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4,08

sur 590 notes
Je découvre l'auteur grâce à ce roman. Un livre qui m'a littéralement chamboulée, une histoire poignante, bouleversante, émouvante, touchante, pas assez de mots pour décrire mon ressenti,
Amine, reçoit un appel téléphonique lui apprenant la mort de son père, cet homme qu'il n'a pas vu depuis une vingtaine d'année . IL doit vider son appartement , et là il découvre une série de K7, qui sont datées , enregistrées par son père. Il entend sa voix, ce qu'il apprend est loin de l'image qu'il avait de lui. L'histoire de débute en 1965, suite au départ du Maroc vers la France. Ses parents ne sachant pas lire, il choisit de s'enregistrer, et raconter son quotidien, sa vie, ses amours,ses amitiés, Il a un grand respecter , pour sa mère et son père. Amine découvre une histoire qui le touche en plein coeur , un véritable uppercut. Il part en quête des personnes qu'ils ont connu, il réalise , qu'il ne connaissait pas cet homme qui a ouvré toute sa vie pour le bien être de sa femme et de ses enfants, leur assurer une vie resplendissante, et un avenir prometteur . Amine est déstabilisé, il découvre cet homme qui a tu son passé, qui a avancé son parcours en France, mais son coeur reste toujours au Maroc. L'auteur signe un roman époustouflant, intense en émotion. La plume est sensible subtile , tout est écrit avec une grande pudeur. " Les silences des pères" où plutôt "Le silence du père", prend tout son sens au fur et à mesure de la lecture. Un roman court puissant , qui m'a hypnotisée jusqu'au final.
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Vingt-deux ans que Amine n'a pas revu son père, ce père qui vient de décéder en cette mi-avril 2022, à l'âge de quatre-vingt quatre ans.
« Il a fallu qu'il meure pour que je revienne », c'est ainsi qu'il s'exprime de retour à Trappes pour assister aux funérailles. Il s'agit pour lui à la fois de son père et d'un étranger.
Mais en débarrassant l'appartement, il découvre par accident, une lourde enveloppe cachée sous la baignoire contenant une quarantaine de cassettes audio avec sur chacune, mention d'une année et d'un lieu. L'enregistrement le plus ancien date de 1965 et le plus récent de 2006. Il extrait également un magnétophone enregistreur.
Dès la première écoute il se rend compte qu'il s'agit de cassettes enregistrées par son père et adressées à son propre père resté au pays, au Maroc. Cette première cassette fait référence à un ami d'enfance. Il recherche et trouve une adresse d'un foyer de Lille et décide de s'y rendre.
Il apprend alors comment son père, alors jeune homme de dix-neuf ans et son ami Driss dont les familles respectives peinaient à survivre, avertis de la venue de l'« Homme de la mine », avaient parcouru depuis leur village, une centaine de kilomètres à pied et attendu plusieurs heures sous un soleil de plomb avant d'être admis au bagne des houillères : une sélection rappelant le marché aux esclaves.
« Un voile pudique et silencieux recouvrirait par la suite la souffrance de leur exil. »
Ils arrivèrent donc dans le nord de la France à Lens, dans les mines de charbon, sans savoir que leur premier travail allait consister à prendre la place de grévistes.
Au hasard des témoignages recueillis auprès d'autres amis de son père, il apprend comment celui-ci, après avoir été une gueule noire est devenu une gueule grise lorsqu'il est parti travailler dans une cimenterie d'Aubervilliers en région parisienne, comment il a fait connaissance ensuite avec un producteur et éditeur de musique, puis s'est retrouvé chez Lip à Besançon ou encore à travailler la terre dans le sud de la France avec des Algériens et des Harkis.
Lui qui est devenu un pianiste classique de renommée internationale finira-t-il par comprendre comment une cassette de l'enregistrement du concert donné à Cologne par Keith Jarrett avait pu atterrir chez son père et pourquoi tous deux étaient accros à cette mélopée?
À mesure qu'il découvre l'histoire de son père, il comprend mieux le temps des silences de cet homme duquel il s'était éloigné. Boualem, un autre de ses amis encore en vie lui a d'ailleurs fait comprendre que si les jeunes ne connaissaient plus ces histoires, c'est parce que les vieux comme son père ont voulu que toutes les souffrances, tout ce qu'ils ont subi, s'arrêtent avec eux.
Autant de rencontres et de découvertes qui font qu'Amine a le sentiment d'avoir été trompé, que son père était différent, que c'était un autre homme.
Son trouble sera à son apogée lorsque dans une cassette, il entend son père amoureux demander à son propre père l'autorisation d'épouser une Française qu'il aime...
En entendant l'histoire de son père, il entend le sens de ses silences.
170 pages seulement et pourtant que d'enseignements à retirer de ce roman !
En prenant comme héros de son roman, cet immigré marocain, Rachid Benzine permet de remettre en mémoire ce pan historique que nous avons un peu trop vite oublié, cette convention bilatérale sur la main d'oeuvre signée entre la France et le Maroc, juste après l'indépendance. Les Charbonnages de France ayant obtenu un permis de recruter à grande échelle opéraient une multitude de sélections dans les villages et les souks, puis embarquaient cette main-d'oeuvre docile et précarisée, un élément de gestion de la production du charbon :
« Avec du ciment et des immigrés, voilà comment on a tout reconstruit. Des milliers de forçats affamés. »
C'est aussi l'entrée en nombre des femmes dans le milieu du travail, le développement du cinéma militant mais aussi ces camps de Harkis, ces Algériens qui se sont battus aux côtés de la France, ont perdu la guerre, leur terre et vivent maintenant comme des exilés, qui sont abordés lorsque l'homme arrive chez Lip en 1973.
Ce roman, s'il transcrit avec beaucoup de pudeur, ces silences, ces non-dits entre le père et son fils, ces silences souvent mal interprétés, ce sont aussi ceux de la société française au sujet de l'immigration depuis le début des Trente Glorieuses.

Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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"The Sound of Silence"

Le silence pour laisser les notes flotter...

"Certains compositeurs affirment que la musique se trouve entre les notes."

La musique a été le seul moment de communion entre le narrateur et son père aujourd'hui décédé.
Il éprouve du ressentiment envers ce père trop silencieux. Un père étranger, exilé de sa terre natale mais surtout exilé de sa propre famille.
Une famille qu'il estime avoir trahie par un silence impardonnable lors du décès accidentel de son frère.

Le narrateur est à présent devenu un pianiste de renommée internationale. Il a pris ses distances avec ses proches. Loin des yeux, loin du coeur.
Le décès de son père l'oblige à revenir à Trappes. Il s'y rend à contrecoeur pour y effectuer les formalités d'usage.
En débarrassant les affaires de son appartement, il découvre une enveloppe contenant de nombreuses cassettes audio. En les écoutant, il s'aperçoit que c'est l'histoire de son père qui défile.Toute une vie d'immigré qui resurgit du passé et qui l'emmenera à parcourir la France du nord au sud pour enquêter sur un père différent de ce qu'il imaginait..et finalement comprendre le sens de ses silences...

Un style sobre pour évoquer tout en pudeur une relation entre un père et son fils rendue difficile par les non-dits et les malentendus. Des silences qui nourrissent l'imaginaire et modèlent la réalité.
Ce roman émouvant nous invite à écouter plus attentivement ces silences qui en disent parfois beaucoup.
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Après "Voyage au bout de l'enfance" qui m'avait beaucoup touchée, je découvre aujourd'hui "Les silences des pères", roman poignant dans lequel j'en ressors tout aussi troublée.

Après vingt ans d'absence, un fils apprend par téléphone le décès de son père, avec qui il n'était pas fâché mais que les non-dits et les silences ont fini par éloigner. de retour à Trappes pour les obsèques, ce fils (dont on ne découvre le prénom qu'à la fin) trouve une enveloppe emplie de K7, cachée dans un renfoncement de la salle de bains. Chaque K7 est étiquetée d'une année et d'un lieu.

La première K7 débute avec l'année 1965, dans le Nord de la France. Un jeune travailleur immigré s'enregistre, il parle à son père resté au Bled avec le reste de sa famille. À cette époque, tout le monde n'a pas le téléphone, tout le monde ne sait pas lire non plus, alors on s'enregistre et on l'envoie à la famille comme on le ferait d'une lettre. le jeune ouvrier raconte les conditions de travail à la mine, à la cimenterie, dans le bâtiment, la façon dont ils sont reçus et perçus par les Français, les douleurs de l'exil, les désillusions, ses amours, son mariage, ses enfants...

... que l'un d'eux est en train d'écouter justement. Au fil des K7, ce fils en plein deuil se déplace aux quatre coins de la France pour y rencontrer les personnes que son père nomme dans ses enregistrements. Ce père, qu'il a toujours connu silencieux et taiseux, il a l'impression de ne pas le (re)connaître. Quel jeune homme était-il ? Que s'est-il passé pour qu'il s'enferme dans ses silences ?

Au fil des K7 et des rencontres, le fils part à la recherche de l'homme qu'il ne connaît finalement pas, pour y découvrir les difficultés et obstacles qu'il a rencontrés, les drames et les douleurs qui l'ont touché de près. Il va y voir un homme loin d'être aussi insensible et taciturne qu'il l'avait toujours cru.

"Les silences des pères", c'est le temps du deuil et des regrets, le temps de l'écoute et de la découverte. C'est un retour dans le passé. Y sont abordés les notions de sacrifice, d'amour paternel et de relations père/fils, on y parle aussi d'immigration et d'intégration, de conditions de travail des travailleurs immigrés et de leur exploitation.

L'auteur nous livre un récit poignant, court mais intense, tout en sensibilité et émotions, douloureux et lumineux tout à la fois, avec des personnages traités en profondeur sachant nous toucher au coeur.

Un très très bon moment de lecture.
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Lorsqu'Amine intègre le Berkley College, dans le cadre d'un programme d'échange entre conservatoires de banlieue et grandes écoles américaines, il s'est juré de ne jamais revenir. Et il a tenu parole. Vingt-deux ans qu'il n'a pas revu son père, ni la cité de Trappes, croisant, en de rares occasions, ses soeurs, lors de concerts qu'il donnait à Paris. Mais, en ce mois d'avril 2022, son père décède, à l'âge de 84 ans. Un père absent, silencieux, qui s'est toujours tenu à l'écart de la vie et de sa famille. Pour faire plaisir à ses soeurs, Amine revient sur les lieux de son enfance pour quelques jours. Assister à l'enterrement puis les aider à trier ses affaires et vider son appartement. C'est là qu'il découvre, entre le coffrage et le sabot de la baignoire, une enveloppe contenant une quarantaine de cassettes audio, mentionnant chacune une année et un lieu. du magnétophone s'échappe alors une voix chaude et profonde, celle de son père s'adressant à son propre père...

Ce père taiseux, devenu un étranger, Amine, aujourd'hui pianiste de renommée internationale, va peu à peu le découvrir à travers ces bandes magnétiques. Grâce au son de cette voix chaude, méconnue à ses oreilles, va se dessiner le portrait d'un homme qui aura sacrifié une partie de sa vie. Immigré en France, pendant les Trente Glorieuses, pour y travailler, ce père, comme tant d'autres, a dû quitter son pays et sa famille, renoncer à ses rêves pour tenter d'aider au mieux ses propres enfants à réaliser les leurs et à leur offrir un avenir meilleur. C'est un choc pour Amine d'entendre ces révélations, loin de se douter de ce que son père a subi, a supporté, a sacrifié et laissé. Tous ces silences entre eux prennent alors tout leur sens. Comme un travail de mémoire et pour rendre hommage à son père, Amine va se lancer sur les traces de ce passé, un passé ignoré parce que tenu au secret. À travers le personnage d'Amine et de son père, Rachid Benzine dépeint, avec justesse, intelligence et beaucoup d'émotions, le sort de ces immigrés et de ces enfants d'immigrés, partagés entre cette volonté de perpétuer la mémoire et celle de s'intégrer dans un pays qui les aura vu naître. Un roman fort, intense et tout en pudeur...
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Mémoires post-mortem.
A la mort de son père qu'il n'a pas vu depuis 22 ans, le narrateur découvre une collection de cassettes audio sur lesquelles son paternel consignait toute sa vie de jeune exilé.
Taiseux et aucunement démonstratif, c'est la redécouverte d'un homme et de ses propres origines.

Un livre très touchant et d'une grande dignité.

"C'est à la fois mon père et un étranger qui est mort."

S'adressant à son propre père resté au Maroc (donc le grand-père du narrateur), il parle comme jamais son fils ne l'a entendu "enfoncé dans son fauteuil et dans son silence" : l'exil, l'installation dans le Nord de la France, les difficultés de l'intégration, le travail d'ouvrier, les camps de harkis.
Politique et social, c'est une vie de non-dits ayant aussi une portée historique.
Comme si l'on retirait les oeillères d'un homme mais aussi celles d'un pays.
C'est ce qui en fait selon moi un grand roman.

Il arrive parfois que les pères ne sachent pas s'exprimer. Les fils non plus.
Comment renouer les fils d'une relation que l'on n'a pas vécue ?

Les enregistrements permettent petit à petit de mettre des mots sur l'histoire de ce grand inconnu.

Il n'est jamais trop tard pour combler les trous d'un passé que l'on n'a pas connu. le plus dur est de faire le premier pas et savoir entendre la voix de ces silences.

"Au fond, les enfants ne s'intéressent jamais à ce qu'ont été leurs parents."

C'est un très beau roman qui peut vous remuer aussi intimement qu'idéologiquement.
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Billancourt, place Jules Guesde.
Années 2000, le fronton blanc avec les lettres peintes en noir : Renault. Les portes grises, je présente mon badge, je passe sous le porche et j'entre. Voilà de nombreuses années que ces bâtiments n'ont plus produit aucune voiture, pourtant dans les années 2000, Renault y avait encore de nombreux bureaux.
Sur la place, un grand rond-point circulaire, autour, plusieurs cafés, Les côteaux, le National, La brasserie du Parc …
Face au rond-point quelques bancs, les petits vieux sont là, fidèles au poste. Tous les jours je passe devant eux avant de franchir à nouveau le porche le soir avant de rentrer chez moi.
2024, le quartier a complètement changé. le porche a été repeint en gris pâle et porte la mention Liberté, Égalité, Fraternité et abrite le lycée Simone Veil, le petit hôtel miteux a disparu, les cafés populaires ont fermé les uns après les autres. le dernier bastion, le National ancien bar-tabac, vitres barbouillées de blanc désormais, a clos définitivement ses portes…
Mais les petits vieux sont toujours là sur les bancs, comme immuables. Ils devisent, palabrent, toujours fidèles au poste.
Alors en lisant le livre hommage de Rachid Benzine à son père, émigré marocain qui a passé toute sa vie dans les usines françaises, forcément, j'ai pensé à eux. Ce livre, c'est leur histoire, …
Ils ont rêvé d'une vie meilleure, enduré un déracinement qu'ils pensaient provisoire le temps de gagner assez d'argent pour subvenir aux besoins de leur famille pour ensuite rentrer au pays. Et puis finalement, ils sont restés en France, cet autre pays qui avait besoin d'eux pour se développer sans pour autant les accueillir à bras ouverts. Ils ont courbé la tête, pris ces jobs mals payés en serrant les dents, en reportant leurs espoirs de réussite sur leurs enfants.
Le narrateur n'a jamais réussi à dialoguer avec son père de son vivant, c'était un homme secret, mutique, perdu dans ses pensées, qui semblait sans affect. En vidant les affaires du père de son appartement après son décès, Amine trouve des cassettes audios envoyées par son père à son grand-père afin de lui donner des nouvelles, car ses parents ne savent pas lire. À l'aide de ces cassettes, le fils découvre qui était son père, et part à la rencontre des personnes qui l'ont connu. Ces témoignages, qui mêlent passé et présent m'ont touchée en plein coeur. J'ai été émue de la rencontre post-mortem du fils et du père, du temps à jamais perdu, des paroles qui ne seront pas échangées.
Un livre court et dense, qui mérite qu'on prenne le temps de le lire assis sur un banc en bonne compagnie …
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L'introduction, avec le concert à Cologne de Keith Jarreth m'a tout d'abord intriguée et intéressée. Puis j'ai compris, ce que nous dit clairement le titre, que le fils Amine d'un père taiseux était devenu pianiste par frustration et une sorte de compensation : remplacer les mots absents par les sons.
Car Amine ne voit plus son père depuis vingt-deux ans, et c'est lorsque celui-ci meurt qu'il revient à Trappes :
« Ce deuil n'est pas le mien. Pour pleurer quelqu'un, il faut l'avoir aimé. »
Et s'il ne parlait pas, ce père, c'est qu'il n'avait rien à dire, pense-t-il.
Puis Amine trouve des cassettes cachées, dans lesquelles son père parle à son propre père. Paroles envoyées par courrier, ou gardées, comme lorsqu'on écrit une lettre en se gardant bien de l'envoyer.
le fait est que le fils et petit-fils découvre tout un monde, des relations basées sur l'obéissance, la volonté de cacher son mal-être, de la part du fils parti du Maroc pour travailler dans les mines de charbon du Nord de la France, et pétries de religion musulmane, comme l'interdiction de se marier avec une Française non musulmane de la part du père.

J'étais persuadée que les Polonais seuls s'étaient confrontés au grisou, à la silicose dans le bagne des Houillères  et avaient pour cela bénéficié d'une petite maison pour abriter les pauvres survivants. Ils sont considérés comme l'exemple même de l'intégration réussie d'immigrés, gardant leur langue à l'intérieur des maisons, priant dans leurs propres églises, et se considérant comme Français.
Intégration, pas assimilation.
Or, non, les Marocains ont été recrutés sans savoir qu'au départ ils seraient casseurs de grève, donc haïs de leurs camarades. Leur statut des Marocains commence mal : pas d'avantages sociaux comme en ont connu les Polonais.
Juste une douche chaude.
le père s'est tu pour que le fils pianiste ne vive pas dans cet enfer, qu'il ne ressente aucune amertume ni rancoeur.
Cela, Amine va le découvrir peu à peu, en parlant avec les anciens amis de son père après sa mort, qui tous ont un souvenir ému de leur camarade.
Amine découvre aussi une cassette de ce fameux concert à Cologne où Keith Jarrett improvisait sur un sale piano.
Stop.
Ce père aimé, adulé par ses camarades, s'est enfermé dans le mutisme lorsque son fils ainé est mort : pas de vagues, surtout. Il n'est pas intégré mais ne veut pas manifester, ce qui provoque la fureur d'Amine. Il accepte de ne pas se marier avec la femme qu'il aime, donc Amine apprend qu'il est l'enfant de ce refus, ou plutôt de « l'acceptation de mon père des ordres de son propre père. »
Ce père qui souffre de l'absence d'Amine, mais n'est pas capable de lui dire. Qui préfère ses potes, qui préfère Keith Jarett.
Si Rachid Benzine a écrit : « les silences des pères » pour montrer l'amour paternel, personnellement, je n'y crois pas une seconde.
Au risque d'aller complètement à l'encontre de presque toutes les chroniques très positives, pas une page ne m'a émue. Les personnages m'ont semblé ne dire que des banalités concernant le père.
Enfin aucun sentiment ni amical, ni paternel ne m'a fait vibrer.
Peut-être d'ailleurs que le propos de Rachid Benzine est de nous révéler l'immigration ratée de ce père marocain, resté au pays de son père et sous ses injonctions, gardant pour lui le malheur de ne pas pouvoir s'intégrer.
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Comment faire le deuil d'une absence ? le père du narrateur s'est montré excessif surtout dans le mutisme durant sa vie, une existence résumée à deux dates en épitaphe, « et un immense vide entre les deux». Expliciter les sentiments du narrateur serait dès lors bien délicat, pour tout dire il ne le pleure pas car il ne l'a pas aimé, et ce n'est pas l'annonce de son décès alors qu'il est pleine tournée de pianiste qui risque de chambouler son retrait indéfectible de la vie familiale à Trappes, depuis 22 ans.
Rachid Benzine réussit ici le portrait en absence d'un exilé du Maroc durant les Trente Glorieuses, réfugié dans le silence et inerte à sa vie familiale à Trappes, un portrait saisissant d'obstination mutique avec la mort en parfaite relayeuse d'une vie pour laquelle il aura oblitéré « la parole, le bruit, le brouhaha, les ordres et les mots doux », laissant aux autres « les chants et les berceuses, car lui avait le silence et l'amertume. ». Avant que tout ne s'emballe par la découverte d'enregistrements audios, et d'une voix paternelle. Tout en demi-mesure, en sobriété et en délicatesse, le roman nous emporte dès lors dans les souffrances de l'exil (« comment la parole aurait-elle pu s'y frayer un chemin? ») et les non-dits, explore les pistes d'une réhabilitation et d'une renaissance paternelle, en nous prenant à revers dans les filets de l'émotion.

Un bien beau roman lu d'une traite, merci Célestine pour le conseil !

« Peut-être que la parole arrache brutalement au silence ce qu'il a gagné lentement. Et le galvaude à jamais. Et si le silence était notre dernier espace de liberté ? Là où s'appréhende notre savoir, ce que nous avons appris de l'existence. Se taire pour accéder au vrai, au beau, au juste ? »
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Un fils a perdu son père, ils n'étaient pas proches et le fils lui en voulait, à son père, de son silence. Après avoir vidé l'appartement, presque par hasard, il découvre une enveloppe avec un magnétophone et des cassettes, ce sont les messages que le père envoyait à son propre père resté au Maroc.

Les silences des pères de Rachid Benzine raconte la quête d'un fils pour retrouver le parcours de son père. Dans les années 1970, alors jeune homme de dix-neuf ans, il est venu travailler en France, pour soutenir sa famille.

Pas vraiment un thème de tourne page, et pourtant ! Je n'ai eu de cesse d'avancer dans le livre. Ce qui a dominé ma lecture a été l'émotion, la tristesse pour ce fils qui n'a pas connu son père, l'indignation et enfin la révolte. Comment a-t-on pu traiter des êtres humains d'une telle façon ? Et enfin du soulagement quand j'ai compris que le fils avait, par-delà la mort, retrouvé son père.
Mais faut-il attendre la mort de ses parents pour les découvrir ?

Lien : https://dequoilire.com/les-s..
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