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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ce livre a été lu dans le cadre d'un partenariat et j'en remercie le site Babelio et les éditions Ginkgo

Lecture

Paris est un port, un port au bord de cette Méditerranée qui a englouti le sud de l'Europe, l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient. Lors de cette catastrophe , un furoncle a surgi à l'emplacement supposé de l'antique Sodome biblique. Cet abcès a rejeté du sel mauve. Une société, la Compagnie, a pris le contrôle intégral de la production de ce produit miraculeux mais fragile. les "Soixante-Quinze" dirigent cette entité qui a fondé la Colonie. La Colonie, inaccessible, mystérieuse, barricadée, est le seul site d'extraction. Elle vit comme au moyen-âge technologique, toute agression dénaturant le précieux sel, mais aussi dans un moyen-âge social d'une civilisation fermée, féodale et enkystée.

Avis

Roman surprenant. le contexte est vraiment particulier dans ce monde frappé d'un cataclysme que rien n'annonçait. Cette épreuve sans précédent a amené chacun à se poser la question du pourquoi de sa survie tandis que tant d'autres ont été engloutis. Elle a marqué les existences au fer de la vacuité et du découragement.

La Colonie est un point perdu au milieu de ce que la Compagnie veut être un nulle-part. On ne peut s'empêcher en lisant sa description de penser à un enfer de Aligheri ceinturant le Château de Kafka. Les habitants ne sont pas victimes d'un régime totalitaire, pire ils sont employés volontaires d'une société mystérieuse , omniprésente et protéiforme, la Compagnie. Ce même nom qui était le surnom de la CIA dans les années 50-60 lorsque qu'elle cultivait la paranoïa comme une vertu. C'est une société commerciale qui a privatisé la Méditerranée, qui a monopolisé le Sel. Monstre froid nourri des cadavres des millions de noyés, elle se ceint de manipulations, de secrets, encore aggravés par le fait que les conditions extrêmes autour de la Colonie l'éloignent du monde vivant de plus de trois semaines.

Dans ce lieu soustrait du monde, certains ont des privilèges: le chef de la garde, le secrétaire général, le prêtre de la cathédrale, la femme du Gouverneur, le médecin en chef, le juge. Mais tous ne sont en fait que les valets du Gouverneur. le Gouverneur Bera, homonyme du dernier roi de Sodome, est le seul a recevoir ses consignes directement des Soixante-Quinze. Les mineurs, les cyclistes, moteurs humains des véhicules, les gardes, les dockers, tous sont liés à la Compagnie et respectent des règles strictes, rigides. Un carcan enserre la vie de la Colonie.
Le règlement prévaut, les intérêts de la Compagnie l'emportent sur toute autre considération, seul compte le précieux Sel.

Mais lorsque les rails ne sont plus là pour guider ce train, tout déraille. Les personnages, si rigides, si clairement typés, se révèlent alors cyniques, désabusés, malhonnêtes, égoïstes, mythomanes ou tout simplement fous.

Le roman est écrit en majeure partie sous forme épistolaire, des extraits de lettres écrites par ces six, entrecoupés de leurs échos dans le monde réel. La Colonie n'en fait pas vraiment partie. L'auteur ne change pas vraiment de style pour chaque écrivain, formatés qu'ils sont tous. Mais leurs idées et surtout leurs doutes et leurs folies leurs sont bien personnels. le style est parfait de complexité formelle mêlée d'irrationalité inventive, j'ai adoré. L'humour est peu présent, ce serait plutôt de l'ironie, mais bienvenue.

Ce livre est purement et simplement envoutant. Peut-on parler de science-fiction alors que tout se passe dans un univers qui pourrait être le nôtre, mais où une verrue médiévale et infernale s'accroche dans une mer de désolation? Oui parce que ce futur improbable n'est là que pour mieux exacerber les personnes, pour servir de catalyseur à une réflexion sur la ploutocratie économique, sur l'aliénation. On retrouve dans un autre contexte les thèmes chers à William Gibson, y compris le pouvoir de sédition de la liberté personnelle, mais dans une technologie rétrograde. L'auteur est une femme grecque, le livre date de 2007, mais le Journal Libération titrait début Juillet 2011 "Grèce, première dictature économique?"

Tout dans ce livre est fantasmagorique et en même temps affreusement réel. On sent les personnages s'engluer dans les manipulations, ne plus savoir où est leur propre volonté. Mais la folie semble être la seule réponse à l'absurdité politico-économique qui les enferme. Comme le héros du Procès, ils ne comprennent pas mais pour tenter de s'évader finissent par être eux-mêmes acteurs de cette pièce morbide, du moins jusqu'à que la structure gauchisse, et là, l'humanité reprend le dessus.

A toute cette histoire se rajoute une enquête, ou plutôt une quête, magistralement menée. On peut se laisser larguer par cette comédie sinistre; personnellement je me suis laissé emporter par la folie et la complexité des personnages, par la déliquescence de cette société et par l'intelligence du propos.

Ce livre aurait été un coup de coeur, si ce n'était la postface qui assène sans vergogne que "si ce livre est bien accueilli, on ne pourra plus dire que le public français est nul".
Puisque je suis obligé de faire de ce livre un coup de coeur, sous peine de nullité, je ne puis décemment pas m'y résoudre.

Conclusion:

Bizarre et envoûtant, un livre qui n'est pas de la pure SF. Un livre intelligent et absurde. Un vrai plaisir à dévorer consciencieusement.

Ma note : 16.5 /20

(17/20 sans la post face)
Lien : http://www.atelierdantec.com..
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Le monde d'après le Débordement a cédé à ses plus infâmes sirènes. Celles du profit, de la machination, des complots et contre-complots. La métaphore est relativement transparente. L'économique a remplacé le spirituel et s'incarne dans l'hydre des Soixante-quinze. La Compagnie qui exploite le sel mauve n'a pas de visage, pas de nom, on lui suppose d'autres activités, mais lesquelles ? Son emprise est partout, dans les villes non mortes de la vieille Europe, dans les faubourgs de la Colonie, jusqu'au désert infesté par la lèpre et ce qu'elle touche a un goût de poussière. Comme jadis la main de Dieu, rien ne lui échappe, surtout pas ses colons, en réalité des employés sur qui elle a droit de vie et de mort. le roman parle peu des villes, Paris où évolue pourtant Book est à peine décrite sinon sous l'angle de ce qu'elle n'est plus. La Colonie est le laboratoire du roman, ville-mouroir délimitée en cercles précis, où les strates de population ne se côtoient qu'avec répugnance. Malgré ce que son emplacement (les rives du Jourdain) et son mode de peuplement (accueillir les rescapés d'un cataclysme, toutes nationalités confondues) pourraient laisser croire, on est très loin de l'utopie israélienne des débuts, et si l'on y pense évidemment, c'est pour mieux en concevoir un reflet perverti. La ville dépeinte rappelle plutôt les grandes heures de l'époque coloniale, et c'est loin d'être enthousiasmant. Bourgeoisie nécrosée retranchée dans ses quartiers, cyniquement nommés Hespérides, prolétariat muet et tout d'ombre vêtu, militaires avinés et semi-idiots, forment cette fausse Légion Étrangère : on y adhère pour faire oublier ses crimes passés et se couvrir d'une nouvelle peau. Au nom de la survie et de la préservation des privilèges, on assiste à des scènes d'une absurdité rare, à l'humour très noir et très grinçant, lorsque les six personnages décident de se débarrasser du corps du gouverneur décédé, par exemple.

Comment être un individu dans un système qui par principe vous déclare obsolète ? Dans le système de la Compagnie, l'individu est l'ennemi intime du profit, il convient donc de l'emmailloter si serré qu'il n'aura ni l'envie ni l'espace de se mouvoir. On endort à coup de fouet et de babioles, de décorations sans valeur que l'on retire brusquement. Et chacun de farfouiller dans le sable au lieu de lever le nez. Quand le Gouverneur décède, les Six errent dans les couloirs comme des poulets sans tête…
C'est alors qu'arrive le grain de sable. le grain de sable est un pirate. Un vrai, avec la chemise à jabot, le foulard et l'anneau d'or. Discordant... Peu à peu se dessine un système qui se mord la queue, qui va partir en flammes précisément grâce aux mécanismes qu'il a mis en place. Très fort. Vraiment très fort. le complot, la manipulation, principes de coercition, vont devenir des instruments de résistance…
Des paraboles sur le monde moderne et le capitalisme totalitaire, j'en ai lus d'autres. de plus virulents, plus brutalement pamphlétaires. Non que cette Femme de Loth ne soit pas une saine, une horrifique lecture, mais le propos n'est pas neuf. L'économie prenant le pas sur l'humain est une abomination et crée des monstres incontrôlables, on le sait. Quel ingrédient ici fait de ce roman d'aventures une oeuvre si singulière ? Après y avoir consacré quelques unes de mes insomnies, il me semble que la réponse, du moins celle qui a fait résonner la bonne cloche dans mon petit cerveau, est : le temps. le temps est un véritable enjeu.
ce monde-là a perdu son antique. Plus d'Italie, De Grèce, d'Égypte, les terres bibliques rendues au désert, les puissances européennes modernes décapitées. Plus de mémoire, plus d'histoire. Deux mille ans de civilisation transformés en mythe, comme l'Atlantide. le personnage de Phileas Book est à ce titre symbolique, lui qui a par hasard été envoyé chez une vieille tante quelques semaines avant le Débordement. Unique survivant de sa famille, Phileas n'existe plus, il s'assied sur les docks parisiens et pleure sur sa vie perdue (très belles pages, d'ailleurs, pas encore le Zola de « l'inondation », mais pas loin). Dans ce temps-là, il n'existe pas car il se souvient.
Monde accéléré, amnésique, terrifiant.
Et parce que nous sommes en Europe, justement, que du fond des âges, ce continent s'est construit en grande part autour de la Méditerranée, quoi de mieux que la mer pour exprimer le temps ? J'ai été frappé, au début du livre, par la faible place occupée par cette mer de tous les maux. Glissant très vite vers la Colonie et le désert, le roman fait de la mer un non lieu. Pour cause, cette Méditerranée-là n'est pas la nôtre. C'est une créature surgit des profondeurs, c'est la mer Morte impénétrable dans laquelle seuls les noyés s'enfoncent, et ses eaux mauves provoquent des hallucinations. L'ancienne mer, la bonne mer, reviendra plus tard dans le roman, et avec elle la mémoire, le goût du sel et des larmes. Et l'envie de lever le nez du sable.
La mer, la vie, la mémoire...
Lien : http://luluoffthebridge.blog..
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Oublions tout de suite l'impossibilité technique du postulat de départ, un débordement de la méditerranée qui engloutis une partie de l'Europe, de l'Asie et de l'Afrique et qui transforme Paris en ville côtière. Ioanna Bourazopoulou ne fait pas dans la science fiction "réaliste". Je ne suis même pas certain que le troisième roman de cet auteur grec, le premier qui sort en France, puisque être qualifié de science fiction. Quoi qu'il en soit, ce roman nous permet de suivre plusieurs personnages. Philéas Book, un journaliste travaillant pour le times et résidant à Paris. Il est chargé par la Compagnie, une mystérieuse société exploitant les mines de sel violet de le mère noire, d'étudier six lettres écrites par six de ses employés. Ces employés ce sont des notables de la "colonie" qui exploite les mines de sel pour le compte de la Compagnie. Ces six notables retrouvent un matin le Gouverneur de la colonie mort sur son lit. Ne sachant que faire, la compagnie n'ayant pas prévu ce cas de figure, et ayant peur pour leur situation et leurs privilèges, ils vont se retrouver embarqué dans des situations aussi incroyables que pitoyables où chacun va essayer de tirer la couverture pour soi.

Le thème de ce roman n'est pas nouveau. Ioanna Bourazopoulou nous raconte l'histoire d'une société entièrement dirigée par une entreprise, la "Compagnie", omnisciente et omniprésente. Ces six notables symbolisent ces fonctionnaires déshumanisés qui ne pensent plus et agissent comme des pantins. Et tout de suite on pense à Orwell et 1984, sauf que Ioanna Bourazopoulou serait plus proche de Terry Gilliam et de son Brazil. Si dans le film de Gilliam c'était une mouche qui apportait le chaos, ici c'est un gouverneur qui a eu la fâcheuse idée de mourir. Et nos six notables, confrontés à une situation que ne prévoit pas le sacro-saint règlement de la "Compagnie" vont donner libre court à leurs instincts les plus bas pour cacher cette mort et préserver leurs petits privilèges, ce qui donne lieux durant la première partie du roman à des scènes totalement surréalistes d'un humour noir et féroce. Ioanna Bourazopoulou n'a pas peur de la surenchère et va même très loin. Elle aurait pu très facilement sombrer dans le ridicule mais parvient à trouver le ton juste pour rester crédible, drôle et grinçante. Elle continue même à nous surprendre puisque passé la première moitié du roman, celui change petit à petit. Ces six personnages plus un septième arrivé en cours de route se livrent à un jeu de dupes. Qui manipule qui ? Qui ment ? Qui dit la vérité ? On en vient à douter de tout jusqu'à un final très "Usual Suspects".

Le roman se dévore avec gourmandise et les pages tournent tellement on est happé par l'histoire. La majeure partie du roman est épistolaire. Les chapitres sont une succession d'extraits des lettres écrites par les six notables à la compagnie. Ce choix, loin d'être artificiel, est l'un des atouts du livre puisqu'il alimente cette atmosphère de suspicion permanente. Chacun relatant les évènements d'une façon assez peu objective. Ces lettres sont aussi l'occasion pour le lecteur de mieux comprendre les personnages. Ils ont tous un passé trouble et sont bien plus qu'ils ne le laissent croire. Et même si ils sont ignobles et pathétiques, ils n'en restent pas moins attachants et humains. Ce roman est donc pour moi une très bonne surprise. C'est drôle, grinçant, assez imprévisible et surtout l'histoire est servie par une galerie de personnages absolument épatants. Une excellente lecture qui s'est faite dans le cadre d'un partenariat avec le site babelio.
Lien : http://pitivier-blog.blogspo..
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Bienvenue aux portes d'un futur sans précédent. Un monde fou loin des standards classés science-fiction.

Dans une Europe aux contours redessinés et dévastée par un cataclysme naturel, un Sel violet souterrain, remonté à la surface, devient une denrée plus précieuse que l'or et la plus addictive des drogues.
Privatisée par la Compagnie, une multinationale tentaculaire et mystérieuse, la Méditerranée est devenue un territoire commercial exploitée pour son Sel. Dans la Colonie, la micro société autarcique et totalitaire qui l'extrait, six fonctionnaires incapables de penser par eux-mêmes sont les pantins de cette société en huis clos. A l'extérieur, et pourtant omniprésente, la Compagnie qui les emploie y règne en maître par la terreur et la soumission.
Le petit monde de privilèges entièrement balisé des hauts dignitaires de la Colonie s'effondre le jour où le Gouverneur seul lien avec la Compagnie décède. Face à cette situation sans précédent et sans instruction réglementaire, ils sont perdus, soupçonneux et effrayés par la perte prévisible de leur statut social. Après des tentatives pour dissimuler cet état de fait, ils décident d'écrire chacun une lettre à la Compagnie pour rendre compte des faits précédant la macabre découverte, se dédouaner et donner leur donner leur point de vue sur les responsabilités de chacun.
Phileas Book, un journaliste du Times réputé pour ses « Lettres Croisées » va se retrouver au centre de tous ces destins. Mandaté par la Compagnie, le journaliste britannique résidant à Paris, ville portuaire et siège de la Compagnie se voit confier la tâche minutieuse d'extraire des six lettres des dignitaires le sens de cet imbroglio et de démêler l'intrigue.

Loin des standards classiques de la science-fiction, l'auteure offre une alternative, un roman frais et original qui comblera les curieux. Une occasion de découvrir Ioànna Bourazopoùlou publiée pour la première fois en France. En quelques lignes, l'auteure plante son décor et définit les nouvelles frontières de son monde. Elle raye le bassin méditerranéen et plonge son lecteur en plein Paris les pieds dans l'eau.
En deux mots, une véritable curiosité. Résolument moderne par la présence d'une multinationale monstrueuse et sans âme et définitivement archaïque et régressive au sein même de la Colonie, le roman décortique un monde dément aussi effrayant que déshumanisé.

L'auteur décrit un monde qui oscille entre réalisme et situations improbables. La science-fiction n'est qu'un outil qui lui permet de projeter sur ce monde détérioré et dément la domination d'une société actuelle régit par la puissance économique. Certes, les situations sont discutables et le pitch de départ peu vraisemblable mais peu importe. Ioànna Bourazopoùlou livre un roman ahurissant où chaque personnage a peur de devenir fou, où la suspicion et la manipulation viennent à faire douter de la réalité.
Les personnages se révèlent tour à tour au fil de leur lettre. A la fois théâtraux et très humains, ils se débattent pour survivre. le parti pris de vivre le l'histoire à travers les yeux de chaque protagoniste pour voir petit à petit les faits s'emboiter et se révéler est efficace. Une galerie de personnages complexes et hauts en couleurs, des unités de temps décalées, une écriture épistolaire, une écriture fluide et drôle ; autant d'atouts qui servent ce roman remarquable.
Passé une quatrième de couverture un peu curieuse, on est happé par une aventure qui vaut vraiment le coup.

Un roman inclassable, qui mélange avec soin les genres, passant du burlesque au caustique.
Un livre certes absurde mais un vrai plaisir inattendu.


Lien : http://adam-et-ender.over-bl..
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On découvre un monde qui a été ravagé par une grande catastrophe : les eaux de la Méditerranée ont soudainement monté, engloutissant le nord de l'Afrique et toute l'Europe du sud… plus De Grèce, ni d'Italie,… les eaux de la mer se sont arrêtée à Paris, qui se retrouve être un port.
Ce bouleversement a mis à jour au niveau de la Mer Morte un gisement de sel mauve, devenue une véritable drogue pour les êtres humains : les grains de sel se vendent à l'unité, et laisse libre court à toute les spéculations. Une compagnie surpuissante, les Soixante-Quinze, à la main mise sur le gisement, et y a installé une colonie.
C'est dans cette colonie que se déroule l'histoire : échappant à la technologie (les ondes électrique ou le pétrole détruisant le précieux sel), elle est dirigée par un Gouverneur aux pleins pouvoir.
Quelque chose va perturber la vie dans cette colonie où pourtant tournait rond depuis 20 ans…

On suit un groupe de personnages hauts placés dans cette colonie : un prêtre, un médecin, un juge, un secrétaire du Gouverneur… tous cachant leur véritable être sous une fausse identité : ils sont tous envoyé dans la colonie comme dans un bagne.

L'intérêt principal de l'histoire est le croisement des sources, un jeu sur le concept de livre entre deux axes de narration :
- à la première personne : 6 lettres des 6 protagonistes principaux, divisées en 5 « périodes » qui se suivent de manière chronologique (donc 30 lettres en tout), et expliquent les événement s'étant déroulé dans la Colonie de la Mer Morte
- à la troisième personne : histoire du créateur de mot croisés, chargé de lire les lettre par les Soixante-Quinze, et d'en dégager une grille et de résoudre l'énigme des 6 lettres en trouvant le point commun entre elles.
Une construction passionnante, car l'émotion et l'excitation montent au fur et à mesure de la lecture, jusqu'à la résolution de l'énigme à la fin.

On sent dans l'histoire une critique sociale qui résonne parfaitement avec les événements de ce début d'année, malgré que ce livre ait 4 ans : révolutions arabes et notion de mauve (je n'ai pu passer à côté ayant bossé avec des graphistes tunisiens obligés de tout décliner en mauve pour faire plaisir à Ben Ali), crise financière en Grèce, Espagne, Italie… et plus globalement les colonialistes invisibles aux pouvoirs, le corps dirigeant inapte et manipulé, …

Au niveau de la trame et du côté "bizarre" , dark et un peu onirique (voir halluciné), ça m'a fait penser à "Hypérion" de Dam Simmons, lorsque les personnage au début de l'histoire racontent chacun leur histoire et leur rencontre avec le Gritche… mais la construction est vraiment différente, plus sinueuse.

Un livre que je conseille au fan de SF étrange, pas futuriste mais réaliste, à moitié steampunk… Je pense essayer de trouver d'autres romans grecs de ce genre (cette auteure n'a que ce roman traduit en français). Dans la post-face l'éditeur cite Costas Hadziaryiris et Vanghèlis Hadziyannidis, il faudrait que je voie ça de plus près ...
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Ils sont sept.
Le premier se raccroche aux souvenirs d'un monde perdu. Dernier rempart face à la méditerranée, Paris a troqué ses atours de ville lumière pour un port ultramoderne.
Les six autres sont partis en quête d'un futur dans un monde nouveau. Les rives d'une mer que l'on croyait morte hébergent une colonie isolée du monde par un océan étrange et par un désert infranchissable.

Entre les deux, il y a le trafic du sel mauve, la richesse de la colonie et le monopole des Soixante-Quinze. La mystérieuse compagnie totalitaire asservi les derniers vestiges de l'ancien monde par la dépendance tandis qu'elle exploite les colons venus trouver la rédemption dans les mines de sel.

Les récits des sept se complètent et se recoupent. Leurs lettres dessinent le portrait d'une société étrange, condamnée à danser sur les ruines de l'apocalypse. Une société lointaine ? D'aucun tenteront d'y voir un parallèle troublant avec les multinationales qui entendent dresser les gouvernements et les hommes au fouet de leur intérêts privés. de la littérature engagée ? Peut-être, en tout cas derrière les mots se cache une réalité qui donne à réfléchir.

Tandis qu'à Paris, la compagnie des soixante-quinze embauche Phileas Book pour démêler l'écheveau d'une énigme épaisse, dans la colonie le gouverneur vient de mourir laissant ses six courtisans dans l'embarras.

Littérature grecque et contemporaine, douce antinomie à mes yeux. Jamais je n'aurais pensé lire un écrivain grec qui n'aie pas passé avec succès l'épreuve des siècles. Et pourtant, un soupçon d'opportunisme, un zeste de curiosité et une bonne dose de chance m'ont fait revoir mes préjugés.
L'initiative de l'éditeur Ginkgo et la masse critique de Babelio m'ont permis de recevoir et de critiquer le livre de Ioànna Bourazopoùlou, Qu'a-t-elle vu, la femme de Loth ?

Derrière la référence biblique, on trouve un récit ambitieux et engagé. le style, sans être flamboyant déploie des audaces oniriques qui laissent rêveur. Tout au plus on pourra regretter certaines longueurs ou certains méandres trop hallucinés. Quand à la construction de l'intrigue, elle m'a curieusement fait penser à Usual Suspect tant il faut attendre la dernière page afin de comprendre le tableau et son but.
Lien : http://oiseauchanteur.blogsp..
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[...]
j'avoue ma méconnaissance quasi totale de la littérature grecque. Et le titre, un peu biblique, avec sa référénce à Loth, l'homme qui survécu à la destruction de Sodome, me semblait promettre une lecture peu fantaisiste.
Que nenni !! Ce roman est pour moi une très belle surprise. Bourazopoùlou nous propose ici une oeuvre à la croisée des genres. S'il s'agit avant tout d'une anticipation, à assez court terme je dirais, avec son "cataclysme" et ses conséquences sur notre société. On y trouve aussi un soupçon de SF et une belle part de polar. Mais surtout, il se revèle par l'analyse des comportements humains.
[...]
Lien : http://question-sf.over-blog..
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Avant de commencer cette chronique, je tiens à remercier Babelio et Ginkgo Editeur pour ce partenariat.

Le roman se déroule dans une Europe post-apocalyptique, où la mer méditerranée arrive aux portes de Paris, où le sel est devenu une denrée aussi chère que l'or, et où une société totalitaire, la Compagnie, domine des colonies dans des conditions de vie archaïques. le gouverneur d'une de ces colonies qui extraient du sel décède, et les quelques aristocrates, nommés par le gouverneur lui-même, n'ayant pas d'autre moyen de communication, écrivent aux haut dignitaires de la Compagnie pour rendre compte de ce décès et peut-être se prémunir d'une rétrogradation sociale prochaine. Et dans le même temps, nous suivons le parcours erratique à Paris de Phileas Book, créateur de mots croisés pour un journal, que la Compagnie demande à voir.

Les personnages, qui se décrivent d'eux-mêmes dans leurs lettres, sont touchants. Bien que leur passé soit des plus sombres, il n'en reste pas moins que malgré leurs défauts, leurs peur de qualité et leur manque de discernement, en font tout de même des hommes et des femmes plus vrais que nature.

L'auteure nous livre un roman écrit d'une manière originale et pour laquelle j'ai pris énormément de plaisir. Bien que le quatrième de couverture puisse paraître assez nébuleux, l'intrigue et l'histoire prennent le lecteur rapidement, dès les premières pages, et il devient assez difficile de décrocher.

Chaque lettre, mise bout à bout, conte l'histoire de la Colonie pendant une vingtaine de jours. Comment, sûr d'eux, les protagonistes vont commencer à douter, puis sombrer dans la folie. Un roman magnifique fait d'amour et de haine, de souffrance et de plaisir. Un roman différent, inclassable, un mélange des genres à lire absolument.

Je remercie Babelio et Ginkgo Editeur pour ce partenariat.
Lien : http://skritt.over-blog.fr/a..
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Synopsis :
Dans le monde actuel, le Débordement a englouti les pays et continents du Sud. Paris est devenu un port méditerranéen où se sont installés les Soixante Quinze, une multinationale qui dirige le commerce d'un extraordinaire sel violet qui a jailli après le Débordement. Ce sel envoutant et mystérieux devient rapidement une denrée rare mais indispensable à tous. Les Soixante Quinze ont fondé une Colonie sur la Mer Morte, où ils emploient des colons chargés de l'extraction du sel. La Colonie est un désert, entouré de brume et de marais et le sel violet crée un climat étouffant, très chaud, dans lequel aucune plante ne peut survivre. Lorsque Philéas Book, auteur d'un jeu publié dans le Times - les "Lettres Croisées" -, est convoqué par la Compagnie des Soixante Quinze, il est loin de s'imaginer ce qu'il va découvrir. On lui demande alors de rédiger une grille de ses fameuses "Lettres croisées" à partir de six lettres de colons. Dans ces lettres, il découvre la vie des colons dans une cité isolée du monde, où la technologie a fait un bond d'un siècle en arrière (pas de pétrole, quasi aucun moyen de communication avec l'extérieur) et où les conditions de vie sont insupportables. Ces lettres décrivent les faits et gestes des six colons après l'événement inattendu venu perturber leur vie.

Mon avis :
Difficile de décrire cette intrigue très riche sans trop en dévoiler ! Bien que le début soit un peu lent et que l'on se perde un peu entre les personnages (qui utilisent en plus des noms de code), le récit devient vite passionnant et on se laisse emporter dans la lecture de ce roman de Ioànna Bourazopoùlou.

Deux récits se chevauchent :

- les lettres des six colons : il s'agit des cinq décorés de l'Étoile Pourpre, la plus haute distinction de la Colonie, et du secrétaire particulier du Gouverneur Bera. On découvre un système hiérarchisé, corrompu, dans lequel les colons, "menteurs pathologiques, soupçonneux, sournois, narcissiques, violents, rapaces" sont hantés par leurs crimes, la peur et leur culpabilité. Plus qu'une simple histoire, c'est aussi une réflexion sur une société totalitaire. La Colonie, c'est une nouvelle Sodome, où le péché règne en maitre. Les six colons, désespérés de n'être seulement que des pions, vont se déchirer dans une succession d'événements sanglants, étonnants, voire absurdes.


- la lecture des six lettres par Philéas Book à Paris : Philéas semble être ici le seul à regretter le monde avant le Débordement, lors duquel il a perdu tous les êtres qui lui étaient chers. La Compagnie s'est enrichie grâce au sel violet issu du Débordement et Philéas estime que "quand une société multinationale spécule sur une catastrophe géologique comme la faille de la Mer Morte par exemple, qui avait failli engloutir trois continents, il faut la considérer comme responsable de cette même catastrophe.". On assiste alors à un combat très inégal contre la Compagnie, dont Philéas déplore le monopole et les méthodes employées, à l'aide du seul moyen qu'il possède face à la toute-puissance, ses Lettres Croisées.

Aucun temps mort dans ce roman que j'ai beaucoup apprécié. Les événements s'enchaînent et la partie épistolaire de la narration est une réussite car il permet d'avoir les différents points de vue des protagonistes. Je déplore seulement le manque d'explications sur le sel violet et sur le Débordement. J'ai adoré la fin inattendue, bien que rapide, qui laisse place à l'espoir. Je vous conseille fortement la lecture de ce roman si vous en avez l'envie !
Lien : http://leschroniquesassidues..
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[...]On se retrouve donc à lire rétrospectivement ce qui survint dans cette Colonie du Proche-Orient, bâtie sur le site même de l'ancienne Sodome – dont le symbole biblique marque au fer rouge l'ensemble du récit – et où le Gouverneur est retrouvé mort un matin. Les jours qui suivirent cette macabre découverte sont alors racontés par les épistoliers, tous proches de la personne du décédé, membres influents de la Colonie mais entièrement soumis à feu son dirigeant qui la régissait d'une main de fer. Les profondes inimitiés et rancoeurs qui les tiraillent transparaissent aisément dans ces lettres volontairement volubiles, chacun suspectant les autres et cherchant à se sortir du piège tendu : alliances, mésalliances qui entretiennent une paranoia aiguë les poussant aux pires extrémités. La femme, le juge, le secrétaire, le respondable de la Sécurité et le médecin expliquent leurs agissements en mettant en avant un passé douteux et des motivations obscures. le 6e personnage, qui n'écrit pas mais intervient de temps en temps dans ces lettres est la fille du juge, la seule personne née sur cette Colonie infernale (cernée par le désert et la mer et constamment plongée dans un brouillard humide chargé de sel) et également le seul autre témoin du drame.
Dans ce monde qui ressasse un passé perdu à jamais (car défintivement englouti), on se prend à attendre la conclusion de l'enquête menée depuis Paris avec un intérêt grandissant, même si quelques tics d'écriture agaçants et de trop nombreuses coquilles sapent la lecture. Personnages complexes, sentiments exacerbés, décors surréalistes et construction ludique : des sensations contradictoires et une ambiance laconique qui rappellent le Philippe Curval de la Forteresse de coton.

Un bel essai, un roman à découvrir.
Lien : http://www.ecran-miroir.fr/a..
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