Citations sur Les sirènes du Transsibérien : De Brest à Vladivostok (18)
L'obéissance politique est devenue pour les Russes un culte et une religion. Ce n'est que chez ce peuple qu'on a vu les martyrs en adoration devant les bourreaux.
D'après Custine dans ses lettres de Russie.
A cet endroit, on arrive assez vite à la plage de Ruscumunoc, une superbe crique que les naturistes utilisent dès les beaux jours et par conséquent le sentier côtier est sillonné par tout un bataillon de voyeurs armés de jumelles qui font mine d'observer les macareux moines et les fous de bassan.
Quoi qu'il arrive, où qu'on aille, on se fracasse toujours le nez au fond d'une impasse, n'est ce pas ?
Il n'y eut pas de d'adieux, encore moins de larmes et d'effusions. Le train n'était pas encore entré en gare que les derniers passagers se pressaient déjà près de la sortie comme s'ils avaient une correspondance urgente à prendre ou comme si c'était une question de vie ou de mort de quitter ce train au plus vite. Le colonel Dourakine avait troqué son pyjama de flanelle contre un uniforme qui semblait neuf et, rasé cette fois-ci de prêt, il relevait doctement le menton en attendant l'ouverture des portes. Une demi-douzaine de médailles étaient plantées contre sa poitrine. Le couple de petits vieux se serrait l'un contre l'autre de peur de ne pas se perdre et quelques grosses touffes de manteaux de fourrure me cachaient la vue. Le couloir était encombré le cabas et de valises en tout genre. Ça sentait l'exode. A peine les portes furent-elles ouvertes que tous s'égayèrent telles une nuée d'étourneaux et je me retrouver ce matin-là aussi seul qu'au cœur de la grande taïga. J'ai pensé : peut-être était-ce là la parabole de l'âme russe, la fameuse âme russe, aussi énigmatique que décourageante ?
C'était Vladivostok, dernière station avant pétaouchnok, terminus de la géographie.
Le Transsibérien est comme une immense bande dessinée qui raconte sur plus de 9000 km l'histoire de tous les peuples de Russie et de Sibérie. Le Transsibérien, c'est la frise du Parthénon sur rail, c'est toute la Torah déroulée d'un bout à l'autre sur un ballast de cailloux rosâtres devenu par le temps aussi rêche qu'un parchemin.
Désespérant à dire mais il semble que ce soit là la vocation de la région comme si la Sibérie était à elle seule une punition, un châtiment. J'apprends récemment par un article de presse qu'une institution allemande a décidé d'exporter de jeunes délinquants dans un camp de Sedelnikowo, au sud d'Omsk, pour les confronter à des conditions extrêmes de vie : pas d'eau courante, pas de toilettes et pour se chauffer du bois à couper. Certains de ces gamins ont treize ans.
Ça sert à ça, les trains, partir et revenir, rentrer ou s'enfuir.