Nous autres, Blancs, lorsque nous entrons en contact avec la population de l’ancien continent, nous oublions qu’elle a un passé que nous ignorons ; nous refusons de reconnaître qu’elle a existé avant notre rencontre.
Et tandis que je sais de source certaine que je ne peux vivre sans lui, ne sait-íl pas lui aussi quelque part dans sa tête, sous sa crinière royale, ce que je vaux pour lui et que je suis un cadeau digne du sacrifice de sa vie.
Le lion est la parfaite image que les générations humaines se sont faites de l’indépendance et de l’invincibilité à l’état pur… En face d’un lion on éprouve toujours à la fois une surprise bouleversante et le sentiment d’un revoir.
Il n’est pas de frère, d’ami, d’amant, de nabab venant m’offrir la somme nécessaire pour garder la ferme qui aurait fait pour moi ce que fit alors mon domestique Farah.
La rencontre que j’ai faite en Afrique d’une race essentiellement différente de la mienne a contribué puissamment à l’heureuse expansion de mon univers. La tendresse est née entre nous au premier regard.
Nous autres, Blancs, lorsque nous entrons en contact avec la population de l'ancien continent, nous oublions qu'elle a un passé que nous ignorons ; nous refusons de reconnaître qu'elle a existé avant notre rencontre.
Les Masais étaient mes voisins. Lorsque je traversais le fleuve qui formait la limite de mes terres je me trouvais dans leur réserve.Mais les Masais n'y étaient pas toujours. Ils erraient avec leurs grands troupeaux d'un bout à l'autre de la savane, vaste à peu près comme l'Irlande, se guidant d'après les chutes de pluies et la poussée de l'herbe.
La seule vue d'un éléphant est un spectacle édifiant. En regardant quatre d'entre eux s'en aller paisiblement à travers la plaine, j'avais l'impression que j'étais admise à contempler des sculptures en pierre noire représentant les quatre prophètes.
Je chevauchais lentement dans la forêt toute verte pendant la courte saison des pluies. Des senteurs délicates et variées m'arrivaient par bouffées. J'étais de retour dans cette contrée d’exception. Une fois de plus, j'appartenais au monde africain.
-" Le prince (de Galles) vient à la ferme vendredi pour le dîner et voir danser les gens. Et tu sais que l'on ne danse pas à cette époque de l'année".
Les Ngoma étaient des danses rituelles rattachées à la fête de la moisson et tous les colons savaient qu'en cette matière les indigènes préfèrent mourir que d'enfreindre une loi sacrée en vigueur depuis mille ans.
La nouvelle bouleversa Farah autant qu'elle m'avait bouleversée moi-même. Pendant quelques instants il resta muet et comme pétrifié. Enfin il dit :
- Tu as raison, Memsahib, et à mon avis il n'y a qu'une chose à faire. Je vais prendre l'auto et ferai la tournée des grands chefs. Je leur parlerai et leur dirai qu'il faut qu'ils viennent à ton secours, et je leur rappellerai que c'est toi qui est venue à leur secours il y a trois mois.