Arracher la main d’un client s’essayant au vol à l’étalage instillait un certain sens de l’honnêteté chez les humains fréquentant les Bouquins Hurlants.
- Donne-nous le louveteau, le vieux, ordonna l’un des hommes.
- Comment ? gémit Erebus en tournant la tête, comme s’il n’entendait pas bien.
Comme s’il n’était pas capable de déceler le plus infime battement de cœur en territoire Sanguinati, songea Vlad.
Simon entra dans le bureau de liaison et observa avec incrédulité le Loup blotti dans un…
- Qu’est-ce que c’est que ça ? lâcha-t-il en tapant ses bottes pour ôter la neige amassée sous ses semelles avant de se diriger vers Nathan.
- C’est à moi, décréta celui-ci.
- Comment ça, c’est à toi ?
- Je monte la garde, donc c’est à moi. J’ai aussi des biscuits, ajouta-t-il avec un regard suffisant.
Sans tenir compte du grondement réprobateur du Loup, Simon passa la main sur le tissu, tâta le rembourrage et examina l’étiquette.
- Où as-tu trouvé ça ?
Non seulement ça paraissait confortable, mais ça présentait mieux que la pile de vieilles couvertures qu’il entreposait dans son bureau pour les occasions où il avait envie de se changer en Loup et de faire une sieste.
- C’est Meg qui l’a trouvé.
Nathan posa la tête sur ses pattes et leva les yeux sur Simon.
Le chef de meute était toujours le premier à se servir en matière de nourriture, de femelles, de tout ce qui retenait son attention. Mais un chef qui prenait sans cesse tout ce que possédaient les autres finissait par se battre constamment pour préserver son autorité.
- Ce panier sera réservé à celui qui monte la garde ici. Je demanderai à Meg d’en commander un autre pour moi.
Pendant qu’elle retournait à la table pour prendre les trois derniers tas d’enveloppes, elle s’interrogea sur les noms des poneys. Si Tonnerre pouvait produire un bruit pareil rien qu’en tapant du pied, que se passerait-il si Tornade ou Séisme piquaient une crise ?
- Monsieur Wolfgard ? lança-t-elle avant qu’il franchisse le seuil. J’ai remarqué que la porte de la cuisine donne sur un palier commun. Qui occupe l’autre appartement ?
Il la regarda pendant un long moment.
- Moi.
-On m'appelle cs759, répondit-elle
-Ce n'est pas un nom !
-Non. Mais c'est tout ce qu'il m'ont donné. Tout ce qu'ils nous ont donné à toutes. Un matricule. Les gens donnent des noms à leurs animaux domestiques, mais un objet n'en mérite pas tant. En désignant quelqu'un par un matricule au lieu d'un nom, on n'a pas à réfléchir à ce qu'on lui fait subir, à se demander ce qu'il ressent quand on...
- C'est lui qui vous coince la queue dans la porte, et c'est à nous de nous montrer polis, grommela-y-il. (Il huma l'air, puis tourna la tête vers elle en reniflant de nouveau.) Dans quoi vous êtes-vous roulée pour que vos poils puent à ce point ?
L'irritation l'emporta sur la prudence. Qu'avaient-ils tous à être obsédés par son odeur ?
- Je ne me suis roulée dans rien du tout ! Et mes cheveux sentent moins fort qu'avant.
- Un putois peut en dire autant.
Les terra Indigene ne sont pas des animaux qui se transforment en humains ni des humains qui se transforment en animaux. Ce sont des êtres mystérieux qui ont appris à adopter une forme humaine parce que ça leur convenait. Ils y ont gagné quelque chose, que ce soit la station debout ou l'avantage conféré par les pouces opposables, tout comme ils ont profité de la forme animale qu'ils ont absorbée.