ils ont beau traverser les mêmes espaces, leurs origines sociales et leurs parcours respectifs excluent à priori cette possibilité. Et pourtant les voici embarqués dans une histoire de sexe, puisqu'à défaut d'un langage et d'un humour communs, leurs corps ont trouvé une sorte d'harmonie. Sauf que du coup Louisa délaisse un peu son compagnon, Cristiano, qui vient de perdre son emploi et s'adonne avec ferveur aux paris en ligne.
Voici une histoire qui à mon avis manque un peu d'originalité, sur fond de crise sociale et de capitalisme galopant. Bégaudeau nous montre un petit morceau de cette France disloquée où les classes sociales se frôlent et cohabitent, où les conflits sociaux engendrent les drames individuels, où plane l'ombre du terrorisme. Jusque là, malheureusement, rien de nouveau par rapport aux gros titres de l'actualité: la charge contre les conditions de travail chez Amazon en est un exemple. L'épilogue est surprenant, on croirait débuter un nouveau récit, mais l'affaire se boucle en quelques pages et son dénouement manque à mon avis de crédibilité.
Et pourtant le livre se lit d'une traite, car
François Bégaudeau emploie un style brut, tranchant, ramassé, qui prend aux tripes et malgré tout fait sourire – d'un petit sourire contrit, un peu jaune, en particulier à la lecture de la liste insensée des ‘paris possibles' sur Internet. L'auteur n'hésite pas à recourir à des raccourcis saisissants ou des formules choc pour provoquer l'émotion du lecteur.
Il dresse un beau portrait de femme avec cette Louisa, si vaillante et réaliste, face à son Cristiano, figure sacrificielle, victime d'un atavisme social et d'une déshumanisation du monde du travail qui le dépassent largement ; Romain, quant à lui est l'archétype du jeune homme de classe moyenne instruit, qui peine à surnager dans l'océan de ses contradictions. Vous verrez aussi passer Alban de Carné, un avocat un peu farfelu dont la présence vient pimenter la dernière partie du roman, et de nombreux autres personnages secondaires plutôt bien croqués. Pour la suite, cliquez sur le lien
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