Dès leur rencontre ils avaient décidé qu'ils n'auraient pas d'enfant. D'un commun accord, le sujet était donc clos.
A 42 ans, Marion met au monde un bébé, dans sa salle de bain, sous le regard médusé de Baptiste. C'est l'incompréhension.
"
Tombée des nues " de
Violaine Bérot, publié cette année aux Editions Buchet Chastel, aborde le sujet du déni de grossesse.
Lorsque Tony, leur meilleur ami, découvre la scène, passé le choc, il encourage Baptiste à emmener sa femme, elle-même dans un état second, à l'hôpital, tandis qu'il emmitoufle dans son manteau ce petit être vivant récupéré dans la baignoire.
p. 42 : " il faut vraiment comprendre que tout se joue en quelques minutes, si la mère est seule le pire peut arriver, dans cette histoire le bébé a eu beaucoup de chance, un homme providence a croisé sa route, tous ces enfants n'ont pas droit à pareil conte de fées. "
Bien que de plus en plus formé à ce genre de cas, le personnel soignant n'est jamais entièrement préparé à les affronter...
p. 20 : " je connais pourtant cette problématique, j'ai été formée, j'ai assisté à des conférences sur le sujet, je suis prévenue, j'ai appris comment physiologiquement on l'explique, j'ai vu des schémas, j'ai lu les explications détaillées, j'ai compris d'un point de vue anatomique le processus, j'ai parfaitement assimilé tout cela, il n'empêche que "
L'enfant et Marion sont prises en charge, et baptiste, soutenu par Tony, accuse le choc, lui qui n'a rien vu venir. En effet, accaparée par son métier d'éleveuse de chèvres, elle n'a jamais laissé paraître le moindre signe de fatigue et encore moins de grossesse ! C'est un véritable choc pour l'entourage. Mais Baptiste sent l'arrivée de cet enfant comme un signe, et crée très rapidement un lien fusionnel avec elle, ce dont est absolument incapable la maman.
p. 131 : " ma fille et moi je nous savais désormais indéfectiblement liés l'un à l'autre, elle était l'un de mes organes vitaux, l'éloigner de moi revenait à me vider de mon sang, j'avais enfin découvert ce que je cherchais vainement depuis si longtemps, la réponse à mes errements. "
Sur un récit court qui ne relate que quatre jours après l'accouchement, on suit l'évolution des réflexions de chacun des protagonistes. En effet, l'auteure nous offre la particularité de lire ce roman sous deux formes différentes, d'où l'absence de majuscule et de point au début et à la fin de chaque paragraphe, obtenant ainsi un continuum et une fluidité de lecture. Cette narration à plusieurs voix confère des témoignages spontanés et dénués d'artifices . Si l'écriture repose sur un aspect très factuel des événements, elle en reste néanmoins très fluide.
Par le traitement de ce sujet hautement complexe, l'auteure projette le lecteur dans des cas de faits-divers malheureusement régulièrement relatés par les médias.
Ce roman dont la forme se rapproche plus du récit, apporte donc un témoignage précieux au lecteur lambda, et plus particulièrement sur la période post-natale du déni de grossesse.
p. 121 : " ce sont ces amours mal amorcées qui parfois conduisent à la maltraitance"
La prise de conscience doit se substituer au jugements de bas étage.
p. 31 : " le leur annoncer est très difficile, culturellement la naissance d'un enfant est source de bonheur, or avec elles il faut absolument tout repenser, ce qui leur arrive est trop inconcevable pour qu'elles puissent l'accepter, quelques heures avant elles n'étaient pas enceintes et voilà qu'un bébé sort de leur corps, c'est à rendre fou n'importe qui, ça dépasse l'entendement, pour atténuer la violence de la situation il faut se retenir de faire ce que l'on a le réflexe de faire, annoncer garçon ou fille, poser l'enfant sur la mère, elles sont en état de choc, il faut leur donner du temps, ne surtout pas les devancer, certaines deviennent des furies, d'autres ne sont plus capables d'aucune réaction, il est préférable de leur enlever le bébé plutôt que de le leur imposer, il sera toujours temps de le ramener plus tard, l'important est d'abord de les aider à réaliser, et ce travail doit être entrepris tout autant avec le père qu'avec la mère, on doit parvenir à faire entendre à l'un et à l'autre comment s'appelle ce qui vient de se produire, leur faire comprendre que l'on a déjà rencontré des cas semblables, que ça existe "
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