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Pierre Bergounioux (Autre)
EAN : 9782718610047
64 pages
Galilée (22/10/2020)
4.83/5   3 notes
Résumé :
Je ne me rappelle plus exactement l’âge auquel j’atteins lorsque j’entre, sans le publier, en dissidence, six ans, trois, huit mois ? Une chose est sûre. Je cesse de tenir compte de ce qui se dit ou ne l’est pas et devrait l’être autour de moi pour conformer mes vues, mes jugements à ce qui me semble effectivement exister et que, pour une raison mystérieuse, on s’ingénie à ignorer. Ce restera jusqu’au bout une préoccupation de tous les instants que de concilier ce q... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
« Je ne me rappelle plus exactement l'âge auquel j'atteins lorsque j'entre, sans le publier, en dissidence, six ans, trois, huit mois ? Une chose est sûre. Je cesse de tenir compte de ce qui se dit ou ne l'est pas et devrait l'être autour de moi pour conformer mes vues, mes jugements à ce qui semble effectivement exister et que, pour une raison mystérieuse, on s'ingénie à ignorer. » Tels sont les premiers mots de ce récit de Pierre Bergounioux – l'un de mes auteurs fétiches – qui va dans ce texte court expliquer comment, très jeune, il s'est opposé aux adultes, ces « ad ultima, être finis » en qui le jeune Pierre ne se reconnaît pas.

Seule perspective : la bibliothèque de son village. Bibliothèque publique, aux livres parfois inaccessibles, ils ont l'inconvénient de ne jamais parler du pays qu'habite le jeune Pierre. Les lectures le confortent dans son opposition aux adultes, même si elles ne concordent pas forcément à sa vision.

Bien plus tard, l'écrivain devenu adulte lui-même, découvrira Norbert Elias, qui s'est intéressé aux arts premiers, a écrit sur « l'impact de la conscience » - cela aurait aidé le jeune Pierre mais les écrits d'Elias ne seront publiés qu'en 2002.
Pas d'écrits sur son pays donc, à l'exception d'un gros traité de géologie locale. Et pourtant on parle de lointaines contrées et on en parle même beaucoup – et ce sont les colonies.
Les adultes ne sont cependant pas tous à ranger dans la même catégorie : il y en a (rarement) qui sont « courageux, généreux, qui s'enhardissent à interroger les apparences, à chercher le vrai. » Ceux-là sont souvent instituteurs. Et pourtant ce pays sans écrit a connu quelques grands hommes, et notamment de nombreux colonels.
Un livre soulèvera l'enthousiasme du jeune lecteur. On comprendra qu'il s'agit de la Toison d'Or.

Enfin Pierre Bergounioux reviendra sur ces « découvreurs de l'art nègre », alias des artistes d'origine étrangère, tels que Picasso, Modigliani, Apollinaire ou Félix Fénéon. L'auteur leur rend hommage, et trouvera, dans une boutique d'art africain à Marseille, « le masque de la Toison d'or, kpelie, qui m'attendait ».

C'est toujours un régal de lire la prose de Bergounioux, quel que soit ses écrits – mes préférés sont peut-être « Catherine », « la mort de Brune », « le grand sylvain » ou encore « le matin des origines ». J'ajouterai encore « Ce pas et le suivant » - remarquable.

Avec l'autre Pierre – Michon, bien sûr – ils partagent de nombreuses choses ; des origines géographiques proches (Brive la Gaillarde pour Bergounioux, la Creuse pour Michon) mais aussi le choix des Editions Verdier, et enfin – surtout – ce sont peut-être les deux grands stylistes du moment.
Pour qui ne connaîtrait pas Pierre Bergounioux : n'hésitez pas. Précipitez-vous.
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Très intriguée par ce court texte de Pierre Bergounioux…qui, même après une lecture attentive, me laisse pleine d'interrogations... bien perplexe, au milieu des lectures ou discussions plus habituelles, plus confortables…que nous pouvons avoir !

Je relis la définition d' »Art premier » : « L'art premier ou art primitif est l'art des sociétés traditionnelles, sans écriture ou « primitives ». Par extension, le terme désigne communément l'art traditionnel des cultures non-occidentales. »

Ce court récit met en scène au début, l'auteur, enfant, qui trouve refuge , dès ses sept ans, à la bibliothèque parmi les livres qu'il chérit, lui évitant de perdre son temps avec « ces drôles d'animaux » : les Adultes !!

Très heureuse d'avoir lu avec attention cette réflexion élargie sur l'Histoire, la politique, le capitalisme mondial et au milieu des conflits, des conquêtes coloniales, des compromissions économiques et d'accompagner la réflexion et les analyses originales de Pierre Bergounioux touchant toute la force et l'esprit subversif qu'ont pu et continuent de posséder l'Art, et plus particulièrement les « Arts Premiers »…

Je me permets de transcrire cet extrait qui nous dévoile enfin, après un certain nombre de circonvolutions….. le noyau de la réflexion de Pierre Bergounioux , pouvant surprendre dans une première lecture trop rapide : la valorisation et la reconnaissance de « l'Art nègre » par des jeunes artistes modernes et rebelles !... comme des collectionneurs et entre autres figures féminines de la réussite [ Peggy Guggenheim et Helena Rubinstein ]… qui font comme un pied de nez: à tous les conformismes de la société marchande…où ils sont immergés et de laquelle, ils souhaitent se démarquer !...

« le rapport est manifeste entre une attitude politique oppositionnelle et le goût des arts premiers. Des hommes capables de s'orienter dans le chaos des événements, d'identifier l'ennemi- le capital financier et ses soutiens politiques, ses potentats féodaux, ses colonels-étaient à même de sentir, de célébrer le génie plastique de sociétés asservies par l'impérialisme, disloquées, méprisées. Et si les artistes sont ces hommes, ces femmes qui vivent différemment, voient autre chose que les autres ou bien les mêmes mais autrement, c'étaient eux les plus qualifiés pour briser les conventions éthiques, esthétiques de la société patriarcale, impérialiste, belliciste et pour inventer, du même mouvement, l'"art nègre" et la peinture moderne. (p. 41)”

Je suis doublement ravie d'avoir pu insérer cette nouvelle référence dans la base Babelio et d'en parler un minimum… avant que ce texte choisi avec attention, rejoigne pour Noël, des amis, anticonformistes, rebelles à leur manière au système…et passionnés par l'Afrique … que cette surprise complémentaire apporte un « supplément d'âme » à nos choix souvent trop "formatés"... !!!

Une vraie pépite de questionnements, de réflexions poussées entre la politique, l'économie, le monde marchand qui ne peuvent satisfaire , même au sommet de la réussite sociale, la soif d'absolu d'un Homme et le monde de l'Art…est là, vital, essentiel, marginal, contestataire, dans son essence… et d'autant plus, les Arts premiers… qui ont mis du temps, à avoir droit de cité !

Vive la DISSIDENCE !!!

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La réalité a beau être faite de notre passé, la pensée de la terre demeure notre avenir : de cette terre de fétiches, noirs d'un mystère dont l'adulte a désappris la contemplation. La folie, la croisée des chemins, la pierre aride, voilà d'où il faut commencer, peut-être, sûrement, à nouveau.

Bergounioux, Pierre, ARTS PREMIERS, Galilée, Paris, 2020.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Mes lectures, à quelques miraculeuses exceptions près, entérinaient le désaccord que j'ai eu, d'emblée, avec les adultes, à ceci près, cependant, qu'elles ne concordaient pas non plus avec leur vision. Elles mettaient l'accent sur des choses dont je n'avais pas la moindre idée mais eux non plus et c'était un secret réconfort que de le constater. je n'étais pas seul à supposer que la réalité était différente. De graves personnages l'avaient écrit depuis déjà longtemps même si je ne retrouvais rien ou presque de ce qui m'arrivait dans ce qu'ils racontaient. (p. 14)
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Le rapport est manifeste entre une attitude politique oppositionnelle et le goût des arts premiers. Des hommes capables de s'orienter dans le chaos des événements, d'identifier l'ennemi- le capital financier et ses soutiens politiques, ses potentats féodaux, ses colonels-étaient à même de sentir, de célébrer le génie plastique de sociétés asservies par l'impérialisme, disloquées, méprisées. Et si les artistes sont ces hommes, ces femmes qui vivent différemment, voient autre chose que les autres ou bien les mêmes mais autrement, c'étaient eux les plus qualifiés pour briser les conventions éthiques, esthétiques de la société patriarcale, impérialiste, belliciste et pour inventer, du même mouvement, l'"art nègre" et la peinture moderne. (p. 41)
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Comme Peggy Guggenheim, elle [ Helena Rubinstein ] a contracté, auprès des artistes français, qui sont, pour le coup et pour la plupart, d'origine étrangère, comme elle, le goût des arts premiers et c'est un reliquaire bakota mbulungulu qui lui tient compagnie, dans ses portraits. (p. 45)
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C'est pourquoi on n'avait pu financer les services des penseurs qui auraient tiré au clair le mystère premier, foncier, des poètes, des artistes qui enrichissent, embellissent nos vies.
Une chose, toutefois, est acquise. Ce sont les livres, la clarté qui n'est que d'eux, alors, qu'ils sont susceptibles de répandre sur nos jours. Il existait une bibliothèque publique, dans ma sous-préfecture, et j'y aurai passé le meilleur du temps que je ne perdais pas avec les adultes, de six ans, que mon père m'y a inscrit, à dix-sept, que je suis parti. (p. 12)
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Il est significatif que les découvreurs de l'"art nègre" aient été de jeunes artistes, dont beaucoup d'origine étrangère, Picasso, Modigliani, Apollinaire ou encore des anarchistes, Félix Fénéon, qui annonce que ces fétiches, un jour entreront au Louvre (...) (p. 39)
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Videos de Pierre Bergounioux (18) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Pierre Bergounioux
Cette semaine, Augustin Trapenard est allé à la rencontre de Pierre Bergounioux à l'occasion de la sortie en poche de son livre "Le Matin des origines" aux éditions Verdier. Ce merveilleux ouvrage célèbre l'ancrage profond dans ses racines, dans les terres du Quercy entre Lot et Corrèze, où l'auteur a grandi, dans la chaleur de la maison rose et au sein des paysages qui ont façonné son être. Ces souvenirs, imprégnés dans sa mémoire, représentent une part essentielle de son identité qui demeure là-bas. À travers ces pages, Pierre Bergounioux évoque avec justesse le lien puissant que la terre tisse avec nos souvenirs et nos émotions, révélant ainsi le pouvoir des lieux familiers pour donner du sens à notre passé et à nos moments les plus heureux. Il était donc évident qu'Augustin Trapenard se déplace au coeur de cette histoire, sur les contreforts du plateau des Millevaches, dans sa maison de Corrèze pour un retour aux origines de la vie et de l'écriture.
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