Nous autres, Blancs, lorsque nous entrons en contact avec la population de l’ancien continent, nous oublions qu’elle a un passé que nous ignorons ; nous refusons de reconnaître qu’elle a existé avant notre rencontre.
Nous autres, Blancs, lorsque nous entrons en contact avec la population de l'ancien continent, nous oublions qu'elle a un passé que nous ignorons ; nous refusons de reconnaître qu'elle a existé avant notre rencontre.
Les Masais étaient mes voisins. Lorsque je traversais le fleuve qui formait la limite de mes terres je me trouvais dans leur réserve.Mais les Masais n'y étaient pas toujours. Ils erraient avec leurs grands troupeaux d'un bout à l'autre de la savane, vaste à peu près comme l'Irlande, se guidant d'après les chutes de pluies et la poussée de l'herbe.
Je chevauchais lentement dans la forêt toute verte pendant la courte saison des pluies. Des senteurs délicates et variées m'arrivaient par bouffées. J'étais de retour dans cette contrée d’exception. Une fois de plus, j'appartenais au monde africain.
Sans m'en rendre bien compte, je savais déjà sur cette pente herbeuse que j'avais atteint le plus haut sommet auquel il me serait jamais donné de parvenir sur cette terre. Créature minuscule dans cet alambic formidable de l'air, de la terre et des herbes mais cependant ne faisant qu'un avec eux. Me doutais-je alors que j'avais atteint aussi le sommet de ma propre vie ? L'espace autour de moi était empreint d'une sorte de solennité douloureuse.
Nous autres, Blancs, lorsque nous entrons en contact avec la population de l'ancien continent, nous oublions qu'elle a un passé que nous ignorons ; nous refusons de reconnaître qu'elle a existé avant notre rencontre.
La rencontre que j'ai faite en Afrique d'une race essentiellement différente de la mienne a contribué puissamment à l'heureuse expansion de mon univers. La tendresse est née entre nous au premier regard. J'entendais résonner de tous côtés des accords nouveaux et prolongés. On eut dit que ma propre voix s'amplifiait grâce à leur accompagnement ou en leur faisant écho.
-" Le prince (de Galles) vient à la ferme vendredi pour le dîner et voir danser les gens. Et tu sais que l'on ne danse pas à cette époque de l'année".
Les Ngoma étaient des danses rituelles rattachées à la fête de la moisson et tous les colons savaient qu'en cette matière les indigènes préfèrent mourir que d'enfreindre une loi sacrée en vigueur depuis mille ans.
La nouvelle bouleversa Farah autant qu'elle m'avait bouleversée moi-même. Pendant quelques instants il resta muet et comme pétrifié. Enfin il dit :
- Tu as raison, Memsahib, et à mon avis il n'y a qu'une chose à faire. Je vais prendre l'auto et ferai la tournée des grands chefs. Je leur parlerai et leur dirai qu'il faut qu'ils viennent à ton secours, et je leur rappellerai que c'est toi qui est venue à leur secours il y a trois mois.
En vérité, la vue de ton portrait me réjouit le coeur. En vérité, je suis remplie de joie quand j'entends prononcer ton nom ou que je le prononce moi-même.
La seule vue d'un éléphant est un spectacle édifiant. En regardant quatre d'entre eux s'en aller paisiblement à travers la plaine, j'avais l'impression que j'étais admise à contempler des sculptures en pierre noire représentant les quatre prophètes.