Le roman commence avec une scène très forte : un étranger qui rodait dans les parages, en Pologne, s'en est pris à un homme, le poursuivant avec un gourdin et pour finir lui mettant le feu à lui et à sa maison. Il s'agit d'un vieux « règlement de compte » car l'homme, qui s'appelle Joachim explique son geste par une phrase laconique et néanmoins très explicite : « je suis juif et je reviens ». On a bien compris que l'homme assassiné s'est rendu coupable pendant la seconde guerre mondiale et la justice, même si elle comprend bien cette vengeance, se doit de la condamner pour éviter de donner des idées à d'autres personnes. Il est condamné à dix ans de prison.
On va faire ainsi la connaissance de Joachim, rescapé du ghetto de Varsovie, qui a tenté de fonder une famille en France avec une épouse infirmière et des enfants dont Szymon qui va partir à la recherche du passé de son père, et pour cela il part à Varsovie rencontrer une femme Ava alias Maria, qui a échappé à l'holocauste. Elle est âgée de 79 ans et veut raconter le passé.
On comprend très vite pourquoi Joachim a déserté un jour la famille, laissant en plan sa femme et ses fils, en le suivant dans le ghetto avec ses parents, ses frères ses amis car tout a basculé le 31 octobre 1940 on les a tous parqués comme des bêtes derrière des barbelés avant de construire un mur en brique qu'on leur fera financer bien-sûr !
« … Quatre cent mille personnes sur trois kilomètres carrés, soit 2,4 % de la ville, causant une densité extrême, de cent vingt-huit mille habitants au kilomètre carré contre quatorze mille dans le reste de Varsovie … »
La faim, la promiscuité, puis les maladies vont faire des ravages, mais pas assez vite pour l'Occupant, alors on massacre au hasard pour semer un peu plus la terreur. le plus débrouillard de la famille Szymon, le frère ainé de Joachim essaie de trouver un peu de nourriture, de venir en aide. Il n'y a qu'une seule manière d'échapper à la faim, à la souffrance ou à la folie : quitter le ghetto.
Luba, veut tenter à tout prix de sortir en apprenant les prières catholiques, et laissant sa culture pour s'imprégner de celle des Polonais (elle pensait pourtant bien être une vraie Polonaise avant le ghetto !) mais l'espoir résiste difficilement à la souffrance du quotidien.
Trois femmes vont faire tout leur possible pour faire sortir des enfants du ghetto et les faire adopter par des familles polonaises chrétiennes ; l'une Janina est Polonaise, les deux autres, Bela et Chana sont juives. Il faut user de stratagèmes pour ne pas se faire arrêter, et la décision n'est pas toujours facile à prendre pour les parents, surtout lorsque l'un des deux espère toujours que les choses vont s'arranger et qu'il vaut mieux rester ensemble…
Je n'entrerai pas dans les détails pour évoquer un comportement que je n'ai jamais réussi à comprendre et encore moins à admettre : à la tête du ghetto se trouvait le Conseil Juif dont les membres se comportaient de manière aussi monstrueuse que les nazis, s'en mettant plein les poches, usant de violence et perversité. A quoi cela leur servira-t-il ensuite quand les trains partiront pour Auschwitz ?
Durant toute cette lecture, j'ai été accompagnée par les images du film génialissime « le pianiste » que je venais de revoir pour la énième fois. J'avais l'impression d'accompagner Joachim, Szymon et les autres adolescents et leurs familles, le courage des uns, la lâcheté de certains.
On espère toujours que cela ne recommencera pas, mais en 1968 la Pologne renoue avec ses vieux penchants :
« En mars, la Pologne avait renoué avec son vice, avec ses mauvais gestes, son vilain réflexe, sa vieille pulsion de déjudaïsation, (odzydzanie). de nouveau, on refusait aux Juifs le droit d'être polonais et, pour être bien certains qu'ils s'en iraient, habilement, on les avait destitués, on les avait privés de leur métier, de leurs revenus. On comptait sur l'humiliation, l'appauvrissement et la terreur. »
D'autre part, comment oublier le raffut du premier ministre (ou du président ?) il y a un an environ concernant le camp d'Auschwitz ? Utiliser l'expression « le camp polonais de Auschwitz serait passible de sanction, les Polonais n'y étant pour rien ou comment réécrire l'Histoire ?
Ce livre est un coup de coeur pour moi, malgré un petit, tout petit bémol : la ponctuation est particulière, beaucoup de virgules, moins de points. Je me suis demandé si c'était lié au fait que c'était un livre électronique ou si c'était pour rythmer la narration. le titre «
La chasse aux âmes » m'a beaucoup plu car il est très évocateur, point n'est besoin d'expliquer quelles sont âmes qu'il convient de chasser, voire d'exterminer.
Un grand merci à NetGalley et aux éditions Plon qui m'ont permis de découvrir ce livre et son auteure.
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