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Critique de fbalestas


« Je ne me rappelle plus exactement l'âge auquel j'atteins lorsque j'entre, sans le publier, en dissidence, six ans, trois, huit mois ? Une chose est sûre. Je cesse de tenir compte de ce qui se dit ou ne l'est pas et devrait l'être autour de moi pour conformer mes vues, mes jugements à ce qui semble effectivement exister et que, pour une raison mystérieuse, on s'ingénie à ignorer. » Tels sont les premiers mots de ce récit de Pierre Bergounioux – l'un de mes auteurs fétiches – qui va dans ce texte court expliquer comment, très jeune, il s'est opposé aux adultes, ces « ad ultima, être finis » en qui le jeune Pierre ne se reconnaît pas.

Seule perspective : la bibliothèque de son village. Bibliothèque publique, aux livres parfois inaccessibles, ils ont l'inconvénient de ne jamais parler du pays qu'habite le jeune Pierre. Les lectures le confortent dans son opposition aux adultes, même si elles ne concordent pas forcément à sa vision.

Bien plus tard, l'écrivain devenu adulte lui-même, découvrira Norbert Elias, qui s'est intéressé aux arts premiers, a écrit sur « l'impact de la conscience » - cela aurait aidé le jeune Pierre mais les écrits d'Elias ne seront publiés qu'en 2002.
Pas d'écrits sur son pays donc, à l'exception d'un gros traité de géologie locale. Et pourtant on parle de lointaines contrées et on en parle même beaucoup – et ce sont les colonies.
Les adultes ne sont cependant pas tous à ranger dans la même catégorie : il y en a (rarement) qui sont « courageux, généreux, qui s'enhardissent à interroger les apparences, à chercher le vrai. » Ceux-là sont souvent instituteurs. Et pourtant ce pays sans écrit a connu quelques grands hommes, et notamment de nombreux colonels.
Un livre soulèvera l'enthousiasme du jeune lecteur. On comprendra qu'il s'agit de la Toison d'Or.

Enfin Pierre Bergounioux reviendra sur ces « découvreurs de l'art nègre », alias des artistes d'origine étrangère, tels que Picasso, Modigliani, Apollinaire ou Félix Fénéon. L'auteur leur rend hommage, et trouvera, dans une boutique d'art africain à Marseille, « le masque de la Toison d'or, kpelie, qui m'attendait ».

C'est toujours un régal de lire la prose de Bergounioux, quel que soit ses écrits – mes préférés sont peut-être « Catherine », « la mort de Brune », « le grand sylvain » ou encore « le matin des origines ». J'ajouterai encore « Ce pas et le suivant » - remarquable.

Avec l'autre Pierre – Michon, bien sûr – ils partagent de nombreuses choses ; des origines géographiques proches (Brive la Gaillarde pour Bergounioux, la Creuse pour Michon) mais aussi le choix des Editions Verdier, et enfin – surtout – ce sont peut-être les deux grands stylistes du moment.
Pour qui ne connaîtrait pas Pierre Bergounioux : n'hésitez pas. Précipitez-vous.
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