C'est ainsi que je suis devenu un excellent élève.Le fait d'avoir l'assurance de l'assentiment de ma mère quels que soient mes résultats m'a poussé,dans un premier temps ,à profiter sans vergogne de son incompétence,à lever le pied sur le travail scolaire et à lui cacher mes piètres résultats qui allaient inévitablement avec.Mais,le temps passant,sa mansuétude à mon égard a fini par me peser.Envahi par un sentiment coupable,je me suis promis de ne plus jamais la trahir,de toujours réussir 《 pas trop mal》 et de faire 《 encore mieux la prochaine fois》.Quelques facilités aidant,j'ai rapidement pris goût aux études et pu obtenir brillamment mes diplômes. Au bout du compte, c'est bien la confiance naïve que ma mère me témoignait qui m'a poussé à devenir meilleur.Pour en être digne.Face à une telle sincérité et à une telle innocence, on ne peut ni mentir ,ni tricher .Je lui dois cette leçon. ( Page 45/46).
Mes parents et moi nous avons vécu ensemble mais jamais en même temps.
Je ne sais pas si ma mère a été une bonne mère. Ou simplement une mère qui a fait ce qu’elle a pu. Avec ce que Dieu lui a donné comme connaissance, comme amour, comme courage. Comme patience aussi. Je sais juste que c’est la mienne. Et que ma plus grande richesse en cette vie est d’avoir pu l’aimer.
En dehors des personnels soignants qui se succèdent à son chevet durant la semaine, je suis le seul dont elle accepte cette toilette, sans doute humiliante mais dont elle sait la nécessité.
Je me souviens de la première fois où j’ai dû m’en occuper. Son aide-soignante ne pouvait pas venir, elle avait eu un accident et elle pouvait se faire remplacer mais seulement à partir du lendemain. J’ai vu la détresse sur le visage de ma mère. Elle m’a demandé de lui faire une petite toilette, en attendant, juste avec un gant, pour laver son visage, son cou, ses bras. Mais je savais ce qu’il lui en coûtait de ne pas se laver enti§§rament, comme elle en avait l’habitude depuis toujours. Alors je l’ai regardée et je lui ai dit que j’allais m’en occuper. Elle n’a rien dit, ses yeux se sont embués, mais elle n’a rien dit.
…
Nous avons partagé ce moment d’émotion où nous nous sommes réfugiés dans notre humanité, l’un portant assistance à l’autre sans que les barrières des conventions n’y trouvent à redire.
Ne parlons même pas d'imaginer sa mère ayant du désir... c'est un tabou total. Penser qu'elle aurait eu le moindre plaisir à faire un enfant avec votre père: Impensable. Au sens premier du terme. Le cerveau s'y refuse. Les images ne viennent pas. Pas plus que les paroles. Les émotions. Les respirations courtes. La transpiration. Les sécrétions. La jouissance. Impensable. Définitivement impensable. Pourtant elle a dû être femme, ma mère. Pas seulement maman. Pas seulement épouse passive victime d'un devoir conjugal. Une femme. p.55
Au bout du compte, c'est bien la confiance naïve que ma mère me témoignait qui m'a poussé à devenir meilleur. Pour en être digne. Face à une telle sincérité et à une telle innocence, on ne peut ni mentir ni tricher. Je lui dois cette leçon. p.46
Pourtant ce ne sont pas les occasions qui ont manqué de valoriser ma mère. Mais il aurait fallu que j'aie conscience plus tôt de sa richesse. (...) Comme si une mère n'était faite que pour servir les siens. Quitte à s'user jusqu'à la corde.
Elle essayait toujours de se sortir seule de n'importe quelle situation, "par peur de déranger", disait-elle. Mais je crois qu'au fond elle avait également une autre peur, moins visible, moins dicible, mais tout aussi profonde: montrer sa vulnérabilité.
Elle connait le texte par coeur je crois. Elle est loin de tout comprendre malgré le commentaire que je lui ai maintes fois fait de son vocabulaire, de sa grammaire, de ses formes stylistiques et de ses thématiques. Mais elle rate rarement l'une de mes coquilles de lecture.