Je revois le visage de mon père casqué par un noble soucis. Il était devant moi comme un livre précieux. J'apprenais à vivre en le lisant. La mort, gantée de blanc comme ces bibliophiles qui manipulent des livres d'enluminures, l'a refermé puis elle l'a rangé sur une étagère d'ombre, très loin de moi, trop haut.
Toute naissance est naturelle et tout enterrement surnaturel.
[...] le cœur fatigué de mon père était plus beau encore, avec ses arcades de silence et la patience qui y déambulait.
Le plus grand abandon est à l'orée de la plus vive douceur : c'est ce que disait la croix, comme un ange couché sur le cercueil.
Je dépose la vieille montre de mon coeur chez
Jean Sébastien Bach.
Quand je la reprends, elle est comme neuve
et sonne toutes les secondes.
Je pousse dans les rues une charrette chargée d'optimisme.
Je crie : 'espérance à tout va !"
Beaucoup me répondent en me lançant par la fenêtre
le contenu de leur pot de chambre
mais il en faudrait bien plus
pour éteindre une cargaison de soleils.
Quand je me penche sur une phrase pour la polir
le monde n'est plus qu'un duvet d'oie
volant dans la chambre.
La neige qui va à pas feutrés
porte entre ses mains blanches une couronne de lumière.
Elle cherche une âme pure pour la lui remettre.
Notre Ame regarde passer les wagons de nos projets,
assise dans le fossé
où elle mâche un brin d'herbe
L'or des genêts a été cambriolé
et les fougères ne sont pas encore argentées
L'été traverse la prairie
sans un sou en poche