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sur 4789 notes
La mère d'Anne Berest reçoit un jour une carte postale.
Simplement quatre mots : Ephraïm Emma Noémie Jacques.
Pas de signature.
Vingt ans plus tard, elle ressent le besoin de savoir qui a écrit cette carte avec les noms de ses arrière grand-parents et de sa grande-tante et de son grand oncle.
Avec l'aide de sa mère qui a conservé un nombre incalculable de documents, elle retrace la vie de ses ancêtres.
Jusque là, elle n'en connaissait rien.
Je n'avais pas spécialement envie de lire ce livre.
Les auteurs qui s'emparent de leur propre vie familiale pour écrire des romans, en général, je n'aime pas tellement ça.
La bibliothécaire me l'ayant carrément mis dans les mains, je me suis dit, après tout, pourquoi pas, si ça me gonfle, j'arrêterai, d'autant qu'il fait 500 pages.
Et bien je suis allée jusqu'au bout sans aucune lassitude.
Bien sur on a déjà lu des tas et des tas de livres sur les juifs et sur la Shoah.
Ici, dans la première partie, on suit les déboires de la famille Rabinovitch grâce aux archives de la mère d'Anne Berest.
La second partie semble plus imaginée par l'auteur.
Mais le tout forme un très beau roman au style impeccable.
Franchement, je ne regrette absolument pas ma lecture.
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J'ai beaucoup aimé ce livre qui sait nous toucher en plein coeur. Je ne savais pas qu'il y a deux soeurs Berest écrivains, j'ai beaucoup apprécié Artifices et je croyais qu'il s'agissait de la même auteure, mais non il y a Claire et Anne, toutes deux très talentueuses.

Ce roman se déroule en plusieurs parties. Tout d'abord en 2003, Lélia, la mère d'Anne, reçoit une carte postale anonyme de l'opéra Garnier, achetée plus de dix ans auparavant, sur laquelle figurent les quatre prénoms de ses grands parents, Emma et Ephraïm, de son oncle Jacques et de sa tante Noémie, tous morts en déportation en 1942. Lors d'un déjeuner du dimanche, Lélia parle de cette carte avec ses filles et son mari, mais personne n'a la moindre idée de qui a bien pu l'envoyer. Elle disparait dans un tiroir, alors que Lélia commence discrètement à enquêter sur sa famille.

Dix ans plus tard, Anne est enceinte et s'intéresse à ses ascendants, en vue d'une transmission à son futur bébé. Sa mère lui raconte l'histoire de ses grands parents, nés en Russie à la fin du dix-neuvième siècle. En 1919, le père d'Ephraïm réunit tous ses enfants pour les inciter à émigrer pour fuir les persécutions. Il leur déconseille de se rendre en Europe, mais plutôt en Palestine avec lui ou aux USA, mais les jeunes préfèrent l'Europe, et ne peuvent croire leur père quand il leur dit qu'un jour tous les Européens voudront les voir disparaître. Emma est enceinte et ils attendent la naissance de Miriam pour fuir la Russie dans une charrette. Ils s'installent successivement en Lituanie, en Pologne et en Palestine, le plus souvent chassés par de nouvelles persécutions. Mais le rêve d'Ephraïm c'est Paris, il est ingénieur et a inventé une machine à pain qu'il veut faire breveter en France où la petite famille arrive en 1929. Il inscrit ses filles, Miriam et Noémie dans le meilleur collège où elles deviennent des élèves brillantes. le rêve absolu du père est d'être naturalisé, il en fait la demande et ne voit pas l'étau se resserrer sur les juifs, il espère faciliter sa naturalisation en acceptant tout ce que l'administration lui demande, mais toute la famille sauf Miriam sera assassinée à Auschwitz en 1942 alors que Miriam et son mari Vicente deviennent résistants.

Six ans plus tard, la fille d'Anne est victime de la remarque banale d'un petit camarade qui lui a dit que dans sa famille on n'aime pas trop les juifs. Anne rencontre le directeur mais surtout décide de découvrir l'identité de la personne qui a envoyé la fameuse carte il y a près de vingt ans. Elle enquête avec sa mère après qu'un détective lui ait suggéré quelques pistes. Ce voyage les entraîne sur les traces des grands parents et aussi de Miriam qui a refait sa vie après la guerre et n'a jamais rien voulu dire à sa fille.

Ce livre est très bien écrit, sans pathos mais avec beaucoup d'émotion. Avant cette carte Lélia et ses filles ne savaient pas grand chose de leurs ascendants vu que Miriam refusait de parler. Lélia fait partie de cette génération confrontée aux silences et aux non-dits. Anne s'interroge sur ce que signifie être juive alors que ce n'est ni sa religion ni sa culture et qu'elle ne pratique aucun de ces rites. Après le diner de Pessa'h chez Béatrice, une amie de son petit ami où elle s'est sentie complètement hors du coup, elle se pose la question et en conclut que son identité consiste à avoir hérité de la peur et de l'angoisse de ses ancêtres, peur de la police, de la foule, de l'administration etc. Anne et sa mère retrouvent des objets volés à leur famille, mais l'important est de dire comment ça s'est passé, on ne sait pas si elles ont pu obtenir leur restitution.

La question de l'identité juive et de la mémoire est au centre de roman. On est évidemment plus sage quand on sait comment ça a fini, mais je suis quand même étonnée de l'aveuglement d'Ephraïm qui semble se jeter de lui-même dans la gueule du loup, obsédé par sa naturalisation, il demande à ses enfants de ne pas se rebeller au lieu de les pousser à fuir comme l'a fait son propre père vingt ans plus tôt. Lorsque sa cousine Anna, en 1940 lui propose de fuir avec elle en Amérique, il refuse, blessé qu'il ne s'agisse pas d'un voyage romantique avec son amour de jeunesse, mais d'une proposition raisonnable pour mettre sa famille à l'abri, il n'y a aucune raison de ne pas faire confiance aux autorités françaises pour lui. Cet aveuglement m'a toujours étonnée, pourtant les mesures de Vichy était clairement antisémite depuis le début du régime. le peu de solidarité entre les juifs m'a aussi surprise, les Français assimilés depuis quelques générations accusent les juifs étrangers d'être la cause de leurs malheurs et se montrent peu solidaires. Anne dit être le rêve incarné de arrière grand-père, elle ressemble à une Française ordinaire et rien ne trahit son origine.

Un autre point m'a beaucoup touchée, Anne et Claire ont pour deuxième prénom Myriam et Noémie et elles se demandent en quoi elles sont Miriam la survivante et Noémie la victime, en quoi ces prénoms ont influencé leur destin. Elle échangent des lettres à ce sujet, qui sont restituées dans le livre. Je me demande comment des parents peuvent faire porter un héritage aussi lourd à leurs enfants, ayant moi-même pour premier prénom celui de ma cousine qui s'est noyée quelques mois avant ma naissance, je n'utilise d'ailleurs que le deuxième.

Il y aurait encore beaucoup à dire sur ce magnifique roman, mais je vous laisse le plaisir de la découverte. Dans la version audio, il y a à la fin, un entretien où Anne explique en quoi ce roman est un roman vrai, tout est vrai, mais certains faits sont changés comme par exemple le nom du village où la famille Rabinovitch s'est réfugiée, pour éviter que des lecteurs trop curieux aillent fouiller ce passé, ou la durée de l'enquête qui dure trois mois dans le livre mais quatre ans dans la réalité, etc.

Ce livre est un gros coup de coeur pour lequel je remercie Netgalley, les éditions Grasset et Audiolib. Il a reçu plusieurs prix littéraires et ce n'est que justice, il les mérite amplement.

#Lacartepostale #NetGalleyFrance !

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La carte postale qui fournit son titre à cette oeuvre est très exactement le pendant du célèbre MacGuffin pour Alfred Hithcock. Elle n'existe que pour justifier la relation de cette épouvantable et émouvante chronique de la famille d'Anne Berest. "C'est l'élément moteur qui apparaît dans n'importe quel scénario." selon Hithcock et c'est ce qui permet à la narratrice d'entamer sa quête à la rencontre du passé familial.
Ephraïm, Emma, Noémie, Jacques... quatre prénoms sur cette carte postale et rien d'autre, les quatre prénoms des Rabinovitch assassinés à Auschwitz par les nazis ... et par l'Etat français ayant honteusement collaboré à la déportation.
Ce que raconte Anne Berest n'apprendra pas grand chose de neuf au lecteur mais va simplement, par le biais du flux narratif, lui faire précisément appréhender et ressentir le quotidien d'existences marquées par la fuite, l'espoir d'une vie meilleure en France dans le courant des années vingt, jusqu'à ce que l'horizon s'obscurcisse et que la guerre vienne détruire par l'horreur absolue des camps d'extermination, les êtres marqués par la fatalité d'une idéologie délirante.

La narratrice conte, avec émotion et pudeur, accompagnées d'une grande tendresse pour ces disparus qu'elle n'a pas connus, le sort de sa famille, dont elle retrace la destinée grâce aux souvenirs de sa mère et aux renseignements glanés au cours de l'enquête qu'elle va elle-même mener auprès des personnes susceptibles d'apporter un complément d'informations.
Ces informations seront riches de sens, car Myriam, la grand-mère d'Anne Berest, seule rescapée de la famille Rabinovitch, n'évoquera jamais ses parents pas plus que son frère et sa soeur et s'enfermera, sa vie durant, dans un mutisme farouche sur son passé ; personne, même pas sa fille ne pourra percer le mystère de sa personnalité.
Et c'est sa petite fille, la narratrice qui, par le biais des pages d'un livre, rendra vie à ces quatre prénoms.

Au delà de l'histoire familiale, Anne Berest s'interroge et nous fait, nous lecteur, nous interroger sur le concept de judéité.
Qu'est-ce qu'être juif ? s'agit-il simplement d'une religion, que l'on soit ou non pratiquant ?
Ou plutôt y-a-t-il derrière ce mot la notion de peuple ?
Et la certitude d'appartenir à un peuple apatride (du moins jusqu'à la création de l'état d'Israël), condamné à fuir perpétuellement en fonction des aléas de l'Histoire et du rejet dont il fait l'objet ?
Et pourquoi ce rejet ?
Anne Berest n'apporte aucune réponse, d'ailleurs y-en-a-t-il une ?
Et ne pourrait-on pas davantage imaginer que l'humanité éprouve le besoin d'inventer un responsable à tous les maux qui s'abattent sur le monde ?
C'est une des questions que le lecteur peut se poser en refermant ce livre, écoeuré qu'il est par les relents nauséabonds de ce passé révoltant qui continue à distiller honte et amertume en nos coeurs.
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Quelle claque!! Ma critique n'aura pas vraiment d'importance, car elle se noie parmi des centaines d'autres bien plus justes, mais je me garde une trace de ma lecture, même si je pense ne pas "pouvoir" oublier ce livre.

Anne est sur le point d'accoucher quand elle passe quelques jours chez ses parents à l'occasion des fêtes de fin d'année. C'est là que sa mère reçoit une mystérieuse carte postale, adressée à sa propre mère, Myriam : une vue assez ancienne de l'opéra Garnier à Paris, avec juste ces noms écrits: Ephraïm, Emma, Noémie, Jacques. Ce sont les noms des grands-parents de Lélia (la mère d'Anne), de son oncle et sa tante, déportés et morts à Auschwitz.
Anne se confronte donc à sa mère pour entendre enfin l'histoire de sa famille, de ses ancêtres. Et cette histoire est touchante, et incroyablement dure évidemment, racontée de main de maître par l'autrice. Ce récit occupe toute la première partie du livre (que je n'appellerais pas roman) extrêmement bien documenté.
La deuxième partie suit l'histoire de Myriam, la mère de Lélia, donc seule survivante de sa famille. Elle doit fuir, intègre les réseaux de Résistance, se cache, puis c'est enfin la libération, avec ce retour des camps... Que d'émotions, que d'images fortes, que de douleurs, que de haine. Nous sautons du passé au présent pendant qu'Anne, souvent aidée par sa mère, continue son enquête pour découvrir l'auteur de la carte postale. Ce voyage va l'emmener en Normandie, puis dans le sud de la France, et elle va aller de découverte en découverte... Pendant ce même temps, elle s'interroge sur sa judaïté, elle qui n'a pas du tout été élevée dans la foi, sur ce que veut dire être juif... Les questionnements, les débats autour de cela sont incroyablement justes, intelligents et percutants.

C'est compliqué de ne pas faire trop long pour "critiquer" un tel livre, si bien structuré. On ne s'y perd jamais. Je ne sais pas trop quelle est la part d'invention de l'autrice dans tout cela. La seule chose que je n'ai pas comprise, c'est l'absence de concordance de dates: la carte postale arrive en 2003 alors qu'Anne va accoucher et "seize ans plus tard" l'enquête commence. Or, à ce moment-là, Clara, la fille d'Anne a 6 ans. Erreur? Autre enfant disparue sans être mentionnée plus tard? Dans tous les cas cela n'a pas vraiment d'importance.
Oui, un livre incroyable, qui nous interroge, nous percute, et nous rappelle avec raison qu'il ne faut jamais, jamais oublier. Et quand, à la toute fin de l'enquête, la boucle se noue, c'est un final en apothéose, en tendresse, en douce morale et toujours en intelligence.

Bravo Mme Berest.
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Une famille se raconte au travers d'une carte postale anonyme, support incontestablement haletant pour retracer la Shoah. Sans heurts, sans voyeurisme, sans pathos dans son écriture, Anne Berest pose les mots, justes et bien pesées, sur cette période de l'Histoire, sur les douleurs de sa famille.
La narration est dynamique. La lecture se fait fluidement, tantôt renvoyé au passé, tantôt dans les échanges actuelles avec sa soeur, sa mère. L' attachement toujours plus fort à connaitre la vie de chaque aïeul. Les transmissions intergénérationnelles, les coïncidences troublantes allègent la pesanteur du sujet.
C'est un ensemble vraiment bien roulant, qui peut se lire sans crainte.
J'encourage mes ado à lire ce roman, convaincue qu'il saura transmettre les désastres d'une guerre qui se déclare sournoisement, les bouleversements des vies, les atrocités des génocides.
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Nous suivons les recherches de l'autrice pour retrouver le mystérieux auteur d'une carte envoyée à sa famille avec pour seul texte les prénoms de ses grands-parents, oncle et tante maternels morts en 1942. Avec l'aide de sa mère, elle se plonge dans les archives familiales pour reconstruire leur histoire. Nous découvrons alors le destin des Rabinovitch, de leur fuite de la  Russie à leur mort tragique à Auschwitz en passant part la Lettonie et la Palestine.

Cette enquête familiale m'a happée du début jusqu'à la fin. J'ai adoré suivre l'autrice dans ses découvertes et je me suis attachée aux membres de sa famille. Si le but ultime de ces recherches est la découverte de l'auteur de la carte, ce n'est cependant pas ce qui m'a tenue en haleine mais plutôt la quête identitaire de l'autrice dont il est question. En effet, en reconstituant son histoire elle se pose des questions sur le sens du mot Juif et sur ce qu'il recouvre pour elle et sa fille. Elle interroge le passé pour trouver réponses à ses interrogations sur sa propre personne. Peu à peu le passé fait écho au présent. La plume de l'autrice est agréable et je n'ai pas vu défiler les pages tant j'étais émue par le destin tragique de cette famille. Malgré l'Horreur, il y a beaucoup de lumière dans ce roman qui nous parle avec justesse de transmission intergénerationnelle. L'autrice nous parle du silence gardé par ses parents et de l'impact sur sa construction. La relation avec sa mère pendant toute cette enquête est vraiment touchante. Si cette dernière a longtemps voulu laisser le passé derrière elle, elle se fait violence pour que sa fille accède elle aussi à son histoire. C'est un livre intelligent et émouvant qui me restera longtemps en mémoire.
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Le récit de Anne Berest a comme point de départ une étrange carte postale déposée dans la boîte aux lettres de sa mère. Au verso d'une représentation de l'Opéra Garnier on y trouve les prénoms des grands-parents de sa mère, de son oncle et de sa tante, tous morts en déportation à Auschwitz en 1942. C'est leur histoire que reconstitue l'auteure dans ce roman ainsi que la place qu'elle occupe dans sa propre vie et la manière dont elle l'a définie.

J'ai fini la lecture de la carte postale bouleversée et passionnée par ce roman il y a quelques mois et ai tant reporté l'écriture de ma critique, ne sachant pas bien par quel bout commencer et comment rendre le plus juste hommage à ce magnifique livre, que celle-ci n'a jamais été écrite ! Et quelques mois plus tard il est toujours aussi difficile de trouver les mots justes pour chroniquer ce titre. Disons déjà que ce roman est complètement prenant malgré son point de départ ténu et son issue connue dès le début. Anne Berest trouve d'emblée les mots justes pour nous plonger dans l'histoire de ses arrières grands parents, les Rabinovitch, immigrés en France où comme beaucoup de juifs ils crurent trouvé une vie meilleure jusqu'à l'horreur de la seconde guerre mondiale et de la déportation. de manière assez incroyable, même si je savais dès le début qu'ils n'échapperaient pas à l'arrestation et qu'ils ne reviendraient pas des camps, je me suis surprise plusieurs fois à espérer, à croire en un dénouement autre, tant l'auteure a réussi à m'embarquer dans son récit et à dénoncer l'injustice et l'horreur de cette situation. J'ai d'ailleurs appris après coup la polémique dont ce roman a fait l'objet et les critiques qui lui ont été adressées, notamment sur sa description de la Shoah et des camps et je les trouve totalement injustifiées.

A ce récit historique se mêle brillamment le mystère de la carte postale, qui a bien pu l'envoyer, comment résoudre cette énigme des dizaines d'années après les événements quand quasi tous les témoins directs ont disparu ? Cette partie nous permet de découvrir aussi ce qui est advenu des souvenirs de la famille et l'abominable rajouté à l'horreur quand on découvre comment bons voisins et bons français se sont appropriés sans l'ombre d'un remords les biens des juifs disparus, comment leurs rares survivants n'ont même pas pu avoir au moins les quelques souvenirs qui auraient dû leur revenir de droit et comment des années après la haine et le ressentiment de certains restent hélas toujours aussi tenaces.

La dernière facette de ce roman si riche est celle de la place de l'histoire familiale, de la culture et de la religion dans la vie de chacun. L'auteure s'interroge sur sa judéité, sur l'héritage qu'elle va laisser à sa fille, sur la manière dont leurs ancêtres les ont influencées sa soeur et elle. Toutes ces réflexions sont passionnantes et complètent parfaitement le récit, lui donnant une portée plus large et l'ancrant dans notre réalité contemporaine, nous amenant à nous interroger sur l'antisémitisme et plus généralement la haine de l'autre, de ce qui est différent.

Vous l'aurez compris, j'ai adoré La carte postale même si je ne suis pas sure de savoir expliquer pourquoi. Un grand roman, un beau roman, une histoire riche et précieuse qui a bien mérité son succès et ses prix littéraires. A découvrir si vous ne le connaissez pas encore !
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Le silence assourdissant des absents

Je remercie chaleureusement Netgalley et Audiolib pour m'avoir permis de découvrir ce magnifique récit.
C'est la première fois que j'écoute un livre, et je dois reconnaître que je m'y suis mise en « trainant les pieds » surtout après avoir vu qu'il y avait 14 heures d'écoute ! Mais très vite, la magie a opéré, et je me suis laissée porter par la voix de la comédienne Ariane Brousse, en alternant par une lecture plus « traditionnelle ». Je pense que cette façon de faire a bien fonctionné, et m'a permis d'apprécier pleinement ma lecture.
Ce récit m'a captivée, littéralement happée… et j'en sors bouleversée.
C'est une carte postale qui est le point de départ de la quête menée par Anne Berest, la quête de ses origines. Une simple carte postale, représentant l'Opéra Garnier, adressée à M Bouveris, où sont inscrits quatre prénoms : Ephraïm, Emma, Noémie, Jacques. Reçue par les parents d'Anne, non signée, elle intrigue la famille mais elle termine dans un tiroir où elle est oubliée pendant plus de dix ans. Ce n'est que quand Anne Berest attend son premier enfant qu'elle interroge sa mère, Leila. Ephraïm et Emma sont ses arrières grands-parents, Noémie et Jacques leurs deux enfants cadets, tous les quatre sont morts en déportation. L'aînée, Myriam, la mère de Leila, a survécu. Leila raconte à Anne l'histoire de la famille Rabinovitch, un vrai roman ! Juifs russes, ils fuient les pogroms et partent s'installer à Riga, puis en Palestine rejoindre le patriarche, avant de venir vivre en France où Ephraïm fera tout pour obtenir la nationalité française. Malgré les échos venus d'Allemagne tout au long des années 30, les Rabinovitch se croient en sécurité en France, jusqu'au bout, jusqu'au dernier moment où arrêtés par les gendarmes dans leur petit village de l'Eure, ils pensent rejoindre Noémie et Jacques (qui avaient subi le même sort quelques semaines plus tôt). Mais Anne veut en savoir plus : comment Myriam a-t-elle échappé au sort funeste de sa famille ? Et qui a écrit cette carte postale, et surtout, pourquoi ? Elle bouscule sa mère, la questionne, la force à fouiller dans ses archives, dans sa mémoire, dans tous les non-dits de Myriam. Car pour Anne, plus qu'une « «simple » enquête sur ses origines, c'est la quête de son identité, celle d'une femme juive, qui ne connaît presque rien aux rites religieux, une femme moderne et laïque…
Comme je l'ai dit plus haut, ce livre m'a passionnée, à différents niveaux.
Tout d'abord le contexte historique, celui de la seconde guerre mondiale et de ses prémisses ; une période qui m'a toujours intéressée. Je suis née en 1960, la guerre ne s'était terminée que quinze ans plus tôt, mes parents parlaient souvent de leur enfance au milieu de ce conflit, et ma grand-mère paternelle avait toujours une anecdote, une petite histoire qui s'insérait dans la grande Histoire. C'est dire si ces années noires étaient encore présentes à l'esprit de ceux qui l'avaient vécu. le récit des atrocités dont ont été victimes les Rabinovitch, comme plus de six millions d'autres, est terrifiant. Anne Berest « utilise » un style très journalistique, factuel, détaché, qui ne laisse pas passer beaucoup d'émotions. J'ai lu que cela lui avait été reproché. Pour ma part, je n'en ai pas été gênée, et je considère que c'est, pour l'auteure comme pour le lecteur, une sorte de protection devant l'horreur…
Ce livre touche aussi à un sujet passionnant, celui de la psychogénéalogie-transgénérationnelle. Anne et sa soeur Claire portent toutes deux comme second prénom, l'une Myriam, l'autre Noémie. Les lettres que s'échangent les deux soeurs à ce sujet sont l'un des points forts de ce récit.
Enfin, Anne Berest ancre aussi son récit dans l'actualité : la montée des populismes et celle de l'extrême droite, les relents d'antisémitisme, la religiosité et l'intolérance, l'indifférence …
A lire, à relire à écouter, à réécouter.
#LaCartepostale #NetGalleyFrance
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Anne Berest retrace la vie de sa famille, du côté maternel - famille qui a été décimée sur la 2nde guerre mondiale.

Elle reprend le travail fait par sa propre mère qui voulait savoir ce qu'il s'était passé et surtout prouver que ses tante, oncle, grand-père et grand-mère était mort dans des camps. Elle a aussi monter un dossier pour prouver leur spoliation.

Et un jour, elle reçoit cette fameuse carte postale, sans savoir qui, ni pourquoi .. Anne Berest reprend donc son enquête. Mais si on lit ce livre, ce n'est pas pour ce but ultime, c'est pour suivre le chemin engagé par l'une et l'autre.

En parallèle, elle s'interroge aussi sur son identité juive, elle qui n'est pas croyante. On y entend plusieurs voix, ce que j'ai apprécié car elle ne porte pas de jugement, mise à part s'interroger sur sa place.

Je comprends le Prix Renaudot des Lycéens car il a un côté éducatif, lorsque sa mère lui explique cette guerre, cette Shoah mais aussi l'après-guerre.

On peut d'ailleurs constater que les faits passés sont encore tabous dans certains villages qui ont vu les juifs dénoncés, déplacés et exterminés.
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Quel beau et émouvant roman ! Avec comme point de départ une carte postale anonyme reçue par sa mère, comportant les prénoms des grands-parents de celle-ci, de sa tante et de son oncle, tous déportés et tués à Auschwitz, l'autrice raconte l'enquête menée par sa mère, puis la sienne, pour reconstituer la trame de ce drame. Elles découvriront l'histoire de cette famille juive parmi tant d'autres, la leur, les Rabinovitch, qui fut décimée sous l'odieux régime de Vichy, avec pour seule survivante l'énigmatique Myriam, grand-mère de la narratrice. Cette enquête prend des allures de quête, alors qu'en levant le voile sur cette terrible histoire familiale, l'autrice recolle les morceaux de sa propre identité...Magnifique !
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